RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 juillet et 5 novembre 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Serge X…, demeurant … à La Lande de Fronsac (33240) ; M. X… demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler la décision de la chambre nationale de discipline des architectes en date du 16 décembre 1997 rejetant l’appel qu’il avait formé contre la décision de la chambre régionale de discipline des architectes de Poitou-Charentes en date du 18 septembre 1995 lui infligeant la sanction de la radiation du tableau de l’Ordre des architectes ;
2°) d’annuler la décision de la chambre régionale de discipline des architectes de Poitou-Charentes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 modifiée ;
Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 ;
Vu le décret n° 77-1481 du 28 décembre 1977 modifié ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de M. Pignerol, Auditeur,
– les observations de Me Parmentier, avocat de M. X…,
– les conclusions de Mme Roul, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu’aux termes de l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle … » ;
Considérant qu’en vertu des dispositions des articles 28 et 29 de la loi du 3 janvier 1977 sur l’architecture, la chambre nationale et les chambres régionales de discipline de l’Ordre des architectes peuvent prononcer notamment les sanctions de la « suspension pour une période de trois mois à trois ans » et de la « radiation définitive » ; qu’ainsi, les décisions prises par ces chambres sont susceptibles de porter atteinte au droit d’exercer la profession d’architecte, lequel revêt le caractère d’un droit civil au sens des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, ces stipulations s’appliquent à la procédure suivie devant la chambre nationale de discipline des architectes, notamment en ce que l’audience doit avoir un caractère public ;
Considérant qu’il ne ressort d’aucune des mentions de la décision attaquée que l’audience tenue par la chambre nationale de discipline des arhitectes le 16 décembre 1997, à laquelle a été portée l’affaire concernant M. X…, ait été publique ; qu’ainsi, cette décision ne fait pas la preuve de la régularité de la procédure suivie devant la chambre nationale de discipline ; que, dès lors, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête, M. X… est fondé à demander l’annulation de ladite décision ;
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de renvoyer l’affaire devant la chambre nationale de discipline des architectes ;
Article 1er : La décision de la chambre nationale de discipline des architectes en date du 16 décembre 1997 est annulée.
Article 2 : L’affaire est renvoyée devant la chambre nationale de discipline des architectes.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Serge X…, au Conseil national de l’Ordre des architectes et au ministre de la culture et de la communication.