Le pouvoir de rendre la justice est le seul qui bénéficie d’une indépendance constitutionnellement garantie. Il se trouve ainsi séparé des organes des deux pouvoirs « politiques ». Cette séparation résulte de son statut partiulier. Il veille à la protection des intérêts individuels face aux ingérences éventuelles des actes de la puissance publique. La fonction coïncide ici parfaitement avec l’organe qui en a la charge. La Cour constitutionnelle adopte une définition matérielle du pouvoir de réndre la justice qui pourrait aboutir, dans certains cas, à dissocier l’organe et la fonction. La révision de l’article 10, alinéa 2 LF donne lieu à une décision vivement critiquée à cause de la solution prise : désormais, dans des circonstances exceptionnelles, lorsqu’il y a une menace pour l’ordre constitutionnel démocratique et libéral, le juge et le recours juridictionnel, qui sert de protection contre les actes de l’exécutif, peut être remplacé par une institution spéciale combinant des éléments des pouvoirs législatif et exécutif et qui agit d’après des procédures secrètes ne donnant pas l’occasion à l’individu visé de se défendre. Ainsi, on constate que le recours judictionnel de l’article 19, alinéa 4 LF ne tombe pas sous la protection de l’article 79, alinéa 3 LF. Les modalités de mise en application du principe de la séparation des pouvoirs ne sont pas à l’abri d’une révision constitutionnelle.
En dépassant les conclusions inconsistantes et trop hâtives selon lesquelles la justice constitutionnelle est incompatible avec le principe de séparation des pouvoirs, on constate que le juge constitutionnel est devenu, par ses décisions, le garant du principe de séparation des pouvoirs. En procédant à une mise en balance des intérêts contradictoires présentés par les différents organes investis des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, la Cour constitutionnelle élabore sa propre doctrine de la séparation des pouvoirs qu’elle applique aux différents cas concrets. Loin d’être l’élément trouble, elle constitue la pièce principale du système de freins et de contrepoids de la Loi fondamentale.