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Conclusions Romieu sur CE 22 mai 1903, Caisse des Écoles du VIe arrondissement (1re espèce), Fourcade (2e espèce) et Dareste (3e espèce)

Citer : Jean Romieu, 'Conclusions Romieu sur CE 22 mai 1903, Caisse des Écoles du VIe arrondissement (1re espèce), Fourcade (2e espèce) et Dareste (3e espèce), ' : Revue générale du droit on line, 1903, numéro 68079 (www.revuegeneraledudroit.eu/?p=68079)


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Décision(s) commentée(s):
  • Conseil d’Etat 22 mai 1903, Caisse des Écoles du VIe arrondissement (1re espèce), Fourcade (2e espèce) et Dareste (3e espèce)

1re espèce. – Le préfet de la Seine, à la date du 12 déc. 1901, a prononcé l’annulation d’une délibération du comité d’administration de la Caisse des écoles du VIe arrondissement de Paris, tendant à assurer le paiement de bons émis par la Caisse pour être distribués aux élèves des écoles primaires privées. La Caisse des écoles représentée par son vice-président, autorisé par le comité d’administration, a déféré au Conseil d’État cet arrêté du préfet de la Seine pour excès de pouvoir. Le litige porte sur le droit pour les Caisses des écoles de distribuer des secours aux enfants fréquentant les écoles privées ; nous examinerons successivement les trois questions suivantes :

I. Quel était le régime légal, quels étaient les droits des Caisses des écoles, depuis l’origine, c’est-à-dire depuis 1867, jusqu’à la loi sur renseignement primaire du 30 oct. 1886 ?

 II. Quel est ce régime et quels sont ces droits sous l’empire de la loi actuelle, depuis 1886 ?

III. La législation nouvelle s’applique-t-elle uniquement aux caisses fondées depuis1886 ou a-t-elle modifié les droits des Caisses fondées antérieurement ?

Il n’est pas possible de détacher l’étude des Caisses des écoles de celle de la législation générale de l’enseignement primaire  ; nous devrons donc, aux diverses époques considérer le régime de l’instruction primaire, les rapports des écoles privées et des écoles publiques, entre elles et avec les communes, avant de nous prononcer sur la situation juridique des Caisses des écoles.

I. – Régime antérieur à 1886. – Nous aurons à distinguer deux périodes, d’abord celle qui s’étend jusqu’en 1882 et qui correspond à l’ancienne législation sur l’enseignement primaire, aux lois de 1850 et 1867 ; puis le régime transitoire, qui va des premières lois de la reforme de l’instruction primaire en 1881 et 1882 à la loi organique de 1886.

Période antérieure à 1882. – La législation est celle des lois du 15 mars 1850 et du 10 avr. 1867.

La loi du 15 mars 1850, dans son art. 17 semble ne distinguer que deux espèces d’écoles : les écoles « publiques » fondées ou entretenues par les communes, les départements ou l’État  ; les écoles « privées », fondées et entretenues par des particuliers ou des associations ; mais l’art. 36 permet aux communes d’échapper à l’obligation d’avoir une école publique si elles pourvoient à l’enseignement gratuit des indigents dans les écoles privées ; d’où une troisième catégorie d’écoles : les écoles libres « tenant lieu d’écoles publiques » que les communes ont naturellement le droit et même l’obligation de subventionner. En outre, les communes qui ont une école publique et qui, dès lors, ne sont pas obligées de recourir aux écoles privées pour s’acquitter des obligations de la loi de 1850, peuvent subventionner des écoles privées, qui, dans ce cas, sont soumises à l’inspection du gouvernement ; et c’est une quatrième espèce d’école : « libre », ne tenant pas lieu d’école publique, mais subventionnée par la commune ;

Donc, sous le régime scolaire de 1850 et de 1867, l’école privée joue un rôle considérable, non seulement en fait, mais en droit, dans l’organisation de l’instruction primaire ; le législateur encourage à s’adresser à elle, compte sur elles pour alléger les charges des communes, et donne toutes facilités aux communes pour la subventionner. Elle coopère au service général de l’enseignement avec le bon vouloir et même la faveur de l’administration ; elle est l’auxiliaire de la commune pour l’instruction primaire. En réalité la législation considère le service public de l’enseignement comme assuré tout à la fois par les écoles publiques et les écoles privées, les unes remplaçant, suppléant, soulageant les autres ;

 C’est sous ce régime que sont créées les Caisses des écoles par la loi du 10 avr. 1867. M. Duruy, ministre de l’Instruction publique, cherche à developper l’enseignement primaire par une série de mesures d’ordre divers ; les communes qui veulent créer la gratuité absolue pourront s’imposer des centimes spéciaux  ; mais la gratuité ne suffit pas pour déterminer les parents indigents à envoyer leurs enfants à l’école, et l’on essaie de les y inciter par des distributions de secours. Les Caisses des écoles sont instituées dans ce but ; ce sont des établissements de bienfaisance scolaire, alimentés par des cotisations volontaires, et des subventions des communes, des départements ou de l’État et destinés à encourager la fréquentation de l’école par des récompenses aux élèves assidus et par des secours aux élèves indigents.

Qu’était-ce que la fréquentation de l’école en 1867 ? C’était la fréquentation des écoles privées ou publiques, puisque le service de l’enseignement pouvait faire appel à ces diverses espèces d’écoles, et que les communes pouvaient subventionner l’école privée ou en faire l’école publique. Donc, les fonds des Caisses des écoles devaient s’adresser aux enfants des écoles privées comme à ceux des écoles publiques ; c’était incontestablement le vœu du législateur et personne n’a jamais songé à contester la parfaite légalité des distributions ainsi faites dans l’intérêt de l’instruction primaire telle qu’elle était comprise et organisée par les pouvoirs publics.

Période transitoire de 1882 à 1886. – Peu après 1880 commence la période moderne de la législation de l’enseignement primaire : la loi du 16 juin 1881 créé la gratuite, la loi du 28 mars 1882 impose l’obligation. Mais le régime ne sera définitif que par la loi du 30 oct. 1886 (complétée par la loi du 19 juil. 1889). Les communes n’ont pas encore toutes leurs écoles, et il faut bien, en l’absence d’écoles publiques en nombre suffisant, alors surtout qu’on impose l’obligation aux parents, permettre aux communes d’avoir encore recours à l’école privée ; le régime antérieur ne cesse donc pas de s’appliquer et les lois de 1850 et de 1867 n’étant pas abrogées, les communes peuvent toujours subventionner les écoles privées (Arr. Cons. d’État, 16 nov. 1888, commune de Saturnin, p. 826 ; v. les conclusions du commissaire du gouvernement).

Le rôle de la Caisse des écoles de son côté n’aura pas changé. Puisque les écoles privées peuvent toujours servir d’écoles publiques ou être subventionnées par la commune, la Caisse des écoles devra pouvoir continuer à encourager la fréquentation de l’école publique ou privée. II est bien vrai que la loi du 28 mars 1882 a rendu la création d’une Caisse des écoles obligatoire dans chaque commune, qu’elle a confié la distribution de ses fonds à la commission scolaire, mais ces dispositions nouvelles ne modifient pas encore la situation de l’école privée et ne privent pas plus ses enfants des encouragements de la Caisse des écoles qu’elles ne la privent elle-même des subventions de la commune (Avis de la section de l’intérieur du Conseil d’État, 24 juin 1885, legs Riberprey).

Ainsi, à la veille de la loi de 1886, la jurisprudence administrative de la section de l’Intérieur et celle du Conseil d’État statuant au contentieux, étaient d’accord pour reconnaître la légalité des subventions données par les communes aux écoles privées et des distributions aux enfants des écoles privées faites par les caisses des écoles ; cette interprétation était absolument conforme aux lois alors en vigueur, du 15 mars 1850 et du 10 avr. 1867 sur l’instruction primaire.

II. – Régime de la loi du 30 oct. 1886. – La loi du 30 oct. 1886 a, dans son art. 2, reproduit l’art. 17 de la loi du 15 mars 1850 ; elle reconnaît deux sortes d’écoles, les écoles publiques fondées et entretenues par l’État, les départements et les communes, les écoles privées fondées et entretenues par les particuliers ou des associations. Mais elle abroge entièrement les lois de 1850 et de 1867. Il n’y a donc plus d’école privée tenant lieu « d’école publique ».

Peut-il y avoir encore des écoles privées « subventionnées » par les communes ? La législation nouvelle ne le permet plus ; d’une part, le texte de la loi de 1867, relatif aux écoles subventionnées a disparu ; d’autre part, les amendements tendant à autoriser ces subventions des communes ont été rejetés, lors de la discussion de la loi de 1886, par la Chambre des députés et par le Sénat. L’enseignement primaire public est assuré exclusivement par le concours de l’État, du département et de la commune ; c’est même depuis la loi du 19 juil. 1889 un service public de l’État, avec le concours obligatoire des communes et des départements dans des proportions fixées législativement ; ce service est organisé par les ressources publiques, de façon que les communes n’aient plus besoin de recourir à l’enseignement privé pour assurer l’instruction de leurs enfants ; les écoles publiques doivent suffire, en principe, pour assurer l’enseignement public obligatoire et gratuit. Les écoles privées sont libres, mais la puissance publique n’a plus à les encourager ; car si, en fait, elles peuvent être des auxiliaires, elles sont, en droit, des concurrents du service public ; dès lors, les communes ne peuvent plus employer leurs ressources à subventionner des écoles privées, les deniers publics communaux ne sont pas faits pour concurrencer le service public de l’État dans lequel la commune a sa place, et qui doit être à l’abri des atteintes que les autorités locales voudraient y apporter. Cette solution a été admise, presque à la même époque, dans les termes les plus nets par l’assemblée générale administrative du Conseil d’État (19 juil. 1888 et 14 mars 1889) et par le Conseil d’État statuant au contentieux (20 févr. 1891, ville de Vitré, p. 137 ; v. les conclusions du commissaire du gouvernement).

De ce que la commune ne peut plus subventionner l’école privée, en résulte-il qu’elle ne puisse distribuer des secours aux enfants pauvres qui vont aux écoles privées ? La jurisprudence n’a pas admis cette solution rigoureuse, par les considérations et avec les distinctions suivantes : la commune n’a pas seulement des attributions d’ordre scolaire, elle a aussi une mission charitable très étendue ; elle peut venir en aide aux indigents de toute catégorie, sans examiner s’ils fréquentent les écoles publiques ou privées, car la bienfaisance pure ne distingue pas. Or il y a des œuvres de bienfaisance (distributions d’aliments, de soupes, de vêtements, etc., aux enfants se rendant à l’école) qui peuvent être considérées non seulement comme une annexe charitable de l’établissement scolaire lui-même ; mais aussi comme un service d’assistance pur et simple, rentrant, à ce dernier titre, dans les matières dont la commune peut s’occuper. Seulement il y aura une limite à cette coopération de la commune, il faudra que l’œuvre ait un caractère purement « charitable », qu’elle n’ait pas pour but d’alléger les charges « scolaires » de l’école privée en vue de lui permettre de lutter contre l’école publique ; sinon, ce serait une subvention déguisée, qui, par là même, serait illégale.

En résumé, avant 1886, la commune avait une double vocation : vocation scolaire s’appliquant aux écoles privées comme aux écoles publiques, et résultant de la législation spéciale de l’instruction primaire ; vocation charitable, résultant de la législation générale et du caractère non spécialise de la personnalité communale. Actuellement, la vocation scolaire de la commune, est limitée par la nouvelle législation sur l’enseignement, à l’école publique dans les conditions déterminées par la loi ; la vocation charitable générale subsiste, à la seule condition de conserver effectivement ce caractère. C’est ainsi que deux avis de la section de l’Intérieur du Conseil d’État ont reconnu qu’une commune pouvait être admise, sans violer la loi de 1886, à accepter et distribuer des legs en faveur des élèves pauvres des écoles privées (9 nov. 1887, legs Sinytère ; 27 déc. 1893, legs Dumoulin). De même, le Conseil d’État statuant au contentieux, a décidé que les communes pouvaient distribuer aux enfants pauvres des écoles privées, des secours en argent ou en nature ayant le caractère de bienfaisance pure (20 févr. 1891, ville de Nantes, v. les conclusions du commissaire du gouvernement, p. 137 ; 6 août 1897, ville de Dax, p. 60  ; 21 nov. 1902. P. 678, commune de Daon).

En ce qui concerne les Caisses des écoles, peuvent-elles, depuis la loi de 1886, continuer à distribuer des secours aux élèves des écoles libres ?

On se fonde, pour soutenir l’affirmative, sur la jurisprudence que nous venons d’analyser. On fait remarquer qu’il ne s’agit pas d’une subvention à l’école privée, pour laquelle la législation de 1886 serait opposable aussi bien à la Caisse des écoles qu’à la commune et qui, d’ailleurs, n’est, à aucun moment, rentrée dans la capacité de cette caisse, même vis-à-vis de l’école publique (avis de la section de l’Intérieur, 11 déc. 1900) mais seulement d’une distribution de secours aux enfants qui fréquentent l’école privée, que c’est une œuvre de bienfaisance ; que les Caisses des écoles ont un caractère mixte, et sont à la fois un établissement scolaire et d’assistance ; que, du moment où les communes peuvent distribuer des secours aux enfants pauvres des écoles privées, on ne saurait refuser le même droit aux Caisses des écoles dont les lois du 28 mars 1882, du 31 oct. 1886, du 19 juil. 1889, n’ont, en rien, modifie la capacité ; que cette solution enfin a été admise par la section de l’Intérieur du Conseil d’État, le 25 mai 1887 et par le tribunal de la Seine, le 28 avr. 1887.

Nous ne pensons pas que cette théorie puisse être adoptée. Les Caisses des écoles n’ont d’autre capacité que celle qui leur est reconnue par la loi du 10 avr. 1867 ; elles sont destinées à encourager la fréquentation des écoles. Ce sont donc des établissements d’ordre scolaire créés par une loi relative uniquement à l’enseignement primaire et dans lesquels le caractère de bienfaisance est absolument subordonné au but purement scolaire. Il est donc impossible de distinguer dans leurs attributions l’élément charitable et l’élément scolaire ; pour la commune, cette distinction était possible, en raison de sa personnalité pour ainsi dire illimitée et de sa vocation charitable générale, en dehors de toute préoccupation d’enseignement ; pour la Caisse des écoles, il n’en est pas de même, car la spécialité de sa capacité juridique s’y oppose : elle n’a que la personnalité très limitée qui lui est concédée par la loi de 1867 qui ne peut être divisée et qui est strictement restreinte à sa mission d’auxiliaire de l’école. Si l’on autorisait la Caisse des écoles à faire des actes considérés comme purement charitables, on violerait le principe de la spécialité, on la ferait sortir de ses attributions.

La Caisse des écoles est, d’ailleurs, depuis la loi du 28 mars 1882, rattachée d’une façon encore beaucoup plus étroite au service public de l’instruction ; cette loi rend la Caisse obligatoire dans toutes les communes et charge la commission scolaire de distribuer les secours. II est vrai que l’art. 54 de la loi du 19 juil. 1889, en déclarant abroger le § 2 de l’art. 17 de la loi du 28 mars 1882, semble supprimer cette attribution de la commission scolaire ; mais il ressort, sans aucun doute, des travaux préparatoires et de la circulaire du 27 juil. 1889, que la loi de 1889 a entendu abroger, non le deuxième alinéa mais la deuxième partie du premier alinéa de cet art. 17 de la loi de 1882, et que la disposition relative à l’intervention de la commission scolaire a conservé son entière vigueur. La Caisse des écoles se trouve bien ainsi caractérisée comme annexe du service public de renseignement.

S’il en est ainsi, si la Caisse des écoles est un établissement purement scolaire, il n’est pas possible de lui permettre, sous la législation actuelle, d’encourager, par ses subsides, à la fréquentation de l’école privée. Ce qui était licite lorsqu’il était pourvu à l’enseignement par l’Administration, tant à l’aide des écoles privées que des écoles publiques, cesse de l’être depuis que la puissance publique entend assurer l’enseignement public à l’aide de l’école publique seule. L’établissement, qui était autrefois la Caisse des écoles, publiques ou privées, est devenu la Caisse de l’école.

La jurisprudence invoquée, en sens contraire, date du commencement de l’année 1887 et semble la continuation pure et simple de la jurisprudence antérieure à la loi de 1886 ; elle ne nous paraît pas s’être préoccupée du changement résultant de la législation nouvelle. Tout au contraire, la section de l’Intérieur du Conseil d’État se fixait bientôt dans un sens opposé et décidait qu’en cas de legs faits aux enfants pauvres des écoles en général, il y avait lieu de faire deux parts du legs ; l’une applicable aux enfants pauvres des écoles publiques, pourrait être acceptée par la Caisse des écoles, l’autre, applicable aux enfants des écoles privées, demeurerait en dehors de la capacité de la Caisse et pourrait, seulement, en raison de son caractère charitable, être acceptée, dans l’intérêt de ces enfants, par la commune (avis précités du 9 nov. 1887 et du 27 déc. 1893).

C’est cette doctrine que nous vous proposons de confirmer en déclarant que les Caisses des écoles, depuis la loi du 30 oct. 1886, ne peuvent plus distribuer de secours aux élèves des écoles privées.

II va sans dire que nous réservons absolument le cas des « fondations », c’est-à-dire des legs que les Caisses des écoles auraient, antérieurement à la loi du 30 oct. 1886, été autorisées à accepter avec affectation spéciale aux enfants pauvres fréquentant les écoles libres. II s’agirait, en effet, dans cette hypothèse, de la conservation d’un droit acquis, auquel les modifications apportées par la législation à la capacité de l’établissement légataire ne devraient pas porter atteinte. C’est ainsi que la section de l’intérieur du Conseil d’État, dans deux avis des 2 mars 1893 et 6 juil. 1893, a admis qu’un établissement de bienfaisance et une fabrique, régulièrement autorisée, sous la législation antérieure, à accepter un legs avec obligation de subventionner une école privée, devaient pouvoir, en raison de l’irrévocabilité des actes intervenus, continuer à assurer le service de la fondation, même depuis la loi du 30 oct. 1886. Nous pensons donc, que les Caisses des écoles pourraient, par application de la même jurisprudence, continuer actuellement à distribuer des secours aux enfants des écoles privées, à titre exceptionnel, en tant qu’il s’agirait de l’exécution d’une fondation, précédemment acceptée et ayant un caractère définitif.

III. – La législation nouvelle s’applique-t-elle uniquement aux Caisses des écoles fondées depuis 1886, ou a-t-elle pu modifier les droits des Caisses fondées antérieurement ? Les Caisses fondées depuis 1886, sont évidemment soumises à la législation nouvelle. En est-il de même des Caisses fondées antérieurement ? Ces Caisses qui ont pu légalement, jusqu’en 1886, recueillir et distribuer des subsides en faveur des enfants des écoles libres, se trouvent-elles avoir leur capacité restreinte aujourd’hui aux seuls enfants des écoles publiques ?

 Si la loi avait émis une prescription impérative à l’égard des Caisses des écoles, il n’y aurait aucun doute ; la difficulté vient de ce que le changement de capacité des Caisses des écoles ne résulte pas d’un texte positif, mais découle indirectement de la refonte, de la législation sur l’instruction primaire ; on peut dès lors se demander si la modification affecte les Caisses qui existaient régulièrement à cette époque et si leur personnalité se trouve ipso facto transformée.

La réponse nous paraît dépendre exclusivement de la solution de la question suivante : les Caisses des écoles étaient-elles, avant la législation nouvelle, des établissements publics ou des établissements d’utilité publique ?

Si ces Caisses, en effet, étaient, lors de leur fondation, un établissement public, elles n’étaient pas une personne privée, elles étaient une branche d’une administration publique, un des rouages d’un service public ; donc les modifications du régime du service public, dont elles font partie intégrante, entraîneront nécessairement une modification correspondante dans leur organisation propre. C’est ainsi que la commune, établissement public associé au service de l’enseignement, a eu sa capacité modifiée implicitement par la législation de 1886. Si, au contraire, les Caisses des écoles sont un établissement d’utilité publique, elles constituent une personne privée, distincte du service public, qui peut lui être utile, mais qui n’en dépend pas ; elles sont uniquement régies par l’acte qui leur a donné la vie civile conformément à la législation en vigueur lors de leur création, c’est-à-dire par leurs statuts. Les modifications apportées au service public dont elles sont l’auxiliaire privé et indépendant ne peuvent rétroagir sur leurs statuts ou du moins ne peuvent être réputées rétroagir sur ces statuts, à moins d’une disposition formelle de la loi. Le changement d’affectation de leur patrimoine, la restriction au droit d’en disposer constitueraient une sorte d’expropriation ou de confiscation qui ne pourraient résulter que d’un texte législatif explicite, lequel fait défaut dans l’espèce.

Donc suivant qu’on reconnaîtra aux Caisses des écoles, avant 1886, leur caractère d’établissements publics ou d’établissements d’utilité publique, elles seront atteintes ou non, par la législation nouvelle, elles pourront, ou non, continuer à distribuer aux enfants des écoles privées.

En ce qui concerne les Caisses créées postérieurement à 1882, il n’y a pas d’hésitation. La loi du 28 mars 1882, en édictant l’obligation pour chaque commune d’avoir une Caisse des écoles, constitue ces Caisses à l’état d’organisme administratif nécessaire, ce qui est la négation même de l’établissement privé. Aussi est-on d’accord pour reconnaître aux Caisses, fondées en exécution de cette loi, le caractère d’établissement public.

La difficulté se pose pour les Caisses créées avant la loi du 28 mars 1882, dans les seules conditions prévues par la loi du 10 avr. 1867 ; c’est précisément le cas de la Caisse du VIe arrondissement qui est devant nous, et dont les statuts, approuvés en 1879, n’ont pas été modifiés depuis. Ce qu’il s’agit de déterminer, c’est si la loi du 10 avr. 1867, en autorisant les communes à créer des Caisses des écoles, dotées de la personnalité civile, a entendu à ce moment conférer à ces Caisses le caractère d’établissements publics ou d’établissements d’utilité publique. C’est la question qui fait en réalité le fond du litige actuel ; c’est celle qui a divisé les hommes politiques et les publicistes notamment M.Beurdeley, maire du VIIIe arrondissement, et M. Boillot, ancien maire du VIearrondissement, qui ont soutenu les deux thèses contraires, chacun par d’excellents arguments.

Dans le sens du caractère d’établissement d’utilité publique, on fait valoir que les établissements publics ont une organisation fixe et uniforme, sont soumis une tutelle étroite de l’Administration qui est armée à leur égard, de pouvoirs de coercition (conflits, 9 déc. 1899, p. 731, canal de Gignac) ; que des établissements, même d’un intérêt général considérable, soumis à une législation et une réglementation étroites, avec subsides de l’État, sont considérés comme de simples établissements d’utilité publique, lorsqu’ils sont issus de l’initiative libre et qu’ils sont pourvus d’une administration indépendante comme les sociétés de secours mutuels, aux termes mêmes de la loi et les caisses d’épargne, d’après la jurisprudence (Civ. cass., 5 mars 1856) ; que le but de la loi de 1867, en créant les Caisses des écoles, a été de faire appel l’initiative privée, aux cotisations volontaires, pour alléger les charges des communes ; que la loi ne pose aucune règle pour les statuts, autorise par là même les formes les plus variées comme il sied pour une institution purement privée, et n’exige même pas l’intervention du pouvoir central, laissant le soin d’approuver les statuts au conseil municipal et au préfet ; qu’en fait, l’Administration a, pendant un quart de siècle, permis aux Caisses des écoles de se constituer et de s’administrer avec toute liberté et de la manière la plus variée, au gré de leurs fondateurs. On en conclut que, d’après l’esprit de la loi organique et l’exécution qu’elle a reçue, les Caisses des écoles créées avant 1882, avaient le caractère d’établissements d’utilité publique, libres et autonomes dans les limites de leurs statuts. L’Administration ne pouvait, dès lors, modifier leur organisation et leurs attributions, et les changements de la législation générale de l’enseignement ne pouvaient avoir implicitement de conséquence à leur égard.

Quelle que soit la valeur de plusieurs de ces considérations, nous pensons que la Caisse des écoles a été dès l’origine, un établissement public. Ce qui caractérise l’établissement public, c’est d’être une personne morale créée pour la gestion d’un service public. Or le service public peut exister dans des conditions très diverses : avec des ressources d’origines très diverses (taxes, cotisations volontaires, dons et legs, subventions des personnes publiques), avec ou sans individualité financière et comptable propre (section de commune, pauvres de la commune), avec une organisation plus ou moins bien définie et contrôlée, avec ou sans mode de coercition explicitement déterminé par la loi (chambres de commerce et autrefois fabriques), avec une indépendance presque complété vis-à-vis de l’Administration (Caisses de secours des prêtres âgés ou infirmes).

Il y a donc un grand nombre de critériums différents pour reconnaître un établissement n’est pas nécessaire qu’ils se trouvent tous réunis. Mais il nous paraît qu’il y a une condition essentielle pour qu’il y ait établissement d’utilité publique, c’est que la création en appartienne à l’initiative privée. Or la Caisse des écoles, aux termes mêmes de la loi du 10 avr. 1867, n’est pas créée par l’initiative privée, les ressources privées pourront l’alimenter en partie ou en totalité, mais l’initiative de la création appartient à la commune ou aux communes qui peuvent se réunir à cet effet. La commune n’intervient donc pas seulement pour approuver les statuts d’un établissement privé, mais c’est elle qui crée elle-même une caisse communale pour le service de l’instruction. La circulaire du 12 mai 1867 invite les conseils municipaux à délibérer sur cette création et le modèle de statuts annexé à la circulaire du 9 juil. 1867 porte « le conseil municipal délibère s’il y aura dans la commune une Caisse des écoles ». La Caisse peut donc fonctionner théoriquement sans le concours de particuliers ; la loi ne les associe pas à son fonctionnement et ne les prévoit que comme souscripteurs.

D’autre part, la loi de 1867 prévoit que la gestion de la Caisse sera confiée au percepteur qui en fera le service gratuitement. C’est le comptable communal qui est obligatoirement chargé de cette recette communale, et une circulaire de la direction de la comptabilité publique classe, en conséquence, cette comptabilité comme service hors budget du receveur municipal.

Quant à la pratique suivie jusqu’à ces dernières années, c’est à un régime de fait qui ne peut, aux yeux du juge, se substituer au régime du droit.

Nous estimons donc que les Caisses des écoles ont eu, dès l’origine, sous la loi de 1867, le caractère d’établissements publics ; que, dès lors, elles sont dominées, tout comme les Caisses fondées ultérieurement, par les principes de la législation du service public de l’enseignement dont elle dépendent, et que ces principes s’opposent aujourd’hui à ce qu’elles puissent distribuer des secours aux élèves des écoles privées. C’est la doctrine adoptée par l’assemblée générale administrative du Conseil d’État, le 17 mai 1900, que nous vous proposons de confirmer.

Les statuts ne sauraient dans aucun cas prévaloir contre la loi. Il appartient à l’Administration, en vertu des pouvoirs généraux de tutelle qui lui appartiennent vis-à-vis des établissements publics, de prendre, pour assurer l’exécution de la loi, les mesures nécessaires. Elle peut, soit prononcer la dissolution, soit provoquer la révision des statuts (Conf. les décrets des 31 mars 1884 et 12 juin 1885, relatifs à la Caisse de secours des prêtres âgés du diocèse d’Angers), soit annuler les actes de ces établissements qui seraient contraires à la législation du service public dont ils font partie.

Donc le préfet de la Seine, en annulant les délibérations de la Caisse des écoles du VIe arrondissement, comme contraires au régime légal qui dérive pour cet établissement public scolaire de la loi du 30 oct. 1886, sur l’enseignement primaire, n’a pas excédé la limite de ses pouvoirs.

2e et 3e espèce, sieur Fourcade et Sieur Dareste et autres.

Dans l’affaire de la Caisse des écoles du VIe arrondissement de Paris que nous venons d’examiner, le recours était formé au nom de la Caisse par ses représentants légaux. II ne pouvait y avoir de doute sur sa recevabilité, la Caisse, personne morale, a incontestablement qualité pour demander l’annulation de tous actes administratifs qu’elle prétend faits en violation de ses droits. En est-il de même lorsque l’action est formée à titre individuel par des particuliers comme membres de la Caisse des écoles ?

 La question se pose dans les deux affaires dont vous êtes saisis actuellement : dans l’une, le sieur Fourcade, agissant comme souscripteur de la Caisse des écoles de la commune de Montsoult, vous défère une décision du préfet de Seine-et-Oise annulant, comme dans le VIe arrondissement de Paris, une délibération du comité de la Caisse relative à la distribution gratuite de chaussures et de fournitures scolaires à tous les enfants de la commune qui fréquentent les écoles tant privées que publiques ; dans l’autre, les sieurs Dareste et autres agissant comme électeurs de la Caisse des écoles du XVIe arrondissement de Paris, vous demandent d’annuler les opérations électorales auxquelles il a été procédé pour le renouvellement du comité d’Administration et la décision implicite de rejet résultant du silence garde par le préfet sur leur réclamation.

De semblables recours sont-ils recevables ? Existe-t-il au profit des souscripteurs des Caisses des écoles un droit de contrôle effectif sur le fonctionnement de ces établissements publics, un contentieux de l’annulation des actes administratifs qui les concernent ? Vous vous êtes déjà prononcé pour la négative à l’occasion d’un pourvoi relatif aux élections de la Caisse des écoles de la commune de Roque (24 mai 1901, Barens, p. 598). Vous avez décidé que c’était au préfet, sous l’autorité du ministre qu’il appartenait de veiller à l’observation des statuts et à la régularité des opérations électorales et vous avez rejeté le recours formé par des électeurs contre ses décisions : mais votre arrêt relève un certain nombre de circonstances de fait qui ne permettent pas d’en dégager d’une manière précise la doctrine et les difficultés d’interprétation auxquelles il a donné lieu nous engagent à reprendre devant vous l’étude de la question de droit en vous demandant de la trancher définitivement dans les arrêts que vous allez rendre. Il s’agit de définir la nature des rapports juridiques entre les membres des Caisses des écoles et la Caisse elle-même, le genre de sanction du contrat intervenu entre les parties, la forme des recours contentieux.

Dans le sens de la recevabilité des recours, on fait valoir qu’il s’agit d’une simple application du droit commun en matière administrative et du principe d’après lequel tout citoyen qui justifie d’un droit violé peut former un recours contentieux. Or les souscripteurs ou membres des Caisses des écoles ont des droits qu’ils tiennent des statuts, régulièrement approuvés aux termes de la loi du 10 avr. 1867, par le conseil municipal et le préfet  ; ils sont appelés par ces statuts à verser des fonds, à voter pour les élections au comité, à prendre part, comme membres du comité, à l’administration de la caisse. Ils sont donc associés par les statuts eux-mêmes à cette administration à laquelle ils contribuent directement et nécessairement par leurs cotisations ; ils ont, dès lors, un droit acquis, en vertu du contrat d’association, lui-même, à exercer un contrôle sur la marche de l’association, à exiger que les élections soient sincères et conformes aux statuts, que les fonds soient employés à la destination en vue de laquelle la Caisse a été constituée. On ajoute que dans tous les cas où des corps administratifs sont constitués au moyen de l’élection, il existe un contentieux électoral, soit que la loi l’ait expressément prévu, soit que la jurisprudence l’ait créé de toutes pièces par application des principes généraux du droit administratif : élections des chambres de commerce, des sociétés de secours mutuels, des conseils de fabrique et consistoires, de la chambre des notaires, des syndics des associations syndicales autorisées, des délégués des conseils municipaux commissions administratives, etc.

Nous ne saurions admettre cette théorie dans toute sa généralité et nous estimons qu’il y a lieu de faire une distinction entre la nature des recours que les souscripteurs des Caisses des écoles entendent exercer suivant qu’ils prétendent obtenir l’annulation d’opérations administratives ou d’actes administratifs relatifs à la gestion de ces Caisses ou qu’ils demandent seulement la résolution du contrat à leur égard avec dommages-intérêts, s’il y a lieu.

Les citoyens n’ont pas, en effet, nécessairement le droit de contrôler par la voie contentieuse, les conditions de fonctionnement des services publics ou des établissements publics qui en font partie, par cela seul qu’ils seraient appelés en fait à y coopérer d’une manière quelconque. Pour qu’ils puissent le faire, il faut ou que la loi ait entendu le leur permettre ou qu’ils puissent exciper d’un droit personnel opposable au service public.

Ils tiennent ce droit de la loi, lorsque les textes organiques qui régissent le service public ont spécifié l’existence d’un recours contentieux, ou simplement lorsque ces textes prévoient comme base du fonctionnement du service, un régime électoral et leur confère ainsi un droit propre en tant qu’électeurs, avec les sanctions contentieuses que ce droit comporte, implicitement (Chambres de commerce, conseils de fabrique, etc.).

Ils peuvent invoquer un droit personnel lorsqu’ils se trouvent engagés par voie de coercition dans l’association dont ils se trouvent membres forcés ou lorsque cette association est armée vis-à-vis d’eux de pouvoirs qui peuvent éventuellement léser leurs droits individuels, c’est le cas des habitants d’une commune ou d’un département, des membres d’un syndicat autorise vis-à-vis desquels l’établissement public auquel ils sont agrégés, de gré ou de force, peut procéder par voie d’autorité de perception de taxe par exemple, c’est encore le cas où des agents, des officiers ministériels, des groupes de citoyens quelconques seraient appelés par l’administration à dire des commissions, des conseils de discipline ou autres corps investis à leur égard de pouvoirs de nature à les atteindre dans leurs intérêts privés. Dans ces diverses circonstances, le droit contentieux existe même en l’absence de tout texte de loi, sinon toujours pour obtenir l’annulation des actes de gestion entachés d’illégalité, du moins pour assurer la composition légale des corps au moyen d’opérations électorales régulières.

Aucune de ces conditions ne se trouve réalisée pour les Caisses des écoles. D’une part, les souscripteurs ne peuvent invoquer aucun droit personnel ; ils s’engagent volontairement et ne sont pas recrutés par voie d’autorité ; le fonctionnement de l’établissement public ne peut les toucher en quoi que ce soit  ; d’autre part, aucun texte de loi ou de règlement ne leur confère aucun droit électoral ou autres, sur la marche de l’établissement. La loi du 10 avr. 1867 qui a créé les Caisses des écoles, ne prévoit nullement que des particuliers participeront à la gestion de la Caisse ; elle se borne à dire que la Caisse des écoles est créée par délibération du conseil municipal approuvée par le préfet ; que le revenu se compose de cotisations volontaires, de dons et legs, de subventions de la commune, du département et de l’État, et que le service est fait gratuitement par le percepteur ; la loi du 28 mars 1882 qui rend l’établissement de la Caisse obligatoire dans chaque commune, se contente d’ajouter que la distribution des secours sera faite par la commission scolaire. Donc, d’après la loi, les souscripteurs, que l’on appelle communément les membres de la Caisse des écoles, sont des tiers à l’égard de cette caisse ; ils sont dans une situation analogue aux donataires ou aux testateurs, ou d’une manière générale à ceux qui souscrivent en vue d’un service public. Les textes organiques sur la constitution de ce genre d’établissements publics n’ont pas entendu leur conférer un droit quelconque sur leur fonctionnement ; si les statuts de ces établissements ont cru devoir associer les souscripteurs dans une mesure plus ou moins grande à son administration, cette pratique, bien qu’approuvée par l’autorité compétente (conseil municipal et préfet) n’a pu avoir pour effet de changer leur situation de droit vis-à-vis de l’établissement public, de les transformer légalement de tiers en associés et de leur attribuer sur la marche du service public une action que la loi ne leur a pas donnée.

Les difficultés qui pourront se présenter en ce qui concerne son fonctionnement seront donc des difficultés d’ordre purement intérieur qui devront être résolues par l’Administration seule et ne pourront donner lieu, de la part de ces tiers souscripteurs, à aucun recours en annulation.

Quel sera donc le lien de droit entre le souscripteur et la Caisse des écoles ? Quelle sera la sanction du contrat ?

Le contrat qui intervient entre le souscripteur et la Caisse est purement et simplement un contrat de souscription en vue d’un service public déterminé, dans les conditions spécifiées aux statuts ; c’est identique au contrat, bien connu en droit administratif, qui s’appelle l’offre de concours pour l’exécution de travaux publics.

Le souscripteur verse ou promet une cotisation pécuniaire à une Caisse des écoles en vue d’un fonctionnement, dont les modalités sont fixées par les statuts et qui constituent (élections, mode d’administration, affectation de fonds) la condition du contrat. Le jour où la condition n’est plus remplie ; l’accord contractuel cesse d’exister et le souscripteur peut intenter les actions qu’il croira lui appartenir à condition qu’elles ne touchent ni à l’organisation de l’établissement ni à la marche du service.

S’il s’agissait de dons ou legs, le donateur ou le testateur pourrait soutenir que la condition impulsive et déterminante fait défaut et demander aux tribunaux civils la révocation de la libéralité. S’il s’agissait d’un contrat d’offre de concours, pour l’exécution de travaux publics, on pourrait prétendre que le travail n’a pas été exécuté dans les conditions stipulées et demander au conseil de préfecture à être dégagé de la souscription. De même vis-à-vis de la Caisse des écoles le souscripteur qui estime que les clauses des statuts en vue desquelles il a promis son concours pécuniaire ont été volées, peut refuser de payer ses cotisations à l’avenir, et, le cas échéant, demander le remboursement des cotisations versées, rien ne fait obstacle à ce que des actions de cette nature soient portées devant le Conseil d’État, juge de droit commun en matière administrative.

Pour nous résumer, il y a, en ce qui concerne les Caisses des écoles deux ordres d’idées absolument distincts : d’une part, la création de l’établissement, public par la commune, et son fonctionnement sous le contrôle de l’Administration, qui échappent absolument à l’action contentieuse des souscripteurs ; d’autre part, le contrat de souscription dont l’inobservation ne peut avoir à l’égard de l’établissement public que des conséquences d’ordre exclusivement pécuniaires, dans des limites à déterminer par le juge de ce contrat.

Par ces motifs, nous concluons au rejet comme non recevable du recours du sieur Fourcade et celui des sieurs Dareste et autres.

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L'auteur

Jean Romieu

Conclusions

  • Conclusion sur “CE 28 juin 1889, Compagnie des chemins de fer de l’Est”
  • Conclusion sur “CE 14 févr. 1890, Héritiers Guilloteaux “
  • Conclusion sur ”CE 13 nov. 1891, Commune d’Albias”
  • Conclusion sur “CE 8 avr. 1892, Sieur Trucchi”
  • Conclusion sur “CE 20 mai 1892, Sieurs Tessier et Beaugé, syndic de la faillite de la Societé du Casino de Nice c. ville de Nice”
  • Conclusion sur “CE 24 juin 1892, Ministre des travaux publics c. Garrigou”
  • Conclusion sur “CE 24 juin 1892, Sieur et dame de Quatrebarbes”
  • Conclusion sur “CE 8 août 1892, Sieur Bardot”
  • Conclusion sur “CE 8 août 1892, Compagnie lyonnaise des tramways c. consorts Piraud”
  • Conclusion sur “CE 8 août 1892, Sieur de Molembaix”
  • Conclusion sur “CE 2 dec. 1892, Sieur Mogambury”
  • Conclusion sur “CE 17 mars 1893, Compagnie du Nord et de l’Est et autres c. Ministre de la Guerre”
  • Conclusion sur “TC 8 juillet 1893, Bastide frères c. Falgayrolles et autres”
  • Conclusion sur “CE 17 nov. 1893, Commune de Quillebœuf”
  • Conclusion sur “CE 12 janv. 1894, Héritiers Dufourcq”
  • Conclusion sur “CE 9 févr. 1894, Sieur Brocks”
  • Conclusion sur “CE 21 juin 1895, Sieur Cames”
  • Conclusion sur “CE 17 janv. 1896, Fidon et fils”
  • Conclusion sur “CE 13 mars 1896, Ville de Paris c. Ministre de la guerre”
  • Conclusion sur “CE 5 mars 1897, 1er arrêt Verdier et Compagnie française de Kong c. Ministre des colonies, 2e arrêt Société commerciale, industrielle et agricole du Haut Ogooué (Daumas et Compagnie des héritiers Daumas) c. Ministre des colonies”
  • Conclusions Romieu sur CE 25 mai 1900, Commune de Lavault-Sainte-Anne, Sieurs Fayolle et autres
  • Conclusions Romieu sur CE 1er févr. 1901, Descroix et autres boulangers de Poitiers
  • Conclusions Romieu sur CE 9 mai 1902, Sieur Menut
  • Conclusions Romieu sur TC 2 déc. 1902, Société civile immobilière de Saint-Just 
  • Conclusions sur CE 25 mars 1904, Sieur Bouhier et autres [Commune de Lorient] (1re espèce), Sieur Loones et autres [Commune d’Hazebrouck] (2e espèce) et autres
  • Conclusions Romieu sur CE 10 févr. 1905, Sieur Tomaso Grecco
  • Conclusions Romieu sur CE 3 mars 1905, Lebourg c. Ville de Rouen

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