LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ;
Vu le code électoral ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 2010-145 du 16 février 2010 organisant la concomitance des renouvellements des conseils généraux et des conseils régionaux ;
Vu la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique ;
Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 26 avril 2013 ;
Vu les observations en réplique présentées par les sénateurs requérants, enregistré le 26 avril 2013 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les sénateurs et les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral ; qu’ils contestent la procédure d’adoption de la loi ; qu’ils mettent en cause la conformité à la Constitution de ses articles 3, 4, 24, 30 et 47 ; que les sénateurs contestent, en outre, la conformité à la Constitution de son article 33 et que les députés mettent aussi en cause la conformité à la Constitution de ses articles 15, 16, 17, 18 et 19 ;
– SUR LA PROCÉDURE D’ADOPTION DE LA LOI :
. En ce qui concerne l’étude d’impact jointe au projet de loi :
2. Considérant que les députés requérants font valoir que l’étude d’impact jointe au projet de loi n’a pas permis d’éclairer suffisamment les parlementaires sur la portée du texte qui leur a été soumis ; que l’étude d’impact aurait en particulier omis d’indiquer l’incidence qu’aurait eue l’article 8 du projet de loi déposé par le gouvernement sur le second tour des élections cantonales, qu’elle aurait négligé les difficultés de constitution des listes de candidats pour les élections municipales dans les petites communes en raison des modifications prévues par les articles 16 et suivants du projet de loi et qu’elle aurait insuffisamment démontré les postulats motivant le report des élections départementales et régionales à 2015 prévu par l’article 24 du projet de loi ; qu’en conséquence, aurait été méconnue l’exigence de clarté des débats parlementaires ;
3. Considérant qu’aux termes des troisième et quatrième alinéas de l’article 39 de la Constitution : « La présentation des projets de loi déposés devant l’Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions fixées par une loi organique. – Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l’ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l’assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours » ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 susvisée : « Les projets de loi font l’objet d’une étude d’impact. Les documents rendant compte de cette étude d’impact sont joints aux projets de loi dès leur transmission au Conseil d’État. Ils sont déposés sur le bureau de la première assemblée saisie en même temps que les projets de loi auxquels ils se rapportent » ; que, selon le premier alinéa de l’article 9 de la même loi organique, la Conférence des présidents de l’assemblée sur le bureau de laquelle le projet de loi a été déposé dispose d’un délai de dix jours suivant le dépôt pour constater que les règles relatives aux études d’impact sont méconnues ;
4. Considérant que le projet de loi a été déposé le 28 novembre 2012 sur le bureau du Sénat et que la Conférence des présidents du Sénat n’a été saisie d’aucune demande tendant à constater que les règles relatives aux études d’impact étaient méconnues ; qu’au regard du contenu de l’étude d’impact, le grief tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 doit être écarté ; qu’il en va de même du grief tiré de l’atteinte aux exigences constitutionnelles de clarté et de sincérité des débats parlementaires ;
. En ce qui concerne la procédure parlementaire :
5. Considérant que, selon les députés requérants, en suspendant la séance publique après avoir annoncé le scrutin pour un vote relatif à l’article 1er de la loi déférée en première lecture devant l’Assemblée nationale et en procédant à trois votes successifs d’une motion de rejet préalable en deuxième lecture devant l’Assemblée nationale, le président de séance a enfreint le règlement de cette assemblée, notamment son article 64, et méconnu le principe de sincérité des débats parlementaires ;
6. Considérant, d’une part, qu’il ressort des travaux parlementaires que, lors de l’examen des amendements de suppression de l’article 1er de la loi déférée en première lecture devant l’Assemblée nationale au cours de la première séance du 19 février 2013, le président de séance n’avait pas déclaré ouvert le scrutin avant d’avoir décidé de suspendre la séance pendant les explications de vote ; qu’aucune des dispositions du règlement de l’Assemblée nationale n’interdit au président de séance de suspendre la séance pendant les explications de vote ;
7. Considérant, d’autre part, qu’il ressort également des travaux parlementaires que, lors de la mise aux voix de la motion de rejet préalable en deuxième lecture devant l’Assemblée nationale au cours de la première séance du 26 mars 2013, le président de séance, constatant l’entrée de nombreux députés dans l’hémicycle et le doute qui en résultait sur le résultat du vote à main levée, a procédé à deux reprises à un décompte par assis et levé sans qu’ait été demandé le vote par scrutin public ; qu’à l’issue du dernier décompte, il a constaté le rejet de la motion ; qu’en vertu du deuxième alinéa de l’article 64 du règlement de l’Assemblée nationale : « En cas de doute sur le résultat du vote à main levée, il est procédé au vote par assis et levé ; si le doute persiste, le vote par scrutin public ordinaire est de droit » ; qu’en l’espèce, il n’a pas été demandé de procéder par scrutin public après qu’il a été procédé une première fois à un vote par assis et levé ;
8. Considérant qu’en tout état de cause la méconnaissance de dispositions du règlement ne saurait, à elle seule, avoir pour effet de rendre la procédure législative contraire à la Constitution ; qu’en l’espèce, les exigences constitutionnelles de clarté et de sincérité des débats parlementaires n’ont pas été méconnues ;
– SUR LES ARTICLES 3, 15, 16, 17, 18 et 19 :
9. Considérant que les dispositions des articles 3, 15, 16, 17, 18 et 19 figurent dans le titre Ier de la loi intitulé « Dispositions relatives au conseil départemental » ; que les articles 3, 15 et 16 sont relatifs au mode de scrutin des conseillers départementaux ; que les articles 17 et 18 modifient des dispositions relatives au financement des campagnes électorales ; que l’article 19 comporte des dispositions de coordination ;
. En ce qui concerne l’article 3 :
10. Considérant que l’article 3 modifie l’article L. 191 du code électoral ; qu’aux termes de cet article : « Les électeurs de chaque canton du département élisent au conseil départemental deux membres de sexe différent, qui se présentent en binôme de candidats dont les noms sont ordonnés dans l’ordre alphabétique sur tout bulletin de vote imprimé à l’occasion de l’élection » ;
11. Considérant que, selon les sénateurs requérants, en ce qu’elles contraignent le choix de l’électeur en imposant une parité simultanée dans une élection unique non assortie d’une obligation de solidarité dans l’exercice du mandat pour les élus, les dispositions de l’article 3 méconnaissent le principe de liberté de choix de l’électeur et le principe d’égalité devant le suffrage ; que, selon les députés requérants, en posant le principe d’un scrutin binominal, cet article ne garantit la sincérité du scrutin « ni en termes d’intelligibilité, ni de clarté, ni de loyauté » ;
12. Considérant qu’en vertu de l’article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant le régime électoral des assemblées locales ; qu’il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ;
13. Considérant, d’une part, qu’aux termes du troisième alinéa de l’article 3 de la Constitution : « Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret » ;
14. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de la dernière phrase de l’article 1er de la Constitution : « La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives. . . » ; que ces dispositions permettent au législateur d’instaurer tout dispositif tendant à rendre effectif l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ; qu’il lui est loisible d’adopter des dispositions revêtant soit un caractère incitatif, soit un caractère contraignant ; qu’il lui appartient toutefois d’assurer la conciliation entre ces dispositions constitutionnelles et les autres règles et principes de valeur constitutionnelle auxquels le pouvoir constituant n’a pas entendu déroger ;
15. Considérant qu’en prévoyant que les électeurs de chaque canton du département « élisent au conseil départemental deux membres de sexe différent, qui se présentent en binôme de candidats dont les noms sont ordonnés dans l’ordre alphabétique sur tout bulletin de vote imprimé à l’occasion de l’élection », le législateur a instauré un mode de scrutin majoritaire binominal à deux tours sans panachage ni vote préférentiel ; que par ces dispositions, qui ne sont entachées d’aucune inintelligibilité, le législateur a entendu assurer la parité au sein des conseils départementaux ; qu’il a ainsi favorisé l’égal accès des femmes et des hommes au mandat de conseiller départemental ; qu’il n’a méconnu aucune exigence de valeur constitutionnelle ;
16. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’article 3 doit être déclaré conforme à la Constitution ;
. En ce qui concerne l’article 15 :
17. Considérant que l’article 15 modifie l’article L. 221 du code électoral relatif au remplacement des conseillers généraux ; que le premier alinéa de l’article L. 221, dans sa nouvelle rédaction, prévoit qu’en cas de démission d’office déclarée en application de l’article L. 118-3 du même code ou en cas d’annulation de l’élection d’un binôme de candidats, il est procédé à une élection partielle dans le délai de trois mois à compter de cette déclaration ou de cette annulation ; qu’en vertu du deuxième alinéa de l’article L. 221, le conseiller départemental dont le siège devient vacant pour toute autre cause est remplacé par la personne élue en même temps que lui à cet effet ; que le troisième alinéa prévoit que lorsque le remplacement d’un conseiller départemental n’est plus possible en application du deuxième alinéa, le siège demeure vacant ; que, toutefois, selon le même troisième alinéa, lorsque les deux sièges d’un canton sont vacants, une élection partielle est organisée dans le délai de trois mois à compter de la dernière vacance ; que, selon le quatrième alinéa de l’article L. 221, dans les six mois précédant le renouvellement des conseils départementaux, il n’est procédé à aucune élection partielle ;
18. Considérant que, selon les députés requérants, en définissant les conditions de remplacement d’un conseiller départemental, ainsi que les causes qui peuvent conduire à l’organisation d’élections partielles, l’article 15 permet qu’un conseil départemental délibère, le cas échéant, alors que la moitié de ses sièges sont vacants ; qu’une telle situation rendrait en outre impossible l’élection du président de ce conseil ; qu’ainsi, cet article porterait atteinte à la libre administration des collectivités territoriales et à la sincérité du scrutin ;
19. Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles « concernant le régime électoral. . . des assemblées locales » ; que le même article réserve au législateur la détermination des principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ; qu’en vertu du troisième alinéa de l’article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales « s’administrent librement par des conseils élus » ;
20. Considérant qu’en application de ces dispositions, il appartient à la loi de fixer le délai dans lequel il doit être procédé à des élections partielles au conseil départemental ; que, cependant, les modalités retenues par le législateur ne doivent pas conduire à ce que soient remises en cause les conditions d’exercice de la libre administration des collectivités territoriales ;
21. Considérant que les dispositions de l’article 15 de la loi déférée peuvent aboutir à ce que plusieurs sièges demeurent vacants dans un conseil départemental, sans qu’il soit procédé à une élection partielle lorsque, pour chacun de ces sièges, le conseiller départemental puis son remplaçant ont démissionné, sont décédés ou ont été déclarés inéligibles pour une cause qui leur est propre ; que cette vacance peut durer jusqu’à six ans ; que, nonobstant le caractère limité des hypothèses dans lesquelles une telle vacance peut survenir, sans qu’il soit procédé à une élection partielle, les modalités retenues par le législateur pourraient laisser plusieurs sièges vacants pendant toute la durée du mandat ; que, dans certains cas, le dispositif prévu par la loi pourrait conduire à ce que le fonctionnement normal du conseil départemental soit affecté dans des conditions remettant en cause l’exercice de la libre administration des collectivités territoriales et le principe selon lequel elles s’administrent librement par des conseils élus ;
22. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, que le troisième alinéa de l’article L. 221 du code électoral doit être déclaré contraire à la Constitution ; que, pour le surplus, l’article 15 doit être déclaré conforme à la Constitution ;
. En ce qui concerne les articles 16, 17, 18 et 19 :
23. Considérant que l’article 16 modifie l’article L. 223 du code électoral relatif au contentieux électoral, notamment pour l’adapter au scrutin binominal ; qu’il prévoit que les deux conseillers départementaux élus dans le même canton restent en fonctions jusqu’à ce qu’il ait été définitivement statué sur la réclamation ;
24. Considérant que l’article 17 modifie le chapitre V bis du titre Ier du livre Ier du code électoral sur le financement et le plafonnement des dépenses électorales, en particulier en insérant un article L. 52-3-1 dans ce chapitre ; qu’aux termes du premier alinéa de cet article L. 52-3-1, « pour l’application du présent chapitre aux scrutins binominaux, les membres du binôme exercent les droits reconnus aux candidats et sont tenus aux obligations qui s’imposent à eux, de manière indissociable » ; qu’aux termes du second alinéa du même article : « Les membres du binôme déclarent un mandataire unique et déposent un compte de campagne unique » ; que l’article 17 modifie en particulier les articles L. 52-4, L. 52-5, L. 52-6, L. 52-9, L. 52-12, L. 52-13 et L. 52-15 relatifs au financement des campagnes électorales ; qu’il insère après le premier alinéa de l’article L. 52-13, qui prévoit les modalités de totalisation et décompte des dépenses des candidats lors d’un scrutin de liste, un alinéa ainsi rédigé : « Les dépenses exposées par des candidats ayant agi séparément avant d’être réunis au sein d’un même binôme sont totalisées et décomptées comme faites au profit de ce binôme » ; que le dernier alinéa de l’article L. 52-15, relatif au versement de la somme due au Trésor public en cas de dépassement du plafond des dépenses électorales, est complété par cette phrase : « En cas de scrutin binominal, les deux candidats présentés au sein d’un même binôme sont tenus solidairement au règlement de la créance » ;
25. Considérant que l’article 18 modifie l’article L. 118-3 du code électoral relatif au contentieux des comptes de campagne pour adapter les règles qu’il prévoit au mode de scrutin des conseillers départementaux ;
26. Considérant que l’article 19 prévoit des mesures de coordination liées à l’introduction du scrutin binominal pour l’élection des conseillers départementaux et à la suppression du renouvellement triennal par séries des conseils généraux ; qu’à cette fin il modifie le code électoral, le code général des impôts et le code général des collectivités territoriales ; qu’il modifie en particulier les articles L. 3122-1 et L. 3122-2 de ce dernier code relatifs à la désignation et au remplacement du président du conseil départemental ;
27. Considérant que, selon les députés requérants, les articles 16, 17, 18 et 19, en ce qu’ils prévoient une peine automatique d’inéligibilité pour les deux membres du binôme, sont contraires à l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et aux exigences de nécessité, d’individualisation et de proportionnalité des peines ;
28. Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que les principes ainsi énoncés ne concernent pas seulement les peines prononcées par les juridictions pénales mais s’étendent à toute sanction ayant le caractère d’une punition ;
29. Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article 18 de la loi déférée, qui modifient l’article L. 118-3 du code électoral, le juge électoral, saisi par la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut prononcer l’inéligibilité des deux candidats du même binôme lorsque le compte de campagne fait apparaître, le cas échéant après réformation, un dépassement du plafond des dépenses électorales, lorsque le compte n’a pas été déposé dans les conditions et le délai prescrits par l’article L. 52-12 du code électoral ou, encore, lorsque le compte a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité au financement des campagnes électorales ; que cette inéligibilité peut être prononcée pour une durée maximale de trois ans ; qu’elle s’applique à toutes les élections mais n’a pas d’effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision ; que, si le juge de l’élection a prononcé l’inéligibilité des membres d’un binôme proclamé élu, il annule son élection ou, si l’élection n’a pas été contestée, déclare les membres du binôme démissionnaires d’office ;
30. Considérant que les dispositions relatives à la présentation du compte de campagne et au financement des campagnes électorales ont notamment pour but d’assurer la sincérité du suffrage qui constitue une exigence constitutionnelle ; qu’en instituant l’unicité du compte de campagne pour les candidats membres d’un binôme ainsi que l’obligation d’un mandataire commun et en retenant le principe de solidarité de ces candidats, le législateur a entendu que les membres d’un binôme appliquent conjointement les règles relatives aux campagnes électorales afin d’en favoriser le respect ; qu’à cet effet, par les dispositions de l’article 18, le législateur a prévu que les deux membres du même binôme encourent les mêmes inéligibilités en cas de méconnaissance des règles de l’article L. 118-3 du code électoral relatives tant à la présentation du compte de campagne qu’au financement de la campagne électorale ; qu’il appartient au juge de l’élection de tenir compte, dans le prononcé des inéligibilités, des circonstances de chaque espèce ; que les dispositions de l’article 18 ne méconnaissent ni les exigences de l’article 8 de la Déclaration de 1789 ni aucune autre exigence constitutionnelle ;
31. Considérant que les articles 16, 17, 18 et 19, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarés conformes à la Constitution ;
– SUR LES ARTICLES 4 ET 46 :
32. Considérant que l’article 4 insère dans le code électoral l’article L. 191-1 ; qu’aux termes du premier alinéa de cet article : « Le nombre de cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l’unité impaire supérieure si ce nombre n’est pas entier impair » ; qu’aux termes du second alinéa du même article : « Le nombre de cantons dans chaque département comptant plus de 500 000 habitants ne peut être inférieur à dix-sept. Il ne peut être inférieur à treize dans chaque département comptant entre 150 000 et 500 000 habitants » ;
33. Considérant que l’article 46 modifie l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales relatif aux modifications des limites territoriales des cantons, à leur création et à leur suppression ; qu’il insère dans cet article un paragraphe III en vertu duquel la modification des limites territoriales des cantons est conforme aux règles suivantes :
« a) Le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques ;
« b) Le territoire de chaque canton est continu ;
« c) Est entièrement comprise dans le même canton toute commune de moins de 3 500 habitants » ;
34. Considérant que l’article 46 de la loi déférée insère également dans l’article L. 3113-2 un paragraphe IV aux termes duquel : « Il n’est apporté aux règles énoncées au III que des exceptions de portée limitée, spécialement justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques, d’ordre topographique, comme l’insularité, le relief, l’hydrographie ; d’ordre démographique, comme la répartition de la population sur le territoire départemental ; d’équilibre d’aménagement du territoire, comme l’enclavement, la superficie, le nombre de communes par canton ; ou par d’autres impératifs d’intérêt général » ;
35. Considérant que, selon les requérants, l’article 4 est contraire à la répartition des compétences prévue par les articles 34 et 37 de la Constitution en matière de délimitation des circonscriptions électorales ; qu’en méconnaissant l’exigence selon laquelle la répartition des sièges doit être établie sur des bases essentiellement démographiques, l’article 4 serait en outre contraire au principe d’égalité devant le suffrage ; que les sénateurs requérants font enfin valoir qu’en choisissant de conserver les cantons comme circonscriptions d’élection des conseillers départementaux « malgré l’apparition du binôme », le législateur expose le pouvoir réglementaire « à de plus grandes difficultés dans l’exercice de sa mission constitutionnelle de respect du principe d’égalité devant le suffrage » ;
36. Considérant que, d’une part, aux termes de l’article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant « le régime électoral. . . des assemblées locales. . . ainsi que les conditions d’exercice des mandats électoraux et des fonctions électives des membres des assemblées délibérantes des collectivités territoriales » ; qu’il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, d’adopter des dispositions nouvelles dont il lui appartient d’apprécier l’opportunité et de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions, dès lors que, dans l’exercice de ce pouvoir, il ne prive pas de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ;
37. Considérant que, d’autre part, selon l’article 1er de la Constitution, la France « assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion » ; qu’aux termes du quatrième alinéa de son article 24 : « Le Sénat. . . assure la représentation des collectivités territoriales de la République » ; que, selon le troisième alinéa de son article 72, les collectivités territoriales « s’administrent librement par des conseils élus » « dans les conditions prévues par la loi » ; qu’il ressort de ces dispositions que l’organe délibérant d’un département doit être élu sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges et une délimitation des circonscriptions respectant au mieux l’égalité devant le suffrage ; que, s’il ne s’ensuit pas que la répartition des sièges doive être nécessairement proportionnelle à la population de chaque département ni qu’il ne puisse être tenu compte d’autres impératifs d’intérêt général, ces considérations ne peuvent toutefois intervenir que dans une mesure limitée ;
38. Considérant, en premier lieu, que le législateur a prévu que le nombre de cantons dans lesquels sont élus les conseillers départementaux est égal, pour chaque département, à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l’unité impaire supérieure si ce nombre « n’est pas entier impair » ; qu’il résulte des travaux préparatoires, que le législateur a entendu, d’une part, « maintenir un lien de proximité entre les électeurs et leurs élus » et, d’autre part, maintenir le nombre de conseillers départementaux à un niveau proche de celui du nombre des conseillers généraux actuels ; que, dans ces buts, il était loisible au législateur de conserver pour l’élection des conseillers départementaux le principe de circonscriptions électorales internes au département tout en fixant leur nombre ;
39. Considérant, en deuxième lieu, que les règles relatives à la délimitation des circonscriptions électorales pour l’élection des assemblées locales constituent des composantes du régime électoral de celles-ci ; qu’en l’espèce, sans méconnaître les articles 34 et 37 de la Constitution, le législateur a fixé le nombre de conseillers départementaux et encadré la compétence du pouvoir réglementaire pour la mise en oeuvre de ces règles ;
40. Considérant, en troisième lieu, que les conseillers départementaux sont appelés à siéger au sein des conseils départementaux ; que le respect des exigences attachées au principe d’égalité devant le suffrage s’apprécie au sein de chaque département ; que le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant le suffrage en tant qu’il s’applique aux écarts de représentation entre départements par rapport à une moyenne nationale est inopérant ; que les dispositions contestées n’ont pas pour effet de modifier la répartition par département des sièges de sénateurs ; que les conseillers départementaux constituent eux-mêmes une part réduite des collèges électoraux pour l’élection des sénateurs ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant le suffrage doit être écarté ;
41. Considérant, en quatrième lieu, que, d’une part, en vertu des dispositions du paragraphe III ajouté à l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales par l’article 46 de la loi déférée, la modification des limites territoriales des cantons doit être effectuée en respectant les règles selon lesquelles le territoire de chaque canton est défini sur des bases essentiellement démographiques, le territoire de chaque canton est continu et toute commune de moins de 3 500 habitants est entièrement comprise dans le même canton ;
42. Considérant que, d’autre part, le paragraphe IV ajouté à l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales par l’article 46 de la loi déférée prévoit qu’il n’est apporté aux règles énoncées au paragraphe III que des exceptions de portée limitée spécialement justifiées ; qu’en vertu de ces mêmes dispositions, ces exceptions peuvent être justifiées, au cas par cas, par des considérations géographiques, d’ordre topographique, comme l’insularité, le relief, l’hydrographie ; qu’elles peuvent être également justifiées par des considérations d’ordre démographique, comme la répartition de la population sur le territoire départemental, ou des considérations d’équilibre d’aménagement du territoire, comme l’enclavement, la superficie, le nombre de communes par canton ; que le législateur, enfin, a prévu que les exceptions aux règles énoncées au paragraphe III pouvaient être justifiées « par d’autres impératifs d’intérêt général » ; que, si le législateur peut tenir compte de considérations géographiques, au nombre desquelles figurent l’insularité, le relief, l’enclavement ou la superficie, ainsi que d’autres impératifs d’intérêt général susceptibles d’atténuer la portée de la règle de l’égalité devant le suffrage, il ne saurait le faire que dans une mesure limitée ; que, par leur généralité, les exceptions prévues par ce paragraphe IV pourraient donner lieu à des délimitations arbitraires de circonscriptions ; que, par suite, les mots « d’ordre topographique, comme l’insularité, le relief, l’hydrographie ; d’ordre démographique, comme la répartition de la population sur le territoire départemental ; d’équilibre d’aménagement du territoire, comme l’enclavement, la superficie, le nombre de communes par canton » sont contraires à la Constitution ;
43. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’article 4 ainsi que l’article 46 de la loi déférée, à l’exception des mots « d’ordre topographique, comme l’insularité, le relief, l’hydrographie ; d’ordre démographique, comme la répartition de la population sur le territoire départemental ; d’équilibre d’aménagement du territoire, comme l’enclavement, la superficie, le nombre de communes par canton » figurant au paragraphe IV de l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales, doivent être déclarés conformes à la Constitution ;
– SUR L’ARTICLE 24 :
44. Considérant que le titre IV du livre Ier du code électoral est relatif à l’élection des conseillers municipaux ; que son chapitre II, applicable aux communes de moins de 3 500 habitants, prévoit, à l’article L. 252, que les membres des conseils municipaux de ces communes sont élus au scrutin majoritaire ; que son chapitre III, applicable aux communes de 3 500 habitants et plus, prévoit, à l’article L. 260, que, dans ces communes, les membres des conseils municipaux sont élus au scrutin de liste à deux tours, avec dépôt de listes comportant autant de candidats que de sièges à pourvoir ; que la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 264 dispose que la liste est composée alternativement d’un candidat et d’une candidate ;
45. Considérant que l’article 24 abaisse de 3 500 à 1 000 habitants le seuil prévu par ces dispositions ;
46. Considérant que, selon les sénateurs requérants, compte tenu de l’exigence de parité des listes électorales, l’extension du scrutin de liste proportionnel aux communes comportant entre 1 000 et 3 499 habitants rendra excessivement difficile la composition de listes dans les communes dont la population est égale ou légèrement supérieure à 1 000 habitants ; qu’il en résulterait une atteinte inconstitutionnelle à la liberté de choix de l’électeur et au principe constitutionnel de pluralisme des courants d’idées et d’opinions ;
47. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article L. 228 du code électoral : « Sont éligibles au conseil municipal tous les électeurs de la commune et les citoyens inscrits au rôle des contributions directes ou justifiant qu’ils devaient y être inscrits au 1er janvier de l’année de l’élection » ; que l’article L. 2121-2 du code général des collectivités territoriales fixe le nombre des membres du conseil municipal à 15 pour les communes de 500 à 1 499 habitants, à 19 pour les communes de 1 500 à 2 499 habitants et à 23 pour les communes de 2 500 à 3 499 habitants ; qu’en abaissant de 3 500 à 1 000 habitants le seuil de population d’une commune à partir duquel les conseillers municipaux sont élus au scrutin de liste, le législateur a entendu favoriser, dans les communes comprises dans cette extension, l’égal accès des femmes et des hommes à ces mandats ; que le seuil de population retenu et le nombre de conseillers municipaux limitent les éventuelles difficultés à composer des listes répondant à l’exigence de parité retenue par le législateur ; que, dans ces conditions, le législateur n’a pas porté une atteinte inconstitutionnelle au principe de pluralisme des courants d’idées et d’opinions ; que, par suite, les dispositions de l’article 24 ne méconnaissent pas les exigences constitutionnelles précitées ; qu’elles doivent être déclarées conformes à la Constitution ;
– SUR L’ARTICLE 30 :
48. Considérant que l’article 30 est relatif à la répartition des sièges des membres du conseil de Paris ; qu’il remplace le tableau n° 2 annexé au code électoral par un tableau annexé à la loi déférée ; que ce tableau prévoit que les 163 sièges du conseil de Paris sont répartis en vingt secteurs correspondant aux arrondissements de Paris ; qu’il maintient la règle selon laquelle chaque arrondissement dispose d’au moins trois sièges quelle que soit sa population ; que la répartition résultant du nouveau tableau retire un siège aux secteurs des 7ème, 16ème et 17ème arrondissements et ajoute un siège aux secteurs des 10ème, 19ème et 20ème arrondissements ;
49. Considérant que, selon les requérants, les modifications apportées à ce tableau ne sont pas justifiées par les évolutions de la population des arrondissements en cause ; que le principe d’égalité devant le suffrage aurait dû conduire à une révision plus importante de la répartition des conseillers de Paris ;
50. Considérant qu’il ressort des articles 1er, 24 et 72 de la Constitution que le conseil de Paris doit, comme tout organe délibérant d’une collectivité territoriale, être élu sur des bases essentiellement démographiques selon une répartition des sièges et une délimitation des circonscriptions respectant au mieux l’égalité devant le suffrage ;
51. Considérant qu’en fixant un nombre minimal de trois conseillers de Paris par secteur, le législateur a entendu assurer une représentation minimale de chaque secteur au conseil de Paris ; que, toutefois, dans les 1er, 2ème et 4ème arrondissements, le rapport du nombre des conseillers de Paris à la population de l’arrondissement s’écarte de la moyenne constatée à Paris dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ; qu’il s’ensuit que l’article 30 et le tableau annexé à la loi, qui constituent des dispositions inséparables, doivent être déclarés contraires à la Constitution ; que la conformité à la Constitution d’une loi déjà promulguée peut être appréciée à l’occasion de l’examen des dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine ; qu’en l’espèce, les dispositions contestées de l’article 30 déclarées contraires à la Constitution avaient pour effet de remplacer le tableau n° 2 annexé au code électoral qui fixe la répartition par arrondissement des conseillers de Paris ; que, pour les mêmes raisons, ce tableau doit également être déclaré contraire à la Constitution ;
– SUR L’ARTICLE 33 :
52. Considérant que l’article 33 complète le livre Ier du code électoral par un titre V, comprenant les articles L. 273-1 à L. 273-12, et relatif à l’élection des « conseillers communautaires » qui composent l’organe délibérant des communautés de communes, des communautés d’agglomération, des communautés urbaines et des métropoles ; qu’il prévoit que les membres de cet organe délibérant ne seront plus élus par les conseils municipaux des communes membres, mais au suffrage universel direct pour la même durée que les conseillers municipaux de la commune qu’ils représentent et renouvelés intégralement à la même date que ceux-ci ; qu’en vertu du premier alinéa de l’article L. 273-6 du code électoral, les conseillers communautaires représentant les communes de 1 000 habitants et plus « sont élus en même temps que les conseillers municipaux et figurent sur la liste des candidats au conseil municipal » ; qu’en vertu de l’article L. 273-11 du même code, les conseillers communautaires représentant les communes de moins de 1 000 habitants « sont les membres du conseil municipal désignés dans l’ordre du tableau » ;
53. Considérant que, selon les sénateurs requérants, en permettant que les membres d’une même assemblée intercommunale soient élus selon un régime électoral différent selon la taille de la commune, ces dispositions portent atteinte au principe, garanti par l’article 72 de la Constitution, selon lequel les collectivités territoriales s’administrent librement par des conseils élus ; qu’elles porteraient également atteinte aux principes d’égalité devant la loi et devant le suffrage ;
54. Considérant, d’une part, qu’aucune exigence constitutionnelle n’impose que tous les membres de l’organe délibérant d’un établissement public de coopération intercommunale soient élus selon le même mode de scrutin ;
55. Considérant, d’autre part, qu’en prévoyant que, dans les communes de moins de 1 000 habitants, les délégués communautaires sont les membres du conseil municipal désignés dans l’ordre du tableau, le législateur a entendu éviter, dans les communes où les conseillers municipaux sont élus au scrutin majoritaire, la complexité qui résulterait d’une procédure de désignation distinguant l’élection des conseillers municipaux et celle des conseillers communautaires ; que la différence de traitement instituée est fondée sur un critère objectif et rationnel en lien direct avec l’objet de la loi ;
56. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les griefs tirés de l’atteinte à l’égalité devant la loi et le suffrage doivent être écartés ; que les articles L. 273-6 et L. 273-11 du code électoral doivent être déclarés conformes à la Constitution ;
– SUR L’ARTICLE 47 :
57. Considérant que, par dérogation aux dispositions des articles L. 192 et L. 336 du code électoral qui fixaient à six ans la durée du mandat des conseillers généraux, des conseillers régionaux et des membres de l’Assemblée de Corse, la loi du 16 février 2010 susvisée a, dans la perspective de la réforme du conseiller territorial, réduit de six à quatre ans la durée du mandat des conseillers régionaux élus en mars 2010 et de six à trois ans celle du mandat des conseillers généraux élus en 2011 ; que, par suite de cette réforme, le mandat de tous les conseillers généraux ainsi que celui des conseillers régionaux et des membres de l’Assemblée de Corse arrive à expiration en mars 2014 ; qu’en application de l’article 21 de la loi du 27 juillet 2011 susvisée, les assemblées de Guyane et de Martinique doivent être élues en mars 2014 concomitamment au renouvellement des conseils régionaux et des conseils généraux ;
58. Considérant que l’article 47 proroge d’un an le mandat des conseillers généraux, des conseillers régionaux et des membres de l’assemblée de Corse afin que ces élections aient lieu en mars 2015 ;
59. Considérant que, selon les requérants, cette modification du calendrier électoral n’est pas justifiée par un motif d’intérêt général ; qu’en particulier, la loi déférée ne modifierait pas le régime de l’élection des conseillers régionaux ; que le lien entre l’objectif de favoriser la participation électorale et l’étalement sur deux ans des élections locales ne serait pas établi ; qu’en outre, la prorogation du mandat des conseillers généraux et des conseillers régionaux au-delà des élections sénatoriales prévues en septembre 2014 méconnaîtrait le principe, fixé par l’article 24 de la Constitution, selon lequel le Sénat assure la représentation des collectivités territoriales de la République ;
60. Considérant que le législateur, compétent en application de l’article 34 de la Constitution pour fixer les règles concernant le régime électoral des assemblées locales, peut, à ce titre, déterminer la durée du mandat des élus qui composent l’organe délibérant d’une collectivité territoriale ; que, toutefois, dans l’exercice de cette compétence, il doit se conformer aux principes constitutionnels, qui impliquent notamment que les électeurs soient appelés à exercer leur droit de suffrage selon une périodicité raisonnable ;
61. Considérant que le Conseil constitutionnel ne dispose pas d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement ; qu’il ne lui appartient donc pas de rechercher si le but que s’est assigné le législateur pouvait être atteint par d’autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas manifestement inappropriées à cet objectif ;
62. Considérant qu’en prorogeant d’un an le mandat des conseillers généraux, des conseillers régionaux et des membres de l’assemblée de Corse, le législateur a estimé que l’organisation en 2014 du renouvellement de l’assemblée délibérante des départements, des élections régionales ainsi que des élections municipales et de l’élection des députés européens aurait été de nature à favoriser l’abstention ; que le report de l’élection des membres des assemblées départementales est en outre rendu nécessaire par les délais de mise en œuvre de la réforme résultant du chapitre Ier du titre Ier de la loi déférée ; qu’il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur le choix de maintenir la concomitance des élections régionales et des élections départementales alors qu’est par ailleurs abrogée la loi du 16 février 2010 susvisée organisant cette concomitance ; que ce report, limité à un an, n’a pas pour effet de méconnaître le principe selon lequel les électeurs doivent être appelés à exercer leur droit de suffrage selon une périodicité raisonnable ;
63. Considérant, d’autre part, qu’aux termes du quatrième alinéa de l’article 24 de la Constitution : « Le Sénat. . . Est élu au suffrage indirect. Il assure la représentation des collectivités territoriales de la République » ;
64. Considérant que le corps électoral des sénateurs est dans une très large majorité composé d’élus et de représentants des communes ; que les élections municipales seront organisées en mars 2014 ; que le grief tiré de ce que les sénateurs élus en septembre 2014 seront désignés par un collège en majeure partie composé d’élus exerçant leur mandat au-delà de son terme normal manque en fait ; que le grief tiré de la méconnaissance de l’article 24 de la Constitution doit par suite être écarté ;
65. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’article 47 de la loi déférée doit être déclaré conforme à la Constitution ;
66. Considérant qu’il n’y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d’office aucune autre question de constitutionnalité,
D É C I D E :
Article 1er.- Sont déclarées contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral :
– à l’article 15, le troisième alinéa de l’article L. 221 du code électoral ;
– l’article 30 et le tableau annexé ;
– à l’article 46 les mots « d’ordre topographique, comme l’insularité, le relief, l’hydrographie ; d’ordre démographique, comme la répartition de la population sur le territoire départemental ; d’équilibre d’aménagement du territoire, comme l’enclavement, la superficie, le nombre de communes par canton » figurant dans le paragraphe IV de l’article L. 3113-2 du code général des collectivités territoriales.
Article 2.- Sont déclarées conformes à la Constitution les dispositions suivantes de cette même loi :
– les articles 3 et 4 ;
– le surplus de l’article 15 ;
– les articles 16, 17, 18, 19 et 24 ;
– à l’article 33, les articles L. 273-6 et L. 273-11 du code électoral ;
– le surplus de l’article 46 et l’article 47.
Article 3.- Le tableau n° 2 annexé au code électoral (Tableau des secteurs pour l’élection des membres du conseil de Paris) est déclaré contraire à la Constitution.
Article 4.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 mai 2013, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d’ESTAING, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.