REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le recours, enregistré le 30 mars 2009 au greffe de la Cour administrative d’appel de Marseille sous le n° 09MA01135, présenté par le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ;
Le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0802650 du 27 janvier 2009 du Tribunal administratif de Marseille en tant qu’il a annulé la décision en date du 6 février 2008 par laquelle le lieutenant de la maison d’arrêt de Luynes chargé de l’enquête relative à un incident mettant en cause M. Gilles A, a suspendu celui-ci de ses fonctions d’auxiliaire d’étage à titre conservatoire dans l’attente de sa comparution devant la commission de discipline ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Marseille ;
——————————————————————————————————-
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale ;
Vu l’article 1er de l’arrêté du 27 janvier 2009 qui autorise la cour administrative d’appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l’article 2 du décret du 7 janvier 2009, situant l’intervention du rapporteur public avant les observations des parties ou de leurs mandataires ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 6 janvier 2011 :
– le rapport de M. Pocheron,
– et les conclusions de Mme Chenal-Peter, rapporteur public ;
Considérant que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE relève appel du jugement en date du 27 janvier 2009 du Tribunal administratif de Marseille en tant qu’il a annulé la décision en date 6 février 2008 par laquelle le lieutenant chargé de l’enquête relative à des faits commis par M. A, détenu à la maison d’arrêt de Luynes et auxiliaire d’étage, a suspendu l’intéressé de son emploi à titre conservatoire dans l’attente de sa comparution devant la commission de discipline ;
Considérant qu’aux termes de l’article D 99 du code de procédure pénale : Les détenus, quelle que soit leur catégorie pénale, peuvent demander qu’il leur soit proposé un travail. L’inobservation par les détenus des ordres et instructions donnés pour l’exécution d’une tâche peut entraîner la mise à pied ou le déclassement de l’emploi. ; qu’aux termes de l’article D 100 du même code : Les dispositions nécessaires doivent être prises pour qu’un travail productif et suffisant pour occuper la durée normale d’une journée de travail soit fourni aux détenus. ; qu’aux termes de l’article D 101 : Le travail est procuré aux détenus compte tenu du régime pénitentiaire auquel ceux-ci sont soumis, des nécessités de bon fonctionnement des établissements ainsi que des possibilités locales d’emploi. Dans la mesure du possible, le travail de chaque détenu est choisi en fonction non seulement de ses capacités physiques et intellectuelles, mais encore de l’influence que ce travail peut exercer sur les perspectives de sa réinsertion. Il est aussi tenu compte de sa situation familiale et de l’existence de parties civiles à indemniser … ; qu’aux termes de l’article D 102 : L’organisation, les méthodes et les rémunérations du travail doivent se rapprocher autant que possible de celles des activités professionnelles extérieures afin notamment de préparer les détenus aux conditions normales du travail libre. ; qu’il résulte de ces dispositions que le travail auquel les détenus peuvent prétendre constitue pour eux non seulement une source de revenus mais encore un mode de meilleure insertion dans la vie collective de l’établissement, tout en leur permettant de faire valoir des capacités de réinsertion ;
Considérant que M. A, incarcéré à la maison d’arrêt de Luynes du 2 septembre 2006 au 15 septembre 2008 en exécution d’un jugement du Tribunal correctionnel d’Aix en Provence, a été classé auxiliaire d’étage en octobre 2006, chargé notamment du nettoyage de certaines zones de l’établissement pénitentiaire, en application des dispositions sus-rappelées de l’article D 99 à 102 du code de procédure pénale ; qu’il ressort des pièces du dossier que, le 6 février 2008, il a récupéré une copie du règlement intérieur affiché derrière une vitre, comprenant notamment les consignes relatives au travail des auxiliaires d’étage, et modifié les phrases relatives aux tâches de travail qui lui incombaient en matière de nettoyage du monte-charge ; qu’il a également souligné en rouge des horaires et des règles à respecter par ses co-détenus bénéficiaires comme lui d’une mesure de classement ; que le lieutenant chargé de l’enquête a alors décidé le passage de l’intéressé en commission de discipline et une mesure de suspension de travail à titre conservatoire dans l’attente de sa comparution devant la commission de discipline ; que cette commission a, le 26 février suivant, décidé le déclassement de M. A ;
Considérant que si, eu égard à sa nature et à l’importance de ses effets sur la situation des détenus, une décision de déclassement d’emploi constitue un acte administratif susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, il en va autrement de la mesure en litige, qui, par son caractère provisoire, et conservatoire en l’attente du passage de l’intéressé en commission de discipline, n’a pu par elle-même affecter de manière substantielle la situation de M. A, ni mettre en cause ses libertés et ses droits fondamentaux ; que, par suite, les conclusions dirigées contre la décision litigieuse du 6 février 2008, qui est insusceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir, étaient irrecevables et ne pouvaient qu’être rejetées par les premiers juges ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Marseille a annulé la décision en date du 6 février 2008 ayant prononcé la suspension de travail à titre conservatoire de M. A dans l’attente de sa comparution devant la commission de discipline ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement en date du 27 janvier 2009 du Tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu’il a annulé la décision en date du 6 février 2008 ayant prononcé la suspension de travail à titre conservatoire de M. A dans l’attente de sa comparution devant la commission de discipline.
Article 2 : Les conclusions de M. A présentées devant le Tribunal administratif de Marseille et tendant à l’annulation de la décision en date du 6 févier 2008 mentionnée à l’article 1er sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au GARDE DES SCEAUX, MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES LIBERTES et à M. Gilles A.