Cette étude reflète uniquement l’opinion personnelle de l’auteur. L’étude est à jour au 29 février 2024. Elle prend en compte la loi no 2024-42 du 26 janvier 2024 « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration ». En revanche, la réglementation de l’Union issue du « Pacte sur la migration et l’asile », qui n’a pas été adoptée à la date où cette étude a été complétée, n’est pas prise en compte.
Si la dignité de toute personne humaine doit être respectée et protégée, la situation des demandeurs d’asile soulève des défis particuliers. En effet, toute demande de protection internationale présuppose la crainte que le pays d’origine du demandeur ne soit pas en mesure de protéger celui-ci de persécutions ou d’atteintes graves à sa dignité, voire que les autorités de ce pays soient à l’origine de ces persécutions ou de ces atteintes graves. De même, après avoir quitté leurs pays d’origine, la plupart des demandeurs d’asile peuvent être particulièrement exposés à des situations susceptibles de porter atteinte à leur dignité de personnes humaines.
La présente étude porte sur la situation des personnes qui ont présenté ou manifesté l’intention de présenter une demande de protection internationale1, c’est-à-dire une demande ayant pour objet l’obtention du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire2. En revanche, la situation des anciens demandeurs d’asile, dont la demande a déjà été traitée3, ne sera pas abordée. L’étude n’abordera pas non plus les questions liées à la dignité humaine mais non spécifiques aux demandeurs d’asile, liées par exemple à l’entrée et au séjour sur le territoire national4 ou à l’éloignement de celui-ci.
Dans ce contexte, le concept de dignité humaine5 sera appréhendé à la lumière de son lien avec l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants6. En effet, ce qui est inhumain est par nature indigne de la personne humaine, si bien que l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants peut être considérée comme un corollaire concret de la dignité humaine. Cependant, il ne faut pas confondre cette corrélation avec une identité : si la sauvegarde de la dignité humaine était limitée à l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants, elle ne se manifesterait que dans des cas particulièrement graves, au point de devenir une interdiction à la portée pratique réduite, voire essentiellement théorique.
Par ailleurs, ces concepts présentent une certaine ambiguïté. Ainsi, la dignité humaine, en ce qu’elle permet la protection des personnes vulnérables face aux tiers, est un moyen d’inclusion et de promotion des libertés individuelles et des prestations essentielles, mais, en ce qu’elle permet la protection de chacun contre soi-même, elle limite aussi ces libertés, au nom de l’exclusion de pratiques indignes7. Sans doute aussi en raison du fait qu’il s’agit de standards en partie insaisissables, la dignité humaine et les traitements inhumains ou dégradants sont mentionnés avec parcimonie tant dans les actes législatifs de l’Union en matière de protection internationale que dans la réglementation française en la matière, codifiée dans le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA)8.
En particulier, les directives « qualification »9, « procédures »10 et « accueil »11 ainsi que le règlement « Dublin III »12 mentionnent la dignité dans quelques considérants et dans un nombre limité d’articles, concernant notamment la situation des demandeurs en rétention, les transferts, les fouilles ou les examens et soins médicaux13. Les références à des traitements inhumains ou dégradants sont également peu nombreuses14, même si parfois elles sont décisives. Ainsi, l’article 15, sous b), de la directive « qualification » inclut la torture et les traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine parmi les atteintes graves qui figurent parmi les conditions de la protection subsidiaire15. En outre, l’annexe I de la directive « procédures » définit, en substance, un « pays d’origine sûr » comme un pays dans lequel, notamment, « d’une manière générale et uniformément, il n’y est jamais recouru à la persécution […] ni à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ».16 Quant au règlement Dublin III, l’article 3, paragraphe 2, alinéa 2, de celui-ci interdit les transferts vers un État membre dans lequel il existe des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne17.
C’est vers la jurisprudence qu’il faut se tourner pour déterminer dans quelle mesure la situation juridique des demandeurs d’asile se caractérise par des modalités spécifiques de sauvegarde de la dignité humaine. À cet égard, la sauvegarde de la dignité humaine et l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants ont vocation à constituer des facteurs d’unité de la jurisprudence européenne. S’agissant de la Cour EDH, on connaît tant l’importance de la jurisprudence relative à l’article 3 de la Convention EDH que l’ « absence irradiante », bien au-delà du domaine de l’asile et de l’immigration, de la sauvegarde de la dignité humaine18. Quant à la CJUE, les arrêts en matière d’asile et d’immigration comprennent plusieurs références au concept de dignité humaine et à l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. On a pu y voir un facteur de cohérence dans une jurisprudence assez casuistique par ailleurs19, ce qui est d’autant plus remarquable à la lumière de la réticence de la Cour à se référer à la charte en l’absence d’une valeur ajoutée claire de celle-ci dans une affaire donnée. Par-delà la cohérence interne à la jurisprudence respective de la cour de Strasbourg et de la cour de Luxembourg, la sauvegarde de la dignité humaine et l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants constituent aussi les éléments d’un langage commun de ces deux juridictions dans la prise en compte réciproque de leur jurisprudence respective.
Dans une certaine mesure, ces concepts constituent également un facteur unifiant de la jurisprudence française en matière de droit des étrangers, issue des juridictions administratives et, dans une moindre mesure, du Conseil constitutionnel. Certes, l’importance de la dignité humaine en la matière est sans doute moindre que dans d’autres domaines du droit administratif, tels que la police administrative générale ou le maintien de l’ordre public. Toutefois, depuis quelques décennies, la sauvegarde de la dignité humaine contribue de manière non négligeable à la stabilité d’un ordre juridique qui, depuis 1980, a produit trente lois en matière de droit des étrangers20.
À la lumière de ces constats, cette étude a un double objectif. D’une part, il s’agit d’identifier les principales manifestations de la sauvegarde de la dignité humaine dans la jurisprudence européenne relative aux demandeurs d’asile, et plus exactement les domaines dans lesquels la référence à la dignité humaine présente une véritable valeur ajoutée par rapport à d’autres règles ou principes. D’autre part, il s’agit de saisir la dialectique du droit européen et du droit national en la matière, en déterminant dans quelle mesure l’interaction de la jurisprudence européenne et de la jurisprudence française se caractérise par la convergence. À cet égard, il est possible d’identifier trois domaines dans lesquels la sauvegarde de la dignité humaine des demandeurs d’asile joue un rôle important, selon des modalités différentes. En ce qui concerne les conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile, la convergence n’est pas toujours sans difficultés (A). En ce qui concerne le transfert vers l’État responsable du traitement de la demande, dans le cadre du règlement « Dublin III », la convergence semble se faire au cas par cas (B). Enfin, en ce qui concerne la détermination de la qualité de réfugié ou l’octroi de la protection subsidiaire, la convergence s’est consolidée au fil du temps (C).
A. Une convergence difficile : les conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile
La raison d’être de la directive « accueil » consiste à assurer des conditions de vie dignes aux demandeurs d’asile. En effet, en l’absence de règles en la matière, ces personnes seraient totalement exposées au risque de conditions d’accueil indignes. À ce sujet, des « conditions incompatibles avec la dignité humaine » sont mentionnées dans la jurisprudence pénale en matière de marchands de sommeil21. Désormais, l’article L. 425-11 du CESEDA, issu de la loi no 2024-42 du 26 janvier 2024 « pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration », prévoit que l’étranger qui dépose plainte contre une personne qu’il accuse d’avoir commis à son encontre des faits constitutifs de l’infraction de soumission à des conditions d’hébergement incompatibles avec la dignité humaine, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » d’une durée d’un an, renouvelée pendant toute la durée de la procédure pénale.
La directive ne se limite pas à prévoir des conditions matérielles d’accueil, qui sont les conditions d’accueil comprenant le logement, la nourriture et l’habillement, fournis en nature ou sous forme d’allocation financière ou de bons, ou en combinant ces trois formules, ainsi qu’une allocation journalière22. Ainsi, les demandeurs de protection internationale pouvant être transférés dans un autre État membre en vertu du règlement « Dublin III » (les « dublinés » ou « dublinables ») doivent notamment avoir accès au marché de l’emploi dans l’État membre qui les accueille, notamment parce que cela contribue à la sauvegarde de leur dignité23. Toutefois, la dignité humaine joue un rôle important surtout dans la clarification de l’obligation d’assurer les conditions matérielles d’accueil (I) et de la faculté de les retirer (II).
I. L’obligation d’assurer des conditions matérielles d’accueil susceptibles de couvrir les besoins fondamentaux des demandeurs d’asile
La sauvegarde de la dignité humaine des demandeurs d’asile entraîne, dans l’interprétation de la directive « accueil » retenue par la Cour de justice, l’exigence que les conditions matérielles d’accueil couvrent les besoins fondamentaux des demandeurs de protection internationale. Ainsi, la Cour a précisé en 2012, en réponse à une demande de décision préjudicielle du Conseil d’État, que les « dublinés », en tant que demandeurs de protection internationale, ont droit aux conditions matérielles d’accueil prévues par la directive « accueil » jusqu’au transfert effectif dans l’État membre en vertu du règlement « Dublin III »24. En octobre 2009, le Conseil d’État avait déjà jugé, en ce sens, que les « dublinés » doivent bénéficier de conditions matérielles d’accueil décentes en France, ce qui découlait de l’ordonnance applicable à l’époque25. Or, le ministère de l’Intérieur n’était pas du même avis, comme confirmé par une circulaire du 3 novembre 2009, dont l’annulation, finalement intervenue en 2013, était l’enjeu du renvoi préjudiciel à la Cour de justice. Cet exemple illustre la tension qui peut exister en pratique entre, d’une part, le caractère essentiel de certains besoins des demandeurs d’asile, qui touchent à leur dignité en tant que personnes humaines et, dès lors, doivent être satisfaits sans exception et, d’autre part, la rareté des ressources à disposition des autorités publiques.
Cette tension s’est également manifestée autour de la question de savoir si l’octroi de conditions matérielles d’accueil relève d’une obligation de moyens ou de résultat. En 2010, le Conseil d’État a considéré que l’administration n’était tenue que par une obligation de moyen et non de résultat.26 Au contraire, la jurisprudence européenne décrit l’octroi de conditions matérielles d’accueil comme relevant, en substance, d’une obligation de résultat. La Cour EDH a été la première à parvenir à cette conclusion, en exigeant de la Grèce, dans l’affaire M. S. S., des conditions matérielles d’accueil susceptibles de couvrir les besoins fondamentaux des demandeurs d’asile. Selon la Cour EDH, le défaut de ces conditions est susceptible de constituer un traitement inhumain ou dégradant. Tel est le cas lorsque les personnes concernées sont dans des conditions de dénuement extrême27. Ce raisonnement a été confirmé plus récemment28. La Cour de justice, quant à elle, a précisé en 2014, que, lorsqu’un État membre a opté pour la fourniture des conditions matérielles d’accueil sous la forme d’allocations financières, ces allocations doivent être suffisantes pour garantir un niveau de vie digne et adéquat pour la santé ainsi que pour assurer la subsistance des demandeurs d’asile en leur permettant de disposer notamment d’un logement, le cas échéant sur le marché privé de la location29.
Depuis, le Conseil d’État n’a pas hésité à contrôler le caractère adéquat du montant de ces allocations, et plus particulièrement du montant additionnel pour le logement. Ainsi, en 2016 il a estimé manifestement insuffisant le montant de 4,20 euros30. En 2018, il a considéré que, dans la plupart des grandes agglomérations où se concentrent d’ailleurs les demandes d’asile, un montant additionnel de 5,40 euros demeure manifestement insuffisant pour permettre à un demandeur d’asile de disposer d’un logement sur le marché privé de la location31. En 2019, le Conseil d’État a fini par considérer qu’un montant journalier de 7,40 euros pour se loger n’est pas manifestement insuffisant pour permettre à un demandeur d’asile de disposer d’un logement sur le marché privé de la location32.
Il reste que, en 2020, la Cour EDH a constaté à cet égard une peu flatteuse violation de l’article 3 de la Convention EDH. En effet, le retard constaté dans la mise en œuvre des conditions matérielles d’accueil est susceptible d’entraîner la violation de cette disposition, dans la mesure où il contraint certains demandeurs d’asile à vivre dans la rue pendant des mois, sans moyens. Ainsi, en l’espèce, les requérants « ont été victimes d’un traitement dégradant témoignant d’un manque de respect pour leur dignité et […] cette situation a, sans aucun doute, suscité chez eux des sentiments de peur, d’angoisse ou d’infériorité propres à conduire au désespoir ». Selon la Cour EDH, de telles conditions d’existence, combinées avec l’absence de réponse adéquate des autorités françaises, alertées à maintes reprises sur impossibilité pour les personnes concernées de jouir en pratique de leurs droits et donc de pourvoir à leurs besoins essentiels, et le fait que les juridictions internes ont systématiquement opposé aux intéressés le manque de moyens dont disposaient les instances compétentes au regard de leurs conditions de jeunes majeurs isolés, en bonne santé et sans charge de famille, ont atteint le seuil de gravité requis par l’article 3 de la Convention33.
Il apparaît donc que la sauvegarde de la dignité humaine des demandeurs d’asile n’est pas toujours effective, ceux-ci ne pouvant pas toujours bénéficier de conditions matérielles d’accueil susceptibles de couvrir leurs besoins fondamentaux. Des questions analogues se posent à propos du retrait de telles conditions matérielles d’accueil.
II. Le retrait des conditions matérielles d’accueil
La Cour de justice a eu l’occasion de clarifier les limites de la faculté qu’ont les États membres de retirer les conditions matérielles d’accueil. À l’occasion d’un renvoi préjudiciel concernant la réglementation belge, la Cour a considéré qu’un État membre ne peut pas prévoir, parmi les sanctions susceptibles d’être infligées à un demandeur de protection internationale en cas de manquement grave au règlement des centres d’hébergement, ainsi que de comportement particulièrement violent, une sanction consistant à retirer, même de manière temporaire, le bénéfice des conditions matérielles d’accueil ayant trait au logement, à la nourriture ou à l’habillement, dès lors que cette sanction aurait pour effet de priver ce demandeur de la possibilité de faire face à ses besoins les plus élémentaires. En outre, l’infliction d’autres sanctions doit respecter les principes de proportionnalité et de la dignité humaine34.
Or, pendant environ deux ans, l’article D. 744-36, alinéa 3, du CESEDA35 a prévu le retrait des conditions matérielles d’accueil notamment en cas de comportement violent ou lorsque l’intéressé a commis des manquements graves au règlement du lieu d’hébergement. Depuis l’adoption du décret no 20201734, du 16 décembre 2020, ce retrait n’est plus prévu dans ces cas, même s’il reste prévu dans d’autres cas, notamment en cas de fraude. À la lumière du caractère absolu, en principe, des « besoins les plus élémentaires », en ce qu’ils sont intrinsèques au respect de la dignité humaine, la conformité de cette solution avec la directive « accueil » peut être source d’interrogations, qui nourriront peut-être de futurs développements jurisprudentiels.
De manière plus générale, il est possible de constater une certaine convergence de la jurisprudence européenne et du droit français dans le domaine des conditions matérielles d’accueil. Toutefois, cette convergence semble caractérisée par la prudence et apparaît comme fragile. En effet, il incombe aux autorités chargées de l’accueil des demandeurs d’asile d’assurer des conditions d’accueil dignes, permettant notamment la satisfaction de besoins essentiels non négociables, qui ne peut pas être mise en balance avec d’autres considérations. Or, même en faisant abstraction de l’instabilité de l’opinion publique en la matière, la réalisation de cet objectif exige des moyens importants, alors que le droit et la jurisprudence français ne semblent pas insensibles aux limites des moyens disponibles à cet effet.
B. Une convergence casuistique : le transfert vers l’État membre responsable du traitement de la demande en vertu du règlement « Dublin III »
Le règlement « Dublin III », et plus particulièrement la faculté de transférer certains demandeurs de protection internationale vers un autre État membre, responsable du traitement de la demande, soulève une difficulté d’une autre nature, à savoir celle d’assurer une convergence des appréciations in concreto de la sauvegarde de la dignité humaine dans telle ou telle situation. Cette difficulté trouve son origine dans le fait que la jurisprudence européenne exclut le transfert dans deux situations, étroitement liées à la sauvegarde de la dignité humaine, à savoir, d’une part, l’existence de défaillances systémiques dans l’État membre responsable du traitement de la demande (I) et, d’autre part, le risque de traitements inhumains ou dégradants (II).
I. L’existence de défaillances systémiques dans l’État membre responsable de la demande
Dans l’affaire M. S. S., la Cour EDH a condamné la Belgique pour le transfert de demandeurs d’asile vers la Grèce, État dans lequel les défaillances systémiques du régime de l’accueil de cette catégorie de personnes étaient de nature à entraîner une violation de l’article 3 de la Convention EDH36. Dans l’affaire N. S., la Cour de justice s’est partiellement inspirée de cette solution, qui est également à l’origine de l’article 3, paragraphe 2, alinéa 2, du règlement « Dublin III »37. Ainsi, le droit de l’Union s’oppose au transfert d’un demandeur d’asile vers l’État membre responsable lorsque des défaillances systémiques de la procédure d’asile et des conditions d’accueil dans cet État laissent sérieusement craindre que le demandeur soit soumis à des traitements inhumains ou dégradants. Cela étant, cette juridiction insiste, au nom « de la raison d’être de l’Union et de la réalisation de l’espace de liberté, de sécurité et de justice », sur le fait que « toute violation d’un droit fondamental » par l’État membre responsable n’a pas pour effet d’affecter les obligations des autres États membres de respecter les obligations du règlement « Dublin III »38. Partant, lorsque l’État responsable a accepté la prise en charge d’un demandeur d’asile, le demandeur ne peut contester cette acceptation qu’en se prévalant des défaillances systémiques dans cet État.39
La Cour de justice recherche une conciliation entre, d’une part, la nécessité d’éviter le transfert lorsque celui-ci aboutirait à des conditions de vie telles que le demandeur d’asile subirait des traitements inhumains ou dégradants et, d’autre part, la nécessité d’éviter la paralysie de la politique de l’Union en matière de protection internationale. Cette recherche d’équilibre est illustrée par l’arrêt Jawo, où la Cour a jugé qu’un demandeur d’asile ne peut pas être transféré vers l’État membre qui lui a déjà accordé une protection si les conditions de vie prévisibles des bénéficiaires d’une protection internationale dans cet État membre l’y exposent à une situation de dénuement matériel extrême, contraire à l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants. Cette contrariété est due au fait que, dans une telle hypothèse, cette personne ne pourrait pas faire face à ses besoins les plus élémentaires, tels que notamment ceux de se nourrir, de se laver et de se loger, et qu’il serait porté atteinte à sa santé physique ou mentale ou la mettrait dans un état de dégradation incompatible avec la dignité humaine. À cet égard, il faut tenir compte de la « vulnérabilité particulière » de la personne concernée. Ce faisant, la Cour a confirmé le caractère certes non impossible mais exceptionnel de ces situations, qui ne se résument pas à la précarité ou à une protection des droits moins bonne que dans l’État membre qui effectue le transfert40.
Les juridictions administratives françaises semblent hésitantes quant à la mise en œuvre de ces orientations. La jurisprudence en la matière est casuistique et présente des contradictions qui vont au-delà de la simple adaptation à l’évolution des circonstances dans le temps et dans l’espace. Au sujet de la Grèce, le Conseil d’État a, dans un premier temps, conclu à la licéité des transferts de demandeurs d’asile41, en dépit de la position en sens contraire du Tribunal administratif de Paris42. Toutefois, à partir de 2010, le point de vue de la juridiction suprême de l’ordre administratif a évolué43, sans doute aussi sous l’impulsion des condamnations de la Grèce par la Cour EDH en raison de violations de l’article 3 de la Convention EDH44. S’agissant de l’Italie, la condamnation de cet État devant la Cour EDH en raison des conditions d’accueil des demandeurs d’asile45 ne semble avoir trouvé que des échos ponctuels et circonstanciés, limités à certaines cours administratives d’appel46. Quant à Malte, certaines décisions de transfert ont été annulées47, avant que le Conseil d’État ne contredise cette analyse48. Enfin, la qualification de la Hongrie, à une époque où sa qualification comme État membre responsable du traitement d’une demande en vertu du règlement « Dublin III » ne relevait pas du cas d’école49, a fait l’objet d’appréciations divergentes des cours administratives d’appel50.
Par-delà l’appréciation de la situation de tel ou tel État membre, qui peut présenter des évolutions au gré des flux de personnes, des réformes entreprises ou des situations individuelles en cause, cette fluctuation suscite des questions. Les défaillances systémiques qui, selon la jurisprudence européenne, font échec au transfert vers l’État membre concerné, devraient pouvoir être appréciées de manière relativement uniforme. En effet, précisément en raison de leur nature systémique, en l’absence de changements significatifs à l’échelle de cet État membre, ces défaillances devraient, en principe, aboutir aux mêmes conclusions pour toutes les situations analogues dans lesquelles le transfert est envisagé. S’il est possible que, parmi les demandeurs d’asile, certaines catégories soient plus exposées que d’autres à des atteintes à la dignité humaine dans un État donné, des conclusions divergentes sont difficiles à justifier au sein de chaque catégorie de demandeurs, par exemple celle des familles comprenant des enfants mineurs, par rapport à laquelle le caractère systémique des défaillances en question devrait s’opposer à une appréciation simplement casuistique. Cette dernière approche est plus adaptée à des risques ponctuels de violation de l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants.
II. Les risques de traitements inhumains ou dégradants
Dans l’affaire C. K. de 2017, la Cour de justice a jugé que, en dehors même de toute défaillance systémique dans l’État responsable de la demande de protection internationale, la décision de transfert est de nature à constituer un traitement inhumain ou dégradant prohibé par l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne dès lors que ce transfert entraînerait un risque réel et avéré d’une détérioration significative et irrémédiable de l’état de santé de l’intéressé. Si l’existence d’une probabilité de traitements inhumains ou dégradants est établie, il incombe aux autorités de s’assurer que l’état de santé de cette personne est compatible avec le transfert et, dans le doute, de suspendre celui-ci51. Il s’agit d’une solution remarquable notamment parce qu’elle diffère de celle retenue, en principe, dans d’autres domaines de l’espace de liberté, de sécurité et de justice. En particulier, le refus d’exécution d’un mandat d’arrêt européen en raison d’un risque de violation de la charte des droits fondamentaux est conditionné à un examen en deux étapes consistant à rechercher, premièrement, des défaillances systémiques ou généralisées dans l’État membre d’émission et, deuxièmement, si de telles défaillances existent, des motifs sérieux et avérés de croire qu’un tel risque s’est effectivement réalisé en l’espèce, à l’aune de l’incidence concrète des défaillances en cause sur la situation individuelle de la personne concernée52.
En cas de risques de nature à entraîner des traitements inhumains ou dégradants, les juridictions françaises interdisent également le transfert du demandeur d’asile. En matière de risques pour la santé de l’intéressé, une telle approche a été suivie, implicitement, avant même que la Cour de justice ne la consacre53. La juridiction saisie doit alors apprécier au cas par cas le risque de traitement inhumain ou dégradant, soit en raison de l’état de santé de l’intéressé54, soit en raison de traitements inhumains ou dégradants subis par le passé55. À cet égard, ni le Conseil d’État56 ni la Cour de justice57 n’admettent un risque « par ricochet » dû à l’absence d’assurance de la part de l’État membre responsable du traitement de la demande que le demandeur d’asile ne sera pas renvoyé dans son pays d’origine. En définitive, l’orientation générale est bien établie, mais sa mise en œuvre est toujours circonstanciée et casuistique, bien que ceci semble moins problématique qu’en ce qui concerne les défaillances systémiques dans l’État responsable de la demande de protection internationale.
C. Une convergence progressive : la détermination de conditions d’octroi de la protection internationale
Les conditions d’octroi de la protection internationale se caractérisent par un lien indissoluble avec la sauvegarde de la dignité humaine. Un tel constat s’impose de manière générale (I), mais aussi, de manière originale, s’agissant des réfugiés de Palestine, dont le statut juridique particulier a donné lieu à une jurisprudence spécifique (II).
I. Le lien indissoluble entre la sauvegarde de la dignité humaine et les conditions d’octroi de la protection internationale
Les articles 9 et 10 de la directive « qualification » se réfèrent aux actes et aux motifs de persécution au sens la convention de Genève de 195158. Bien que cette convention ne mentionne pas la dignité humaine, son préambule se réfère aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales tels qu’affirmés dans la Charte des Nations unies et dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Le souci de contribuer à ce que les réfugiés bénéficient de conditions de vie dignes en dehors de leur pays d’origine sous-tend l’ensemble du droit de l’asile. Ce souci est confirmé par la notion de protection subsidiaire, complémentaire à la qualité de réfugié en ce qu’elle a pour critère d’octroi le risque d’atteintes graves comprenant notamment la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants infligés à un demandeur dans son pays d’origine59.
Le lien entre la sauvegarde de la dignité humaine et la protection internationale est donc omniprésent. Même lorsqu’il n’est pas expressément mentionné, il apparaît en filigrane dans les questions auxquelles la Cour de justice est appelée à répondre, comme dans l’affaire en cours relative à la qualification des « personnes s’identifiant aux valeurs de l’Union » en tant que groupe social, au sens de l’article 10, paragraphe 1, sous d) de la directive « qualification »60. En l’état actuel de la jurisprudence, ce lien est déjà visible en matière de protection contre les persécutions en raison de la religion. À cet égard, la crainte du demandeur d’asile d’être persécuté est fondée dès qu’il est raisonnable de penser que, à son retour dans son pays d’origine, il effectuera des actes religieux l’exposant à un risque réel de persécution. Lors de l’évaluation individuelle d’une demande visant à obtenir le statut de réfugié, on ne peut pas raisonnablement attendre du demandeur qu’il renonce à ces actes religieux61. L’interprétation opposée « semble contraire au respect dû à la dignité humaine consacrée à l’article 1er de la charte [des droits fondamentaux de l’Union européenne]. En effet, en exigeant du demandeur d’asile qu’il dissimule, modifie ou renonce à la manifestation publique de sa foi, nous lui demandons de changer ce qui est susceptible de constituer un élément fondamental de son identité, c’est-à-dire, en quelque sorte, à se renier lui-même. Or, personne ne dispose de ce droit »62.
La dignité humaine du demandeur d’asile doit aussi être respectée dans la procédure de détermination de sa qualité de réfugié. En particulier, l’orientation sexuelle est considérée, en ce qui concerne certains pays d’origine, comme un critère d’appartenance à un groupe social. En France, la Cour nationale du droit d’asile a jugé, par exemple, que les personnes homosexuelles subissent une hostilité telle de la part des autorités et de leur cercle familial en République démocratique du Congo que ces personnes constituent un groupe social en dépit de l’absence de criminalisation de l’homosexualité par la loi congolaise63. Tout comme les demandes fondées sur d’autres motifs de persécution, les demandes fondées sur les motifs de l’orientation sexuelle peuvent faire l’objet d’un processus d’évaluation mené dans le respect des principes et droits garantis par la charte des droits fondamentaux, tels que la dignité humaine. Le respect de celle-ci interdit à l’État membre concerné de soumettre le demandeur à l’accomplissement d’actes homosexuels, à des tests en vue d’établir l’homosexualité. De même, le droit au respect de la vie privée et familiale impose que la procédure ne doit comporter aucun interrogatoire sur les pratiques sexuelles du demandeur. Dans ce cadre, les autorités de l’État membre concerné ne peuvent estimer que la demande manque de crédibilité au seul motif que le demandeur aurait répondu de manière insatisfaisante à des interrogatoires fondés sur la seule base de notions stéréotypées concernant les homosexuels64.
II. La situation particulière des réfugiés de Palestine
Si tout octroi de la protection internationale manifeste l’exigence de sauvegarder la dignité humaine du demandeur, qui serait menacée en cas de retour dans son pays d’origine, ce lien apparaît de manière originale s’agissant des réfugiés de Palestine, pour lesquels la jurisprudence de la Cour de justice semble préfigurer, à certains égards, une reconnaissance du statut du réfugié par les États membres au nom du seul respect de la dignité humaine. En effet, la construction de cette jurisprudence au fil du temps, ainsi que son interaction avec des arrêts inspirés par la jurisprudence de la Cour EDH, a abouti à attribuer un poids significatif, dans l’appréciation de la situation du demandeur, à l’impossibilité d’assurer des conditions de vie dignes, pour l’instant s’agissant de sa santé, autrement que par l’octroi du statut de réfugié dans l’Union.
Tel est le résultat d’un cadre juridique spécifique par rapport à celui, généralement applicable, de l’article 1er, section A, paragraphe 1, sous 2), de la convention de Genève de 1951. En effet, selon l’article 12, paragraphe 1, sous a), de la directive « qualification », qui reproduit en substance l’article 1er, section D, de la convention de Genève, tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride est exclu du statut de réfugié lorsqu’il relève du champ d’application de la protection ou l’assistance de la part d’un organisme ou d’une institution des Nations unies autre que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Cela étant, si cette protection ou cette assistance cesse pour quelque raison que ce soit, sans que le sort de ces personnes ait été définitivement réglé conformément aux résolutions pertinentes de l’Assemblée générale des Nations unies, ces personnes pourront ipso facto se prévaloir de la directive « qualification ». Cette disposition concerne, en particulier, les personnes protégées par l’UNRWA (United Nations Relief and Works Agency for Palestine Refugees in the Near East, Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient)65. À cet égard, il est possible de constater une convergence progressive, permise par des clarifications successives, de la jurisprudence française et de la jurisprudence de la Cour de justice.
Dans un premier temps, la Cour nationale du droit d’asile a considéré que l’assistance de la part de l’UNRWA doit être regardée comme ayant cessé dès lors que l’intéressé se trouve en dehors de la zone d’activité de cet organisme66. En effet, selon cette jurisprudence, dès lors que cette protection a cessé, la protection équivalente prévue par la convention de Genève devait s’y substituer.67 Ce raisonnement aboutissait à une sorte de reconnaissance automatique de la qualité de réfugié UNRWA, qui ouvrait droit à la reconnaissance de la qualité de réfugié par les autorités françaises. Or, le Conseil d’État a considéré, par la suite, que l’intéressé ne pouvait se voir reconnaître la qualité de réfugié que s’il avait des raisons sérieuses de craindre d’être persécuté pour l’un des motifs énoncés à l’article 1er, section A, paragraphe 1, sous 2), de la convention de Genève68. Ce raisonnement niait, en substance, la spécificité de la qualité de réfugié UNRWA, dont les effets étaient ainsi limités de manière sans doute excessive.
De manière plus nuancée, la Cour de justice a jugé qu’une simple absence physique de la zone d’intervention de l’UNRWA, ou une décision volontaire de la quitter, ne sauraient caractériser une cessation de la protection. Tel est toutefois le cas si le départ de la personne concernée est motivé par des contraintes indépendantes de sa volonté, en raison de l’incapacité de l’UNRWA à lui assurer des conditions de vie conformes à la mission dont cet office est chargé. Il s’agit de situations personnelles de grave insécurité dans lesquelles l’UNRWA n’a pas cessé d’exister, mais dans lesquelles sa mission de protection, elle, a cessé d’être correctement assurée à l’égard de l’intéressé69. La raison d’être de cette solution réside dans le fait que la cessation de l’assistance par l’UNRWA ne saurait se limiter à la seule possibilité, pour la personne concernée, de solliciter le statut de réfugié selon la procédure de droit commun prévue dans la directive « qualification », faute de quoi les réfugiés de Palestine seraient, en dépit de leur statut juridique spécifique et plus avantageux, dans la même situation que tout autre demandeur d’asile.
Les arrêts suivants de la Cour de justice ont fait apparaître indirectement une double dimension sécuritaire et liée à des conditions de vie dignes. Ainsi, la Cour a considéré que les États membres ne sont pas tenus de reconnaître la qualité de réfugié à une personne enregistrée auprès de l’UNRWA si un État tiers lui permet de séjourner sur son territoire en sécurité, dans des conditions de vie dignes et aussi longtemps que les risques encourus dans le territoire de sa résidence habituelle le rendent nécessaire. Plus exactement, une personne enregistrée auprès de l’UNRWA doit, si elle bénéficie d’une protection ou d’une assistance effective de cet organisme dans un pays tiers ne correspondant pas au territoire dans lequel elle réside habituellement mais faisant partie de la zone d’opération dudit organisme, être considérée comme jouissant d’une protection suffisante dans ce pays tiers. Ceci est toutefois subordonné au fait que le pays tiers s’engage à réadmettre l’intéressé après que celui-ci a quitté son territoire pour demander une protection internationale dans l’Union, reconnaisse la protection ou l’assistance de l’UNRWA et adhère au principe de non-refoulement, permettant ainsi à l’intéressé de séjourner sur son territoire en sécurité, dans des conditions de vie dignes et aussi longtemps que les risques encourus dans le territoire de sa résidence habituelle le rendent nécessaire.70
Sur cette base, le Conseil d’État a considéré qu’un réfugié de Palestine qui se trouve en dehors de la zone d’activité de l’UNRWA doit être regardé comme ne bénéficiant plus de la protection ou de l’assistance de cet organisme dans les cas suivants : lorsqu’une menace grave pour sa sécurité a contraint un réfugié de Palestine à quitter l’État ou le territoire situé dans la zone d’intervention de l’UNRWA dans lequel il avait sa résidence habituelle et fait obstacle à ce qu’il y retourne ; lorsqu’une telle menace, apparue après le départ de l’intéressé, fait pareillement obstacle à son retour sur place ; enfin, lorsque, pour des motifs indépendants de sa volonté, étrangers à l’existence d’une menace pour sa sécurité, un réfugié palestinien se trouve dans l’impossibilité de regagner l’État ou le territoire dans lequel il avait sa résidence habituelle. Par ailleurs, se fondant sur les exigences attachées au respect de l’article 8 de la Convention EDH, qui protège notamment les apatrides des atteintes excessives au droit au respect de la vie privée, le Conseil d’État a ajouté le cas du réfugié de Palestine qui possède en France des liens familiaux ou des liens personnels, compte tenu notamment de la durée de sa résidence sur le territoire, tels que le centre de ses intérêts se trouve désormais en France71. Bien qu’elle ne figure pas expressément dans la motivation de cette solution, la sauvegarde de la dignité humaine semble orienter de manière directe, de manière originale par rapport aux critères de droit commun, la reconnaissance de la qualité de réfugié.
Un tel constat peut être effectué, à plus forte raison, pour la jurisprudence récente de la Cour de justice. En effet, selon celle-ci, la protection ou l’assistance de l’UNRWA doit être regardée comme ayant cessé lorsque cet organisme n’est pas en mesure d’assurer à un apatride d’origine palestinienne relevant de cette protection ou de cette assistance l’accès aux soins et aux traitements médicaux sans lesquels ce dernier court un risque réel de décès imminent ou un risque réel d’être exposé à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé ou à une réduction significative de son espérance de vie. En effet, dans de telles circonstances, l’intéressé doit être considéré comme ayant été contraint de quitter la zone d’opération de l’UNWRA72. Cette solution, qui porte en l’occurrence sur l’impossibilité de soins, même complexes, concernant une maladie rare, consiste à reprendre, dans le domaine de la protection internationale, le critère dégagé par la Cour EDH, sur le fondement de l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants, en matière d’éloignements d’étrangers73, critère déjà repris par la Cour de justice74. Au vu de la spécificité du statut juridique des réfugiés de Palestine, il est certainement excessif de voir dans cette jurisprudence un signe avant-coureur d’une reconnaissance généralisée de la qualité de réfugié du seul fait d’un risque d’atteinte grave à la dignité humaine du demandeur. Il est néanmoins remarquable que, s’agissant plus particulièrement des risques pour la santé, cette qualité vise à protéger la dignité humaine du demandeur d’asile, indépendamment de toute exigence spécifiquement liée à l’existence d’une persécution.
Les questions relatives aux conditions matérielles d’accueil, au transfert vers l’État membre responsable du traitement de la demande en vertu du règlement « Dublin III » et aux conditions d’octroi de la protection internationale démontrent que la sauvegarde de la dignité humaine joue, expressément ou implicitement, le cas échéant par le truchement de l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants, un rôle significatif dans l’élaboration de solutions jurisprudentielles. Dans une certaine mesure, ces solutions se caractérisent par la convergence de la jurisprudence européenne et de la jurisprudence française. Cela étant, l’ampleur et la dynamique de cette convergence diffèrent dans chaque domaine, et force est de constater que la convergence n’est que partielle sur certaines questions.
Plusieurs explications peuvent être recherchées pour rendre compte de cette situation. Sans doute, des facteurs matériels peuvent expliquer une certaine prudence sur le plan national, comme observé en matière de conditions matérielles d’accueil. Les fonctions respectives des juridictions concernées peuvent aussi expliquer, en partie, des divergences d’approche. Ainsi, s’agissant de l’appréciation factuelle de situations pertinentes en vue du transfert d’une personne vers l’État membre responsable du traitement de la demande en vertu du règlement « Dublin III », il faut garder à l’esprit que, si les juridictions nationales, surtout celles de fond, sont confrontées à des litiges spécifiques, impliquant des appréciations individuelles au cas par cas, les juridictions européennes, en particulier la Cour de justice, doivent veiller, essentiellement par des orientations générales, à la cohérence de l’interprétation et à l’application du droit dans tous les États membres.
Cette étude a fait aussi apparaître que, sur plusieurs questions, en dépit de divergences initiales, les solutions européennes et nationales finissent par se rejoindre, ce dont les conditions d’octroi de la protection internationale sont une illustration. C’est de cette recherche constante et patiente de solutions harmonieuses que devront certainement faire preuve, face aux nombreux défis auxquels est confrontée la sauvegarde de la dignité humaine des demandeurs d’asile, tant les juridictions européennes que les juridictions françaises dans les années à venir.
- Pour un aperçu général du statut des demandeurs d’asile en France, T. Fleury Graff, A. Marie, Droit de l’asile, 2e éd., 2019, pp. 73-140. [↩]
- Voir la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection (refonte) (JO 2011 L 337, p. 9). [↩]
- Telle est la situation des personnes dont la demande a été acceptée, y compris lorsque le statut de réfugié ou la protection internationale sont retirés par la suite, ou définitivement rejetée. [↩]
- Par exemple, l’article 46 de la loi no 2024-42 du 26 janvier 2024 insère un nouvel article L. 412-7 au sein du CESEDA afin de prévoir la souscription d’un contrat d’engagement au respect des principes de la République, dont la dignité de la personne humaine, par l’étranger qui sollicite un document de séjour, ce que le Conseil constitutionnel a considéré comme conforme à la Constitution (CC, déc. no 2023-863 DC du 25 janvier 2024, cons. 166 à 174). [↩]
- V., à cet égard, l’article 1er de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. Le respect de la dignité humaine figure également parmi les valeurs, communes aux États membres, sur lesquelles l’Union européenne est fondée. En droit français, le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine est un principe à valeur constitutionnelle (CC, déc. no 94-343/344 DC du 27 juillet 1994). [↩]
- V. l’art. 3 de la Convention EDH et l’art. 4 de la charte des droits fondamentaux. [↩]
- V. not. J.-M. Sauvé, « Dignité humaine et juge administratif », intervention au colloque organisé à l’occasion du 90ème anniversaire de la création du Tribunal administratif de Strasbourg, 27 novembre 2009, <https://www.conseil-etat.fr/publications-colloques/discours-et-interventions/dignite-humaine-et-juge-administratif>; P. Cossalter, « La dignité humaine en droit public français : l’ultime recours », intervention à l’Université Panthéon-Assas, 30 octobre 2014, <https://www.revuegeneraledudroit.eu/blog/2014/11/06/la-dignite-humaine-en-droit-public-francais-lultime-recours>. Tous les liens internet ont été consultés pour la dernière fois le 29 février 2024. [↩]
- Les mentions de la dignité sont parfois banales, comme à l’article R. 532-38 du CESEDA, qui dispose notamment que les personnes qui assistent aux audiences à la Cour nationale du droit d’asile doivent observer une attitude digne et garder le respect dû à la justice. [↩]
- Directive 2011/95/UE, cit. note 3. [↩]
- Directive 2013/32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale (refonte) (JO 2013 L 180, p. 60). [↩]
- Directive 2013/33/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant des normes pour l’accueil des personnes demandant la protection internationale (refonte) (JO 2013 L 180, p. 96). [↩]
- Règlement (UE) no 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l’examen d’une demande de protection internationale introduite dans l’un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte) (JO 2013 L 180, p. 31). [↩]
- V. le considérant 16 de la directive « qualification » ; le considérant 60 ainsi que les articles 13, paragraphe 2, sous d), et 25, paragraphe 5, de la directive « procédures » ; les considérants 11, 18, 25 et 35 ainsi que l’article 20, paragraphe 5, de la directive « accueil » ; le considérant 24 et l’article 29, paragraphe 1, du règlement « Dublin III ». [↩]
- V., en ce qui concerne les mineurs, l’article 23, paragraphe 4, de la directive « accueil ». [↩]
- S’agissant des soins de santé, voir l’article 30 de cette directive. [↩]
- V. également l’article 38 ainsi que les considérants 31 et 42 de cette directive. [↩]
- V. la partie B de cette étude. [↩]
- L. Burgorgue-Larsen, « La dignité dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme », in L. Burgorgue-Larsen (dir.), La dignité saisie par les juges en Europe, 2010, pp. 55-78, p. 55. [↩]
- S. Barbou des Places, « Au-delà de la casuistique ? La part de la Cour de justice dans la construction du droit des migrations de l’Union européenne », Titre VII, 2021/1, no 6, pp. 50-57, p. 51. V. aussi N. Bacic Selanec, D. Petrić, « Migrating with dignity: conceptualising human dignity through EU migration law », European Constitutional Law Review, 2021, no 17(3), pp. 498-516. [↩]
- À titre d’exemple en dehors du droit de l’asile, depuis les années 2000 la dignité ou l’interdiction des traitements inhumains ou dégradants fondent des solutions jurisprudentielles permettant l’octroi de titres de séjour « vie privée et familiale », humanitaire, pour raisons de santé ou en tant qu’apatride. [↩]
- Cour de cassation, chambre criminelle, 30 janvier 2018, no 17-81.624. [↩]
- Article 2, sous g), de la directive « accueil ». [↩]
- CJUE, 14 janvier 2021, The International Protection Appeals Tribunal e.a., C322/19 et C385/19, EU:C:2021:11. [↩]
- CJUE, 27 septembre 2012, Cimade et GISTI, C179/11, EU:C:2012:594. [↩]
- CE, 20 octobre 2009, M. et Mme Mirzoian, no 332631. [↩]
- CE, 13 août 2010, Mbala Nzuri, no 342330. En outre, l’appréciation de l’atteinte au droit d’asile doit tenir compte, notamment, des moyens dont dispose l’autorité administrative (CE, 25 janvier 2011, Chakraboty, no 345800). [↩]
- Cour EDH, 21 janvier 2011, M. S. S. c. Belgique et Grèce, no 30696/09. [↩]
- Cour EDH, 8 décembre 2022, M. K. et autres c. France, nos 34349/18, 34638/18 et 35047/18. [↩]
- CJUE, 27 février 2014, Saciri e.a., C79/13, EU:C:2014:103. [↩]
- CE, 23 décembre 2016, Cimade, no 394819. [↩]
- CE, 17 janvier 2018, no 410280 [↩]
- CE, 11 décembre 2019, no 422857. En outre, lorsqu’un État membre a choisi d’octroyer les conditions matérielles d’accueil relatives au logement sous la forme d’une allocation financière, il peut en subordonner l’octroi à l’existence de frais de logement effectivement supportés par ce demandeur. Ainsi, dès lors que le demandeur dispose gratuitement d’un hébergement ou d’un logement par l’entremise de réseaux familiaux, amicaux ou associatifs, l’allocation financière ne lui est pas due tant que dure la gratuité de l’hébergement ou du logement. [↩]
- Cour EDH, 2 juillet 2020, N. H. et autres c. France, no 28820/13. [↩]
- CJUE, 12 novembre 2019, Haqbin, C233/18, EU:C:2019:956. Cette solution a été confirmée plus récemment [CJUE, 1er août 2022, Ministero dell’Interno (Retrait des conditions matérielles d’accueil), C422/21, EU:C:2022:616]. [↩]
- Cette disposition était issue du décret no 2018-1359 du 28 décembre 2018. [↩]
- Cour EDH, M. S. S. c. Belgique et Grèce, cit. note 28. [↩]
- « Lorsqu’il est impossible de transférer un demandeur vers l’État membre initialement désigné comme responsable parce qu’il y a de sérieuses raisons de croire qu’il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d’asile et les conditions d’accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l’article 4 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, l’État membre procédant à la détermination de l’État membre responsable poursuit l’examen des critères énoncés au chapitre III afin d’établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. » [↩]
- CJUE, 21 décembre 2011, N. S. e.a., C411/10 et C493/10, EU:C:2011:865, not. points 82 et 83. [↩]
- CJUE, 10 décembre 2013, Abdullahi, C394/12, EU:C:2013:813. [↩]
- CJUE, 19 mars 2019, Jawo, C163/17, EU:C:2019:218. La même solution a été retenue en matière de protection subsidiaire (CJUE, 19 mars 2019, Ibrahim e.a., C297/17, C318/17, C319/17 et C438/17, EU:C:2019:219). [↩]
- CE, 24 mars 2005, Hassan-Mohamed, no 278805 ; 14 mai 2009, Diallo, no 327792 ; 30 septembre 2009, Pashe, no 332310. [↩]
- Tribunal administratif de Paris, 25 mai 2009, no 0908427. [↩]
- CE, 1er mars 2010, Tahir, no 336857 ; 20 mai 2010, M. et Mme O., nos 339478 et 339479. [↩]
- Cour EDH, 11 juin 2009, S. D. c. Grèce, no 53541/07 ; 21 octobre 2014, Sharifi et autres c. Italie et Grèce, no 16643/09. [↩]
- En 2014, la Cour EDH a considéré que le renvoi d’une famille afghane vers l’Italie était susceptible de constituer une violation de l’article 3 de la Convention EDH au regard des défaillances que présentait le système italien des centres d’accueil d’urgence des réfugiés, en particulier s’agissant de la prise en charge adaptée à l’âge des enfants et au regard de la préservation du principe d’unité de famille (Cour EDH, 4 novembre 2014, Tarakhel c. Suisse, no 29217/12). [↩]
- Selon la Cour administrative d’appel de Nantes, la situation en Italie ne faisait pas obstacle au transfert, sauf des cas particuliers concernant une mère accompagnée de sa fille très jeune et de sa nièce, toutes trois atteintes d’une grave affection respiratoire (Cour administrative d’appel de Nantes, 22 décembre 2017, no 17NT02239) ou concernant une personne souffrant d’une hépatite B chronique et d’une anomalie cardiaque qui nécessitent absolument la poursuite des examens et du suivi médical mis en œuvre en France (Cour administrative d’appel de Nantes, 21 septembre 2018, no 17NT01285). En revanche, le Tribunal administratif de Paris a annulé un transfert vers l’Italie en raison des difficultés rencontrées par les autorités italiennes dans le traitement des demandes d’asile dans des conditions conformes à l’ensemble des garanties exigées par le respect du droit d’asile et en raison de la décision de ces autorités de refuser d’admettre sur le territoire italien des migrants déclarant vouloir solliciter l’asile (Tribunal administratif de Paris, 25 juin 2018, no 1807362). [↩]
- Tribunal administratif de Rouen, 29 mars 2011, no 1100950. [↩]
- CE, 7 juillet 2011, Nelson, no 350369. [↩]
- Cet État membre n’a enregistré que 45 premières demandes d’asile en 2022 (Conseil de l’Union européenne, « Infographie – Demandes d’asile dans l’UE », <https://www.consilium.europa.eu/fr/infographics/asylum-applications-eu>). Voir, à cet égard, les arrêts du 17 décembre 2020, Commission/Hongrie (Accueil des demandeurs de protection internationale), C 808/18, EU:C:2020:1029, et du 22 juin 2023, Commission/Hongrie (Déclaration d’intention préalable à une demande d’asile), C 823/21, EU:C:2023:504. [↩]
- Les Cours administratives d’appel de Bordeaux et Nantes ont retenu des analyses aboutissant à l’annulation de décisions de transfert (Cour administrative d’appel de Bordeaux, 27 septembre 2016, no 16BX00997 ; Cour administrative d’appel de Nantes, 19 octobre 2016, no 16NT00171 ; 21 septembre 2018, no 17NT02328). Les Cours administratives d’appel de Lyon et de Versailles ont retenu la position opposée (Cour administrative d’appel de Lyon, 31 mai 2016, no 15LY03569 ; 13 décembre 2016, nos 15LY02193, 16LY02285 et 16LY02818 ; Cour administrative d’appel de Versailles, 28 juin 2017, no 16VE02239). [↩]
- CJUE, 16 février 2017, C. K. e.a., C578/16 PPU, EU:C:2017:127. [↩]
- CJUE, 5 avril 2016, Aranyosi et Căldăraru, C404/15 et C659/15 PPU, EU:C:2016:198. V. cependant, en ce qui concerne l’exécution d’un mandat d’arrêt européen, CJUE, 18 avril 2023, E. D. L. (Motif de refus fondé sur la maladie), C699/21, EU:C:2023:295. [↩]
- CE, 11 octobre 2011, Artchakov et Artchakova, no 353006, où la preuve a été rapportée que l’état de santé du demandeur aurait été incompatible avec un voyage à destination du pays de renvoi ou que le traitement nécessaire n’existait pas dans ce pays. [↩]
- Par exemple, CE, 1er août 2023, no 476413 ; Tribunal administratif de Paris, 16 février 2024, no 2401097. [↩]
- Cour administrative d’appel de Paris, 28 juin 2018, no 18PA00145. [↩]
- CE, 28 mai 2021, no 447956. [↩]
- CJUE, 30 novembre 2023, Ministero dell’Interno e.a. (Brochure commune – Refoulement indirect), C228/21, C-254/21, C-297/21, C-315/21 et C-328/21, EU:C:2023:934 ; 29 février 2024, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Confiance mutuelle en cas de transfert), C-392/22, EU:C:2024:195. [↩]
- Selon l’article 1er, section A, paragraphe 1, sous 2), de cette convention, le terme « réfugié » s’applique à toute personne « [q]ui, par suite d’événements survenus avant le premier janvier 1951 et craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner. » [↩]
- Article 15, sous b), de la directive « qualification ». [↩]
- Voir les conclusions de l’avocat général Collins, du 13 juillet 2023, dans l’affaire Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Personnes s’identifiant aux valeurs de l’Union), C646/21, EU:C:2023:581. [↩]
- CJUE, 5 septembre 2012, Y et Z, C71/11 et C99/11, EU:C:2012:518. [↩]
- Conclusions de l’avocat général Bot, du 19 avril 2012, dans les affaires jointes Y et Z, C71/11 et C99/11, EU:C:2012:224, point 100. [↩]
- CNDA, 13 mai 2022, no 22000728. Un autre pays où, à titre d’exemple, les personnes homosexuelles constituent un groupe social est l’Afghanistan (CNDA, 8 juin 2022, no 21050501). Sur la notion de groupe social, en l’occurrence celui formé de toutes les femmes d’un pays ou d’un groupe de femmes présentant certaines caractéristiques, voir CJUE, 16 janvier 2024, Intervyuirasht organ na DAB pri MS (Femmes victimes de violences domestiques), C621/21, EU:C:2024:47. [↩]
- CJUE, 2 décembre 2014, A e.a., C148/13 à C150/13, EU:C:2014:2406. [↩]
- Par ailleurs, s’agissant plus spécifiquement de la bande de Gaza, la Cour nationale du droit d’asile a reconnu, dans le cadre des événements postérieurs au 7 octobre 2023, une situation de violence aveugle d’intensité exceptionnelle. Ainsi, du fait de la seule présence en tant que civil, un demandeur d’asile court un risque réel de subir une menace grave contre sa vie ou sa personne, ce qui constitue une atteinte grave au sens de l’article 15, sous c), de la directive « qualification » (CNDA, 12 février 2024, no 22054816). [↩]
- CNDA, 25 juillet 1996, no 247249, sous l’empire de la directive 2004/83, dont l’article 12 équivaut à l’article 12 de la directive 2011/95. [↩]
- CE, 22 novembre 2006, OFPRA, no 277373 ; CNDA, 14 mai 2008, no 493412. [↩]
- CE, 23 juillet 2010, OFPRA, no 318356. [↩]
- CJUE, 19 décembre 2012, Abed El Karem El Kott e.a., C364/11, EU:C:2012:826. [↩]
- CJUE, 25 juillet 2018, Alheto, C585/16, EU:C:2018:584. Il appartient aux autorités et juridictions nationales compétentes de vérifier que le départ du demandeur de la zone d’opérations de l’UNRWA était bien justifié par des motifs indépendants de sa volonté [CJUE, 3 mars 2022, Secretary of State for the Home Department (Statut de réfugié d’un apatride d’origine palestinienne), C349/20, EU:C:2022:151]. Pour déterminer si la protection ou l’assistance de l’UNWRA a cessé à l’égard d’une personne qui en a bénéficié auparavant, les juridictions nationales ou les autorités administratives compétentes doivent tenir compte de toutes les zones d’opération de l’UNWRA dans lesquelles le demandeur aurait effectivement accès à la protection ou à l’assistance de ce dernier [CJUE, 13 janvier 2021, Bundesrepublik Deutschland (Statut de réfugié d’un apatride d’origine palestinienne), C507/19, EU:C:2021:3]. [↩]
- CE, 24 décembre 2019, OFPRA, no 427017. [↩]
- CJUE, 5 octobre 2023, OFPRA (Statut de réfugié d’un apatride d’origine palestinienne), C294/22, EU:C:2023:733. [↩]
- Cour EDH, 13 décembre 2016, Paposhvili c. Belgique, no 41738/10. [↩]
- CJUE, 22 novembre 2022, Staatssecretaris van Justitie en Veiligheid (Éloignement – Cannabis thérapeutique), C69/21, EU:C:2022:913. [↩]
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