REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°) sous le n° 219379, la requête enregistrée le 27 mars 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES), dont le siège est … (75341 cedex 07) ; le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté du 25 janvier 2000, publié au Journal officiel du 27 janvier 2000, par lequel le ministre de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie a fixé la répartition des postes offerts aux concours réservés du CAPET, du CAPES et du PL 2 ;
2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 5 000 F sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 2°) sous le n° 221699, la requête enregistrée le 2 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES), dont le siège est … (75341 cedex 07), représenté par son secrétaire général adjoint, M. Bernard X… ; le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler la délibération du jury du CAPES réservé « enseignement religieux catholique » pour la session 2000 ;
2°) d’annuler, par voie de conséquence, les nominations prononcées, dans le corpsdes professeurs certifiés pour la session 2000 ;
3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 5 000 F sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu 3°) sous le n° 221700, la requête enregistrée le 2 juin 2000 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES), dont le siège est … (75341 cedex 07) ; le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler la délibération du jury du CAPES réservé « enseignement religieux protestant » pour la session 2000 ;
2°) d’annuler, par voie de conséquence, les nominations prononcées, dans le corps des professeurs certifiés pour la session 2000 ;
3°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 5 000 F sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi du 15 mars 1850 ;
Vu la loi locale du 12 février 1873 ;
Vu l’ordonnance du chancelier d’Empire en date du 10 juillet 1873 modifiée par les ordonnances du 20 juin 1883 et du 16 novembre 1887, notamment son article 10 A ;
Vu la loi du 17 octobre 1919 relative au régime transitoire de l’Alsace et de la Lorraine, notamment ses articles 3 et 4 ;
Vu la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin et de la Moselle, notamment son article 1er ;
Vu le décret du 10 octobre 1936 relatif aux sanctions de l’obligation scolaire, notamment son article 6 ;
Vu l’ordonnance relative au rétablissement de la légalité républicaine dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle du 15 septembre 1944 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi du 31 décembre 1973, autorisant la ratification de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et le décret du 3 mai 1974, portant ratification de cette convention ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutairesrelatives à la fonction publique de l’Etat ;
Vu la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989, notamment son article 10 ;
Vu la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l’emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d’ordre statutaire, notamment son article 1er ;
Vu le décret n° 97-349 du 16 avril 1997 portant organisation de concours de recrutement de personnels de l’enseignement du second degré réservés à certains agents non titulaires au titre du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche en application de l’article 1er de la loi n° 96-1093 du 16 décembre 1996 relative à l’emploi dans la fonction publique et à diverses mesures d’ordre statutaire ;
Vu l’arrêté du 16 avril 1997 modifié par l’arrêté du 30 octobre 1997 relatif aux modalités d’organisation des concours réservés à certains personnels non titulaires exerçant des fonctions d’enseignement, d’éducation ou d’orientation ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de M. Vallée, Auditeur,
– les conclusions de Mme Mignon, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées émanent d’un même requérant et présentent à juger des questions communes ; qu’il y a lieu de les joindre et de statuer par une seule décision ;
Considérant que le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) demande l’annulation, d’une part, de l’arrêté du 25 janvier 2000 du ministre de l’éducation nationale fixant le nombre de postes offerts au titre de l’année 2000 « au concours réservé » de recrutement de certains professeurs certifiés exerçant dans les disciplines d’enseignement général du second degré, en tant que ledit arrêté offre, sous la rubrique « Sections diverses », 35 postes d’enseignement religieux catholique et 8 postes d’enseignement religieux protestant et, d’autre part, des délibérations des jurys de la section enseignement catholique et de la section enseignement protestant de ce concours réservé, ainsi que, par voie de conséquence, des nominations des candidats reçus dans le corps des professeurs certifiés ;
Sur la légalité de l’arrêté du 25 janvier 2000 en tant qu’il prévoit 35 postes pour la section enseignement religieux catholique et 8 postes pour la section enseignement religieux protestant :
Considérant, d’une part, que l’arrêt attaqué a été pris en application des dispositions de l’article 1er de la loi du 16 décembre 1996 relatif à la résorption de l’emploi précaire, qui a prévu, par dérogation à l’article 19 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat et pour une durée maximum de quatre ans, l’ouverture de concours réservés aux agents non titulaires en fonction dans les établissements d’enseignementpublics et assimilés et remplissant certaines conditions ;
Considérant, d’autre part, qu’en vertu de la législation spéciale aux départements d’Alsace et de Moselle, maintenue en vigueur sans qu’il soit nécessaire de la publier au Journal officiel de la République française, par les lois du 17 octobre 1919 et du 1er juin 1924 et l’ordonnance du 15 septembre 1944, et, notamment, de l’article 10 A de l’ordonnance du 10 juillet 1873 modifiée par l’ordonnance du 16 novembre 1887, l’obligation d’assurer un enseignement religieux dans toutes les écoles de ces départements et, en particulier, dans les établissements publics d’enseignement du second degré, constitue une règle de valeur législative s’imposant au pouvoir réglementaire ;
Considérant que l’article 7 de la loi du 1er juin 1924, mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, a maintenu en application dans ces départements les articles 21 à 79 du code civil local ; qu’ainsi le maintien en vigueur de la législation locale procède de la volonté du législateur ; que si, postérieurement à la loi précitée du 1er juin 1924, les préambules des constitutions des 27 octobre 1946 et 4 octobre 1958 ont réaffirmé les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, au nombre desquels figure le principe de laïcité, cette réaffirmation n’a pas eu pour effet d’abroger implicitement les dispositions de ladite loi ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en offrant les postes litigieux, au titre de la session 2000 des concours réservés prévus à l’article 1er de la loi du 16 décembre 1996, pour permettre la titularisation de ceux des maîtres auxiliaires de religion exerçant dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle qui remplissent les conditions légales requises pour pouvoir se présenter à ces concours, le ministre de l’éducation nationale a fait une exacte application des dispositions précitées ; que le moyen du syndicat requérant tiré de ce qu’en édictant les dispositions critiquées de l’arrêté du 25 janvier 2000 le ministre aurait agi sans base légale et méconnu le principe de la laïcité, commettant ainsi une erreur de droit, doit donc être rejeté ;
Considérant que l’arrêté attaqué ne crée pas, par lui-même, un enseignement de la religion ; que, par suite, le moyen selon lequel, le Conseil supérieur de l’éducation nationale aurait dû être consulté, ne peut, par suite, qu’être écarté ;
Considérant que si le syndicat requérant soutient que le maintien en vigueur de la législation spéciale applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, en ce qu’elle prévoirait un « enseignement religieux obligatoire » dans les écoles publiques serait contraire aux stipulations de l’article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales garantissant à toute personne le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, il ressort des pièces du dossier que l’obligation en cause est celle, pour les pouvoirs publics, d’organiser un enseignement de la religion, pour chacun des quatre cultes reconnus en Alsace-Moselle, et que celui-ci s’accompagne de la faculté ouverte aux élèves, sur demande de leurs représentants légaux, d’en être dispensés ; qu’ainsi, et en tout état de cause, le moyen doit être rejeté ;
Sur les délibérations des jurys et les nominations :
Considérant qu’à l’appui de ses conclusions en annulation des délibérations et nominations qu’il attaque le syndicat requérant reprend, en premier lieu, les mêmes moyens que ceux qu’il invoque à l’encontre de l’arrêté du 25 janvier 2000 ; qu’il y a lieu de rejeter ces moyens par les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés ;
Considérant, en second lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que l’arrêté du 16 février 2000 portant nomination des présidents des jurys des sections d’enseignement religieux du « concours réservé » au titre de l’année 2000 a été publié le 24 février 2000 au Bulletin officiel de l’éducation nationale ; que la circonstance que les arrêtés, datés également du 16 février 2000, et nommant les autres membres de ces jurys, n’aient fait l’objet d’aucune publicité est sans influence sur la régularité des délibérations attaquées ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) n’est pas fondé à demander l’annulation des décisions qu’il attaque ;
Sur l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser au SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) les sommes qu’il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes du SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au SYNDICAT NATIONAL DES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRE (SNES) et au ministre de l’éducation nationale.