RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Le préfet de la Loire a déféré au tribunal administratif de Lyon la délibération du 15 décembre 2017 du bureau du syndicat intercommunal d’énergies du département de la Loire (SIEL) en tant qu’elle prévoit que la contribution communale aux dépenses relatives aux travaux d’éclairage public et d’installation de bornes de recharge pour véhicules électriques, inscrits au programme 2017, prendra la forme de fonds de concours.
Par un jugement n° 1803653 du 14 février 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ce déféré.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2019, le préfet de la Loire demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement du 14 février 2019 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d’annuler la délibération du 15 décembre 2017 en tant qu’elle prévoit une participation communale sous la forme de fonds de concours pour des travaux d’éclairage public et de bornes de recharge pour véhicules électriques.
Il soutient que contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, l’article L. 5212-26 du code général des collectivités territoriales, par les renvois successifs aux articles L. 5212-24 et L. 2224-31 de ce code, n’autorise le financement de travaux sous la forme de fonds de concours qu’en ce qui concerne les domaines relevant strictement de la compétence d’autorité organisatrice de la distribution publique d’électricité ; dès lors que l’éclairage public et les bornes de recharge pour véhicules électriques ne relèvent pas de cette compétence, le syndicat intercommunal ne pouvait légalement prévoir un financement de ces travaux sous la forme de fonds de concours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2019, le syndicat intercommunal d’énergies du département de la Loire (SIEL), représenté par la SCPA Seban et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l’Etat au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
– le préfet fait une lecture contra legem des dispositions de l’article L. 5212-26 du code général des collectivités territoriales : ces dispositions posent uniquement une condition de nature » organique » visant à permettre aux seuls syndicats, autorités organisatrices de la distribution publique d’électricité, de mettre en place des fonds de concours ;
– les travaux parlementaires relatifs à la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 confirment l’analyse du tribunal administratif.
Par un courrier du 4 septembre 2020, les parties ont été informées, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, que l’arrêt était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office tiré de la méconnaissance du champ d’application de l’article L. 5212-26 du code général des collectivités territoriales en ce que, à la date de la délibération contestée du 15 décembre 2017, cet article s’appliquait aux syndicats de communes, tels que définis par l’article L. 5212-1 de ce code, et non aux syndicats mixtes, relevant des dispositions des articles L. 5721-1 et suivants, et ne pouvant recevoir de leurs membres le versement de fonds de concours que dans les conditions prévues aux articles L. 5722-10 et L. 5722-11 en l’absence de renvoi, par l’article L. 5722-8, aux dispositions de l’article L. 5212-26.
Le SIEL a produit un mémoire, enregistré le 11 septembre 2020, en réponse à ce moyen d’ordre public.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code de l’énergie ;
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme C… ;
– les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;
– les observations de M. B…, représentant la préfète de la Loire et celles de Me A…, représentant le SIEL ;
Considérant ce qui suit :
1. Le préfet de la Loire relève appel du jugement du 14 février 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la délibération du 15 décembre 2017 du bureau du syndicat intercommunal d’énergies du département de la Loire (SIEL) portant sur son programme de travaux de 2017 en tant que cette délibération indique que la contribution communale aux travaux portant sur l’éclairage public et les bornes de recharge pour véhicules électriques prendra la forme de fonds de concours.
2. En vertu de l’article L 2224-31 du code général des collectivités territoriales, auquel renvoie l’article L. 322-1 du code de l’énergie, l’autorité organisatrice d’un réseau public de distribution d’électricité, dont la fonction est de desservir les consommateurs finals et les producteurs d’électricité raccordés en moyenne et basse tension, est la commune ou l’établissement public de coopération auquel elle a transféré cette compétence ou le département s’il exerçait cette compétence à la date de la publication de la loi du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz, aux entreprises électriques et gazières. En vertu des mêmes dispositions, l’autorité organisatrice de la distribution d’électricité (AODE) négocie et conclut les contrats de concession et exerce le contrôle du bon accomplissement des missions de service public par le concessionnaire. Elle assure la maîtrise d’ouvrage des travaux de premier établissement, d’extension, de renforcement et de perfectionnement des ouvrages de distribution visés à l’article L. 322-6 du code de l’énergie et peut réaliser ou faire réaliser des actions relatives aux économies d’énergie des consommateurs finals d’électricité basse tension ayant pour objet ou pour effet d’éviter de différer l’extension ou le renforcement des réseaux publics de distribution relevant de leur compétence.
3. En vertu de l’article L. 1321-9 du code général des collectivités territoriales, les communes peuvent transférer à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) ou un syndicat mixte la compétence en matière d’éclairage public, distincte de la compétence d’AODE. Elles peuvent également, en vertu de l’article L. 2224-37 du même code, transférer la compétence relative à la création et l’entretien des infrastructures de charge nécessaires à l’usage de véhicules électriques ou hybrides rechargeables notamment aux autorités organisatrices d’un réseau public de distribution d’électricité visées à l’article L. 2224-31.
4. Il ressort des pièces du dossier et en particulier de ses statuts, que le SIEL a été créé sous la forme d’un syndicat mixte ouvert, régi par les dispositions des articles L. 5721-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, pour exercer les compétences d’AODE en lieu et place de ses membres ainsi que des compétences optionnelles, lorsque ses adhérents lui en font expressément la demande, relatives à la maîtrise d’ouvrage des travaux neufs et de rénovation d’éclairage public et à la » mobilité propre » pour la mise en place et l’organisation d’un service qui comprend la création, l’entretien et l’exploitation des infrastructures de charge nécessaires à l’usage des véhicules électriques ou hybrides rechargeables. Par la délibération contestée, le bureau du SIEL a indiqué que les contributions communales aux dépenses d’investissements, pour l’année 2017, notamment en matière d’éclairage public et de bornes de charge des véhicules électriques, prendraient la forme de fonds de concours.
5. Il résulte cependant du chapitre II du titre II du livre VII de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales relatif aux dispositions financières applicables aux syndicats mixtes associant des collectivités territoriales, des groupements de collectivités territoriales, et d’autres personnes morales de droit public, que les syndicats mixtes ouverts ne peuvent bénéficier de fonds de concours que dans les conditions prévues par les articles L. 5722-10 et L. 5722-11 de ce code, soit parce qu’ils assurent la gestion d’un port autonome, soit, tel le SIEL, parce qu’ils sont compétents pour l’établissement d’un réseau de communications électroniques.
6. Si l’article L. 5711-1 du code général des collectivités territoriales, applicable aux syndicats mixtes fermés, prévoit expressément qu’ils sont soumis aux dispositions relatives aux syndicats de communes, et peuvent ainsi bénéficier de fonds de concours en vertu de l’article L. 5212-26 du même code lorsqu’ils exercent la compétence d’AODE, tel n’est pas le cas des syndicats mixtes ouverts. En effet, la rédaction de l’article L. 5722-8 de ce code, dans sa version applicable à la date de la délibération en litige, qui énonce que les dispositions de l’article L. 5212-24 sont applicables aux syndicats mixtes ouverts, implique seulement que ceux-ci peuvent, le cas échéant, percevoir la taxe communale sur la consommation finale d’électricité, prévue à l’article L. 2333-2, en lieu et place de leurs membres.
7. Il résulte de ce qui précède que le bureau du SIEL ne pouvait sans méconnaître le champ d’application de l’article L. 5212-26 du code général des collectivités territoriales, prévoir une participation de ses membres sous la forme de fonds de concours pour la réalisation de travaux en matière d’éclairage public et de » mobilité propre « . Par suite, le préfet de la Loire, qui peut en tout état de cause, en application de l’article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales applicable au présent litige en vertu de l’article L. 5721-4 du même code, déférer au juge administratif tous actes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics qu’il estime contraire à la légalité, y compris ceux présentant un caractère préparatoire, est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
8. Dans ces conditions, les conclusions présentées par le SIEL sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1803653 du tribunal administratif de Lyon du 14 février 2019 et la délibération du 15 décembre 2017 du bureau du SIEL, en tant seulement qu’elle prévoit une participation de ses membres aux travaux d’éclairage public et de bornes de charge pour véhicules électriques sous forme de fonds de concours, sont annulés.
Article 2 : Les conclusions présentées par le SIEL sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la préfète de la Loire et au syndicat intercommunal d’énergies du département de la Loire.
Délibéré après l’audience du 17 décembre 2020, à laquelle siégeaient :
M. d’Hervé, président de chambre,
Mme Michel, président-assesseur,
Mme C…, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 janvier 2021.
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N° 19LY01487