REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le recours du ministre du budget enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat le 21 juin 1989 ; le ministre demande au Conseil d’Etat d’annuler le jugement du 17 mars 1989 par lequel le tribunal administratif de Rouen, sur la demande de la S.A.R.L. « Le Charles », dont le siège est …, a annulé pour excès de pouvoir la décision du 26 août 1988 aux termes de laquelle le directeur des services fiscaux de la Seine-Maritime a maintenu son refus de lui communiquer la feuille d’instruction de la réclamation présentée par elle le 14 avril 1987 en vue d’être déchargée de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie au titre de l’année 1986 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
– les conclusions de M. Gaeremynck, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article 2 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, modifiée par la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, les documents administratifs sont, « sous réserve des dispositions de l’article 6 … de plein droit communicables aux personnes qui en font la demande … » ; qu’en vertu de l’article 6 bis de ladite loi, « les personnes qui le demandent ont droit à la communication … des documents de caractère nominatif les concernant », sans que, parmi les motifs de refus de communication généralement prévus à l’article 6, puissent leur être opposés, à raison de faits qui leur sont personnels, les risques d’atteinte au secret de la vie privée, au secret médical ou au secret en matière commerciale et industrielle ; qu’il résulte toutefois de l’ensemble de ces dispositions qu’elles ne concernent que les documents achevés et non ceux qui s’insèrent dans l’élaboration de la décision administrative ;
Considérant que la « feuille d’instruction » rédigée par un agent du service à la suite de la réclamation d’un contribuable et destinée à l’autorité administrative qui doit statuer sur cette réclamation ne saurait, quelle qu’ait été la suite donnée à ladite réclamation, être regardée comme un document administratif achevé communicable à l’intéressé ; que, dès lors, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens exposés tant en première instance qu’en appel, le ministre chargé du budget est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé pour excès de pouvoir la décision du 26 août 1988 du directeur des services fiscaux de la Seine-Maritime maintenant son refus de communiquer à la S.A.R.L. « Le Charles » la feuille d’instruction de la réclamation qu’elle avait présentée en vue d’être déchargée de la cotisation de taxe professionnelle à laquelle elle avait été assujettie au titre de 1988 ;
Article 1er : Le jugement du 17 mars 1989 du tribunal administratif de Rouen est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la S.A.R.L. « Le Charles » devant le tribunal administratif de Rouen et tendant à l’annulation de la décision du 26 août 1986 du directeur des services fiscaux de la Seine-Maritime maintenant son refus de lui communiquer la feuille d’instruction de la réclamation qu’elle avait présentée contre sa cotisation de taxe professionnelle de 1988 est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget et à la S.A.R.L. « Le Charles ».