La présente affaire pourrait marquer un ralentissement dans la multiplication des déclinaisons de votre jurisprudence Czabaj1. Elle va, à tout le moins, vous conduire à préciser si celle-ci s’applique aux recours contentieux de nature indemnitaire.
Faits et procédure
Mme Murielle Pommay a été prise en charge par le centre hospitalier de Vichy en février 2009 à la suite de douleurs ressenties pendant sa grossesse. Après deux visites au service des urgences, les 28 février et 1er mars 2009, au cours desquelles un diagnostic de trouble digestif a été posé, l’intéressée a fini par subir une opération qui a permis de révéler une grossesse extra-utérine imposant une salpingectomie. Contestant les conditions de sa prise en charge, Mme Pommay a d’abord saisi le centre hospitalier d’une demande préalable d’indemnisation, non chiffrée, assortie d’une demande tendant à ce que l’hôpital engage, par l’intermédiaire de son assureur, une expertise. Cette demande a été rejetée par une décision expresse du 5 mai 2010 notifiée le 7 mai 2010.
Le 7 juillet 2010, l’intéressée a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Clermont-Ferrand sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative. Le tribunal a fait droit à sa demande et désigné un expert qui a rendu son rapport le 16 mai 2011. Par un jugement du 9 avril 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a condamné le centre hospitalier de Vichy à indemniser Mme Pommay, à hauteur d’un peu plus de 5 000 €, en raison de fautes commises lors de la prise en charge de la jeune femme dans la nuit du 28 février au 1er mars 2009. La cour administrative d’appel de Lyon a confirmé ce jugement par l’arrêt attaqué aujourd’hui devant vous par le centre hospitalier de Vichy.
Position de la cour administrative d’appel
Le premier moyen du pourvoi nous fait entrer dans le vif du sujet. Il est tiré de l’erreur de droit de la cour qui, pour juger la requête recevable, a écarté l’application de la jurisprudence sur le délai raisonnable de recours issu de votre décision d’Assemblée du 13 juillet 2016 au motif que le litige dont elle était saisie portait non pas sur la contestation d’une décision administrative individuelle mais sur l’indemnisation d’un préjudice. L’hôpital avait soutenu en première instance que la demande de Mme Pommay était tardive en opposant l’article R. 421-1 du code de justice administrative et la circonstance que le rejet de la demande de l’intéressée lui avait été notifié, le 7 mai 2010, par une décision qui comportait la mention des voies et délais de recours permettant de la contester. Le tribunal a cependant jugé que la saisine du juge des référés, le 7 juillet, avait interrompu le délai de recours contentieux lequel n’avait recommencé à courir qu’à compter de la notification du rapport d’expertise, notification dont le dossier ne portait cependant pas trace. La cour ne s’est pas placée sur le même terrain. Elle a tout d’abord jugé que le délai de deux mois posé par le code de justice administrative ne pouvait courir faute de notification dans la décision rejetant la demande d’indemnité de ce que ce délai était suspendu en cas de saisine de la commission de conciliation et d’indemnisation, en mettant ainsi en œuvre les percepts de votre avis du 17 septembre 2012, ONIAM2, puis refusé de faire jouer le délai de la décision Czabaj.
Cette dernière décision, faut-il le rappeler, prévoit que lorsque le délai de recours de deux mois posé par l’article R. 421-1 du code de justice administrative n’est pas opposable, faute de preuve du respect des obligations d’informations sur les voies et les délais de recours, le destinataire d’une décision ne peut néanmoins la contester au-delà d’un délai raisonnable fixé, sauf circonstances particulières, à un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance.
Déclinaison de la jurisprudence Czabaj
La matrice a été déclinée. Czabaj, encore et toujours… ou presque comme on a pu le lire3, concerne désormais le contentieux fiscal de l’assiette et du recouvrement4, celui des titres exécutoires5 ainsi que les recours en responsabilité fondés sur des décisions expresses à objet purement pécuniaire6. Le délai raisonnable est opposable aux décisions explicites et implicites7, aux recours administratifs préalables obligatoires8 et peut jouer à la fois pour la contestation directe des actes administratifs et pour celle soulevée par voie d’exception9. Il n’y a jusqu’ici qu’en matière fiscale que l’option a été retenue de ne pas appliquer totalement le nouveau délai raisonnable, au nom de l’autonomie de la législation fiscale, en ce qui concerne les décisions implicites de rejet des réclamations, présentées sur le fondement de l’article R. 199-1 du livre des procédures fiscales10. De manière plus prévisible, vous avez également jugé que le juge du référé précontractuel n’avait pas à être saisi dans le délai raisonnable issu de votre jurisprudence11.
Les litiges portés devant vous donnent ainsi l’impression de soulever plus souvent la question du « comment Czabaj ?12» que celle du « pourquoi Czabaj ? ». Pour avoir pris parti en faveur des solutions récentes13, nous reconnaissons qu’il est difficile, compte tenu des termes du débat originel, de ne pas retenir une acception assez large du champ d’application de votre jurisprudence sur le délai raisonnable. Dans la dialectique du principe de légalité et de l’exigence de stabilité des situations juridiques, celle-ci consacre l’idée selon laquelle nonobstant l’inapplication des règles posées par le code de justice administrative en matière de délai de recours, les décisions administratives ne doivent pas être menacées à titre perpétuel d’un recours contentieux lorsqu’elles sont à l’évidence connues de leur destinataire. Même si la solution a été dégagée pour les décisions individuelles expresses, la solution adoptée, ainsi résumée, peut difficilement ne pas être étendue à toutes les hypothèses dans lesquelles l’administration prend une décision pour laquelle l’assurance peut être donnée que celui qui entend la contester en a bien connaissance. Le reste, pourrait-on dire, est une question de réglage.
Extension non souhaitable au contentieux des actions indemnitaires
Nous pensons néanmoins que le contentieux des actions indemnitaires, telles que celui dont vous saisit le centre hospitalier de Vichy, ne s’inscrit pas parfaitement dans le cadre désormais familier de votre jurisprudence Czabaz et qu’une nouvelle extension du champ d’application de celle-ci ne s’impose dès lors pas.
Comme l’a jugé la cour14, ce type de contentieux ne porte pas sur une décision administrative.
Nous entendons ici le contentieux des actions indemnitaires comme celui des recours qui tendent à la mise en jeu de la responsabilité de la puissance publique en vue d’obtenir la réparation d’un préjudice.
Un acte administratif intervient bien dans les litiges en question. Celui-ci est indispensable en vertu de la règle cardinale de l’intervention d’une décision préalable à laquelle est en principe subordonnée la saisine du juge, laquelle est aujourd’hui posée à l’article R. 421-1 du code de justice administrative. Une telle décision naît en contentieux de la responsabilité d’une demande préalable auprès de l’administration destinée à lier le contentieux qui conduit l’administration à prendre position sur un droit à réparation. Longtemps assortie de tempéraments, l’exigence de liaison du contentieux a été renforcée récemment par les dispositions du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative, dit « décret JADE », pour « justice administrative de demain ». Celui-ci a tout d’abord mis fin à l’exception relative à la matière des travaux publics, présente dès l’origine et notamment devant les conseils de préfecture de par la loi du 28 pluviôse an VIII. Le décret du 2 novembre 2016 a ensuite exclu que le contentieux puisse se trouver lier, ainsi que vous l’admettiez15 par une réponse de l’administration sur le fond du litige devant le juge. Vous venez de préciser que le texte ne pouvait être regardé comme étant allé jusqu’à remettre en cause la possibilité que le contentieux soit lié après saisine du juge dès lors la condition de recevabilité de la requête tenant à l’existence d’une décision de l’administration s’apprécie à la date à laquelle le juge statue16,17.
La décision née d’une demande préalable traduit la prise de position, implicite ou explicite de l’administration sur la demande qui lui est adressée. Elle n’est pas sans portée.
Celle-ci délimite le cadre du litige qui ne peut varier devant le juge, qu’il s’agisse des parties18, de l’objet de la demande19, ou de sa cause juridique20 exception faite de celles qui sont d’ordre public, tel le fondement de responsabilité sans faute21 ou qui résultent, en matière contractuelle de l’irrégularité du contrat constatée en cours d’instance22. Votre jurisprudence sur l’immutabilité de la demande est relativement souple et autorise que les conclusions présentées devant le juge ne soient pas en tous points identiques à celles de la demande préalable pourvu qu’elles constituent un développement de la demande initiale, ou qu’elles se situent dans son sillage, notamment lorsque l’étendue du préjudice n’est connue que postérieurement à la réclamation23 ou que celui-ci s’est aggravé depuis24, voire survienne en cours d’instance, pour autant qu’il se rattache au même fait générateur et repose sur la même cause juridique25. Le requérant peut également ne pas préciser le montant des indemnités qu’il demande à l’administration de lui verser, qu’il pourra ne chiffrer que devant le juge26.
La décision préalable déclenche par ailleurs, en principe, le délai de recours contentieux de deux mois. Les dispositions des articles R. 421-1 et suivants du code de justice administrative sont en effet applicables aux décisions prises sur demande préalable en matière indemnitaire et toute décision régulièrement notifiée ne peut être soumise au juge que dans le délai de recours de droit commun. La jurisprudence est ancienne et constante en ce sens27. Quelques-unes de vos décisions plus récentes l’ont rappelée lesquelles ont jugé des demandes d’expertises inutiles au motif qu’elles faisaient suite à une demande préalable contestée tardivement qui ne pouvait dès lors prospérer28.
Précisons que l’application du délai de forclusion peut être radicale dans le contentieux indemnitaire dès lors que toute nouvelle demande identique présentée à l’administration fait naître une décision en principe confirmative, et, partant, insusceptible de recours contentieux29. La tendance est en outre ici aussi au renforcement des contraintes qui pèsent sur le requérant avec la suppression par le décret JADE de deux hypothèses dans lesquelles le recours dirigé contre une décision prise sur demande préalable était soustrait à toute condition de délai. La première est celle qui concerne la matière des travaux publics, qui étaient à la fois exemptés de demande préalable et de toute contrainte de délai de recours contentieux, y compris donc si une décision préalable était intervenue30. Cette matière a désormais rejoint le droit commun. Le décret JADE a en outre supprimé la dérogation posée au délai de recours de deux mois pour les décisions implicites intervenues en plein contentieux, lesquelles sont assez fréquentes en matière indemnitaire31. Si elle n’est ainsi pas sans portée, la décision prise sur demande préalable n’en demeure pas moins dans le contentieux des actions indemnitaires une décision de nature singulière. Simple vecteur de la saisine du juge elle ne constitue pas l’objet du recours porté devant lui. Pour reprendre les mots de la professeure C. Broyelle, rappelant des auteurs plus anciens, « cette décision n’est pas, par elle-même, un élément constitutif du droit d’action » même si elle est indispensable à ce droit mais, seulement « l’expression de prétentions opposées, dont l’existence, elle, est une composante du droit d’action »32. On comprend dès lors que la décision préalable soit un acte transparent devant le juge dont les vices propres sont sans influence sur l’issue du litige33. Elle n’est d’ailleurs en principe mentionnée ni dans les visas, ni dans le dispositif du jugement.
Quant au fondement de la demande, il s’agit du droit à réparation dont l’appréciation ne dépend aucunement de l’acte par lequel l’administration a pris position sur ce point. De ce point de vue, le contentieux né de la décision prise sur recours préalable se distingue de celui qui tend à la remise en cause des décisions de portée pécuniaire telles que les états exécutoires ou les décisions prises en matière fiscales. Le rempart temporel l’exercice de ce droit à réparation se trouve dans l’application de règles de prescription dont l’objet est d’éteindre ce droit lorsqu’il n’a pas été mis en œuvre passé un certain temps34. En matière de responsabilité des personnes publiques, les deux principales35 sources de prescription sont la loi du n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’État, les départements, les communes et les établissements publics, qui pose une règle de prescription quadriennale au profit de l’État, des départements et des communes à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ainsi que l’article L. 1142-28 du code de la santé publique, issu de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, qui institue une prescription décennale des actions en responsabilité tendant à la réparation de dommages résultant d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins et dirigées contre des professionnels de santé ou des établissements de santé publics ou privés.
Lorsque les dispositions du code de justice administrative sur les délais de recours trouvent également à jouer, et peuvent valablement être opposées, une règle de forclusion s’ajoute donc, laquelle peut même remplacer le délai prescription, une fois la décision de l’administration intervenue en mettant fin à toute possibilité d’indemnisation, notamment du fait de votre jurisprudence relative aux décisions confirmatives.
Deux bornes sont ainsi posées au droit à réparation d’un préjudice imputable à l’administration. Lorsque celle de ces deux bornes qui repose sur les dispositions du code de justice administrative cède, à défaut pour l’administration d’établir qu’elle a respecté des conditions de notification lui permettant de la faire jouer, nous ne croyons pas fondé que vous ajoutiez de manière prétorienne à la règle de prescription qui elle demeure nouveau délai tel que celui issu de votre jurisprudence Czabaj.
La motivation fondamentale de la solution dégagée par votre décision d’assemblée repose sur l’exigence du principe de sécurité juridique et de la stabilité des situations qu’il implique.
La sécurité juridique n’est évidemment pas absente en matière indemnitaire. Elle repose néanmoins avant tout sur les règles de prescription ainsi que vous en avez jugé dans votre décision Mme Tassius du 5 décembre 200536 avant même la consécration principielle de la notion37, ainsi que plus récemment dans votre décision, Polynésie française du 23 juin 201438. Le président Labetoulle ne disait pas autre chose, dans son article « Principe de légalité et principe de sécurité juridique », paru dans les Mélanges Braibant lorsqu’il se demandait « pourquoi instituer des prescriptions où le fait et le temps effacent le droit ou en créent sinon parce qu’assurer la stabilité des situations acquises paraît parfois préférable à l’application pure et simple de la règle de droit ? »39. La prescription ne constituait pas en 2016 un filet de sécurité suffisant pour traiter de la situation des décisions individuelles explicites qui vous était soumise. Tout d’abord, toutes ces décisions individuelles explicites ne sont pas soumises à des règles de prescription loin de là. Pour les appréhender toutes, il eut fallu poser une règle de prescription portant sur le droit d’agir en justice, ce qui vous vous êtes refusé à faire. Ensuite, lorsque des règles de prescription pouvaient être mobilisées, comme c’était le cas pour le contentieux des pensions, en cause en l’espèce, celles-ci ne permettaient pas de couvrir le champ de toutes les décisions prises par l’administration40. La maille… était trop grosse.
Il n’en est rien lorsqu’il est question de droit à réparation où des règles de prescription trouvent en principe toujours à jouer. La limitation des possibilités de remise en cause de l’acte liant le contentieux apporte seulement une nouvelle garantie à l’administration qui a l’assurance que sa prise de position ne sera pas contestée passé un certain délai. Cette finalité protectrice des deniers publics est louable mais elle ne paraît pas indispensable s’il s’agit d’éviter que l’administration reste sous la menace de demande perpétuelle de réparation41. La sécurité juridique n’apparaît dans ces conditions pas menacée au point d’autoriser que vous dégagiez une règle de forclusion applicable sans texte.
Il n’est en réalité qu’une hypothèse dans laquelle en matière indemnitaire l’application du délai raisonnable de forclusion d’un an peut assez logiquement supplanter celui de la prescription. Il s’agit du contentieux des actions en responsabilité fondées sur l’illégalité fautive d’une décision à objet purement pécuniaire auquel vous venez de rendre votre jurisprudence sur le délai raisonnable applicable par la décision du 9 mars 2018 Communauté de communes du pays roussillonnais42. Cette solution n’entre en rien en contradiction avec ce que nous proposons aujourd’hui. La notion de décision à objet pécuniaire, issue de votre jurisprudence Lafon de 195943, est mobilisée dans le contexte précis dans lequel un recours indemnitaire a été formé qui tend à la réparation d’un préjudice qui trouve sa source dans une décision d’ordre pécuniaire. Vous admettez depuis votre décision Lafage44 qu’une telle décision puisse relever du recours pour excès de pouvoir
« instrument mis à la portée de tous, pour la défense de la légalité méconnue »45 dès lors que la seule question posée est celle de la légalité de l’acte, alors même que la finalité de l’annulation est bien de nature indemnitaire. La décision Lafage n’a toutefois pas fermé la voie du contentieux indemnitaire et la question s’est alors inévitablement posée de l’articulation des deux voies concurrentes, ainsi que de l’opportunité de laisser subsister la possibilité d’une action indemnitaire après l’expiration des délais du recours pour excès de pouvoir, alors que la jurisprudence admettait que l’illégalité d’une décision définitive puisse être utilement invoquée à l’appui d’une demande de réparation46. C’est alors que vous avez restreint la possibilité d’un cumul des recours en jugeant que le recours indemnitaire était exclu passé le délai après lequel la décision à objet pécuniaire était devenue définitive, faisant ainsi de la souplesse de la décision Lafage, une contrainte pour le requérant qui choisissait la voie du plein contentieux. L’exception du délai de recours parallèle est venue pallier l’absence d’exception de recours parallèle47. La décision à l’origine du contentieux marque donc tout entier le régime applicable. Celle-ci autorise la voie du recours direct contre la décision (pour excès de pouvoir ou de plein contentieux) comme elle impose un délai unique de recours – quelle que soit la voie contentieuse choisie – celui qui s’attache à l’acte48. C’est d’ailleurs en raison du caractère non définitif de la décision initiale que vous avez jusqu’à présent écarté l’application de la jurisprudence Lafon lorsque cette décision présente un caractère implicite, ce qui, pour un recours de plein contentieux, empêchait – jusqu’à l’intervention du décret JADE – de faire courir le délai49,50. Il est dès lors cohérent de faire application de l’ensemble des règles de forclusion opposable à la décision pécuniaire, y compris celle de la jurisprudence Czabaj.
Lorsqu’il n’est plus question d’indemnisation en lien avec de telles décisions, les règles de forclusion nous paraissent secondaires51. C’est pourquoi nous vous proposons de juger que, sauf en ce qui concerne le contentieux des décisions expresses dont l’objet est purement pécuniaire, à défaut pour le délai de forclusion de l’article R. 421-1 du code de justice administrative de pouvoir jouer, il n’est pas de délai opposable au recours tendant à la mise en jeu de la responsabilité d’une personne publique autre que le délai de prescription. Vous pourrez si vous nous suivez confirmer l’analyse de la cour et écarter le premier moyen du pourvoi.
Erreur de qualification ?
Le second vous retiendra moins longtemps.
Il est tiré de l’erreur de qualification résultant de la reconnaissance par la cour d’une faute de l’établissement hospitalier à raison d’un retard de prise en charge. Le Centre hospitalier conteste à la fois l’existence d’une faute et ses conséquences sur l’état de santé de Mme Pommay. S’inspirant étroitement du rapport de l’expert qui s’est prononcé sur le dossier à la demande de la juridiction, la cour a circonscrit la faute reprochée au centre hospitalier à l’absence d’examen qualifié par une sage-femme ou un gynécologue dans la nuit du 28 février au 1er mars 2009. Le centre hospitalier qui souligne que Mme Pommay a été vue durant ce laps de temps à de nombreuses reprises ne contredit pas l’absence d’examen qualifié. Quant à l’analyse de la cour sur l’existence d’un lien de causalité entre cette faute et les souffrances ainsi que le préjudice psychologique de la patiente, il ne nous paraît pas entaché d’erreur de qualification52 eu égard aux termes, ici encore, du rapport d’expertise sur ce point.
Par ces motifs, nous concluons au rejet du pourvoi. ■
- CE Ass. 13 juillet 2016, Czabaj, n° 387763 : Rec., p. 340. [↩]
- N° 360280 : Rec., p. 333. [↩]
- D. Connil, « Czabaj, encore et toujours […] ou presque », AJDA 2018, p. 1790. [↩]
- CE S. 31 mars 2017, Ministres des Finances et des comptes publics c/ M. Amar : Rec., p. 105. [↩]
- CE 9 mars 2018, Communauté d’agglomération du pays ajaccien, n° 401386 : Rec., T., p. 532. [↩]
- CE 9 mars 2018, Communauté de commune du pays roussillonnais, n° 405355 : Rec., T., p. 532. [↩]
- CE 18 mais 2019, M. Jounda Nguegoh, n° 417270 : à paraître aux Tables. [↩]
- Ministres des Finances et des comptes publics c/ M. Amar, préc. [↩]
- CE 27 février 2019, M. Law-Tong, n° 418950 : Rec., p. 41. [↩]
- CE 8 février 2019, SARL Nick Danese Applied Research, n° 406555 : à paraître aux Tables. [↩]
- CE 12 juillet 2017, Société Étude et créations et informatique, n° 410832, inédite, concl. O. Henrard. [↩]
- Ce fut le cas s’agissant des décisions implicites ou des recours triangulaires, dont le sort a été fixé par les décisions M. Jounda Nguegoh et M. Valière, préc. [↩]
- Concl. sur Valière, Jounda Nguegoh, préc. [↩]
- Ainsi que, notamment, CAA Versailles 4 juillet 2017, Mutuelles du Mans Assurances venant aux droits de la société Covea Risks, n° 17VE00124. [↩]
- CE 11 avril 2008, Établissement français du sang, n° 281374 : Rec., p. 168 ; 1er juin 1984, Commune de Vieux-Boucau, n° 26989 : Rec., p. 195 ; 21 février 1997, Quille, n° 86678 : Rec., p. 57. [↩]
- CE S. 27 mars 2019, Époux Rollet, n° 426472 : à paraître au Recueil. [↩]
- Un dernier ajout vient d’être apporté à l’article R. 421-1 écartant de l’obligation de recours préalable les mesures prises pour l’exécution d’un contrat. Ce léger recul dans le mouvement d’extension des obligations de saisir l’administration avant le juge est venu confirmer la jurisprudence rendue sous l’empire des dispositions anciennes du code, CE 11 avril 2012, Prathotels, n° 355351 : Rec., T., p. 741 ; CE S. 27 mars 2019, Époux Rollet, n° 426472 : à paraître au Recueil. [↩]
- 10 janvier 1947, Bivois et Cie l’Urbaine et la Seine : Rec., p. 667. [↩]
- 28 juillet 1950, Dame Veuve Claret : Rec., p. 472 ; 16 mars 1979, Commune de Mireval : Rec., T. décennales 1975-1984, p. 4811. [↩]
- 17 mai 1968, Ministre des Anciens combattants c/ Roulland, n° 19738 : Rec., p. 320. [↩]
- 20 décembre 1974, Commune de Barjols : Rec., T., p. 1161 ; 30 juin 1999, Foucher, n° 190038 : Rec., p. 232 ; voir encore, pour l’application d’un régime spécial d’indemnisation, 6 mars 2015, Centre hospitalier de Roanne c/ Mme Begani : Rec., p. 82. 20 décembre 1974, Commune de Barjols : Rec., T., p. 1161 ; 30 juin 1999, Foucher, n° 190038 : Rec., p. 232 ; voir encore, pour l’application d’un régime spécial d’indemnisation, 6 mars 2015, Centre hospitalier de Roanne c/ Mme Begani : Rec., p. 82. [↩]
- CE 18 septembre 2015, Commune de Bora-Bora, n° 376973 : Rec., T., p. 755-790, rendue dans le prolongement de la décision de Section, 20 octobre 2000, Société Citécâble Est, n° 196553 : Rec., p. 457. [↩]
- CE S. 8 juillet 1998, Département de l’Isère, n° 12302 : Rec., p. 308. [↩]
- 7 mars 1902, Crespel : Rec., p. 177. [↩]
- CE 5 mars 2008, Société d’Aménagement du bois de Bouis, n° 255266 : Rec., T., p. 606-874-910-921. Voir auparavant, s’agissant de l’appel, 31 mai 2007, Herbeth, n° 278905 : Rec., p. 175. [↩]
- 9 décembre 1949, Dame Geveerding : Rec., p. 543 ; CE 30 juillet 2003, AP-HP c/ M. Benoit, n° 244618 : Rec., T., p. 899. [↩]
- CE 12 janvier 1962, Commune de Mauriac : Rec., p. 25 ; 11 avril 1962, Doucet : Rec., T., p. 1061 ; 26 juin 1968, Dame Marchand : Rec., p. 402 ; 7 mai 1971, Société Cogifrance et Cie : Rec., p. 350 ; 11 juin 1975, Sirand : Rec., T., p. 1109. [↩]
- 30 juillet 2003, Assistance publique-hôpitaux de Paris c/ M. Benoît, préc. ; CE 7 juin 2004, Assistance publique à Marseille, n° 252869 : Rec., T., p. 810. [↩]
- CE 7 juin 2004, Centre hospitalier intercommunal de Fréjus Saint-Raphaël, n° 253043, inédite, concl. Pt Chauvaux ; CE 10 août 2005, M. Maigret, n° 266027 : Rec., T., p. 1018. [↩]
- CE Ass. 16 octobre 1970, Ville de Rueil-Malmaison : Rec., p. 584 ; RDP 1970, p. 1126, note Waline. [↩]
- Le plein contentieux fiscal demeure exclu du champ de cette dernière mesure : CE 7 décembre 2016, Société Cortansa, n° 384309 : Rec., p. 547. [↩]
- Contentieux administratif, LGDJ, 6e édition, p. 90. [↩]
- CE 11 juin 2003, M. Colin, n° 248865 : Rec., T., p. 899, concl. Pdt Stahl. [↩]
- Cf. Le doyen G. Cornu, Vocabulaire juridique : la prescription extinctive « entraîne l’extinction du droit (la perte du droit substantiel) par non-usage de ce droit pendant un laps de temps déterminé ». Cité par O. Henrard dans ses conclusions sur la décision Czabaj. [↩]
- Voir également la prescription – de cinq ans – pour exercer l’action en répétition de certaines taxes et contributions imposées par les personnes publiques en violation de dispositions du code de l’urbanisme (art. L. 332-30 du code de l’urbanisme) ou la prescription – de trois ans – pour la réparation des dommages causés par des membres de l’enseignement public (art. L. 911-4 du code de l’éducation). [↩]
- CE 5 décembre 2005, Mme Tassius, n° 278183 : Rec., T., p. 815-816-884, à propos de la loi du 31 décembre 1968. [↩]
- CE Ass. 24 mars 2006, Société KPMG et autres, nos 288460 et autres : Rec., p. 154 ; CE S. 13 décembre 2006, Mme Lacroix, n° 287845 : Rec., p. 540. [↩]
- N° 355801 : Rec., p. 171. [↩]
- Dalloz, 1996, p. 403. [↩]
- Cf. 24 juillet 2009, Gandry, n° 322806 : Rec., T., p. 860-863, concl. A. Courrège. [↩]
- Étant précisé qu’une fois l’administration saisie d’une demande d’indemnisation, la prescription court à nouveau pour un délai de quatre ans, à compter du premier jour de l’année au cours de laquelle la demande a été faite, cf. article 1er loi du 31 décembre 1968. [↩]
- Préc. [↩]
- CE S. 2 mai 1959, Ministres des Finances c/ Lafon : Rec., p. 282. [↩]
- 8 mars 1912, n° 42612 : Rec., p. 348, concl. Pichat. [↩]
- Concl. Pdt Pichat sur la décision Lafage. [↩]
- 31 mars 1911, Blanc, Argaing, Bézié : Rec., p. 407 ; CE S. 3 décembre 1952, Dubois : Rec., p. 555 ; CE S. 14 octobre 1960, Laplace : Rec., p. 541. [↩]
- La jurisprudence sur les décisions à objet pécuniaires de la jurisprudence Lafage, d’abord cantonnée aux litiges d’ordre pécuniaires entre l’administration et ses agents, a été étendue à ceux qui mettaient aux prises l’administration et des tiers (versement de prime, 2 juillet 1965, Delobel : Rec., p. 400) et des collectivités publiques entre elles (cf. subvention versée par l’État à une commune, CE S. 16 octobre 1981, Ville de Levallois-Perret : Rec., p. 372, litige relatif à des arrêtés portant répartition de crédits d’un fonds intercommunal, CE 8 novembre 2000, Commune de Faa’a, n° 194039 : Rec., T., p. 859). [↩]
- Les exceptions au déclenchement du délai de recours sont tout aussi applicables, cf., décision à objet pécuniaire prise dans le cadre d’un dommage de travaux publics : CE S. 12 février 1988, Société des automobilistes Citrëen : Rec., p. 64. [↩]
- CE S. 5 janvier 1966, Delle Gacon : Rec., p. 4. [↩]
- Voir la chronique Puissochet-Lecat, AJDA 1966, p. 40 ; CE S. 5 janvier 1966, Dlle Gacon : Rec., p. 4. [↩]
- D’ailleurs alors même qu’une demande indemnitaire repose sur l’illégalité d’une décision administrative, le caractère définitif de celle-ci – sauf cas de la décision à objet pécuniaire – n’empêche pas l’indemnisation du préjudice qui en est résulté (Dubois, Laplace, préc. et CE S. 30 avril 1976, Siméon : Rec., p. 225 ; AJ 1976, p. 625). [↩]
- Cf. sur le contrôle du lien de causalité en l’occurrence, 26 novembre 1993, SCI Les jardins de Bibemus : Rec., p. 327. [↩]
Table des matières

