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Répartition de la dette de réparation des dommages causés par le DES en fonction des parts de marché

CA Versailles, 14 avril 2016, RG n° 16/00296.

Citer : Sophie Hocquet-Berg, 'Répartition de la dette de réparation des dommages causés par le DES en fonction des parts de marché, CA Versailles, 14 avril 2016, RG n° 16/00296. ' : Revue générale du droit on line, 2017, numéro 25012 (www.revuegeneraledudroit.eu/?p=25012)


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Décision(s) citée(s):
  • Cour de cassation, première Chambre civile, 14 avril 2016, Mme Y contre la Clinique Saint-Jean, numéro de pourvoi 14-23909


Contexte : Dans cette décision rendue le 14 avril 2016, la cour d’appel de Versailles adopte une position novatrice en jugeant que la répartition de la charge du dommage causé par l’exposition in utero au DES (Distilbène® ou Stilboestrol-Borne®) doit s’opérer au regard de la part de chacun de chacune des spécialités des deux laboratoires pharmaceutiques.

Litige : Une femme exposée in utero au DES, sans être en mesure d’établir laquelle des deux spécialités fabriquées par les sociétés UCB Pharma et Novartis a été administrée à sa mère durant sa grossesse, saisit le tribunal de grande instance de Nanterre pour obtenir leur condamnation à réparer ses préjudices résultant de malformations gynécologiques et de son infertilité. Après avoir déclaré les deux laboratoires responsables in solidum de ses préjudices personnels ainsi que ceux de ses proches, le tribunal de grande instance de Nanterre dit que la société UCB Pharma contribuera à la dette à hauteur de 95 % et la société Novartis seulement à hauteur de 5 %.

Solution : La cour d’appel de Versailles confirme le jugement rendu le 22 mai 2014 aux motifs que :

« Pour fixer la contribution à la dette, le tribunal a retenu que, si les fautes commises sont d’une nature identique, leur degré de gravité doit être apprécié en tenant compte de l’importante disparité de présence sur le marché de chacune des spécialités, UCB étant en situation de quasi-monopole. Il en a déduit que l’obligation de vigilance et de surveillance d’UCB Pharma était renforcée, en sorte que la gravité de son manquement l’était également. En outre, la probabilité que Mme F. ait été exposée à l’une ou à l’autre des spécialités est nécessairement proportionnelle aux parts de marché respectives des deux médicaments. Il en a tiré la conséquence que la répartition de la charge du dommage devait s’opérer proportionnellement au risque pour chacun des laboratoires de l’avoir causé, qui ne pouvait s’évaluer qu’au regard de leurs parts de marché respectives.

UCB Pharma fait valoir que, sur le plan de la causalité, c’est le lien entre le dommage et l’exposition au DES qui doit être établi. Or ce lien est analogue pour les deux médicaments, puisque, contenant le même principe actif, ils peuvent provoquer les mêmes effets. Il n’existe donc aucune hiérarchie entre eux sur le plan de la causalité. Ce laboratoire ajoute que faire dépendre d’une part de marché l’importance de la contribution reviendrait à encourager singulièrement la négligence de la personne recherchée dans la mesure où elle serait minoritaire, est de surcroît parfaitement hasardeux, compte tenu de la difficulté à évaluer cette part, et inéquitable, l’acteur économique dominant pouvant ainsi être conduit à indemniser un dommage qu’il n’a pas causé, dans l’hypothèse où ce serait le produit concurrent qui aurait été absorbé. Il rappelle encore qu’ayant eu l’occasion de soumettre ce point à la Cour de cassation à l’occasion d’une précédente affaire, Novartis s’est désisté de son pourvoi et a ainsi acquiescé à l’arrêt qui retenait à sa charge une contribution de 50 %.

Novartis devenu Glaxosmithkline produit une étude déterminant les prescriptions respectives d’un panel de médecins, notamment pour 1968 faisant apparaître que sa part de marché est de 1,7 %. Ce laboratoire expose que le régime de responsabilité consacré par la jurisprudence dite « Ferrero » étant dérogatoire au droit commun puisque fondé sur une probabilité, elle-même déduite de la présence sur le marché de deux responsables possibles, la contribution à la dette entre eux doit être également répartie selon le même critère, pour des raisons de cohérence. Il ajoute que la solution adoptée par le tribunal a été unanimement approuvée par la doctrine, qui souligne notamment qu’il serait contraire à l’équité que celui qui a la part prépondérante du marché ne contribue à la dette de réparation qu’à hauteur de sa part virile, alors que c’est lui qui a tiré le plus grand profit de la vente du produit considéré, et que la compensation de la sévérité liée à la condamnation in solidum de tous les responsables potentiels doit être équilibrée par une répartition du poids de la dette de réparation en fonction des parts de marché. Il fait en outre valoir que le raisonnement usuel relatif aux co-responsables d’un même dommage identiquement fautifs n’est pas pertinent, puisque l’on se trouve en présence d’une hypothèse différente, soit celle d’un seul auteur sur les deux possibles, dont l’identité demeure indéterminée.

Il ne peut être tiré aucune conséquence du désistement de son pourvoi par Novartis au regard du rapport produit.

UCB Pharma souligne avec raison qu’il ne peut être question de retenir contre elle une faute d’une gravité supérieure à celle de Novartis en considération de l’importance de sa part de marché, ce qui reviendrait à mettre à la charge d’un agent économique minoritaire, une moindre exigence de vigilance. Le manquement ci-dessus relevé est en effet identique, qu’il s’agisse d’UCB Pharma ou de Novartis, en ce qui concerne sa gravité.

En ce qui concerne son rôle causal, UCB Pharma fait encore justement valoir qu’il ne peut davantage être considéré comme supérieur en raison de sa place prépondérante sur le marché, puisqu’il s’agit d’une responsabilité alternative, dans laquelle le dommage est causé par une seule faute et un seul produit, dont il ne peut être déterminé, parmi les auteurs et médicaments possibles, auquel il est imputable.

Néanmoins, la responsabilité in solidum des deux laboratoires est en réalité fondée, non sur un lien de causalité strictement entendu, mais sur une présomption d’imputabilité à une prise de risque fautive, soit en d’autres termes sur une probabilité que l’un ou l’autre des laboratoires soit l’auteur du dommage, à raison de la faute identique commise par tous deux.

Or le risque imputable à Novartis est, au vu de sa part de marché, bien moindre. Ce laboratoire est donc bien fondé, dans ses rapports avec son coresponsable, à demander que la contribution à la dette soit proportionnelle au risque qui lui est imputable, dont on ne voit pas comment elle pourrait être appréciée si ce n’est par référence à leurs parts de marché respectives.

Le tribunal sera donc approuvé d’avoir retenu ce critère, étant observé que la faculté reconnue à l’un des auteurs présumés de rapporter la preuve que son produit n’est pas la cause du dommage demeure, en sorte que le grief relatif à la violation de ses droits fondamentaux résultant de l’application d’un tel critère évoquée par UCB Pharma n’est pas démontré.

En ce qui concerne la détermination de la part de marché respective des deux laboratoires, la cour constate que, contrairement à l’opinion exprimée par UCB Pharma, les éléments produits sur ce point sont suffisamment précis, en ce que, notamment, ils comprennent des données concernant la période de grossesse de Mme P., en sorte qu’il n’existe, en l’espèce, aucune réelle difficulté pour cerner la part de marché respective des deux laboratoires. Elle adopte sans aucune réserve les motifs pertinents retenus sur ce point par le tribunal.

L’équivalence des fautes retenues contre les sociétés UCB Pharma et Novartis aux droits de laquelle se trouve la société Glaxosmisthkline Santé Grand Public conduit à rejeter la demande de garantie formulée par UCB Pharma contre la société Glaxosmisthkline (…). ».

Analyse : Cette décision de la cour d’appel de Versailles repose sur une méconnaissance délibérée des critères habituellement retenus pour répartir la dette de réparation entre coresponsables.

En effet, la jurisprudence retient avec constance que, lorsque deux coauteurs sont tenus en raison de leur faute, la répartition est faite en fonction de la gravité des fautes en présence. Si les coauteurs d’un même dommage ont commis une faute d’une gravité équivalente, la contribution à la dette se fait par parts égales. Elle se fait également par parts égales lorsque les coauteurs sont tous tenus au titre d’une responsabilité sans faute. En l’occurence, la faute de vigilance commises par laboratoires étant identique, chacun d’eux devrait supporter 50 % du poids de l’indemnisation.

Des auteurs invitent à repenser ces critères de répartition de la dette (V. P. Jourdain, Pour un réexamen du droit des recours en contribution, Resp. civ. et assur. 2009, dossier 3 ; M. Ranouil, Les recours entre co-obligés, Paris I, éd. IRJS 2014),  en prenant notamment en considération le rôle causal de chacun dans la réalisation du dommage (V. Cass. 1re civ., 14 avril 2016, n° 14-23.909, à paraître au bulletin). En particulier, il est  soutenu que ces critères ne sont pas adaptés lorsque la responsabilité découle de la présomption d’imputabilité récemment posée par la Cour de cassation, lorsqu’il est établi qu’une molécule est la cause de la maladie dont souffre la victime, sans que celle-ci ne parvienne à établir lequel des deux laboratoires a fourni le médicament effectivement administré (V. C. Quezel-Ambrunaz, La fiction de la causalité alternative, D. 2010 p. 62). Dans une telle hypothèse, il appartient à chacun des laboratoires de prouver que son produit n’était pas à l’origine du dommage (Cass. 1re civ., 24 septembre 2009, n°08-10081, Bull. I, n°186, JCP G 2009 381 note S. Hocquet-Berg, Resp. civ. et ass. 2009 étude 15, Ch. Radé, RDC 2010, p. 90, obs. J.-S. Borghetti ; D. 2010, p. 51, obs. Ph. Brun ; RTD civ. 2010, p. 111, obs. P. Jourdain).

S’inspirant de modèles étrangers, certains ont proposé une répartition de la dette en fonction de la part de marché détenue au moment de la mise en circulation par chacun des producteurs (F. G’Sell-Macrez, La preuve du lien de causalité : comparaisons franco-américaines à propos des arrêts Distilbène, LPA 29 octobre 2010 n° 216 p. 6 ; Cl. Quétand-Finet, note sous CA Paris, 26 octobre 2012, D. 2012, p. 2859). Il faudrait raisonner donc désormais raisonner en recherchant la part de risques imputables à chacun des laboratoires. Cette idée séduit un grand nombre d’auteurs (V. Ph. Stoffel-Munck, JCP 17 oct. 216, n° 42, 1117, n° 8) et a manifestement séduit la cour d’appel de Versailles.

Cependant, elle se heurte à un certain nombre d’objections (V. S. Hocquet-Berg, Resp. civ. et assur. 2016, comm. 254). En effet, non seulement le critère des parts de marché est contraire à nos traditions et notre système juridique (V.H. Lécuyer, En route vers le market share liability ? Quelles suites à la jurisprudence relative à la responsabilité du fait du DES ?, LPA 22 mai 2012, n° 102, p. 3) mais il pourrait aboutir à retenir, comme dans les systèmes juridiques où il est appliqué, une répartition de la réparation dès le stade de l’obligation à la dette (V. J.-F. Borghetti, le tribunal de Nanterre consacre le market share liability dans le contentieux du DES, D. 2014, p. 1434, spéc. n° 12).

En outre, il ne paraît guère compatible avec la possibilité pour un laboratoire de s’exonérer de la présomption d’imputabilité dans une affaire particulière (V. Ch. Quézel-Ambrunaz, JCP G 2014, p. 575). En effet, à partir du moment où l’on considère que la responsabilité des laboratoires est proportionnelle à la probabilité d’exposer les patients à l’une ou l’autre des spécialités qu’ils commercialisent, il n’est plus possible de justifier l’exonération par la preuve que son produit n’est pas la cause du dommage.

Par ailleurs, le critère tiré des parts de marché apparaît difficile à mettre en œuvre dans la mesure où, comme le montre d’ailleurs la présente affaire, chacun des laboratoires avancent des chiffres très différents, ceux-ci variant notamment selon la définition du marché retenue. En outre, l’écoulement du temps altère évidemment la fiabilité des données.

Enfin, il est très spécifique au contentieux du DES et impossible à transposer aux autres cas dans lesquels la Cour de cassation a admis une présomption d’imputabilité, comme c’est notamment le cas en matière d’infection nosocomiale (Cass. 1re civ., 17 juin 2010, n° 09-67011, Bull. I, n° 137 ; JCP 2010, n° 41, p. 1015, obs. L. Bloch ; JCP G 2010, n° 36, p. 70, note O. Gout ; D. 2010, p. 2092, n° 6, obs. C. Creton ; D. 2011, p. 35, n° 2, obs. Ph. Brun ; RTD. civ. 2010, p. 567, obs. P. Jourdain ; RDC 2010, p. 1247, obs. G. Viney ; Resp. civ. et assur. 2010, comm. 259, note Ch. Radé. V. égal. C. Bonnin, La reconnaissance de la condamnation in solidum pour les infections nosocomiales, D. 2011, p. 283).

Cependant, comme l’a justement dit un auteur (Ph. Stoffel-Munck, JCP 17 oct. 216, n° 42, 1117, n° 8), la parole est maintenant à la Cour de cassation, puisque celle-ci est évidemment saisie d’un pourvoi à l’encontre de cette décision.

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About Sophie Hocquet-Berg

Professeur de droit privé et de sciences criminelles - Université de Lorraine (Metz)
Avocat Associé au Barreau de Metz
contact@mediclaw.fr
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https://www.facebook.com/spaeteravocat/

Sophie Hocquet-Berg

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