REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu la requête enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat le 11 octobre 1993, présentée par l’Assemblée territoriale de la Polynésie française, représentée par son président en exercice ; l’Assemblée territoriale de la Polynésie française demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler le jugement en date du 29 juin 1993 par lequel le tribunal administratif de Papeete a annulé, à la demande du Haut-commissaire de la République en Polynésie française, le 6° de l’article 5 de la délibération n° 92-119/AT du 23 juillet 1992 ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Papeete par le Haut-commissaire de la République ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-820 du 6 septembre 1984 modifiée, portant statut du territoire de la Polynésie française ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de M. Pêcheur, Maître des Requêtes,
– les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant que, sauf dans le cas où des dispositions législatives ou réglementaires ont organisé des procédures particulières, toute décision administrative peut être l’objet dans le délai imparti pour l’introduction d’un recours contentieux, d’un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai ;
Considérant qu’aux termes de l’alinéa 4 de l’article 92 de la loi susvisée du 6 septembre 1984 modifiée : « Le Haut-commissaire peut déférer au tribunal administratif de la Polynésie française … les délibérations de l’assemblée territoriale qu’il estime contraires à la légalité dans les deux mois de la notification » ; que ces dispositions n’ont ni pour objet, ni pour effet d’organiser une procédure particulière dérogeant au principe sus-énoncé ; que, dès lors, la lettre adressée le 6 octobre 1992 par le Haut-commissaire de la République en Polynésie française au président de l’Assemblée territoriale pour lui demander de rapporter le 6° de l’article 5 de la délibération n° 92-119/AT du 23 juillet 1992 qu’il estimait entaché d’illégalité, doit être regardée comme constituant un recours gracieux ;
Considérant que la délibération litigieuse ayant été reçue par les services du Haut-commissaire le 5 août 1992, le recours gracieux, formé le 6 octobre 1992 par le Haut-commissaire, a été présenté au président de l’assemblée territoriale dans le délai du recours contentieux et a interrompu ce délai ; que le président de l’assemblée territoriale ayant gardé le silence pendant plus de 4 mois sur la demande qui lui avait été présentée, il s’ensuit que le déféré du Haut-commissaire de la République en Polynésie française, enregistré le 5 avril 1993 au greffe du tribunal administratif de Papeete, était recevable ; que, dès lors, c’est à bon droit que le tribunal administratif a écarté la fin de non recevoir opposée par le président de l’assemblée territoriale à l’encontre du déféré du Haut-commissaire ;
Sur la légalité de la délibération de l’Assemblée territoriale du 23 juillet 1992 :
Considérant que par un jugement en date du 12 décembre 1991 passé en force de chose jugée, le tribunal administratif de Papeete a annulé, à la demande du Haut-commissaire de la République, une délibération du 29 janvier 1991 de l’Assemblée territoriale instituant une condition de résidence sur le territoire de 5 années consécutives pour l’accès à la fonction publique du territoire ; que ce jugement était motivé d’une part par l’incompétence de l’Assemblée territoriale qui avait délibéré en dehors de la période ouverte pour la session ordinaire, d’autre part par la violation du principe d’égal accès aux emplois publics ; que chacun de ces deux motifs étant le support nécessaire du dispositif de ce jugement auquel s’attache l’autorité absolue de la chose jugée laquelle s’attache également à ses motifs, c’est à bon droit que le tribunal administratif de Papeete a fondé le jugement attaqué du 29 juin 1993 sur ce jugement du 12 décembre 1991 et annulé la nouvelle délibération de l’assemblée territoriale en date du 23 juillet 1992 qui instituait la même condition de résidence de 5 années consécutives sur le territoire pour l’accès à la fonction publique territoriale ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède et sans qu’il soit besoin de statuer sur l’autre moyen de la requête, que le président de l’assemblée territoriale n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a annulé, à la demande du Haut-commissaire de la République en Polynésie française, le 6° de l’article 5 de la délibération du 23 juillet 1992 ;
Article 1er : La requête du président de l’assemblée territoriale de la Polynésie française est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au président de l’assemblée territoriale de la Polynésie française et au ministre des départements et territoires d’outre-mer.