La question de la disponibilité des données publiques est une question récurrente. Ainsi, le 2 avril dernier, un média en ligne rendait publics plusieurs milliers de données issues du CHU de Toulouse relatives à de graves dysfonctionnements internes1. Ce « CHU Leaks » résulte d’une erreur informatique de l’hôpital qui a eu pour conséquence de rendre plus de 26 000 fiches d’incidents disponibles sur l’intranet du CHU et a permis à ce média de se les procurer. Ces données recueillies par le CHU de Toulouse n’avaient pas vocation à être rendues publiques, toutefois leur publicité a remis au centre des débats, outre la question des dysfonctionnements dans le milieu hospitalier, la question de l’information des usagers concernés par ces dysfonctionnements2. Comme le met en évidence cet exemple, l’accessibilité des données publiques est fondamentale pour informer les administrés quant à leur situation.
La notion même d’open data est une notion relativement récente en France ou en tout cas son acception en tant qu’instrument au service des administrés est récente comme a pu le mettre en évidence le professeur Cluzel-Métayer3. En effet, ce sont différentes lois qui ont introduit l’open data en France : la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, la loi du 28 décembre 2015 relative à la gratuité et aux modalités de la réutilisation des informations du secteur public et la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Sans pour autant revenir de manière exhaustive sur cette notion, il convient de retenir que l’open data, qui se définit en sens européen par la donnée publique ouverte, consiste en la mise à disposition des données publiques à l’usage de tous les administrés4. Cette définition exclut donc de l’open data les données ouvertes d’origine privée présentes dans le Big data5.
La notion importante à l’aune de laquelle l’open data sera analysée dans ce développement est la notion d’enfants. Elle renvoie à toutes personnes âgées de moins de 18 ans6, elle recouvre donc tant les enfants en bas âge que les adolescents qui sont les enfants âgés de 10 à 18 ans7. Cette dernière catégorie doit faire l’objet d’une attention particulièrement puisqu’en deçà de 10 ans les enfants sont peu ou moins amenés à utiliser internet8. De manière générale, les enfants sont caractérisés par leur vulnérabilité, par le fait qu’ils ont besoin d’être représentés pour exercer leurs droits et par le fait qu’ils ont besoin d’assistance pour les connaitre. L’open data peut dès lors s’avérer utile pour eux puisqu’il se présente comme un instrument destiné à améliorer l’information des administrés. Il faudra donc se pencher ici sur la relation entre l’open data et l’information des enfants quant à leurs droits.
L’étude de cette relation apparaît d’autant plus pertinente qu’il existe un phénomène d’actualité qui peut être mis en perspective avec cette étude. Il s’agit de la disponibilité des données en ligne relatives aux moyens et à la manière pour un adolescent non accompagné de rejoindre la Syrie ou l’Iraq afin de combattre pour le groupe Daech. En effet, si l’on se met dans la peau d’un adolescent qui souhaite rejoindre ce groupe et que l’on tape sur un moteur de recherche des phrases telles que « comment rejoindre Daech ? », « comment aller en Syrie ? » ou « comment éviter la police pour aller en Syrie ? » qui correspondent au genre de questions qu’un adolescent pourrait se poser – le constat est sans appel. Il est possible d’obtenir des résultats efficaces avec une facilité déconcertante jusqu’à aboutir sur un site permettant de faire une demande de visa pour se rendre en Turquie9. Effectivement, toutes les données, qu’elles soient publiques c’est-à-dire issues de l’open data ou qu’elles soient privées établissent que le meilleur moyen pour rejoindre le groupe Daech est de passer par la voie terrestre en traversant la Turquie.
Ainsi, lorsqu’on constate la facilité extrême avec laquelle un adolescent peut trouver sur internet des informations pour rejoindre un tel groupe, il est possible de se demander s’il lui serait aussi facile de savoir quels sont ses droits et s’il peut mettre en œuvre leur garantie sur internet. Par conséquent, il convient de répondre à la question de savoir si l’open data au sens de données publiques ouvertes, permet aux enfants d’avoir accès à leurs droits et si oui, dans quelle mesure10.
Il conviendra dans un premier temps de dresser le panorama des données publiques susceptibles d’informer les enfants sur leurs droits et sur la manière de leur mettre en œuvre (I). Dans un second temps, il conviendra de faire la critique de cet open data relatif à ces données, critique issue de la concurrence efficace des données ouvertes d’origine privée qui aboutit à rendre cet open data largement insuffisant (II).
I.- Le panorama de l’open data relatif aux droits de l’enfant
Les données relatives aux droits de l’enfant sont largement disponibles sur internet. En effet, lorsqu’on tape les mots « droits de l’enfant » dans le moteur de recherche Google, nous obtenons plusieurs millions de résultats de recherche en moins d’une seconde.
S’agissant plus précisément des données publiques relatives aux droits de l’enfant, elles sont aussi disponibles et consultables en ligne (A) mais ce constat de disponibilité résulte d’un raisonnement d’adulte et a fortiori d’un raisonnement de chercheur. Or, la question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si les données publiques relatives aux droits de l’enfant sont accessibles aux enfants. A cette question, il faudra apporter une réponse nuancée puisqu’il s’avère que l’accessibilité de ces données aux enfants pose un véritable problème en ce sens qu’elles sont inadaptées à différents égards (B).
A. La disponibilité des données publiques relatives aux droits de l’enfant sur internet
En tant qu’adulte, il est possible de trouver un certain nombre de données publiques portant sur les droits de l’enfant. Pour prendre connaissance de ces droits, les données publiques en ligne auxquelles il est utile de se référer sont les données relatives aux obligations opposables aux personnes publiques et privées, notamment issues de conventions internationales, ou encore les données issues de la législation interne relative à ces droits. Ces premières données sont disponibles et répertoriées sur le site Légifrance, qui a pour mission de service public la diffusion du droit.
En outre, les données disponibles et à consulter sont également celles issues du Défenseur des droits, Jacques Toubon. En tant qu’Autorité Administrative Indépendante (AAI), le Défenseur des droits a un rôle à jouer dans l’information et la protection des droits de l’enfant en tant qu’il a pour adjoint un Défenseur des enfants, Geneviève Avenard, dont la mission est exclusivement la défense et la promotion des droits de l’enfant en France. Chaque année le Défenseur des droits publie un rapport en ligne en développant certaines thématiques. En 2017, son rapport portait sur le droit à la santé des enfants et la mise en œuvre de ce droit ainsi que sur le droit à l’éducation à la sexualité. Outre son rapport annuel et en plus de certains rapports plus ponctuels et des avis11 qu’il peut rendre, notons que le site du Défenseur des droits et plus précisément la page du Défenseur des enfants présente le contenu des droits de l’enfant, le champ d’action du défenseur des droits et fait des renvois aux sources pertinentes, en particulier à la Convention internationale sur les droits de l’enfant.
Par ailleurs, une autre interface constitue une source d’information sur les droits de l’enfant, il s’agit du site « Vie publique », qui développe des synthèses sur l’état du droit dans certains domaines. Ce site participe au service public de l’information aux administrés et consacre plusieurs pages aux droits de l’enfant. Il fait d’ailleurs de nombreux renvois au site du Défenseur de droits12.
Parmi d’autres sources de données publiques, nous pouvons citer les données disponibles sur les sites des différents ministères, comme : le site du Ministère de l’éducation nationale13qui développe l’ensemble des droits relatifs à l’enseignement des enfants et aux actions éducatives qui doivent leur être destinées ; encore le Ministère des Solidarités et de la Santé14 qui développe plusieurs rubriques relatives aux droits de l’enfant comme le droit d’être entouré, d’être protégé, d’être soigné, etc.
Sans développer davantage cet aspect, il est incontestable que les données publiques relatives aux droits de l’enfant sont disponibles sur internet. Toutefois, comme cela a été mis en évidence supra, la question qu’il convient de se poser est celle de savoir si toutes ces données sont accessibles aux enfants.
Concrètement plusieurs problèmes tenant à l’inadaptation de ces données viennent nuire voire empêcher les enfants d’avoir accès aux données publiques susceptibles de les informer sur leurs droits.
B. L’inadaptation des données publiques relatives aux droits de l’enfant
Deux problèmes distincts mais pourtant liés à l’accessibilité des données publiques rendent ces données inadaptées pour des enfants. Le premier problème concerne le référencement de la donnée publique dans le Big data. Il constitue un véritable obstacle à l’accès des enfants à leurs droits. En effet, comme cela a été mentionné lorsqu’on tape les mots « droits de l’enfant » sur le moteur de recherche Google, nous obtenons plusieurs millions de résultats de recherche en moins d’une seconde. Néanmoins, toutes les données publiques auxquelles il a été fait référence précédemment n’apparaissent pas dès la première page de résultat de recherche. La première source de données publiques qui apparaît dans les résultats de recherche se trouve sur la deuxième page de résultat et il s’agit des données issues du site du Défenseur des droits. Toutes les autres données doivent être recherchées précisément pour pouvoir être trouvées. Or, un élément pragmatique est à prendre en considération de manière particulière lorsqu’on traite des enfants, même s’il s’agit d’adolescents : combien d’utilisateurs d’internet décident d’accéder aux résultats de recherche se trouvant au-delà de la première page de résultat ? Il est possible de considérer qu’une minorité d’utilisateurs est concernée mais si l’utilisateur est un adolescent, cette minorité tend à disparaitre. Si aucun chiffre n’existe sur cette question, il semble très probable que les adolescents ne vont pas voir quels sont les résultats qui apparaissent après la première page de résultats de recherche.
Il en résulte un premier problème tenant au mauvais référencement des données publiques relatives aux droits de l’enfant apparaît et empêche les enfants d’avoir accès à leurs droits.
Le second problème est celui de leur accessibilité non pas en termes de référencement mais en termes d’intelligibilité du contenu des données publiques. Les données publiques ne sont pas adaptées aux besoins des enfants en ce sens qu’elles sont trop construites pour leur être clairement intelligibles.
Pour ce qui concerne les données publiques évoquées issues des rapports des Ministères ou du Défenseur des droits, la difficulté qui se pose également est un problème d’accessibilité au sens de l’intelligibilité des données par des enfants. Concrètement, les données issues des différents Ministères sont incompréhensibles pour eux. De même, les données issues du site « Vie publique » – qui ont pourtant vocation à être consultées par le plus grand nombre – ne sont pas compréhensibles pour des adolescents. Les seules données issues de l’open data pouvant présenter un intérêt de ce point de vue sont celles présentes sur le site du Défenseur des droits, à l’exclusion des rapports15.
Ainsi, lorsque le problème du référencement a été surmonté, il est possible d’accéder à un site bien conçu et intelligible pour les adolescents avec la présence immédiatement visible d’une case qui se présente sous la forme d’un bouton sur lequel il est écrit « Saisir le défenseur des droits ». Grace à ce dispositif, un adolescent peut contacter cette AAI en ligne, même si le terme « saisir » mériterait d’être remplacé par un terme moins juridique16. Il faut aussi noter la présence d’un numéro de téléphone qu’il est possible de composer pour joindre cette AAI autrement que par internet. La présence de ce numéro à mettre particulièrement en évidence au regard du fait que la présence d’un tel numéro se fait de plus en plus rare lorsqu’il s’agit de joindre une administration. Un autre élément est à noter puisque lorsqu’on accède au site du Défenseur des droits depuis un appareil Apple (smartphone de type Iphone, ordinateur Mac ou tablette Ipad) et que l’on clique sur le numéro de téléphone, cela ouvre automatiquement l’application Facetime. De la même manière, si l’on clique sur ce numéro depuis un appareil sous Android (smartphone ou tablette) ou depuis un appareil sous Windows (PC ou Windowsphone), l’application Skype qui sera automatiquement mobilisée. Un réel effort a donc été fait pour communiquer avec les adolescents grâce à leurs outils de communication.
Il convient néanmoins de nuancer ces efforts sont à nuancer par le problème du référencement puisque comme cela a été signalé supra le site du Défenseur des droits n’apparaît qu’à la deuxième page de résultats de recherche lorsqu’on fait une recherche générale sur les droits de l’enfant. Il faudrait donc impérativement améliorer le référencement des sites publics relatifs à la protection des droits de l’enfant car en pratique si les données publiques existent, elles sont peu exploitées.
Il y a, par conséquent, une absence manifeste de données publiques relatives aux droits de l’enfant qui soient accessibles aux enfants. Or, ce vide laissé par l’administration caractérise l’insuffisance de l’open data puisque face aux carences des données publiques, ce sont les données ouvertes d’origine privée qui s’avèrent remplir leur fonction avec plus ou moins d’efficacité.
II.- L’insuffisance de l’open data relatif aux droits de l’enfant : la concurrence efficace des données ouvertes d’origine privée
Face à la carence de données publiques accessibles, les données ouvertes d’origine privée sont une alternative en raison principalement de leur pragmatisme (A), ce qui a eu pour conséquence de faire de ces données privées la source principale d’information des enfants quant à leurs droits (B).
A. Le pragmatisme des données ouvertes d’origine privée par rapport à l’open data
Outre le manque d’intelligibilité des données publiques, une autre critique peut s’élever contre ces données : leur manque de pragmatisme. En effet, lorsqu’un enfant va sur internet pour se renseigner sur ses droits, le plus souvent c’est pour un problème précis.
Pour illustrer ce propos, prenons un exemple concret, celui d’un adolescent qui serait maltraité par l’un de ses parents17 et qui taperait sur internet les mots « mes parents me frappes que faire ? ». Il faut noter le fait que dès la première page de résultats de recherche, une réponse du Ministère des Solidarités et de la Santé apparaît. Toutefois, lorsqu’on accède à la page de ce ministère, nous constatons qu’elle porte sur : « que faire et à qui s’adresser face à une crise suicidaire ? » 18. Deux remarques sont à soulever. D’une part, le seul site public qui apparaît parmi les premiers résultats ne répond pas à la question de l’enfant. Effectivement, il est à supposer que l’adolescent en cause attend une réponse qui lui propose des interlocuteurs à qui parler de ce problème, interlocuteurs qui pourront le cas échéant prendre des mesures pour assurer sa protection. Or, ici les seules données publiques accessibles traitent de la réaction à adopter face à un désir de suicide alors même qu’il y a, a priori, plusieurs étapes entre le moment où un enfant s’interroge sur le comportement à adopter face à une situation de maltraitance et le moment où il va avoir des pensées suicidaires19. C’est précisément entre ces deux moments qu’une intervention et donc une information sont indispensables, ce que n’apportent pas les données publiques accessibles sur cette question précise.
D’autre part, l’autre élément qu’il faut mettre en évidence en plus de l’inadaptation de la réponse est le fait que ce site public ne contient pas que des données publiques. Il renvoie à un certain nombre de données privées issues d’associations telles que SOS Amitié, Suicide écoute ou Fil Santé Jeunes, etc. Ainsi, sur cette page du Ministère des Solidarités et de la Santé ; la part de données privées tendant à être équivalente voire plus importante que la part de données publiques.
Il faut conclure sur ce simple exemple qu’en termes d’information des enfants quant à leurs droits et aux démarches qu’ils peuvent entreprendre, il existe une certaine forme de complémentarité des données publiques et privées. Cette complémentarité se manifeste en ce sens que les personnes publiques, en l’espèce le Ministère des Solidarités et de la Santé, renvoient à des données privées traduisant la reconnaissance implicite d’une carence des données publiques pour répondre aux besoins spécifiques des enfants.
Ce manque de pragmatisme des données publiques a eu pour conséquence d’ériger les données ouvertes d’origine privée comme principale source d’information des enfants sur les droits.
B. Les données ouvertes d’origine privée comme principale source d’information des enfants sur leurs droits
Les informations qui arrivent en tête des résultats de recherche lorsqu’on veut en savoir plus sur les droits de l’enfant sont issues de données privées et non pas publiques.
Ainsi, si l’on reprend la recherche initiale relativement large en tapant les mots « droits de l’enfant » sur internet20, les premiers résultats sont des sites privés relatifs à des associations et des Organisations non gouvernementales (ONG). Sur ce point, un élément en particulier est à soulever. Il s’agit d’une distinction qu’il faut faire parmi ces résultats entre d’une part, ceux qui constituent une annonce résultant ainsi d’un accord avec le moteur de recherche pour rendre plus visible le résultat21 et d’autre part, ceux n’étant pas des annonces et apparaissant uniquement en tant qu’ils répondent à une recherche. Les annonces ne répondent pas nécessairement de la manière la plus pertinente à la recherche réalisée. Sur la recherche générale relative aux droits de l’enfant, certaines annonces apparaissent, telles que Amnesty International France ou encore l’association Partage, sans pour autant qu’elles soient les plus aptes à répondre aux besoins d’un enfant. Parmi les résultats de recherche qui ne constituent pas des annonces, nous retrouvons des ONG comme Humanium22 ou le BICE23 (Bureau International Catholique de l’Enfance). Il est également possible de retrouver l’incontournable Wikipédia24 qui consacre une page à cette thématique.
Par ailleurs et de la même manière, si l’on fait une recherche plus précise comme celle mentionnée supra, « mes parents me frappent » ou encore une recherche qui soulève un autre problème d’actualité tel que « je me fais harceler au collège », les informations qui répondent à ces recherches ne sont pas issues de données publiques mais de données privées qui vont différer des données privées issues d’associations ou d’ONG mentionnées précédemment. En effet, pour des recherches beaucoup plus précises, ce sont en priorité des forums entre particuliers qui y répondent.
Ainsi, les données les plus efficaces pour aboutir à une information de l’enfant vont résulter du « peer to peer »25, c’est-à-dire de l’échange direct de données entre plusieurs utilisateurs d’internet via une plateforme. Les forums sont les sources d’information principales des enfants qui cherchent à avoir accès à leurs droits car ce sont les plus accessibles dans les deux sens du terme. Elles sont les plus accessibles, d’une part, en termes de référencement étant donné que ces forums répondent à des problématiques précises. Les moteurs de recherche fonctionnant par mots-clefs, les résultats qui vont apparaître vont répondre au regard des mots clefs donc si un forum existe sur le sujet intéressant l’enfant, ce forum apparaîtra dès les premiers résultats de recherche. De fait, il bénéficie d’un bon référencement. D’autre part, les forums sont les sources d’information les plus accessibles en raison de leur contenu car celui-ci sera intelligible pour les adolescents. Cette intelligibilité est aussi liée au fait que les forums répondent à des problématiques précises et qu’un véritable dialogue s’instaure entre les utilisateurs d’internet.
Ces forums sont donc, au sein des données ouvertes d’origine privée, des sources d’information incontournables concernant les droits de l’enfant puisque les données qui vont s’y trouver vont aboutir à une information intelligible, précise et adaptée aux besoins des enfants.
Pour conclure, il convient de répondre sans ambiguïté à la question de la capacité de l’open data à être un instrument de l’information des enfants quant à leurs droits. L’open data n’en a pas la capacité en l’état actuel de son développement en France puisqu’il ne permet pas aux enfants d’avoir accès à leurs droits. Cependant, il faut saluer les efforts faits notamment par le Défenseur des droits. Son site permet aux enfants d’effectuer des démarches en ligne et il a fait un réel effort pour tenter de rendre ses données aussi claires que possible pour qu’il en résulte une information intelligible pour les adolescents ; nonobstant la nuance qui doit être apportée tenant au problème du référencement de ce site qui vient entraver l’accès des enfants à ces données. S’agissant de l’information des enfants, les données ouvertes d’origine privée restent encore les plus adaptées à leurs besoins d’information. Parmi ces données, la distinction faite entre celles issues d’associations ou d’ONG d’une part, et celles issues des particuliers d’autre part, est à prendre en considération puisque les données privées issues du « peer-to-peer » sont beaucoup plus accessibles aux adolescents.
Enfin, il faut noter l’existence d’un paradoxe relatif à une certaine catégorie de droits. Les données publiques relatives au cyber-harcèlement sont de plus en plus accessibles sur internet ce qui signifie qu’elles bénéficient d’un meilleur référencement et d’une meilleure intelligibilité26. L’open data le plus efficace concerne donc les droits de l’enfant dans le Big data et non dans la vie réelle. Cependant, internet n’est-il pas le lieu des paradoxes ? Il l’est sans aucun doute puisque comme l’ont mis en exergue ces développements, internet est l’espace dans lequel il y a le plus d’informations mais c’est aussi l’espace dans lequel il est impossible de trouver certaines informations si elles ne sont pas recherchées précisément.
- P. Turpin et H. Mokadem, « CHU Leaks : ces documents confidentiels qui accablent l’hôpital de Toulouse », Médiacités, 2 avril 2018, consultable sur : https://www.mediacites.fr/toulouse/enquete-toulouse/2018/04/02/chu-leaks-ces-documents-confidentiels-qui-accablent-lhopital-toulousain/ [↩]
- Ces fiches d’incidents sont des documents confidentiels relatant des problèmes survenus lors du service des soignants et destinées à l’administration afin que des mesures puissent être adoptées dans le but de prévenir la survenance d’autres problèmes similaires. [↩]
- L. Cluzel-Métayer, « Les limites de l’open data », AJDA, 2016, p. 102 et suiv. ; « La notion d’open data », RGD, actes de colloque « L’Open data : une évolution juridique ? » (30 mars 2018). [↩]
- « En effet, l’open data inclut la reconnaissance d’un droit, puisqu’il ouvre à toute personne l’accès à l’information en ce qui concerne l’accès aux documents produits ou reçus dans le cadre d’une mission de service public, et le droit de réutiliser librement ces informations » (H. Verdier, « L’Etat et la politique d’ouverture en France », AJDA 2016, p. 92 et suiv.). « Une donnée ou un contenu est ouvert si n’importe qui peut librement l’utiliser, le réutiliser, et le redistribuer – à condition seulement, et au maximum, de devoir en attribuer la source » (OpenDataSupport, « Licences pour les données et les métadonnées », consultable sur : http://frama.link/OpenDataSupport_Licences). [↩]
- La notion de Big data signifie littéralement « mégadonnées ». Aucune définition précise et universelle n’a été donnée au Big data mais il s’agit d’un concept renvoyant au stockage d’un nombre indicible de données de toutes origines dans une base numérique. [↩]
- Il s’agit de la définition issue de l’article 1er de la Convention internationale sur les droits de l’enfant qui dispose qu’ : « un enfant s’entend de tout être humain âgé de moins de dix-huit ans ». Relevons que la France a ratifié cette convention le 7 aout 1990 et qu’elle n’a émis aucune réserve à cet article. [↩]
- L’adolescence est une période d’âge se situant entre 10 et 19 selon l’Organisation mondiale de la santé. [↩]
- Ce constat résulte d’une approche sociologique et psychologique qui développe la règle des 3-6-9-12. Cette approche démontre qu’il faut éviter les écrans aux enfants avant 3 ans, qu’il faut éviter les jeux vidéo avant 6 ans, qu’il faut éviter internet avant 9 ans et enfin que les enfants ne doivent pas utiliser internet seuls avant 12 ans. V. not. : S. Tisseron, Approvoiser les écrans et grandir, Paris, Erès, octobre 2013, 136 p. [↩]
- Notons que les citoyens français n’ont pas besoin de visa pour se rendre en Turquie dès lors que le séjour n’excède pas une certaine durée, il est seulement nécessaire d’avoir une pièce d’identité. Toutefois, pour la majorité des autres citoyens de l’Union européenne et des citoyens des États non membres de l’Union européenne, un visa est nécessaire. [↩]
- Le récent rapport publié par le Défenseur des droits consacre une enquête « Accès aux droits – Droits de l’enfant ». V. Défenseur des droits, Rapport annuel d’activité 2017, 10 mai 2018, spé. p. 71 et suiv. [↩]
- Défenseur des droits, Enquête sur l’accès aux droits : Place et défense des droits de l’enfant en France, Vol. 4, mai 2017, 30 p. ; Défenseur des droits, L’accès à la santé des enfants pris en charge au titre de la protection de l’enfance : accès au soin et sens du soin, janvier 2017, 176 p. [↩]
- Vie publique, « Droits de l’enfant : 25 années d’application de la Convention », novembre 2014, consultable sur : http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/droits-enfant-25-annees-application-convention-20141120.html; Vie publique, « Convention internationale des droits de l’enfant : quelle application en France ? », mars 2018, consultable sur : http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/convention-internationale-droits-enfant-quelle-application-france.html; Vie publique, « Justice : garantir les droits des enfants, » novembre 2013, consultable sur : http://www.vie-publique.fr/actualite/alaune/justice-garantir-droits-enfants-20131120.html [↩]
- Accessible sur : http://www.education.gouv.fr/cid58357/journee-internationale-des-droits-de-l-enfant.html [↩]
- Accessible sur : http://solidarites-sante.gouv.fr/affaires-sociales/familles-enfance/droits-de-l-enfant/ [↩]
- Site accessible sur : https://www.defenseurdesdroits.fr/fr/competences/missions-objectifs/defense-des-droits-de-lenfant [↩]
- Ce terme pourrait être remplacé par « contacter » ou « joindre ». [↩]
- La Haute Autorité de Santé relève que 80% des mauvais traitement subis par les enfants ont pour auteur un membre de leur famille (INSERM, Un plan de lutte contre les violentes faites aux enfants, 1er mars 2017, consultable sur : https://presse.inserm.fr/1er-mars-2017-un-plan-de-lutte-contre-les-violences-faites-aux-enfants/27387/). [↩]
- Consultable sur : http://solidarites-sante.gouv.fr/prevention-en-sante/sante-mentale-et-psychiatrie/article/que-faire-et-a-qui-s-adresser-face-a-une-crise-suicidaire [↩]
- Cette page est particulièrement inappropriée également au regard de la fragilité psychologique de l’enfant qui effectuerait cette recherche. Guider un enfant en détresse physique et psychologique vers ce site alors qu’il recherche une aide pourrait le conduire à avoir des pensées suicidaires ou en tout cas à envisager le fait qu’il n’a pas d’autre « solution ». [↩]
- Dans le moteur de recherche Google. [↩]
- Les annonces sont un moyen pour permettre à l’administrateur d’un site de voir ce dernier arriver en tête des résultats de recherche dès lors qu’un seuil de pertinence au regard des mots clefs de la recherche est atteint. Pour cela, il faut que l’annonceur établisse une enchère qui fixe le montant maximal qu’il est prêt à payer au moteur de recherche à chaque fois qu’un utilisateur accède à son annonce. Plus l’enchère est élevée, plus cette dernière est visible sur la première page de résultats de recherche mais plus l’annonceur devra payer un montant élevé lorsque son annonce est sélectionnée. S’agissant du moteur de recherche Google, les détails sont consultables sur : https://support.google.com/adwords/answer/1722122 [↩]
- Humanium apparait à deux reprises dès la première page de résultat de recherche avec une page consacrée à la signification de l’enfant et de ses droits et une page consacrée à la Convention internationale sur les droits de l’enfant, respectivement consultable sur : https://www.humanium.org/fr/les-droits-de-l-enfant/ et consultable sur : https://www.humanium.org/fr/convention/ [↩]
- Consultable sur : http://bice.org/fr/droits-de-lenfant/droits-fondamentaux-de-l-enfant/ [↩]
- Consultable sur : https://fr.wikipedia.org/wiki/Droits_de_l%27enfant [↩]
- « Dans ce type de réseau comparable au réseau client-serveur, chaque client constitue lui-même un serveur. Le [peer-to-peer ou] P2P permet ainsi à plusieurs ordinateurs de communiquer entre eux via un réseau » (« P2P (peer to peer) : définition, traduction et acteurs », JDN, 12 janvier 2018, consultable sur : https://www.journaldunet.fr/web-tech/dictionnaire-du-webmastering/1203399-p2p-peer-to-peer-definition-traduction-et-acteurs/). [↩]
- Le Ministère de l’éducation nationale consacre une page très bien référencée au cyber-harcèlement en proposant aux adolescents des réponses adaptées en ligne. Consultable sur : https://www.nonauharcelement.education.gouv.fr/que-faire/faire-face-au-cyberharcelement/ [↩]
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