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L’évolution du droit public allemand en 1968

Citer : Michel Fromont, 'L’évolution du droit public allemand en 1968, ' : Revue générale du droit on line, 2025, numéro 68388 (www.revuegeneraledudroit.eu/?p=68388)


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Les principaux événements législatifs et jurisprudentiels survenus en Allemagne en 1968

Nous examinerons successivement les réformes législatives et les décisions jurisprudentielles qui sont intervenues en Allemagne au cours de l’année 1968 et qui méritent de retenir l’attention du juriste français1.

 

I. Les principaux événements législatifs

 

A. – Les révisions de la Loi fondamentale

1) Seizième loi modifiant la Loi fondamentale, promulguée le 18 juin 1968 (B. G. Bl., I, p. 657). Le système juridictionnel allemand est particulièrement complexe : outre les juridictions constitutionnelles (de la Fédération et des Länder), il comprend cinq ordres de juridictions : les tribunaux ordinaires (ou judiciaires), les tribunaux du travail, les tribunaux administratifs, les tribunaux sociaux, les tribunaux fiscaux2. Pour coordonner la jurisprudence de ces cinq ordres de juridictions, la Loi fondamentale avait prévu une Cour suprême, mais celle-ci n’a jamais été instituée. La nouvelle rédaction de la Loi fondamentale est moins ambitieuse : elle prévoit seulement une Chambre commune aux cinq tribunaux fédéraux de cassation (Gemeinsamer Senat der obersten Gerichtshöfe) ; celle-ci a été effectivement créée par une loi du 19 juin 1968 (B. G. Bl., I, p. 661)34.

2) Dix-septième loi modifiant la Loi fondamentale, promulguée le 24 juin 1968. Elle a fait l’objet de notre chronique parue dans cette Revue, 1969, p. 197.

3) Dix-huitième loi modifiant la Loi fondamentale, promulguée le 15 novembre 1968 (B. G. Bl., I, p. 1177). Elle allonge sensiblement les délais accordés au Bundesrat (composé des représentants des gouvernements des Länder) lors de l’examen des projets de loi.

B. – Les modifications de la législation fédérale

1) Loi du 9 avril 1968 sur les voies d’eau fédérales (Bundeswasserstraßengesetz, B. G. Bl., II, p. 173). Cette loi a retenu l’attention des juristes allemands5 dans la mesure où elle posait le difficile problème de la répartition des compétences entre la Fédération et les Länder. En vertu de plusieurs décisions du Tribunal constitutionnel fédéral de Karlsruhe6, la Fédération est certes compétente pour légiférer en matière de cours d’eau fédéraux, mais son administration ne peut intervenir que pour assurer la circulation et non pour s’occuper des autres formes d’utilisation des cours d’eau (notamment de l’eau qu’ils contiennent). De ce fait, le législateur a été amené à élaborer de savantes formules de collaboration entre l’administration fédérale et les administrations des Länder : ainsi, en principe, les Länder intéressés doivent autoriser la Fédération à modifier ou à construire de nouvelles voies d’eau fédérales. Cette loi retient également l’attention du juriste français dans la mesure où l’Allemagne parvient aux mêmes solutions pratiques qu’en France sans utiliser la théorie du domaine public, ce qui montre l’inutilité de cette dernière.

2) Loi du 24 mai 1968 sur les contraventions (B. G. Bl., I, p. 481)7 . Sous le régime de la loi précédente, celle du 25 mars 1952, les infractions aux lois étaient punies par des amendes infligées par l’autorité administrative qui avait la responsabilité de veiller à leur respect. Il s’agissait donc de véritables sanctions administratives ; il était toutefois possible d’obtenir leur annulation par les tribunaux d’instance. Sous le régime de la nouvelle loi, les amendes infligées par les autorités administratives ne sont plus que des amendes de composition : si l’auteur de l’infraction n’accepte pas, il est traduit automatiquement devant les tribunaux d’instance (Amtsgerichte). On assiste ainsi à un effort pour réserver aux tribunaux ordinaires le pouvoir d’infliger des amendes. L’avenir dira si les sanctions administratives de caractère pécuniaire disparaîtront vraiment

C. – Les modifications de la législation des Länder8

1) Code administratif du Schleswig-Holstein, promulgué le 18 avril 1967 et entré en vigueur le 1er janvier 19689. C’est le premier texte législatif de cette sorte en Allemagne10. Il comporte deux parties : la première concerne l’organisation administrative (les différentes autorités, les différentes personnes morales de droit public, les différents contrôles administratifs), la deuxième a pour objet l’action administrative. Cette seconde partie est la plus intéressante par son objet : les différentes décisions de l’administration et leurs conditions de validité, les procédures de notification et d’exécution forcée y sont notamment définies. Les dispositions de cette partie sont d’ailleurs empruntées pour une large part au projet de loi-modèle (Musterentwurf) qui fut élaboré en 1963 par une commission composée de représentants de la Fédération et des Länder11, et qui portait principalement sur la procédure administrative non contentieuse.

2) La réforme administrative en Rhénanie-Palatinat12. Le gouvernement C.D.U. de ce Land, soutenu sur ce point par l’opposition S.P.D., a décidé de procéder à une vaste réforme administrative en vue de résoudre dans la mesure du possible les problèmes posés par la pauvreté des administrations locales. Tout d’abord, le nombre des diverses circonscriptions de l’administration d’État (c’est-à-dire du Land) a été réduit : une loi du 16 juillet 1968 a supprimé deux des cinq départements (Regierungsbezirke) à compter du 1er octobre 1968 ; une loi du 22 octobre 1968 a supprimé onze des 39 arrondissements (Landkreise) existants. Puis, le gouvernement s’est efforcé d’accroître la dimension des communes. Afin de tenir compte des résistances du Parlement local, il favorisa tout d’abord la création de fédérations de communes : ce fut la loi du 16 juillet 1968 qui créa une nouvelle institution qui rappelle les districts urbains de la France (ce sont surtout les grands services publics et l’établissement de schémas directeurs d’urbanisme qui leur sont confiés). On a alors prévu que 223 groupements de ce genre réuniraient les 2 905 communes du Land, à l’exception toutefois des 55 villes et de quelques communes isolées. Il faut noter que de nombreuses communes ont déjà des mairies communes (Bürgermeistereien) ou des services communs (Ämter), ce qui fait qu’il n’y avait guère que 1 188 unités administratives dans le Land. Il semble que les espoirs mis dans cette loi ont été déçus et, à l’automne 1968, le gouvernement a franchi le Rubicon. Il en est résulté deux lois, celles du 7 janvier 1969 et du 14 février 1969 : la première prévoit l’incorporation de 22 communes suburbaines dans des villes et la réunion de 261 communes en 114 nouvelles ; la seconde devait prévoir environ 30 absorptions de communes suburbaines et 180 fusions de villages. Comme le montre le professeur Ule dans l’article cité précédemment en note, il est probable que la constitutionnalité de ces lois sera contestée par de nombreuses communes devant le Tribunal constitutionnel de Rhénanie-Palatinat, car la constitution du Land (comme d’ailleurs la Loi fondamentale) garantit l’existence des collectivités locales, et le droit des communes à être entendues par le Parlement avant toute suppression semble ne pas avoir toujours été respecté. D’autres Länder s’efforcent également de réformer l’organisation communale. Ainsi, en Rhénanie du Nord-Westphalie, une loi du 19 décembre 1967, entrée en vigueur le 1er janvier 1968, a remplacé les 67 communes existant dans l’arrondissement de Unna par 9 communes ayant de 10 000 à 50 000 habitants. De même une loi du 18 juillet 1967 a simplifié la procédure de fusion des communes dans ce Land13.

II. Les principaux événements jurisprudentiels

A. – La justice constitutionnelle

Nous avons seulement retenu quelques décisions du Tribunal constitutionnel fédéral (Bundesverfassungsgericht) de Karlsruhe.

1) Lois soumises au contrôle du Tribunal constitutionnel fédéral. Dans ses décisions du 7 mai 1968 et du 11 juin 196814, le Tribunal rappelle que tous les tribunaux peuvent contrôler eux-mêmes la constitutionnalité des lois qui ont été promulguées avant l’entrée en vigueur de la Loi fondamentale (23 mai 1949) et qu’ils sont tenus de saisir le Tribunal constitutionnel fédéral seulement dans le cas où ces lois ont été approuvées par les législateurs ultérieurs (par exemple, en modifiant la disposition même dont la constitutionnalité est contestée).

2) Appréciation de la validité des règlements administratifs. En général, pour être valable, un règlement administratif doit avoir été prévu par une loi d’habilitation régulière15 : c’est l’application de l’article 80 de la Loi fondamentale. En matière pénale, un autre article, sensiblement plus restrictif, est applicable : c’est l’article 103, alinéa 2, de la Loi fondamentale, selon lequel « un acte ne peut être puni que si son caractère répréhensible a été établi par une loi antérieure à l’acte » ; par conséquent, la loi doit décrire elle-même dans leurs grandes lignes les cas d’infraction et la nature et l’étendue des peines et le règlement peut seulement définir les modalités d’application16. Tel est l’enseignement principal qu’il convient de tirer de la décision rendue par le Tribunal constitutionnel fédéral le 7 mai 196817. En l’espèce, il s’agissait d’un règlement d’application du § 366, n° 10 du Code pénal. Le requérant soutenait que ce paragraphe violait la Loi fondamentale parce qu’il donnait à la police une autorisation trop vague. Le tribunal a considéré que l’autorisation n’était pas trop vague, car, en raison du contexte, elle imposait à l’autorité de police l’obligation de prendre ces règlements dans l’intérêt de la circulation. Mais, en revanche, il a considéré que le règlement bavarois du 7 novembre 1951 (modifié le 14 août 1952) sur les affiches et tracts ne pouvait pas être fondé sur le § 366 du Code pénal, car précisément ce règlement n’était pas pris dans l’intérêt de la circulation, mais dans celui de l’ordre public. Le règlement imposait aux citoyens l’obligation de communiquer à la police vingt-quatre heures à l’avance les affiches et tracts politiques qu’ils se proposaient de coller ou de distribuer. En conséquence, le jugement de la Cour d’appel de Munich condamnant le requérant pour infraction à ce règlement a été annulé.

3) Annulation partielle de la loi du 24 juillet 1967 sur les partis politiques (Parteiengesetz). Cette loi a eu pour objet de poser certaines règles générales relatives à l’organisation intérieure (nécessité d’une démocratie interne) et aux finances (nécessité de lutter contre les ressources occultes) des partis politiques, conformément à l’article 21 de la Loi fondamentale qui a posé quelques grands principes (notamment celui de l’interdiction des partis politiques poursuivant des buts anticonstitutionnels). La partie la plus discutée, tant sur le plan politique que juridique, était celle relative au financement des partis. Par un jugement rendu le 3 décembre 196818 à la suite des recours du parti N. P. D. et du parti bavarois, le Tribunal constitutionnel fédéral a annulé certaines dispositions relatives à cette question. Tout d’abord, en ce qui concerne l’aide financière de l’État, le Tribunal a approuvé qu’elle soit limitée au seul remboursement des dépenses de propagande électorale, conformément d’ailleurs à sa propre jurisprudence19. Il a également approuvé qu’elle soit évaluée forfaitairement sur la base de 2,5 DM par électeur inscrit et qu’elle soit partagée entre les partis politiques selon les résultats obtenus aux dernières élections législatives. En revanche, il a jugé inconstitutionnelle l’exclusion des partis politiques ayant obtenu moins de 2,5 % des suffrages exprimés aux élections du Bundestag (le législateur fédéral autorisait d’ailleurs les législateurs des Länder à adopter une législation semblable pour les élections aux Parlements des Länder). Selon lui, en effet, tout parti politique qui a fait des efforts sérieux de propagande doit être remboursé de ses frais et bénéficier d’avances pour la prochaine campagne même s’il n’a pas obtenu 2,5 % des voix. Par ailleurs, en ce qui concerne la publicité de l’origine des ressources, le Tribunal a jugé contraire au principe d’égalité (art. 3 de la Loi fondamentale) la règle selon laquelle les noms des personnes physiques ayant effectué des dons au parti doivent être divulgués à partir de 20 000 DM par an alors que ceux des personnes morales n’ont à être divulgués qu’à partir de 200 000 DM par an. Car cette discrimination ne peut pas être justifiée par l’objet de ces dispositions : connaître ceux qui sont susceptibles d’influencer un parti politique.

4) Rôle joué par les droits fondamentaux en droit privé. Deux décisions du Tribunal constitutionnel fédéral montrent excellemment comment les droits fondamentaux proclamés par la Loi fondamentale dominent l’ensemble du droit allemand, y compris le droit privé. Tout d’abord, dans une décision du 24 juillet 196820,  le tribunal a jugé que l’obligation de respecter l’institution du mariage (art. 6, alinéa 1, de la Loi fondamentale) ne s’opposait pas à ce que les époux soient placés dans une situation moins favorable en cas de faillite de l’un d’eux : dans ce cas, la validité d’une loi de droit privé est contrôlée par rapport aux droits fondamentaux. Dans la deuxième espèce21, le tribunal va encore plus loin : il applique directement aux rapports entre particuliers les principes posés par la Loi fondamentale ; il considère en effet que le principe de la liberté de la presse l’emporte sur les règles du droit privé relatives à la protection de l’honneur des personnes. Ainsi, une association malmenée par une revue dans le cadre d’une controverse relative à un projet de loi ne peut pas obtenir d’un tribunal qu’il interdise à celle-ci le renouvellement de tels articles. On aboutit dans ce cas à une interprétation nouvelle des règles anciennes du droit privé.

B. – Jurisprudence administrative 

Ici également, nous avons retenu quelques jugements significatifs du Tribunal administratif fédéral.

1) Le contrôle de la légalité des actes administratifs se heurte aux mêmes difficultés qu’en France22. Il est encore dominé par la distinction du pouvoir discrétionnaire et du pouvoir lié : il y a pouvoir discrétionnaire lorsque l’administration applique une loi qui lui laisse une certaine marge d’appréciation, il y a pouvoir lié lorsque l’administration applique une loi qui, selon les cas, lui laisse ou non une certaine marge d’interprétation. Depuis quelques années, on assiste à un renforcement très remarquable du contrôle juridictionnel. Deux jugements du Tribunal administratif fédéral le montreront. Le premier est un jugement du 28 février 1968 relatif à une décision administrative autorisant une entreprise à congédier un mutilé23 : le tribunal a admis que l’administration disposait d’un pouvoir discrétionnaire pour donner son autorisation, mais qu’elle était toutefois tenue de prendre en considération tout à la fois la nécessité pour l’entrepreneur d’employer des salariés efficaces et l’intérêt du mutilé à conserver son emploi. Dans l’appréciation de la légitimité respective de ces intérêts, la marge est étroite ; le pouvoir discrétionnaire se ramène en définitive à ce que, dans les cas limites, les conceptions de l’administration sont tenues pour justes et à ce que le juge administratif ne corrige pas celles qui lui paraissent défendables. Quant au second jugement, rendu le 15 novembre 196724, il concerne un cas où l’administration doit simplement appliquer la loi à un cas concret. En l’espèce, il s’agissait d’une décision administrative mettant un livre sur la liste des ouvrages dangereux pour la jeunesse. Bien que ces notions soient délicates à appliquer, le tribunal a considéré que le juge devait contrôler lui-même si le livre était dangereux pour la jeunesse et s’il n’échappait pas à la mise à l’index en raison de son caractère artistique (la Loi fondamentale a en effet posé le principe de la liberté de l’art). Le tribunal n’a pas appliqué la théorie selon laquelle l’administration doit disposer dans certains cas d’une certaine liberté d’interprétation des notions employées (Beurteilungsspielraum), théorie qui conduit à un contrôle moins poussé du juge, assez semblable à celui que permet la jurisprudence française dite de l’erreur manifeste. À cet égard, ce jugement est en pleine harmonie avec la jurisprudence récente qui tend à restreindre les cas dans lesquels le juge ne contrôle pas entièrement la qualification juridique des faits.

2) Le retrait de l’acte administratif. La jurisprudence allemande est assez complexe25. Elle ne distingue pas entre le retrait rétroactif et le retrait pour l’avenir, mais entre le retrait des décisions illégales et celui des décisions légales. Le jugement du 29 avril 196826 constitue une bonne illustration de la jurisprudence sur le retrait des décisions illégales : une attestation administrative permettant d’obtenir des avantages fiscaux avait été délivrée sur la base de renseignements erronés donnés par le requérant. Le tribunal a jugé que le retrait de cette attestation était valable parce que l’illégalité de celle-ci était due aux agissements du requérant. La date à laquelle intervient ce retrait n’est pas prise en considération par le juge.

3) L’effet suspensif des recours27.  En vertu de l’article 80 de la loi de 1960 sur les juridictions administratives, les recours en annulation ainsi que les recours préalables qui doivent être obligatoirement adressés à l’administration avant de saisir le juge ont un effet suspensif, c’est-à-dire que la décision administrative attaquée a ses effets paralysés jusqu’au jour où l’autorité saisie statue. Dans l’affaire jugée le 13 décembre 196728, le Tribunal administratif fédéral avait à résoudre la difficulté suivante : au cas où l’autorité administrative saisie ne répond pas, l’effet suspensif du recours préalable continue-t-il de s’exercer ou cesse-t-il à partir du jour où l’administré perd la possibilité d’introduire un recours en carence ? Le tribunal a choisi la deuxième solution. Cette décision a été critiquée par de nombreux auteurs29. En effet la règle selon laquelle l’administré doit introduire un recours en carence dans l’année qui suit son recours préalable a été édictée dans l’intérêt des administrés ; elle ne doit pas être interprétée de telle façon qu’elle aboutisse à priver l’administré du bénéfice de l’effet suspensif, alors précisément qu’en cas de silence, l’administré n’est pas informé des délais à respecter30. Il semble que les règles relatives au silence de l’administration évoluent souvent dans un sens défavorable aux administrés : on sait qu’en France également, le fait de laisser une demande sans réponse plus de six mois prive, depuis 1956, l’auteur de la demande de tout recours.

  1. Cette chronique repose essentiellement sur le dépouillement systématique des numéros parus en 1968 des deux revues Neue Juristische Wochenschrift (N. J. W.) et Deutsches Verwaltungsblatt (D. V. Bl.) avec son supplément trimestriel Verwaltungsarchiv (Verw. Arch.) qui ont été adressés à cette Revue. [↩]
  2. Sur tous ces points, FROMONT, La répartition des compétences entre les tribunaux civils et administratifs en droit allemand, 1960. [↩]
  3. Voir la note d’information parue dans N. J. W., 18 juillet 1968, p. II de la couverture. [↩]
  4. Par ailleurs un mouvement se dessine en faveur d’un code de procédure commun aux trois ordres de juridiction compétents en droit public (administratifs, sociaux, fiscaux) : ULE, Für ein einheitliches Verwaltungsgerichtsgesetz, N. J. W., 1968, p. 967. [↩]
  5. Voir notamment les commentaires de FRIESECKE, N. J. W., 1968, et de CZYCZKOWSKI, D. V. Bl., 1968, 573. [↩]
  6. B. Verf. G. E., 15, 1 = N. J. W., 1962, 2243, et D. V. Bl., 1963, 60 ; B. Verf. G. E., 21, 312 = N. J. W., 1967, 1956 = D. V. Bl., 1968, 590. [↩]
  7. Voir le commentaire de BODE, Grundzüge des neuen Rechts der Ordnungswidrigkeiten, N. J. W., 1968, 1449. [↩]
  8. Elles sont mentionnées ici dans la mesure où elles traduisent une évolution générale. [↩]
  9. Voir le commentaire de ULE et SELLMANN, D. V. Bl., 1967, 837. Voir aussi l’ouvrage sur feuilles mobiles de Klaus VON DER GROEBEN et Hans Joachim KNACK, Carl Heymanns Verlag, Köln-Berlin, 1968. [↩]
  10. Il en existe un en Autriche depuis les années 1920. [↩]
  11. Musterentwurf eines Verwaltungsverfahrensgesetzes, Köln-Berlin, 1964. [↩]
  12. HOFMANN, Die Verbandsgemeinden und die kommunale Neuordnung in Rheinland-Pfalz, D. V. Bl., 1968, 932, et ULE, Zwangseingemeindungen und Verfassungsgerichtsbarkeit, Verw. Arch., 1969, 101. Voir aussi l’article paru dans le n° 52 (23 décembre 1968) du Spiegel, p. 58. [↩]
  13. GRAFE, Die Entwicklung des öffentliche Rechts im Lande Nordrhein-Westfalen im Jahre 1967, D. V. Bl., 1968, 907. [↩]
  14. N. J. W., 1968, 1772. [↩]
  15. Sur cette question, FROMONT, Le contrôle juridictionnel des actes administratifs en Allemagne, A. J. D. A., novembre 1964. [↩]
  16. Si les peines prescrites sont des peines préventives de liberté, l’article 104 de la Loi fondamentale exige que la loi définisse elle-même l’infraction. [↩]
  17. N. J. W., 1968, 1515. [↩]
  18. N. J. W., p. II de la couverture du n° 51 (19 décembre 1968), qui analyse l’arrêt. [↩]
  19. Dans un jugement très commenté rendu le 19 juillet 1966 (B. Verf. G. E., 20, 56 ; N. J. W., 1966, 1499 ; D. V. Bl., 1966, 635 ; D. ö. V., 1966, 563) le Tribunal constitutionnel fédéral avait annulé les dispositions de la loi de finances pour 1965 qui accordait une indemnité globale de 30 millions DM aux partis politiques et qui la répartissait entre les partis politiques représentés au Bundestag. Voir Gustave PEISER, L’institutionnalisation des partis politiques dans la République fédérale allemande, cette Revue, 1959, p. 639 et s. [↩]
  20. N. J. W., 1968, 1771 [↩]
  21. N. J. W., 1969, p. II de la couverture du numéro du 9 janvier (analyse sommaire). [↩]
  22. Voir notre contribution aux Mélanges Sayagès Laso (à paraître) dont la version allemande fait partie de notre livre Rechtsschutz gegenüber der Verwaltung paru en 1967 (Carl Heymanns Verlag). Voir aussi FROMONT, Le contrôle juridictionnel des actes administratifs en Allemagne, A. J. D. A., 1966. [↩]
  23. D. V. Bl., 1968, 655. [↩]
  24.  D. V. Bl., 1968, 879. [↩]
  25. Voir le mémoire de Vlad CONSTANTINESCO soutenu devant la Faculté de Droit et des Sciences économiques de Nancy en 1965. [↩]
  26. D. V. Bl., 1968, 795. [↩]
  27. Sur cette question, voir le mémoire soutenu par Jean-Claude BÉGUIN devant la Faculté de Droit et des Sciences économiques de Dijon en février 1969. [↩]
  28. N. J. W., 1968, 955. [↩]
  29. MENGER dans Verw. Arch., 1969, 182, et REIGL dans N. J. W., 1968, 1491. [↩]
  30. En droit allemand, l’Administration a l’obligation d’indiquer les possibilités de recours (et les délais) lorsqu’elle notifie la décision à son destinataire ; si elle n’y satisfait pas, le délai est porté de un mois à un an. [↩]

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Table des matières

  • Les principaux événements législatifs et jurisprudentiels survenus en Allemagne en 1968
    • I. Les principaux événements législatifs
      • A. – Les révisions de la Loi fondamentale
      • B. – Les modifications de la législation fédérale
      • C. – Les modifications de la législation des Länder8
    • II. Les principaux événements jurisprudentiels
      • A. – La justice constitutionnelle
      • B. – Jurisprudence administrative 

About Michel Fromont

1933 - 2025. Ancien professeur aux universités de la Sarre, de Dijon et de Panthéon-Sorbonne Paris I.

Michel Fromont

1933 - 2025. Ancien professeur aux universités de la Sarre, de Dijon et de Panthéon-Sorbonne Paris I.

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  • Les principaux événements législatifs et jurisprudentiels survenus en Allemagne en 1968
    • I. Les principaux événements législatifs
      • A. – Les révisions de la Loi fondamentale
      • B. – Les modifications de la législation fédérale
      • C. – Les modifications de la législation des Länder8
    • II. Les principaux événements jurisprudentiels
      • A. – La justice constitutionnelle
      • B. – Jurisprudence administrative 

Chroniques de droit constitutionnel allemand

  • Avant-propos
  • L’évolution du droit public allemand en 1968, RDP 1969, p. 197-224
  • L’évolution du droit public allemand en 1968, RDP 1969 p. 621-640

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