Le Conseil d’Etat avait à connaître d’un pourvoi exercé contre une ordonnance par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble avait annulé une procédure de publicité et de mise en concurrence (Conseil d’Etat, SSR, 25 mars 2013, Département de l’Isère c. Société PL Favier, requête numéro 364950, publié au recueil).
Le département de l’Isère avait lancé en 2012 une procédure d’appel d’offres ouvert en vue de l’attribution d’un marché à bons de commande portant sur le renouvellement, le renforcement des chaussées, l’entretien des voies vertes et des abords des bâtiments du conseil général, divisé en treize lots. L’offre de la société PL Favier avait été rejetée, au profit de la société Eiffage.
L’un des critères de jugement des offres était afférent à l’insertion professionnelle.
Aux termes de l’article 53 du code des marchés publics :
I.-Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, le pouvoir adjudicateur se fonde :
1° Soit sur une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l’objet du marché, notamment la qualité, le prix, la valeur technique, le caractère esthétique et fonctionnel, les performances en matière de protection de l’environnement, les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l’agriculture, les performances en matière d’insertion professionnelle des publics en difficulté, le coût global d’utilisation, les coûts tout au long du cycle de vie, la rentabilité, le caractère innovant, le service après-vente et l’assistance technique, la date de livraison, le délai de livraison ou d’exécution, la sécurité d’approvisionnement, l’interopérabilité et les caractéristiques opérationnelles. D’autres critères peuvent être pris en compte s’ils sont justifiés par l’objet du marché ;
Le juge du référé du Tribunal administratif de Grenoble avait annulé la procédure, considérant que les travaux de renforcement et de renouvellement de chaussées prévus par le marché ne présentaient aucun lien direct avec l’insertion professionnelle des publics en difficulté.
Le Conseil d’Etat annule l’ordonnance en ces termes :
4. Considérant qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient au pouvoir adjudicateur de déterminer l’offre économiquement la plus avantageuse en se fondant sur des critères permettant d’apprécier la performance globale des offres au regard de ses besoins, tels que définis à l’article 5 du code des marchés publics, compte tenu des objectifs de développement durable ; que, dans le cadre d’une procédure d’attribution d’un marché qui, eu égard à son objet, est susceptible d’être exécuté, au moins en partie, par des personnels engagés dans une démarche d’insertion, le pouvoir adjudicateur peut légalement prévoir d’apprécier les offres au regard du critère d’insertion professionnelle des publics en difficulté dès lors que ce critère n’est pas discriminatoire et lui permet d’apprécier objectivement ces offres ; que, par suite, le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a commis une erreur de droit en relevant que, par nature et indépendamment des personnels susceptibles d’être concernés par l’exécution du marché, les travaux de renforcement et de renouvellement de chaussées prévus par le marché litigieux ne présentent aucun lien direct avec l’insertion professionnelle des publics en difficulté ; qu’il y a lieu, en conséquence, sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, d’annuler son ordonnance ;
La Haute juridiction note que l’objectif d’insertion professionnelle des publics en difficulté est en rapport avec l’objet d’un marché de travaux, quand bien même l’exigence d’insertion ne serait pas reprise dans le cadre des clauses d’exécution du marché.