Le présent ouvrage reprend la thèse de doctorat, rédigée sous le régime de la cotutelle et dirigée par MM. les Professeurs Olivier Jouanjan (Université Panthéon-Assas, Paris 2) et Christoph Schönberger (Universität Konstanz, RFA). La soutenance a eu lieu le 6 décembre 2014 à l’Université de Strasbourg devant un jury composé de MM. les Professeurs Jacky Hummel, Matthias Jestaedt, Olivier Jouanjan, Éric Maulin, Christoph Schönberger et Karl-Peter Sommermann.
La séparation des pouvoirs est sans doute l’une des notions les plus en vogue dans le vocabulaire des juristes, mais prend également de la place dans des travaux de science politique ou d’histoire, ou même dans le langage ordinaire, non-spécialisé. Elle est devenue une notion sous-entendue, qui frappe tellement par l’évidence de son existence qu’il n’est point nécessaire de vouloir l’expliquer. Tout le monde sait ce qu’est la séparation des pouvoirs. La paternité française de la notion, attribuée à Montesquieu, ainsi que la conception française de la séparation des pouvoirs règnent en maître dans les travaux de la doctrine et dans la jurisprudence constitutionnelle françaises. Les étudiants de première année savent la définir. Il suffit de se référer aux deux modèles de régime politique qui l’appliquent : le régime parlementaire et sa séparation souple des pouvoirs et le régime présidentiel impliquant une séparation stricte ou rigide des pouvoirs. Mais l’on oublie que classer les régimes politiques en fonction de la manière dont s’organise l’exercice du pouvoir d’État n’est pas entreprendre de définir une notion dans sa teneur juridique.
Lorsque, après la réalisation d’un mémoire sur les doctrines classiques de la notion d’exécution en France et en Allemagne, qui portait essentiellement sur le XIXe et le début du XXe siècle, le Professeur Olivier Jouanjan a formulé la proposition de prolonger cette réflexion dans le cadre d’une thèse sur un sujet de droit allemand, nous nous réjouissions de pouvoir continuer à travailler sur l’Allemagne qui, malgré sa proximité géographique, reste toujours peu ou prou dans l’obscurité du champ de vision général français, bien que l’on puisse avoir le plaisir de lire les travaux excellents d’universitaires français germanophones, rares. Le sujet, Le principe de séparation des pouvoirs en droit allemand, venu naturellement, n’était guère exploité en France malgré son importance qualitative et quantitative dans la doctrine et la jurisprudence allemandes. Jeune doctorante, nous ne nous rendions pas compte de l’ampleur de la tâche ni du nombre écrasant de présupposés, de préjugés, auquel nous devrions nous confronter constamment lors de la rédaction de ce travail et encore aujourd’hui. Nous avons fait table rase de toutes ces images confectionnées et prêtes à utiliser pour découvrir la richesse que proposait le principe allemand de séparation des pouvoirs. Il ne s’agit ici ni d’un travail de droit comparé, ni d’une recommandation d’importer en France la réflexion et les solutions allemandes. Les ordres juridiques allemand et français sont deux mondes différents et l’on ne peut s’attendre à une entreprise d’import-export de leurs notions juridiques, ancrées dans leur histoire, propres à leur paysage doctrinal. Il s’agit d’une thèse rédigée par une juriste de formation française qui ne peut en aucun cas jouer le rôle de la « gentille dame de la réception »1, située à la frontière de deux ordres juridiques, qui donnerait des réponses allemandes à son interlocuteur français. Il est davantage question de présenter les aspects allemands d’une théorie de la séparation des pouvoirs à laquelle œuvrent, outre-Rhin, le juge constitutionnel et la doctrine, afin de pouvoir apporter une réflexion nouvelle sur la situation française, dépouillée des présupposés et préjugés qui maintiennent la notion dans une cage en verre.
Nous ne saurions exprimer notre gratitude à l’égard de celui qui, il y a si longtemps, a éveillé un intérêt vif et continu en nous pour ces questions allemandes. Au-delà de ce que peuvent dire les mots, nous remercions le Professeur Olivier Jouanjan pour son soutien moral et scientifique, pour l’élégance et l’acuité de ses remarques, pour les conversations et échanges précieux, pour avoir été un directeur de thèse infaillible.
Ce travail n’aurait sans aucun doute pas été le même, si le Professeur Christoph Schönberger n’avait pas accepté, malgré les difficultés administratives qui accompagnent immanquablement la conclusion d’une convention de cotutelle, de s’associer au directeur français pour apporter à la thèse son côté allemand. Mit helfendem Rat hat er die Bearbeitung des Themas begleitet und die unentbehrliche deutsche Dimension gegeben. Pour sa rassurante présence et ses remarques, toujours pertinentes, nous lui témoignons de toute notre gratitude.
Afin de ne pas occuper de manière prétentieuse l’espace consacré à l’avant-propos, nous nous contentons de remercier de manière générale, par le prisme institutionnel, l’Université de Strabourg, l’Université de Constance, l’Université allemande de Sciences administratives de Spire, l’Université Albert-Ludwig de Fribourg-en-Brisgau, le Collège doctoral franco-allemand en droit public comparé et européen, où nous avons toujours trouvé une infinie bienveillance et, à maintes reprises, des réponses à des questions scientifiques, mais également, de manière plus prosaïque, lors de nos séjours de recherche, à des interrogations d’ordre administratif et même logistique.
Nos remerciements vont au Professeur Philippe Cossalter qui a proposé et soutenu la publication de cette thèse allemande rédigée en langue française dans une maison d’édition qui porte si bien son nom. Le Centre juridique franco-allemand de l’Université de la Sarre a toujours été un facteur décisif, un lien traditionnel entre la France et l’Allemagne. Nous ne pouvons être plus heureuse de n’avoir pas cédé à la tentation, malgré l’attractivité d’autres propositions, de publier cette thèse plus tôt pour voir, enfin, sa parution dans la continuité du dialogue franco-allemand du Centre.
- Nous empruntons cette figure de style au Professeur Olivier Jouanjan qui a si bien diagnostiqué la difficulté qui accompagne tout travail portant sur un ordre juridique étranger [↩]