REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, 1°) sous le n° 203854, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 janvier 1999 et 25 mai 1999, au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le SYNDICAT AUTONOME DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT CGT DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT CFDT DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT FO DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est … et le SYNDICAT CFTC DE LA BANQUE DE FRANCE, représentés par leur président en exercice ; ils demandent que le Conseil d’Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision DR n° 1971 en date du 23 novembre 1998 du Gouverneur de la Banque de France relative à l’élection des représentants du personnel dans les comités d’établissement ;
2°) condamne la Banque de France à leur verser la somme de 10 000 F en application de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu, 2°) sous le n° 203855, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 janvier 1999 et 25 mai 1999, au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le SYNDICAT AUTONOME DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT CGT DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT CFDT DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est6, rue de la Vrillière, à Paris (75001), le SYNDICAT FO DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est … et le SYNDICAT CFTC DE LA BANQUE DE FRANCE, représentés par leur président en exercice ; ils demandent que le Conseil d’Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision DR n° 1970 en date du 23 novembre 1998 du Gouverneur de la Banque de France relative à l’élection des représentants du personnel dans les comités d’établissement ;
2°) condamne la Banque de France à leur verser la somme de 10 000 F en application de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu, 3°) sous le n° 204029, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 29 janvier 1999 et 25 mai 1999, au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le SYNDICAT AUTONOME DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT CGT DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT CFDT DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est …, le SYNDICAT FO DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est … et le SYNDICAT CFTC DE LA BANQUE DE FRANCE, représentés par leur président en exercice ; ils demandent que le Conseil d’Etat :
1°) annule pour excès de pouvoir la décision DR n° 1980 en date du 21 janvier 1999 du Gouverneur de la Banque de France relative à la composition du comité central d’entreprise de la Banque de France ;
2°) condamne la Banque de France à leur verser la somme de 10 000 F en application de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public ;
Vu la loi n° 93-980 du 4 août 1993 modifiée relative au statut de la Banque de France et à l’activité et au contrôle des établissements de crédit ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de M. Aubert, Conseiller d’Etat,
– les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du SYNDICAT NATIONAL AUTONOME DU PERSONNEL DE LA BANQUE DE FRANCE, du SYNDICAT CGT BANQUE DE FRANCE, du SYNDICAT CFDT BANQUE DE FRANCE, du SYNDICAT FOBANQUE DE FRANCE et du SYNDICAT CFTC BANQUE DE FRANCE, et de Me Delvolvé, avocat de la Banque de France,
– les conclusions de M. Savoie, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées présentent à juger la même question ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur l’intervention du Syndicat des indépendants et chrétiens de la Banque de France :
Considérant que le Syndicat des indépendants et chrétiens de la Banque de France a intérêt à l’annulation des décisions attaquées ; qu’ainsi, son intervention est recevable ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la loi du 4 août 1993 : « La Banque de France est une institution dont le capital appartient à l’Etat » ; qu’elle constitue une personne publique chargée par la loi de missions de service public qui, ayant principalement pour objet la mise en oeuvre de la politique monétaire, le bon fonctionnement des systèmes de compensation et de paiement et la stabilité du système bancaire, sont pour l’essentiel de nature administrative ; qu’elle n’a pas le caractère d’un établissement public mais revêt une nature particulière et présente des caractéristiques propres ;
Considérant qu’au nombre des caractéristiques propres à la Banque de France figure l’application à son personnel des dispositions du code du travail qui ne sont incompatibles ni avec son statut, ni avec les missions de service public dont elle est chargée, ainsi que le confirme sa mention à l’annexe III de la loi du 26 juillet 1983 ; qu’aucune disposition législative ultérieure n’a eu pour objet ou pour effet d’écarter l’application du code du travail aux agents de la Banque de France ;
Considérant que les décisions attaquées du Gouverneur de la Banque de France relatives à l’élection des délégués du personnel et des représentants du personnel aux comités d’établissement et à la composition du comité central d’entreprise, fixant en ces matières des règles spécifiques différentes de celles qui résultent du code du travail, ont été prises en application d’une délibération du 12 novembre 1998 du conseil général de la Banque estimant que le code du travail n’était pas applicable aux agents de la Banque ; qu’il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que cette délibération est entachée d’erreur de droit et que les syndicats requérants sont fondés à demander l’annulation pour excès de pouvoir des décisions du Gouverneur prises sur son fondement ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 et de condamner la Banque de France à payer au SYNDICAT NATIONAL AUTONOME DU PERSONNEL DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT CGT DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT CFDT DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT FO DE LA BANQUE DE FRANCE et au SYNDICAT CFTC DE LA BANQUE DE FRANCE une somme globale de 30 000 F au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L’intervention du Syndicat des indépendants et chrétiens de la Banque de France est admise.
Article 2 : Les décisions DR n°s 1970, 1971 et 1980 du Gouverneur de la Banque de France en date des 23 novembre 1998 et 21 janvier 1999 sont annulées.
Article 3 : La Banque de France versera une somme globale de 30 000 F au SYNDICAT NATIONAL AUTONOME DU PERSONNEL DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT CGT DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT CFDT DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT FO DE LA BANQUE DE FRANCE et au SYNDICAT CFTC DE LA BANQUE DE FRANCE au titre de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL AUTONOME DU PERSONNEL DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT CGT DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT CFDT DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT FO DE LA BANQUE DE FRANCE, au SYNDICAT CFTC DE LA BANQUE DE FRANCE, au Syndicat des indépendants et chrétiens de la Banque de France, à la Banque de France et au ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.