AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 17 novembre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par l’ASSOCIATION PROMOUVOIR, dont le siège est B.P. 23 à Carpentras Cedex 01 (84201) représentée par son président en exercice ; l’ASSOCIATION PROMOUVOIR demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du ministre de la culture et de la communication en date du 6 octobre 2003 accordant un visa d’exploitation au film intitulé Ken Park en tant qu’elle comporte seulement une interdiction de représentation aux mineurs de seize ans et qu’elle ne l’inscrit pas sur la liste des films pornographiques ou d’incitation à la violence soumis aux dispositions des articles 11 et 12 de la loi du 30 décembre 1975 portant loi de finances pour 1976 ou, à titre subsidiaire, qu’elle ne l’assortit pas d’une interdiction de représentation aux mineurs de dix-huit ans ;
2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code pénal, notamment l’article 227-24 ;
Vu le code de l’industrie cinématographique ;
Vu la loi du 30 décembre 1975 portant loi de finances pour 1976 ;
Vu le décret n° 90-174 du 23 février 1990, dans sa rédaction issue du décret n° 2001-618 du 12 juillet 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Mary, Maître des Requêtes,
– les conclusions de Mme de Silva, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il résulte de l’instruction, d’une part, que le film Ken Park, s’il comporte une scène de sexe non simulée et plusieurs scènes de violence, ne présente pas, compte tenu de son thème et des conditions de sa mise en scène, un caractère pornographique ou d’incitation à la violence, qui aurait imposé son inscription sur la liste des films soumis aux dispositions des articles 11 et 12 de la loi du 30 décembre 1975 portant loi de finances pour 1976 ; qu’ainsi, le ministre de la culture et de la communication n’a pas commis d’erreur d’appréciation ni méconnu le principe de la dignité humaine invoqué par l’association requérante en n’inscrivant pas le film Ken Park sur la liste des films pornographiques ou d’incitation à la violence ;
Mais considérant qu’eu égard à la scène de sexe non simulée évoquée ci-dessus, qui revêt un caractère particulièrement cru et explicite, et aux autres scènes du film qui représentent elles aussi des adolescents en mêlant sexe et violence, le ministre, en interdisant la représentation de Ken Park seulement aux mineurs de moins de seize ans et non à ceux de moins de dix-huit ans, a fait une inexacte application des dispositions de l’article 3 du décret du 23 février 1990 pris pour l’application des articles 19 à 22 du code de l’industrie cinématographique et relatif à la classification des films, dont la modification issue du décret du 12 juillet 2001, alors applicable, a pour objet la protection des mineurs ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’association requérante est seulement fondée à demander l’annulation du visa d’exploitation litigieux, en tant qu’il n’est pas assorti d’une interdiction de représentation aux mineurs de moins de dix-huit ans ;
Sur l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l’Etat à verser à l’association requérante la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du ministre de la culture et de la communication en date du 6 octobre 2003 accordant un visa d’exploitation au film Ken Park est annulée, en tant que ce visa n’est pas assorti d’une interdiction de représentation aux mineurs de moins de dix-huit ans.
Article 2 : Le surplus des conclusions de l’ASSOCIATION PROMOUVOIR est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l’ASSOCIATION PROMOUVOIR, à la société Pan européenne distribution et au ministre de la culture et de la communication.