Cour de cassation
chambre sociale
Audience publique du mercredi 18 février 2004
N° de pourvoi: 02-60567
Publié au bulletin Rejet.
Président : M. Boubli, conseiller doyen faisant fonction., président
Rapporteur : Mme Andrich., conseiller rapporteur
Avocat général : M. Foerst., avocat général
Avocats : la SCP Boutet, la SCP Célice, Blancpain et Soltner., avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu que le syndicat UNSA-USCP fait grief au jugement attaqué (tribunal d’instance de Paris 7e, le 21 mai 2002) de l’avoir débouté de sa demande tendant à voir reconnaître l’existence d’une unité économique et sociale entre les députés composant l’assemblée nationale pris en leur qualité d’employeur de collaborateurs parlementaires, alors, selon le moyen :
1 / que nul n’est autorisé à se constituer de preuve à lui-même, qu’en se fondant sur deux lettres émanant du cabinet des questeurs, dont l’une du 7 février 2002, postérieure à sa saisine en date du 14 février 2002, pour juger que ceux-ci n’étaient investis que d’un mandat de gestion des aspects purement matériels et financiers du contrat de travail et non d’un réel pouvoir de décision, le tribunal d’instance a violé l’article 1315 du Code civil, ensemble l’article L. 431-1 du Code du travail ;
2 / qu’il incombe au juge de se prononcer sur les documents régulièrement versés aux débats et soumis à son examen ; qu’en se bornant à se fonder sur deux pièces émanant du cabinet des questeurs pour écarter l’existence d’un pouvoir de décision de leur part, sans examiner aucun des nombreux documents versés aux débats par le syndicat exposant tendant à démontrer que sur bien des aspects fondamentaux de la relation de travail le pouvoir de décision appartenait aux questeurs sans accord préalable des députés employeurs, le tribunal d’instance a violé l’article 1353 du Code Civil, ensemble l’article L. 431-1 du Code du travail ;
3 / que, dans ses conclusions d’appel, le syndicat exposant avait fait valoir que c’était le bureau de l’Assemblée nationale qui avait autorisé les députés à engager des collaborateurs et leur avait alloué une enveloppe budgétaire à cette fin, que les licenciements en cas de non renouvellement du mandat du député intervenaient sur décision de l’Assemblée nationale qui fixait la date à laquelle elle cesserait de rémunérer les collaborateurs, que l’assemblée nationale décidait de la subvention qu’elle allouait aux associations et au syndicat regroupant les collaborateurs, que l’Assemblée nationale avait négocié directement avec les représentants des collaborateurs et décidé sans accord préalable des députés de l’étude d’un régime de prévoyance, de l’allocation d’une prime de treizième mois et d’une prime de précarité, de la mise en place de la réduction du temps de travail ; qu’en omettant d’examiner ces divers éléments de nature à caractériser le pouvoir de direction effectivement exercé par l’Assemblée nationale représentée par les questeurs sur les assistants parlementaires, le tribunal d’instance a entaché sa décision d’un défaut de réponse à conclusions, violant l’article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
4 / qu’ayant constaté que les questeurs n’étaient investis d’aucun mandat de la part des députés pour lesquels ils assuraient cependant la gestion matérielle et financière des contrats de travail ainsi que la gestion centralisée des licenciements dictés par le résultat des élections, ce dont il résultait que les questeurs se substituaient purement et simplement aux députés dans leurs prérogatives d’employeur, le tribunal d’instance, qui en a cependant conclu l’absence de pouvoir de direction de la part des questeurs, n’a pas déduit de ses propres constatations les conséquences légales qui s’en évinçaient nécessairement et a violé l’article L. 431-1 du Code du travail ;
5 / que les questeurs sont des membres élus du bureau de l’Assemblée nationale, chargés des services administratifs et financiers, agissant au nom et pour le compte de cette Assemblée, attraite en la cause en la personne de son président ; qu’en se bornant dès lors à affirmer qu’il était impossible d’inclure dans le périmètre de l’unité économique et sociale constituée de l’ensemble des députés le cabinet des questeurs, le tribunal d’instance a méconnu ses pouvoirs et a violé l’article L. 431-1 du Code du travail ;
6 / qu’ayant constaté que les assistants parlementaires étaient soumis aux mêmes conditions de travail, que les locaux et le matériel de fonctionnement leur étaient communs, de même que les formations, que la réduction du temps de travail leur avait été proposée dans les mêmes termes, le tribunal d’instance, qui a cependant exclu l’existence d’une communauté de travailleurs, a, derechef, violé l’article L. 431-1 du Code du travail ;
Mais attendu qu’il n’existe aucune unité de direction sur les collaborateurs parlementaires ;
D’où il suit que c’est à bon droit que le tribunal d’instance a décidé que les députés composant l’assemblée nationale ne constituent pas une unité économique et sociale ;
Que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit février deux mille quatre.
Analyse
Publication : Bulletin 2004 V N° 56 p. 53
Décision attaquée : Tribunal d’instance de Paris 7e , du 21 mai 2002
Titrages et résumés : ELECTIONS PROFESSIONNELLES – Comité d’entreprise et délégué du personnel – Cadre de la représentation – Unité économique et sociale – Reconnaissance – Exclusion – Applications diverses.
Les députés composant l’Assemblée nationale, pris en leur qualité d’employeurs de collaborateurs parlementaires, ne constituent pas une unité économique et sociale dès lors qu’il n’existe aucune unité de direction sur ces collaborateurs.
ELECTIONS PROFESSIONNELLES – Comité d’entreprise et délégué du personnel – Cadre de la représentation – Unité économique et sociale – Reconnaissance – Conditions – Présence en son sein de l’entité juridique exerçant le pouvoir de direction