Conseil d’État, Assemblée, 21/12/2012, 362347, Publié au recueil Lebon
Conseil d’État – Assemblée
N° 362347
ECLI:FR:CEASS:2012:362347.20121221
Publié au recueil Lebon
Lecture du vendredi 21 décembre 2012
Rapporteur
M. Guillaume Odinet
Rapporteur public
M. Vincent Daumas
Avocat(s)
SCP BARADUC, DUHAMEL ; SCP DELAPORTE, BRIARD, TRICHET ; SCP ODENT, POULET ; SCP GATINEAU, FATTACCINI ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP PIWNICA, MOLINIE
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, 1°, sous le n° 362347, la requête, enregistrée le 30 août 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour la société Groupe Canal Plus, dont le siège est 1, place du Spectacle à Issy Les Moulineaux (92130), représentée par ses dirigeants en exercice, et la société Vivendi, dont le siège est 42, avenue de Friedland à Paris Cedex 08 (75380), représentée par ses dirigeants en exercice ; les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi demandent au Conseil d’Etat :
1) d’annuler pour excès de pouvoir la décision n° 12-DCC-100 du 23 juillet 2012 de l’Autorité de la concurrence relative à la prise de contrôle exclusif de TPS et Canalsatellite ;
2) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 15 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu, 2°, sous le n° 363542, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 octobre et 5 novembre 2012, présentés pour la société Parabole Réunion, dont le siège est 2 rue Emile Hugot à Sainte Clotilde (97400), représentée par ses dirigeants en exercice ; la société Parabole Réunion demande au Conseil d’Etat :
1) d’annuler pour excès de pouvoir la décision n° 12-DCC-100 du 23 juillet 2012 de l’Autorité de la concurrence relative à la prise de contrôle exclusif de TPS et Canalsatellite en tant que l’injonction n° 8 (a) est insuffisante à éliminer les risques d’atteinte à la concurrence sur le marché des départements et régions d’outre-mer ;
2) d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 28 août 2012 par laquelle le ministre de l’économie et des finances a rejeté sa demande tendant à ce qu’il mette en oeuvre le pouvoir d’évocation dont il dispose en vertu de l’article L. 430-7-1 du code de commerce ;
3) d’enjoindre au ministre de l’économie et des finances d’imposer à la société Groupe Canal Plus :
– de dégrouper les chaînes Canal + le Bouquet dans les départements et régions d’outre mer ;
– de limiter le champ de ses exclusivités contractuelles avec des chaînes d’éditeurs tiers sur le territoire des départements et régions d’outre-mer ;
– de renouveler son contrat de fourniture de chaînes à la société Parabole Réunion, dans des conditions commerciales (notamment sur les exclusivités) et de durée identiques à celles du contrat prenant fin au 31 décembre 2012 ;
– de mettre à disposition de la société Parabole Réunion des chaînes dégroupées proposant des contenus premium sportifs et cinématographiques en exclusivité de manière à rétablir l’attractivité de son bouquet ;
4) de mettre à la charge de la société Groupe Canal Plus et de l’Etat la somme globale de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
…………………………………………………………………………
Vu, 3°, sous le n° 363703, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 et 14 novembre 2012, présentés pour la société Numéricable, dont le siège est 10 rue Albert Einstein à Champs sur Marne (77420), représentée par ses dirigeants en exercice ; la société Numéricable demande au Conseil d’Etat :
1) d’annuler pour excès de pouvoir la décision n° 12-DCC-100 du 23 juillet 2012 de l’Autorité de la concurrence relative à la prise de contrôle exclusif de TPS et Canalsatellite ;
2) de mettre à la charge de l’Etat (Autorité de la concurrence) la somme de 6 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
…………………………………………………………………………
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de commerce ;
Vu la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
Vu le décret n° 2010-1379 du 12 novembre 2010 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Guillaume Odinet, Auditeur,
– les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la Société Groupe Canal Plus et de la Société Vivendi, de la SCP Odent, Poulet, avocat de la Société Parabole Réunion, de la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la Société Numéricable, de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de l’Autorité de la Concurrence, de la la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de TF1 et autres et de la SCP Lyon Caen, Thiriez avocat de Métropole Télévision (M6),
– les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la Société Groupe Canal Plus et de la Société Vivendi, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la Société Parabole Réunion, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de la Société Numéricable, à la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de l’Autorité de la Concurrence, à la la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat de TF1 et autres et à la SCP Lyon Caen, Thiriez avocat de Métropole Télévision (M6) ;
1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre la même décision et présentent à juger des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
2. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 30 août 2006, le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie a autorisé, en application du IV de l’article L. 430-7 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable, la création de la société Canal Plus France, contrôlée par la société Vivendi Universal et regroupant les activités de télévision payante de la société Groupe Canal Plus, notamment celles de Canalsat, et les activités de télévision payante de la société TPS, acquises par la société Vivendi Universal auprès des sociétés TFI et Métropole Télévision (M6) ; que cette autorisation était subordonnée à la réalisation effective de cinquante-neuf engagements pris par les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi Universal ; que, par une décision du 20 septembre 2011, l’Autorité de la concurrence a notamment, sur le fondement des dispositions du IV de l’article L. 430-8 du code de commerce, retiré la décision du 30 août 2006 du ministre chargé de l’économie ; qu’à la suite de cette décision, les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi ont procédé à une nouvelle notification de l’opération de concentration ; que, par une décision du 23 juillet 2012, l’Autorité de la concurrence a autorisé la prise de contrôle exclusif de Canalsat et TPS par les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi, sous réserve du respect de trente-trois injonctions prononcées par la décision ; que les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi, la société Parabole Réunion et la société Numéricable demandent l’annulation pour excès de pouvoir de cette décision ; que la société Parabole Réunion demande en outre l’annulation pour excès de pouvoir de la décision du 28 août 2012 par laquelle le ministre de l’économie et des finances a rejeté sa demande tendant à ce qu’il fasse usage du pouvoir d’évocation qu’il tient de l’article L. 430-7-1 du code de commerce et statue sur l’opération de concentration notifiée ;
Sur les interventions, dans l’affaire n° 362347, de la société Métropole Télévision (M6) et des sociétés Télévision Française 1 (TF1), TF1 Vidéo, TF1 Thématiques, Eurosport France SA, Histoire, Société paneuropéenne d’édition et d’exploitation de documentaires, Société d’exploitation de documentaires et TV Breizh :
3. Considérant que ces sociétés ont intérêt au maintien de la décision attaquée ; qu’ainsi leurs interventions sont recevables ;
Sur les conclusions tendant à l’annulation de la décision de l’Autorité de la concurrence du 23 juillet 2012 :
4. Considérant que la demande des sociétés Groupes Canal Plus et Vivendi Universal tendant à l’annulation de la décision n° 11-D-12 de l’Autorité de la concurrence du 20 septembre 2011 relative au respect des engagements figurant dans la décision autorisant l’acquisition de TPS et Canalsat par Vivendi Universal et Groupe Canal Plus a été rejetée par la décision n° 353856 en date de ce jour du Conseil d’Etat, statuant au contentieux ; que les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi, ne sont, par suite, pas fondées à demander, par voie de conséquence de l’illégalité de cette décision, l’annulation de la décision de l’Autorité de la concurrence du 23 juillet 2012 ;
Sur la légalité externe de la décision attaquée :
En ce qui concerne le délai d’adoption de la décision attaquée :
5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 430-7 du code de commerce : » I. Lorsqu’une opération de concentration fait l’objet d’un examen approfondi, l’Autorité de la concurrence prend une décision dans un délai de soixante-cinq jours ouvrés à compter de l’ouverture de celui-ci. / II. Après avoir pris connaissance de l’ouverture d’un examen approfondi en application du dernier alinéa du III de l’article L. 430-5, les parties peuvent proposer des engagements de nature à remédier aux effets anticoncurrentiels de l’opération. S’ils sont transmis à l’Autorité de la concurrence moins de vingt jours ouvrés avant la fin du délai mentionné au I, celui-ci expire vingt jours ouvrés après la date de réception des engagements. / (…) » ;
6. Considérant que l’Autorité de la concurrence a engagé un examen approfondi de l’opération de concentration par une décision du 27 mars 2012 ; que le délai prévu au I de l’article L. 430-7 du code de commerce, qui n’est pas un délai franc, expirait donc le 6 juillet 2012 ; que, les parties ayant transmis une proposition d’engagements le 26 juin 2012, soit moins de vingt jours ouvrés avant la fin de ce délai, celui-ci expirait vingt jours ouvrés après la date de réception des engagements, soit le 24 juillet 2012 ; que dès lors, le moyen tiré par la société Numéricable de ce que l’Autorité de la concurrence n’aurait pas statué dans le délai prévu à l’article L. 430-7 du code de commerce ne peut qu’être écarté ;
En ce qui concerne le caractère contradictoire de la procédure :
7. Considérant, en premier lieu, qu’en vertu des dispositions combinées de l’article L. 430-6 et du deuxième alinéa de l’article L. 463-2 du code de commerce, le rapport établi par les rapporteurs de l’Autorité de la concurrence est notifié aux parties ayant procédé à la notification, qui disposent d’un délai de quinze jours ouvrés pour produire leurs observations en réponse ; que, d’une part, la seule circonstance que le rapport communiqué aux parties le 11 mai 2012 mentionne, au sein du » propos introductif « , que certaines données financières, communiquées par les parties le 4 mai 2012 en réponse à une demande du 6 avril précédent, étaient en cours d’analyse, ne saurait conduire à regarder ce document comme partiel ou incomplet ; que, d’autre part, la note d’analyse de ces données financières qui, eu égard à son contenu, ne constituait pas un rapport complémentaire, dès lors qu’elle ne modifiait ni l’analyse concurrentielle, ni l’appréciation des injonctions, a été communiquée aux parties le 22 mai 2012 ; que celles-ci ont ainsi disposé d’un délai suffisant pour présenter utilement les observations que cette note pouvait appeler de leur part ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article L. 463-4 du code de commerce, applicable à l’examen des projets d’opérations de concentration en vertu de l’article L. 430-6 du même code : » Sauf dans les cas où la communication ou la consultation de ces documents est nécessaire à l’exercice des droits de la défense d’une partie mise en cause, le rapporteur général de l’Autorité de la concurrence peut refuser à une partie la communication ou la consultation de pièces ou de certains éléments contenus dans ces pièces mettant en jeu le secret des affaires d’autres personnes. Dans ce cas, une version non confidentielle et un résumé des pièces ou éléments en cause lui sont accessibles. / (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 463-15-1 du même code : » Pour l’application de l’article L. 463-4 dans le cadre de l’examen des projets d’opérations de concentration prévu au titre III, les personnes apportant des informations à l’Autorité de la concurrence lui précisent en même temps celles qui constituent des secrets d’affaires. Le rapporteur général veille à ce que ces informations soient réservées à l’Autorité et au commissaire du Gouvernement et à ce que soient constituées, si nécessaire, des versions non confidentielles des documents les contenant. / Les dispositions des articles R. 463-13 à R. 463-15 ne sont pas applicables » ; qu’il résulte de ces dispositions que si le rapporteur général peut refuser à une partie la communication de documents ou d’informations mettant en jeu le secret des affaires d’autres personnes, il lui incombe, dans les cas où la communication de telles informations est nécessaire à l’exercice des droits de la défense de cette partie, de lui donner accès au contenu de ces informations, le cas échéant au moyen de versions non confidentielles des documents ou de résumés suffisamment explicites pour lui permettre l’exercice de ses droits ; que, de même, si ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le rapport prévu à l’article L. 463-2 du code de commerce contienne des éléments couverts par le secret des affaires de personnes tierces et faisant l’objet d’une occultation, il incombe au rapporteur général, dans le cas où la communication de ces éléments est nécessaire à l’exercice des droits de la défense d’une partie, de lui donner accès à leur contenu, le cas échéant au moyen d’un résumé suffisamment explicite ;
9. Considérant que les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi soutiennent que les occultations auxquelles il a été procédé aux paragraphes 110, 131, 185, 213, 333 à 336, 348 et 565 à 571 du rapport et le refus de communication des réponses au test de marché les ont privées de l’exercice des droits de la défense ;
10. Considérant, toutefois, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier que les sociétés requérantes ont eu accès, le 22 mai 2012, à un résumé des paragraphes 185, 213, 333 à 336 et 348 du rapport qui indiquait clairement le sens des passages occultés et les mettait ainsi en mesure de contester leur contenu sans qu’il ait été besoin de porter atteinte au secret des affaires ; qu’il est constant qu’elles ont eu accès, le 1er juin 2012, à la version confidentielle des paragraphes 565 à 571 du rapport ; que les versions non confidentielles des réponses au test de marché produites au dossier, auxquelles les parties ont eu accès, les mettaient suffisamment en mesure de contester leur contenu ; que, s’il n’est pas contesté que la version non confidentielle de la réponse de la société Parabole Réunion au test de marché était insuffisante pour permettre l’exercice des droits de la défense, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que l’Autorité de la concurrence s’est fondée uniquement sur les documents annexés à cette réponse, qui ont été communiqués dans leur version confidentielle aux parties le 1er juin 2012 ;
11. Considérant, d’autre part, que les éléments occultés au paragraphe 131 du rapport ne figurent pas parmi les motifs de la décision attaquée ; que, dès lors, le caractère insuffisant du résumé de ce paragraphe est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
12. Considérant, enfin, qu’eu égard, d’une part, à l’impératif de célérité qui caractérise l’économie générale de la procédure d’examen des projets d’opération de concentration, d’autre part, à la circonstance que le contenu du paragraphe 110 du rapport figurait dans le projet de décision transmis aux parties intéressées le 11 juillet 2012, le caractère insuffisant du seul résumé du paragraphe 110 transmis aux parties le 22 mai 2012 ne peut être regardé comme ayant entaché la décision attaquée d’irrégularité ;
13. Considérant, en troisième lieu, que la communication aux parties, les 1er et 5 juin 2012, de deux procès-verbaux d’audition ne saurait être regardée comme entachant d’irrégularité la décision attaquée, dès lors, d’une part, qu’il n’est pas allégué que la décision attaquée se serait fondée sur le contenu de ces procès-verbaux, d’autre part, que les sociétés requérantes ont pu présenter utilement les observations que ces éléments appelaient de leur part avant l’expiration du délai de 15 jours ouvrés prévu par l’article L. 430-6 du code de commerce ou lors de la séance du 11 juin 2012 ;
14. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes du dernier alinéa du III de l’article L. 430-7 du code de commerce : » Le projet de décision est transmis aux parties intéressées, auxquelles un délai raisonnable est imparti pour présenter leurs observations » ; que ces dispositions n’imposaient pas la transmission du projet à la société Numéricable qui, en sa seule qualité de concurrente de la société Groupe Canal Plus, n’est pas une partie intéressée au sens de ces mêmes dispositions ;
15. Considérant, en cinquième lieu, que ni les dispositions précitées du III de l’article L. 430-7 du code de commerce, ni aucune autre disposition ou aucun principe ne faisait obstacle à ce que l’Autorité de la concurrence adoptât, pour tenir compte des observations formulées par la société Groupe France Telecom Orange, l’injonction n° 2 (c), dès lors que celle-ci ne constitue pas une mesure corrective nouvelle mais se borne à prévenir un comportement visant à priver les injonctions nos 2 (a) et 2 (b) de leur portée ; que par suite, doit être écarté le moyen tiré de ce que la décision serait irrégulière au motif qu’elle prononce une injonction qui ne figurait pas dans le projet de décision communiqué aux parties intéressées ;
16. Considérant, en sixième lieu, qu’il est constant que la société Groupe Canal Plus représentait l’ensemble de ses filiales dans la procédure d’examen de l’opération notifiée devant l’Autorité de la concurrence ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les filiales de la société Groupe Canal Plus n’auraient pas été mises à même de présenter leurs observations ne peut qu’être écarté ;
En ce qui concerne la consultation des tiers :
17. Considérant, d’une part, que ni les dispositions de l’article L. 462-9 du code de commerce, qui rappellent l’obligation de secret professionnel qui s’impose à l’Autorité de la concurrence, ni aucune autre disposition législative ou réglementaire ou aucun principe ne faisait obstacle à ce que l’Autorité de la concurrence procédât à une consultation publique des tiers sur les mesures correctives nécessaires à l’autorisation de cette opération ;
18. Considérant, d’autre part, que les parties, qui ont obtenu communication du résultat de cette consultation le 11 juillet 2012, ont disposé d’un délai suffisant pour pouvoir présenter utilement leurs observations ;
En ce qui concerne le respect du principe d’impartialité :
19. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes du paragraphe 1 de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : » Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (…) publiquement (…) par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera (…) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (…) » ;
20. Considérant que lorsqu’elle se prononce sur une opération de concentration qui lui a été notifiée, l’Autorité de la concurrence, qui ne prononce pas une sanction, statue sur une demande qui lui est présentée et, alors même qu’elle se prononce sur la base de normes de droit et à l’issue d’une procédure organisée, ne tranche pas une contestation sur des droits et obligations de caractère civil, mais exerce un pouvoir de police ; que dès lors, sa décision n’entre pas dans le champ des stipulations de l’article 6, paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut donc qu’être écarté ;
21. Considérant, en deuxième lieu, d’une part, que par sa décision n° 2012-280 QPC du 12 octobre 2012, le Conseil constitutionnel a jugé que le législateur avait pu, sans méconnaître le principe d’impartialité qui découle de l’article 16 de la Déclaration de 1789, confier à l’Autorité de la concurrence la charge de contrôler les opérations de concentration et le pouvoir de sanctionner les manquements aux engagements, injonctions et prescriptions figurant dans les décisions autorisant de telles opérations ; que contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne résulte pas de cette décision que le cumul, par l’Autorité de la concurrence, de la fonction de sanction des manquements et du pouvoir d’autorisation de l’opération à la suite du retrait de la première autorisation ne serait conforme à la Constitution qu’à la condition que les mêmes personnes ne soient pas amenées à adopter les deux décisions ; que, par suite, la circonstance que certains des membres de l’Autorité de la concurrence qui ont pris part à la décision attaquée avaient également délibéré sur la sanction de retrait de la précédente autorisation, par décision du 20 septembre 2011, ne saurait être regardée comme ayant méconnu les dispositions des articles L. 461-1 et suivants du code de commerce, tels qu’ils ont été interprétés par le Conseil constitutionnel ; qu’elle n’a pas davantage méconnu le principe d’impartialité, principe général du droit qui s’impose aux autorités administratives ;
22. Considérant, d’autre part, que la circonstance qu’a été divulguée dans la presse la teneur de l’avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel qui, au demeurant, était destiné aux membres de l’Autorité, ne saurait faire regarder la décision attaquée comme entachée d’une méconnaissance du principe d’impartialité qui s’impose aux autorités administratives ;
En ce qui concerne les autres moyens de légalité externe :
23. Considérant, en premier lieu, d’une part, que contrairement à ce que soutiennent les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi, il ne ressort ni du rapport, ni des autres pièces du dossier que l’Autorité de la concurrence n’aurait pas procédé à un examen complet et précis des données relatives à l’opération de concentration notifiée ; que, d’autre part, il ne ressort ni des termes de la décision attaquée, ni des pièces du dossier que l’Autorité de la concurrence se serait sentie liée par les réponses au test de marché et se serait abstenue de procéder elle-même à une analyse concurrentielle ;
24. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que l’examen approfondi de l’opération de concentration notifiée, qui a été engagé par une décision du 27 mars 2012, a donné lieu à des échanges contradictoires entre les parties ayant procédé à la notification et les rapporteurs de l’Autorité de la concurrence ; qu’au terme de ce processus s’est tenue, le 11 juin 2012, la séance prévue par l’article L. 463-7 du code de commerce, durant laquelle les parties ont été entendues par le collège de l’Autorité de la concurrence ; qu’à l’issue de la séance, le collège s’est réuni pour délibérer et a adopté une décision en se fondant sur les effets anticoncurrentiels de l’opération notifiée et les mesures correctives nécessaires à leur prévention et au maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération ; que le sens et les principaux éléments de cette décision ont été communiqués aux parties qui avaient procédé à la notification ; que celles-ci ont formulé, le 26 juin 2012, des propositions d’engagements qui ne constituaient que des réponses marginales aux effets anticoncurrentiels de l’opération identifiés par l’Autorité de la concurrence et dont elles avaient été informées, dès lors notamment qu’elles ne prévoyaient ni la renonciation au couplage des achats de droits de diffusion de contenus cinématographiques et des achats de droits de diffusion de séries, ni la renonciation au couplage des achats de chaînes en exclusivité pour la distribution sur toutes les plateformes de l’ADSL/fibre, ni la mise à disposition de chaînes de cinéma éditées par la société Groupe Canal Plus, ni la renonciation à la distribution privilégiée ou exclusive des services de VàD et VàDA de la société Groupe Canal Plus sur les plateformes des distributeurs tiers ; que les parties ont transmis à l’Autorité de la concurrence, le 10 juillet 2012, de nouvelles propositions qui ne contenaient aucun complément substantiel aux engagements précédemment formulés ; qu’il ressort des pièces du dossier que tous les membres du collège de l’Autorité de la concurrence ont estimé que les propositions d’engagements ainsi formulées étaient manifestement insuffisantes et ne remettaient pas en cause la position qu’ils avaient arrêtée collégialement le 11 juin 2012 ; que dès lors, la circonstance que le collège ne se soit pas réuni à nouveau pour confirmer formellement la décision attaquée n’a pas entaché celle-ci d’irrégularité ;
25. Considérant, en troisième lieu, que l’Autorité de la concurrence n’était pas tenue, dans les motifs de la décision attaquée, d’écarter les propositions d’engagements formulées par les parties ayant notifié l’opération ; qu’au demeurant, dès lors qu’en vertu de l’article L. 430-7 du code de commerce, le choix de prononcer des injonctions est exclusif de la possibilité de subordonner l’autorisation de l’opération à la réalisation effective d’engagements pris par les parties, l’Autorité de la concurrence a suffisamment justifié de son choix de prononcer des injonctions en estimant que certains seulement des engagements proposés n’étaient pas de nature à remédier aux effets anticoncurrentiels de l’opération notifiée ;
26. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes de l’article 1er de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : » Sont considérés comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d’un service public administratif. » ; qu’aux termes du second alinéa de l’article 4 de la même loi : » Toute décision prise par l’une des autorités administratives mentionnées à l’article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. » ; que l’Autorité de la concurrence, qui est une autorité administrative au sens de l’article 1er de la loi du 12 avril 2000, est en conséquence soumise aux prescriptions de l’article 4 de cette loi ; que, s’agissant d’une autorité à caractère collégial, il est satisfait aux exigences découlant de celles-ci, dès lors que les décisions que prend l’Autorité portent la signature de son président, accompagnée des mentions, en caractères lisibles, prévues par cet article ; qu’il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée répond à ces exigences ; que, par suite, le moyen tiré par la société Numéricable de leur méconnaissance doit être écarté ;
Sur la légalité interne de la décision attaquée :
En ce qui concerne les moyens de la requête des sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi tirés d’erreurs dans l’analyse concurrentielle :
27. Considérant que l’Autorité de la concurrence a procédé à l’analyse des effets sur la concurrence de l’opération notifiée en distinguant, d’une part, plusieurs marchés amont de droits de diffusion, d’autre part, plusieurs marchés intermédiaires d’édition et de commercialisation de chaînes de télévision ou de services de vidéo à la demande à l’acte (VàD) et par abonnement (VàDA), enfin, des marchés de distribution de services de télévision payante linéaire et de services de VàD et VàDA ; que les sociétés requérantes, qui ne contestent pas la définition des marchés pertinents, soutiennent en revanche que l’Autorité de la concurrence a commis des erreurs dans l’analyse des risques concurrentiels de l’opération notifiée ;
S’agissant de l’acquisition de droits de diffusion en télévision payante linéaire de contenus cinématographiques et audiovisuels :
28. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé, d’une part, que l’opération renforçait la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus sur les marchés amont de droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains récents et de films d’expression originale française récents, dès lors qu’elle renforçait la position dominante à l’achat de la société Groupe Canal Plus sur ces marchés et que la concurrence réelle et potentielle était faible ; qu’elle a estimé, d’autre part, que la société Groupe Canal Plus pourrait s’appuyer sur cette puissance d’achat pour conquérir une position dominante, à l’achat, sur le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de séries américaines récentes ;
Quant à l’existence d’une position dominante à l’achat :
29. Considérant que, pour estimer que l’opération avait renforcé la position dominante, à l’achat, de la société Groupe Canal Plus sur le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains récents, l’Autorité de la concurrence s’est fondée, d’une part, sur la circonstance que les » majors » américaines qui avaient conclu des contrats cadres avec la société TPS ont, postérieurement à la réalisation de l’opération, conclu des contrats cadres avec la société Groupe Canal Plus, d’autre part, sur la circonstance que, même après l’entrée sur le marché d’Orange, la société Groupe Canal Plus avait conservé une position dominante, caractérisée par la détention de 79 % des parts de marché en volume et 65 % en valeur, enfin, sur la circonstance que la société Groupe Canal Plus, qui avait déjà conclu un contrat cadre avec cinq des six » majors » américaines, avait conclu le 23 mars 2012 un contrat cadre avec la seule » major » restante, qui entrerait en vigueur au 1er septembre 2013 ;
30. Considérant, en premier lieu, que si les sociétés requérantes soutiennent que la société Groupe Canal Plus aurait réorienté sa stratégie en choisissant d’acquérir un nombre plus limité de films afin de privilégier la qualité des contenus achetés et en favorisant l’édition de ses propres contenus, cette stratégie, à la supposer établie, ne lie pas la société Groupe Canal Plus dans ses choix futurs ; qu’au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’une telle stratégie était élaborée et décidée à la date de la décision attaquée ;
31. Considérant, en deuxième lieu, que si, en vertu des engagements figurant dans la décision n° 12-DCC-101 du 23 juillet 2012 relative à la prise de contrôle exclusif des sociétés Direct 8, Direct Star, Direct Productions, Direct Digital et Bolloré Intermédia par Vivendi et Groupe Canal Plus, la société Groupe Canal Plus ne peut conclure auprès de plus d’une » major » américaine des contrats cadres par lesquels elle détiendrait à la fois les droits de diffusion de films inédits en télévision payante et les droits de diffusion en clair de films ou de séries récentes, de tels engagements n’ont, par eux-mêmes, ni pour objet, ni pour effet de limiter le nombre de » majors » avec lesquelles la société Groupe Canal Plus peut conclure un contrat cadre pour l’achat de droits de diffusion en télévision payante de films américains récents ;
32. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier que la moitié des contrats cadres conclus avec les » majors » américaines énumérées dans la décision attaquée arriverait à échéance en 2013 ; que la seule circonstance qu’il ne soit pas possible d’affirmer que les » majors » américaines souhaiteront renouveler les contrats arrivant à échéance est sans incidence sur la position concurrentielle de la société Groupe Canal Plus sur le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains récents ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier qu’à la date de la décision attaquée, il était décidé que les contrats cadres auxquels la société Groupe Canal Plus était partie arrivant à échéance en 2013 ne seraient pas renouvelés ;
33. Considérant, en quatrième lieu, qu’il est constant qu’à la suite de la réalisation initiale de l’opération de concentration, le 4 janvier 2007, la société Groupe Canal Plus a durablement été et était encore, à la date de la décision attaquée, engagée par des contrats cadres conclus avec cinq » majors » américaines sur six, portant sur plus des trois quarts des films et près des deux tiers des droits du marché ; que, dès lors, les circonstances, à les supposer établies, d’une part, qu’à la date de la décision attaquée, les sociétés Groupe Canal Plus et Sony auraient décidé de ne pas reconduire le contrat cadre qu’elles avaient conclu et qui arrivera à expiration le 31 mars 2013, d’autre part, que la société Groupe Canal Plus n’aurait pas la capacité financière de conclure des contrats cadres avec l’ensemble des » majors « , ne permettent pas de démontrer que la société Groupe Canal Plus ne disposerait pas d’une position dominante, à l’achat, sur le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains récents ;
34. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que l’opération avait renforcé la position dominante, à l’achat, de la société Groupe Canal Plus sur le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains récents ;
Quant à la concurrence exercée par la société Orange Cinéma Séries-OCS :
35. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé que la société Orange Cinéma Séries-OCS n’exerçait plus une concurrence directe sur la société Groupe Canal Plus, en se fondant sur les circonstances, d’une part, que la société Groupe Canal Plus possédait un tiers des parts de la société OCS et pouvait bloquer les décisions déterminant la stratégie commerciale de cette société, notamment le développement de la VàDA, ainsi que l’ensemble des décisions qualifiées d’ » importantes » par les statuts, d’autre part, que la société OCS, dont la baisse des investissements était programmée, avait recentré sa stratégie sur les séries en se désengageant des marchés de droits de diffusion de contenus cinématographiques et entendait ainsi éditer des chaînes venant compléter les chaînes éditées par la société Groupe Canal Plus plutôt que les concurrencer directement ;
36. Considérant, d’une part, que si le pacte d’associés de la société OCS prévoit que cette société conserve la maîtrise de la politique éditoriale, qui est mise en oeuvre par le gérant, il ressort des pièces du dossier que le gérant doit soumettre à l’approbation préalable du conseil toutes les décisions qualifiées d’importantes par les associés et que de telles décisions ne peuvent être adoptées sans le vote favorable d’au moins un membre du conseil nommé sur proposition de la société Multithématiques SAS, filiale de la société Groupe Canal Plus ; que la circonstance, à la supposer établie, que le recours de la société OCS aux services de la société Groupe Canal Plus pour l’achat de droits de diffusion se fasse dans le cadre d’un contrat équilibré, sans que la société Groupe Canal Plus maîtrise la politique d’acquisition, n’est pas de nature à démontrer l’existence d’une concurrence directe entre les deux sociétés ; que ne l’est pas davantage la circonstance, à la supposer établie, que le plafonnement et la réduction programmée des investissements de la société OCS constituent une garantie pour la société Groupe Canal Plus ; que, dès lors, la société OCS ne peut être regardée comme un concurrent indépendant de la société Groupe Canal Plus, alors même que les informations transmises à cette dernière en vertu du pacte d’associés ne lui permettraient pas, à elles seules, d’exercer un droit de regard sur la stratégie éditoriale ;
37. Considérant, d’autre part, qu’il est constant que la société OCS entend recentrer sa stratégie sur les séries plutôt que sur les films récents ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier qu’un tel recentrage, qui aura pour effet immédiat de diminuer la pression concurrentielle exercée par la société OCS sur les marchés de droits de diffusion de films récents, conduirait cette société, à moyen terme, à être plus active sur ces marchés ; qu’il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, que la société OCS, qui a renoncé à reconduire le seul contrat cadre avec une » major » qu’elle avait conclu, pourrait » à tout moment » conclure de nouveaux contrats cadres ; que si les sociétés requérantes soutiennent qu’il n’est pas possible d’anticiper une baisse de l’attractivité des chaînes OCS du fait de l’échéance du contrat conclu entre la société OCS et la société HBO, cette circonstance, relative aux négociations existant sur le marché des droits de diffusion de séries américaines récentes, n’est pas de nature à démontrer que la société OCS constituerait un concurrent direct de la société Groupe Canal Plus sur le marché des droits de diffusion de films américains récents ;
38. Considérant, dès lors, que le moyen tiré de ce que l’Autorité de la concurrence aurait commis une erreur dans l’analyse concurrentielle en estimant que la société OCS n’était plus une concurrente directe de la société Groupe Canal Plus sur les marchés de droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains et français récents doit être écarté ;
Quant à l’existence de barrières à l’entrée :
39. Considérant que, pour estimer que les marchés amont de droits de diffusion linéaire de films récents étaient caractérisés par de fortes barrières à l’entrée, l’Autorité de la concurrence s’est fondée sur la longue durée, le coût et l’opacité des dates d’échéance des contrats cadres conclus avec les principaux détenteurs de droits de films américains, ainsi que sur la nécessité de disposer d’un savoir-faire spécifique, d’une assise financière suffisante et d’une base d’abonnés large ;
40. Considérant, en premier lieu, que la seule circonstance qu’Orange soit parvenue à entrer sur les marchés amont de droits de diffusion linéaire de films récents n’est pas, par elle-même, de nature à démontrer qu’il n’existerait pas de barrières à l’entrée sur ce marché ;
41. Considérant, en deuxième lieu, que si la décision attaquée retient que la faiblesse des résultats de l’entrée d’Orange sur les marchés amont démontre les grandes difficultés rencontrées par cette société pour contester les positions de la société Groupe Canal Plus, cette appréciation ne constituait qu’un élément surabondant au regard des éléments rappelés précédemment ; que, dès lors, la circonstance qu’elle procède d’une analyse erronée, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
42. Considérant, en troisième lieu, que la circonstance, au demeurant postérieure à la décision attaquée, que les chaînes BeIn Sport aient pu obtenir rapidement un nombre d’abonnés important ne remet pas en cause la nécessité, constatée par l’Autorité de la concurrence, de disposer d’une base d’abonnés large pour amortir les coûts importants résultant de l’achat de droits sur les marchés amont ;
43. Considérant, dès lors, que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que l’Autorité de la concurrence aurait commis une erreur d’appréciation en estimant que les marchés de droits de diffusion linéaire de films américains et français récents étaient caractérisés par de fortes barrières à l’entrée ;
Quant aux éléments susceptibles de compenser la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus :
44. Considérant, en premier lieu, d’une part, que si des études réalisées en 2012 par l’autorité de concurrence britannique, qui concluent à l’existence d’une pression concurrentielle suffisante exercée par les services de VàDA sur Internet, dite » over the top « , sur les services de télévision payante, il ressort toutefois des pièces du dossier que ces études, qui ne liaient pas l’Autorité de la concurrence, sont fondées sur une situation concurrentielle dans laquelle la VàDA sur Internet est déjà développée et propose également des contenus de première et deuxième fenêtres de diffusion payante ; qu’elles ne pouvaient donc être transposées à la situation concurrentielle française où la VàDA était peu développée, essentiellement distribuée via les services de télévision payante et n’offrait que des films sortis en salle depuis plus de 36 mois ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que les services offrant des films sortis en salle depuis plus de 36 mois seraient considérés par les consommateurs comme d’une attractivité équivalente à celle des services offrant des films de première ou deuxième fenêtre de télévision payante ; que dès lors, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant qu’en l’état des marchés relatifs à la VàDA à la date de sa décision, les acheteurs présents sur le marché des droits de diffusion non linéaire de contenus cinématographiques n’exerceraient pas une pression concurrentielle suffisante pour prévenir les effets anticoncurrentiels résultant du renforcement de la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus sur les marchés de droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains et français récents ; que, d’autre part, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort ni de la définition des marchés pertinents, au demeurant non contestée, ni des pièces du dossier, que les éditeurs de chaînes pourraient réaliser des chaînes concurrençant effectivement les chaînes éditées par la société Groupe Canal Plus en acquérant uniquement des droits de diffusion de séries américaines récentes et des droits de diffusion de films de catalogue ; que, dès lors, les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus n’aurait pas d’effet anticoncurrentiel en raison de la concurrence existant sur les autres marchés de droits de diffusion ;
45. Considérant, en second lieu, que l’Autorité a estimé que la puissance d’achat dont dispose la société Groupe Canal Plus à l’issue de l’opération notifiée n’était que partiellement remise en cause par le pouvoir de marché des détenteurs de droits de films américains récents et n’était pas limitée par le pouvoir de marché des détenteurs de droits de films d’expression originale française récents ;
46. Considérant, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier que, si les ventes de droits de films américains récents pour une diffusion en télévision payante linéaire en France ne représentent qu’une partie infime du chiffre d’affaires des principaux détenteurs de droits de films américains récents, le marché français, envisagé dans sa globalité, est toutefois une source de revenus importante, si bien qu’une diffusion des films en France est toujours recherchée ; que, dans ce cadre, en estimant que la situation de quasi-monopsone dans laquelle la société Groupe Canal Plus se trouve placée, en raison de l’absence de concurrents directs à l’achat de droits de films américains récents pour une diffusion en télévision payante linéaire en France, n’était que partiellement compensée par le pouvoir de marché des principaux détenteurs de droits américains, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’analyse concurrentielle ; que la seule circonstance que la quantité et le coût global des investissements de la société Groupe Canal Plus en droits de diffusion de films américains récents aient augmenté depuis 2007, à la supposer établie, n’est pas, par elle-même, de nature à remettre en cause cette appréciation ;
47. Considérant, d’autre part, que la circonstance que la société Groupe Canal Plus ait adopté une » stratégie éditoriale de diversité et de qualité « , qui ne la lie pas, n’affecte pas, par elle-même, la puissance d’achat dont elle dispose sur le marché de droits de diffusion en télévision payante linéaire de films d’expression originale française récents ; qu’en estimant que l’obligation de diffuser un quota de films d’expression originale française ne conduisait pas à compenser la puissance d’achat résultant de la situation de quasi-monopsone de la société Groupe Canal Plus, en raison de la faible taille des opérateurs du secteur de la production de films d’expression originale française et de l’importance des besoins de financement des producteurs, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation ;
Quant à l’effet de levier sur le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de séries américaines récentes :
48. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé qu’à la suite de l’opération notifiée, la société Groupe Canal Plus aurait la capacité d’utiliser sa puissance d’achat sur le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains récents pour obtenir une position dominante sur le marché des droits de diffusion linéaire de séries américaines récentes, au motif que les achats de ces deux types de contenus se négocient avec les mêmes offreurs et peuvent faire l’objet d’une négociation commune ;
49. Considérant que, dès lors que la société Groupe Canal Plus se trouve en situation de quasi-monopsone sur le marché des droits de diffusion linéaire de films américains récents, la circonstance qu’elle ne dispose que de moins de 10 % des parts de marché, à l’achat, sur le marché des droits de diffusion de séries américaines récentes ne remet pas en cause sa capacité à exercer un effet de verrouillage sur ce marché en utilisant sa puissance d’achat sur le marché des droits de diffusion linéaire de films américains récents ; que la circonstance que, depuis 2006, la société Groupe Canal Plus n’ait pas mis en oeuvre une telle stratégie de verrouillage ne permet pas d’établir qu’elle n’en aurait pas la capacité ou l’incitation, dès lors notamment que l’engagement n° 4 qui figurait dans la décision du 30 août 2006 autorisant l’opération de concentration imposait aux parties de découpler les acquisitions de droits de diffusion de films américains et de droits de diffusion de séries américaines ; que contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort des pièces du dossier que les droits de diffusion linéaire des séries et des films américains, qui se négocient avec les mêmes interlocuteurs, peuvent faire l’objet d’une négociation simultanée ;
50. Considérant, par suite, que l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de fait, ni erreur d’appréciation en estimant que l’opération notifiée produisait un effet anticoncurrentiel de type congloméral entre le marché des droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains récents et le marché des droits de diffusion de séries américaines récentes ;
S’agissant de l’édition et la commercialisation de chaînes de télévision :
51. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé que l’opération notifiée avait pour effet de placer la société Groupe Canal Plus en situation de position dominante sur le marché de l’édition des chaînes de cinéma ;
52. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, la part de marché de la société Groupe Canal Plus mesurée en nombre de chaînes de cinéma ne permet pas, eu égard aux fortes différences d’attractivité et, par suite, de valeur, susceptibles d’exister entre les chaînes, de mesurer sa position sur le marché de l’édition des chaînes de cinéma ;
53. Considérant, en deuxième lieu, que si, comme le soutiennent les sociétés requérantes, la part de marché en audience ne peut être retenue dès lors que l’audience des chaînes OCS, dont l’Autorité admet qu’elles constituaient les principales chaînes concurrentes aux chaînes de cinéma éditées par la société Groupe Canal Plus, n’est pas mesurée, il ressort toutefois des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs pas contesté, que la société Groupe Canal Plus détient 54 % des parts de marché en valeur sur le marché de l’édition des chaînes de cinéma ;
54. Considérant, en troisième lieu, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus édite les chaînes de cinéma ayant la plus grande notoriété et bénéficiant de la très grande majorité des droits de diffusion linéaire de films américains et français récents ;
55. Considérant, d’autre part, qu’à la suite de la prise de participation de la société Groupe Canal Plus dans la société OCS, le pacte d’associés de cette société a prévu une baisse des investissements sur le marché amont ; que celle-ci a réorienté sa stratégie d’achat sur les séries, en se désengageant des marchés de droits de diffusion de contenus cinématographiques, afin d’éditer des chaînes venant compléter les chaînes éditées par la société Groupe Canal Plus plutôt que les concurrencer directement ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que, à la date de la décision attaquée, le lancement d’une nouvelle chaîne de cinéma attractive aurait été prévisible ; que les autres chaînes de cinéma présentes sur le marché sont d’une attractivité moindre ; qu’ainsi, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier que, postérieurement à l’opération notifiée, les distributeurs tiers pourraient avoir accès, auprès des éditeurs concurrents de la société Groupe Canal Plus, à des chaînes de cinéma d’une attractivité comparable à celles qui sont éditées par cette société ;
56. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’analyse concurrentielle en estimant que la société Groupe Canal Plus disposait d’une position dominante sur le marché de l’édition des chaînes de cinéma ;
S’agissant de la distribution de chaînes thématiques :
57. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé, d’une part, que l’opération notifiée avait pour effet de renforcer la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus sur les marchés intermédiaires de l’édition de chaînes thématiques, d’autre part, qu’elle permettrait à la société Groupe Canal Plus de verrouiller l’accès des distributeurs concurrents aux intrants dans des thématiques regardées comme essentielles à la composition d’une offre de télévision payante attractive, enfin, qu’elle permettrait à la société Groupe Canal Plus de verrouiller l’accès des éditeurs de chaînes à la clientèle ;
Quant à la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus :
58. Considérant que, pour estimer que l’opération notifiée avait renforcé la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus, l’Autorité de la concurrence s’est fondée sur la situation de premier contributeur en redevances versées aux éditeurs de chaînes de la société Groupe Canal Plus, sur la détention par cette société d’une position dominante sur le marché aval des services de télévision payante, sur l’opacité des conditions contractuelles et les primes d’exclusivité versées aux éditeurs de chaînes par la société Groupe Canal Plus qui ont pour effet de maintenir les éditeurs de chaînes dans une situation de dépendance en les empêchant de se tourner vers d’autres distributeurs, sur la dépendance économique des chaînes distribuées à titre non exclusif à l’égard de la société Groupe Canal Plus, dès lors que cette dernière peut faire varier leur rentabilité en fonction du positionnement des chaînes dans son offre et de ses efforts de promotion, et sur l’absence, pour les éditeurs de chaînes, de véritables débouchés de distribution alternatifs, notamment de la part des fournisseurs d’accès à Internet, à la distribution par la société Groupe Canal Plus ;
59. Considérant, en premier lieu, que si, comme le soutiennent les sociétés requérantes, le fait que la société Groupe Canal Plus est le premier contributeur en redevances versées aux éditeurs de chaînes ne suffit pas, à lui seul, à caractériser le renforcement de la puissance d’achat résultant de l’opération notifiée, il résulte de ce qui vient d’être dit que l’Autorité de la concurrence ne s’est pas fondée sur cette unique circonstance ; qu’en retenant, dans les motifs de sa décision, la part de la société Groupe Canal Plus dans les redevances versées aux éditeurs de chaînes, qui permet de mesurer la position des acheteurs effectivement présents sur les marchés concernés, l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de droit, ni erreur d’appréciation ;
60. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le calcul d’une » prime d’exclusivité » versée par la société Groupe Canal Plus aux éditeurs de chaînes ne permette pas de rendre compte des relations contractuelles entre la société Groupe Canal Plus et les éditeurs de chaînes que celle-ci distribue en exclusivité dès lors, notamment, d’une part, que les contrats conclus entre ces parties prévoient parfois l’application d’une décote en cas de perte d’exclusivité, d’autre part, que la perte d’exclusivité n’empêche pas les contrats de comprendre des stipulations relatives au maintien de la qualité des chaînes ; que l’Autorité de la concurrence n’a donc commis ni erreur de droit, ni erreur d’appréciation en se fondant sur les primes d’exclusivité versées par la société Groupe Canal Plus pour déterminer sa capacité à maintenir les éditeurs de chaînes dans une relation contractuelle prévoyant une distribution exclusive ;
61. Considérant, en troisième lieu, que, si les sociétés requérantes soutiennent que la société AB et la société Groupe France Télécom Orange proposent des offres satellitaires, d’une part, il est constant que la société AB n’est pas distributeur sur l’ADSL, d’autre part, il ressort des pièces du dossier et du procès-verbal de l’audience d’instruction que l’offre satellitaire d’Orange n’est destinée qu’aux abonnés des offres » triple play » de cet opérateur qui ne sont pas éligibles à la télévision par ADSL ; qu’elle n’est donc pas distribuée séparément sur le satellite ; que par suite, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur de fait en estimant que la société Groupe Canal Plus était le seul distributeur à être présent sur l’ensemble des plateformes de distribution ;
62. Considérant, en quatrième lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier qu’il serait impossible à la société Groupe Canal Plus de valoriser la distribution d’une chaîne plateforme par plateforme ; que la seule circonstance qu’il soit dans l’intérêt de cette société de ne proposer aux éditeurs de chaînes qu’une distribution exclusive sur l’ensemble des plateformes est sans incidence sur les effets anticoncurrentiels d’une telle pratique contractuelle de la part d’un demandeur disposant d’une puissance d’achat telle que la sienne ;
63. Considérant, en cinquième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier que les fournisseurs d’accès à Internet seraient susceptibles d’amortir sur leur seule plateforme de distribution le coût d’acquisition de l’exclusivité de distribution d’une chaîne sur l’ensemble des plateformes ADSL ;
64. Considérant, en sixième lieu, que la seule circonstance que trente et une chaînes soient passées, dans l’offre Canalsat, d’un mode de distribution exclusif à un mode de distribution non exclusif n’est pas, par elle-même, de nature à démontrer que les éditeurs de chaînes peuvent opter, dans des conditions transparentes, pour le mode de distribution qu’ils privilégient ; qu’il ressort au contraire des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l’audience d’instruction, que la société Groupe Canal Plus a la capacité, en ne présentant aux éditeurs de chaînes indépendants qu’une offre de reprise exclusive pour l’ensemble des plateformes, accompagnée, le cas échéant, d’une offre de reprise non exclusive intégrant l’application d’une décote exagérément élevée, d’empêcher la sortie de certaines chaînes d’une relation contractuelle prévoyant une distribution exclusive et de maintenir ainsi les éditeurs de chaînes dans une situation de dépendance ;
65. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de fait, ni erreur d’appréciation en estimant que la pratique des exclusivités et l’opacité des relations contractuelles entre la société Groupe Canal Plus et les éditeurs de chaînes ne permettaient pas à ces derniers d’arbitrer de façon éclairée entre une distribution exclusive, sur tout ou partie des plateformes de diffusion, et une distribution non exclusive et contribuaient ainsi à renforcer la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus sur les marchés intermédiaires de l’édition de chaînes thématiques ;
Quant au verrouillage des intrants :
66. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, l’Autorité a bien recherché, pour caractériser la capacité de la société Groupe Canal Plus à effectuer un verrouillage des intrants, si les exclusivités détenues par cette société étaient telles qu’aucun distributeur concurrent n’était en mesure de construire une offre lui permettant de rivaliser de façon effective avec cette société ; qu’en procédant à un tel examen, elle n’a pas commis d’erreur de droit ;
67. Considérant, en premier lieu, que si, comme le soutiennent les sociétés requérantes, le critère de l’audience des chaînes détenues en exclusivité ne permettait pas d’apprécier l’attractivité des chaînes éditées par la société OCS, dès lors que l’audience de ces chaînes n’était pas mesurée, il ressort des pièces du dossier que l’Autorité de la concurrence a apprécié l’attractivité de ces chaînes en tenant compte de leur positionnement stratégique et de la qualité de leurs contenus, mesurée par les investissements en droits de diffusion de films récents ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le critère de l’audience, combiné avec ces critères, n’aurait pas été pertinent pour mesurer l’attractivité des autres chaînes ; qu’en revanche, le critère du nombre de chaînes dans chacune des thématiques essentielles ne pouvait être regardé comme pertinent en raison des fortes différences d’attractivité existant entre les chaînes ; que, dès lors, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur de droit dans l’analyse de l’importance des exclusivités détenues par la société Groupe Canal Plus ;
68. Considérant, en deuxième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que, si l’Autorité de la concurrence a constaté que la société Groupe Canal Plus disposait d’un monopole sur le marché de l’édition de chaînes premium mixtes, elle n’a pas exclu que les chaînes premium monothématiques puissent exercer une pression concurrentielle sur ce marché ;
69. Considérant, en troisième lieu, qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, il ressort des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus édite et distribue en exclusivité les chaînes de cinéma ayant la plus grande notoriété et bénéficiant de la très grande majorité des droits de diffusion de films américains et français récents ; qu’il ressort des pièces du dossier que la qualité des chaînes Ciné + mises à disposition des distributeurs tiers par la société Groupe Canal Plus en vertu des engagements figurant dans la décision d’autorisation du 30 août 2006 a subi une forte dégradation depuis 2007 ; qu’enfin, à la suite de la prise de participation de la société Groupe Canal Plus dans la société OCS, le pacte d’associés de cette société a prévu une baisse des investissements sur le marché amont et celle-ci a réorienté sa stratégie d’achat sur les séries, en se désengageant des marchés de droits de diffusion de contenus cinématographiques, afin d’éditer des chaînes venant compléter les chaînes éditées par la société Groupe Canal Plus plutôt que les concurrencer directement ; que dès lors, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant qu’en raison des exclusivités de distribution détenues par la société Groupe Canal Plus, les distributeurs concurrents subissaient un verrouillage des intrants dans la thématique du cinéma ;
70. Considérant, en quatrième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus édite et distribue en exclusivité les chaînes Infosport + et Sport + ; qu’à la date de la décision attaquée, elle distribuait également en exclusivité la chaîne L’Equipe TV et devait distribuer prochainement en exclusivité la chaîne Ma Chaîne Sport ; que l’ensemble de ces chaînes représente 60 % de l’audience totale mesurée pour les chaînes de sport ; que, si la société Groupe Canal Plus ne distribue en exclusivité ni les chaînes Eurosport et Eurosport 2, qui réalisent la plus forte audience des chaînes de sport, ni les chaînes BeIn Sport, dont l’audience n’a pas été mesurée mais qui proposent des contenus premium et figurent donc parmi les chaînes les plus attractives, si bien que les exclusivités détenues par la société Groupe Canal Plus n’ont pas, à elles seules, pour effet de verrouiller les intrants dans la thématique du sport, il ressort toutefois des pièces du dossier et du procès-verbal de l’audience d’instruction qu’eu égard à ses pratiques contractuelles pour la reprise des chaînes dans ses offres de télévision payante, la société Groupe Canal Plus aurait la capacité de ne proposer, lors du renouvellement des contrats de distribution de ces chaînes, qu’une distribution en exclusivité, qui aurait pour effet de priver les distributeurs tiers de l’accès à des chaînes nécessaires à la composition d’un bouquet attractif ; que, dès lors, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que la société Groupe Canal Plus aurait la capacité de verrouiller l’accès des distributeurs concurrents aux intrants dans la thématique du sport ;
71. Considérant, en cinquième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus distribue en exclusivité les chaînes Disney Junior, Disney XD, Canal J, June, Tiji, Nickelodeon, Nickelodeon Junior et Cartoon Network, qui représentent 64 % de l’audience totale mesurée pour les chaînes jeunesse ; que si, en vertu des engagements figurant dans la décision du 30 août 2006, elle ne distribuait pas en exclusivité les chaînes Piwi + et Télétoon +, qui figurent parmi les chaînes les plus attractives, il est constant qu’elle peut décider, dès lors qu’elle édite ces chaînes, de ne plus les mettre à disposition des distributeurs tiers ; qu’ainsi, et alors même que les distributeurs concurrents ont accès à la chaîne Disney Channel, dont il est constant qu’elle figure parmi les chaînes les plus attractives, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que les distributeurs concurrents subissaient un verrouillage des intrants dans la thématique de la jeunesse ;
72. Considérant, en sixième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que l’Autorité de la concurrence n’a pas estimé que la société Groupe Canal Plus aurait la capacité de verrouiller l’accès des distributeurs concurrents aux intrants dans la thématique de l’information ;
73. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que l’opération notifiée permettrait à la société Groupe Canal Plus de verrouiller l’accès des distributeurs concurrents aux intrants dans des thématiques regardées comme essentielles à la composition d’une offre de télévision payante attractive ;
Quant à l’absence de débouchés alternatifs suffisants :
74. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé que la circonstance que les fournisseurs d’accès à Internet ne constituent pas des débouchés de distribution alternatifs suffisants contribuait à caractériser la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus sur les marchés intermédiaires et sa capacité à verrouiller l’accès des éditeurs de chaînes à la clientèle ;
75. Considérant, en premier lieu, que ni la circonstance qu’il existe une certaine porosité entre les offres de télévision payante de premier et de second niveau des fournisseurs d’accès à Internet, qui demeure ponctuelle et ne concerne pas toutes les chaînes, ni celle que les offres dites » triple play » de premier niveau incluent un service de télévision payante ayant un coût ne sont de nature à établir que les offres de premier et de second niveau pourraient être substituées les unes aux autres ; qu’à l’inverse, il ressort des pièces du dossier, et notamment des avis du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, que ces deux types d’offres contiennent des bouquets de chaînes présentant des différences de contenu et d’attractivité structurelles ; que dès lors, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant qu’à la date de sa décision, les offres de télévision payante de premier niveau des fournisseurs d’accès à Internet ne constituaient pas, pour les éditeurs de chaînes, des débouchés alternatifs à la distribution sur Canalsat ;
76. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment des études produites par les sociétés requérantes, qui se fondent sur des éléments ne permettant qu’indirectement de mesurer l’intensité concurrentielle du marché aval, que la société Groupe Canal Plus, qui détient, sans tenir compte des parts de marché de la société SFR, 90,7 % des parts de marché en valeur et 78,8 % des parts de marché en nombre d’abonnements sur le marché aval de la distribution de services de télévision payante, serait soumise à » une contrainte concurrentielle forte » sur ce marché, permettant aux éditeurs de chaînes de bénéficier de nombreux débouchés ; qu’eu égard à la part de marché en nombre d’abonnements que détient la société Groupe Canal Plus sur le marché de la distribution de services de télévision payante, il ne ressort des pièces du dossier, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, ni que les fournisseurs d’accès à Internet disposent d’une base d’abonnements leur permettant de rémunérer les chaînes, y compris en exclusivité, à un niveau concurrençant les offres de reprise de la société Groupe Canal Plus, ni qu’ils peuvent offrir aux chaînes une exposition équivalente à celle permise par l’offre Canalsat ;
77. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que les fournisseurs d’accès à Internet ne constituaient pas des débouchés de distribution alternatifs suffisants à la distribution sur Canalsat ;
Quant à l’effet des commissions versées aux fournisseurs d’accès à Internet :
78. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé que l’augmentation de la rémunération, incluant une composante variable incitative, versée par la société Groupe Canal Plus aux fournisseurs d’accès à Internet en contrepartie du transport de ses bouquets sur l’ADSL et de la commercialisation de ses offres auprès de leurs clients avait pour effet d’inciter les fournisseurs d’accès à Internet à commercialiser les offres de la société Groupe Canal Plus plutôt que leurs propres offres de télévision payante de second niveau ;
79. Considérant que la seule circonstance que l’augmentation de cette rémunération traduise le pouvoir de négociation dont disposent les fournisseurs d’accès à Internet est sans incidence sur l’appréciation ainsi portée sur les effets concurrentiels d’une telle augmentation ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l’Autorité de la concurrence aurait commis une erreur d’analyse concurrentielle au motif que l’augmentation des commissions versées aux fournisseurs d’accès à Internet traduirait le pouvoir de négociation de ces derniers ne peut qu’être écarté ;
S’agissant des marchés aval des services de télévision payante :
80. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé que l’opération notifiée renforçait le pouvoir de marché de la société Groupe Canal Plus sur le marché aval de services de télévision payante ;
81. Considérant, en premier lieu, qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, il ressort des pièces du dossier qu’à la suite de l’opération notifiée, la société Groupe Canal Plus détient, sans tenir compte des parts de marché de la société SFR, 90,7 % des parts de marché en valeur et 78,8 % des parts de marché en nombre d’abonnements sur le marché aval des services de télévision payante ; que, bien que les distributeurs concurrents puissent répondre à une demande supplémentaire dans l’hypothèse d’une augmentation des prix des offres de télévision payante de la société Groupe Canal Plus, celle-ci est à même de freiner l’expansion de ces distributeurs et de priver les consommateurs de la possibilité d’obtenir, auprès de ses concurrents, des offres réellement substituables à ses offres de télévision payante, dès lors qu’elle a la capacité de verrouiller l’accès aux intrants nécessaires à la composition d’un bouquet attractif ; que les consommateurs ne disposent d’aucune puissance d’achat susceptible de compenser le pouvoir de marché de la société Groupe Canal Plus ;
82. Considérant, en deuxième lieu, que si les sociétés requérantes font valoir que le parc d’abonnés de la société Groupe Canal Plus a diminué depuis 2007, il ressort des pièces du dossier, d’une part que l’opération notifiée a néanmoins permis à cette société d’augmenter substantiellement ce parc d’abonnés, d’autre part que le nombre d’abonnements est, quant à lui, resté stable sur la période ; que ni l’évolution, au demeurant peu concluante, de l’excédent brut avant déduction des intérêts, impôts et amortissements, ni l’augmentation des coûts de programme, des investissements de structure, des commissions versées aux fournisseurs d’accès à Internet et des offres promotionnelles ne permettent, par elles-mêmes, d’établir l’existence d’une concurrence suffisante sur le marché aval des services de télévision payante ; qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, les études produites par les sociétés requérantes, qui se fondent sur des éléments ne mesurant qu’indirectement l’intensité concurrentielle du marché aval des services de télévision payante, ne permettent pas davantage d’établir l’existence d’un tel niveau de concurrence ; que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort des pièces du dossier que le revenu moyen par abonné (ARPU) a augmenté substantiellement depuis la réalisation de l’opération de concentration ; que cette augmentation, combinée avec la réduction du parc d’abonnés, n’est pas caractéristique de l’existence d’une » contrainte concurrentielle forte » sur le marché aval concerné ;
83. Considérant, en troisième lieu, qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, l’offre de chaînes de la société OCS ne peut être regardée comme concurrençant directement les offres de la société Groupe Canal Plus ; que l’émergence récente de l’offre des chaînes BeIn Sport, intégrant des contenus premium et commercialisée à un prix inférieur à ceux des offres de la société Groupe Canal Plus, ne peut être regardée comme créant une concurrence suffisante sur le marché aval des services de télévision payante, dès lors qu’elle ne concerne que la thématique du sport ; que par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, l’échec du lancement des offres de milieu de gamme de la société Groupe Canal Plus ne démontre pas, par lui-même, l’existence d’une » pression concurrentielle très vive sur l’ensemble des bouquets de chaînes payantes » ;
84. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’analyse concurrentielle en estimant que l’opération notifiée avait pour effet de renforcer le pouvoir de marché de la société Groupe Canal Plus sur le marché aval des services de télévision payante ;
S’agissant de l’acquisition et de la diffusion non linéaire (VàD et VàDA) de contenus cinématographiques et audiovisuels :
85. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé que l’opération notifiée ne portait pas atteinte à la concurrence par le biais d’effets horizontaux sur les marchés de droits de diffusion non linéaire ou par le biais d’effets horizontaux sur les marchés d’édition et de distribution de services de VàD et VàDA ; qu’elle a toutefois estimé que cette opération produisait, d’une part un effet anticoncurrentiel vertical entre le marché amont des droits de diffusion non linéaire de films français et européens de catalogue et le marché intermédiaire d’édition de services de VàD et VàDA, d’autre part un effet anticoncurrentiel congloméral entre les marchés amont de droits de diffusion linéaire de films français et américains récents et les marchés amont de droits de diffusion non linéaire de contenus cinématographiques, enfin un effet anticoncurrentiel congloméral entre le marché aval de services de télévision payante et les marchés aval de services de VàD et VàDA ;
Quant au verrouillage des intrants des éditeurs de services de VàD et VàDA :
86. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé qu’à la suite de l’opération notifiée, la société Groupe Canal Plus aurait la capacité et l’incitation d’utiliser son pouvoir de marché sur le marché des droits de diffusion non linéaire de films français et européens de catalogue pour verrouiller l’accès des éditeurs de services de VàD et de VàDA aux intrants, et qu’un tel effet de verrouillage entraverait de façon significative la concurrence sur le marché de l’édition de services non linéaires ;
87. Considérant, en premier lieu, qu’en vertu de l’article 12 du décret du 12 novembre 2010 relatif aux services de médias audiovisuels à la demande, les éditeurs de services de VàD et de VàDA doivent en principe mettre à disposition, à tout moment, au moins 60 % d’oeuvres européennes et au moins 40 % d’oeuvres d’expression originale française ; que, en raison de cette contrainte réglementaire, un éditeur de services non linéaires ne pouvant offrir suffisamment d’oeuvres européennes et d’oeuvres d’expression originale française ne pourrait accroître le volume global de son offre ; que, par suite, en recherchant si la société Groupe Canal Plus aurait la capacité, en verrouillant l’accès aux films européens et français susceptibles de faire l’objet d’une diffusion non linéaire dont elle détient les droits, d’exercer un effet de verrouillage sur le marché d’édition des services non linéaires, l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de droit, ni erreur d’analyse concurrentielle ;
88. Considérant, en deuxième lieu, que dès lors que les quotas d’oeuvres françaises et européennes sont exprimés en nombre d’oeuvres, l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de droit, ni erreur d’analyse concurrentielle en tenant compte de la part de marché en nombre de films de la société Groupe Canal Plus sur le marché des droits de films européens et français de catalogue ; qu’il ressort des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus détient 38 % des droits de films européens et français entrant dans les quotas prévus par le décret du 12 novembre 2010 alors que ses premiers concurrents disposent de parts de marchés, en nombre de films, inférieures à 10 % ; qu’ainsi, alors même que la société Groupe Canal Plus ne disposerait que de 24 % des parts de marché en valeur sur le marché des droits de diffusion non linéaire de films européens et français de catalogue, l’Autorité de la concurrence n’a, dans les circonstances de l’espèce, pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que cette société aurait la capacité d’exercer un verrouillage du marché de l’édition de services de VàD et VàDA ;
89. Considérant, en troisième lieu, que si les sociétés requérantes soutiennent que la mise en oeuvre d’un tel effet de verrouillage réduirait les revenus de la société StudioCanal, qui possède les droits des films français et européens de catalogue, il ressort toutefois des pièces du dossier qu’il permettrait de réduire l’attractivité des offres concurrentes de Canalplay et Canalplay Infinity, services de VàD et de VàDA édités par la société Groupe Canal Plus, sur un marché en développement, où les positions concurrentielles sont susceptibles d’évoluer rapidement ; qu’ainsi, une mise en oeuvre temporaire de cet effet de levier permettrait, tout en limitant le manque à gagner de la société StudioCanal, de conférer aux services Canalplay et Canalplay Infinity une position dominante sur les marchés au moment de leur stabilisation et d’augmenter durablement leurs revenus ; que, dès lors, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que la société Groupe Canal Plus serait incitée à exercer un verrouillage du marché de l’édition de services de VàD et VàDA ;
90. Considérant, en quatrième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort des pièces du dossier ni que les films cinématographiques ne représenteraient qu’une faible part de l’offre globale de VàD, ni que d’autres contenus leur seraient aisément substituables dans une offre de VàD ; que dès lors, le moyen tiré de ce que l’Autorité de la concurrence aurait commis une erreur d’appréciation en estimant que la mise en oeuvre, par la société Groupe Canal Plus, d’un verrouillage des droits de diffusion non linéaire de films européens et français de catalogue aurait des conséquences significatives sur la concurrence ne peut qu’être écarté ;
Quant au verrouillage des marchés de droits de diffusion non linéaire de contenus cinématographiques :
91. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé qu’à la suite de l’opération notifiée, la société Groupe Canal Plus aurait la capacité d’utiliser sa puissance d’achat sur les marchés de droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains et français récents pour verrouiller, du côté de la demande, les marchés de droits de diffusion non linéaire de films américains et français, au motif que les détenteurs de droits acceptaient une négociation simultanée des achats de droits de diffusion linéaire et de droits de diffusion non linéaire et que l’achat des droits de diffusion non linéaire était susceptible de se faire sur une base exclusive ; qu’elle a également estimé que la société Groupe Canal Plus serait incitée à exercer un tel effet de levier et que cette mise en oeuvre entraverait de manière significative la concurrence effective sur les marchés de droits de diffusion non linéaire ;
92. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l’audience d’instruction, d’une part que l’achat de droits pour une diffusion non linéaire est susceptible d’avoir un caractère exclusif, d’autre part que l’achat de droits de diffusion en télévision payante linéaire et celui de droits de diffusion non linéaire sont susceptibles de faire l’objet de négociations simultanées ;
93. Considérant, en deuxième lieu, que, dès lors que la société Groupe Canal Plus se trouve en situation de quasi-monopsone sur les marchés de droits de diffusion en télévision payante linéaire de films américains et français récents, la circonstance qu’elle ne dispose pas de positions importantes sur les marchés de droits de diffusion non linéaire de films américains et français ne remet pas en cause sa capacité à verrouiller ces marchés en utilisant sa puissance d’achat sur les marchés de droits de diffusion linéaire de films américains et français récents ; que la circonstance qu’il n’existe que de faibles barrières à l’entrée sur les marchés de droits de diffusion non linéaire de films américains et français, à la supposer établie, ne remet pas davantage en cause la capacité de la société Groupe Canal Plus à exercer cet effet de levier, dès lors que sa mise en oeuvre aurait pour conséquence directe de créer de telles barrières ;
94. Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l’audience d’instruction, que la mise en oeuvre de cet effet de levier permettrait à la société Groupe Canal Plus de diminuer fortement l’attractivité des services de VàD et de VàDA concurrents de ses services Canalplay et Canalplay Infinity ; qu’elle aurait en outre pour effet d’ériger de fortes barrières à l’entrée sur le marché des droits de diffusion en VàD et VàDA et serait susceptible de conférer une position dominante à la société Groupe Canal Plus ; que par suite, cet effet de levier aurait des conséquences significatives sur la concurrence ;
95. Considérant, en quatrième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort tant des termes de la décision attaquée que des pièces du dossier que l’Autorité de la concurrence ne s’est pas fondée sur de simples éventualités mais a, comme il lui appartenait de le faire, caractérisé les risques concurrentiels de l’opération à partir d’une analyse prospective tenant compte de l’ensemble des données pertinentes et se fondant sur un scénario économique plausible ;
96. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de fait, ni erreur d’appréciation en estimant que l’opération notifiée avait un effet anticoncurrentiel de type congloméral entre les marchés de droits de diffusion linéaire de contenus cinématographiques et les marchés de droits de diffusion non linéaire de contenus cinématographiques ;
Quant au verrouillage du marché de distribution de services de VàD et VàDA :
97. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé qu’à la suite de l’opération notifiée, la société Groupe Canal Plus aurait la capacité d’utiliser son pouvoir de marché sur le marché des services de télévision payante linéaire pour obtenir une position dominante sur les marchés de la distribution de services non linéaires en subordonnant l’auto-distribution de ses offres de télévision payante sur les plateformes des fournisseurs d’accès à Internet à la distribution en exclusivité, par ces derniers, de ses services de VàD et VàDA ;
98. Considérant, en premier lieu, d’une part, que contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort des pièces du dossier et du procès-verbal de l’audience d’instruction que le service Canalplay dispose d’une position concurrentielle forte sur le marché des services de VàD et VàDA ; qu’il est constant que la société Groupe Canal Plus, qui distribue et transporte directement ses offres sur le satellite, est libre de ne mettre à disposition de ses abonnés par satellite que sa seule offre de services de VàD et VàDA ; qu’il est également constant que la société SFR est une filiale de la société Vivendi, qui détient 100 % des parts de la société Groupe Canal Plus ; qu’il ressort des pièces du dossier et du procès-verbal de l’audience d’instruction que la société Groupe Canal Plus a conclu avec la société Free un contrat prévoyant la distribution en exclusivité, sur la plateforme de ce fournisseur d’accès à Internet, du service de VàD et VàDA Canalplay ;
99. Considérant, d’autre part, qu’il ressort des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus détient, à elle seule, 90,7 % des parts de marché en valeur et 78,8 % des parts de marché en volume sur le marché aval des services de télévision payante ; que, si la nécessité qu’a la société Groupe Canal Plus d’utiliser les plateformes des fournisseurs d’accès à Internet pour auto-distribuer ses offres sur l’ADSL donne à ces derniers un contre-pouvoir dans leurs relations contractuelles avec cette société et leur a permis d’obtenir une augmentation des commissions que leur verse cette société, il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de l’audience d’instruction, que l’auto-distribution des offres de la société Groupe Canal Plus sur leurs plateformes est indispensable aux fournisseurs d’accès à Internet qui, ainsi que l’estime l’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, » ont besoin de bénéficier d’une partie de la valeur générée par d’autres acteurs à partir de l’utilisation de leurs réseaux et grâce aux investissements considérables qu’ils consentent » ;
100. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que la société Groupe Canal Plus aurait, à la suite de l’opération notifiée, la capacité d’exercer un effet de verrouillage des marchés de la distribution de services non linéaires en négociant avec certains fournisseurs d’accès à Internet la distribution exclusive de ses offres de services de VàD et VàDA ;
101. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l’audience d’instruction, que la distribution de services de VàD et VàDA sur le marché français se fait principalement au travers des services de télévision payante ; que par suite, la conclusion d’exclusivités avec les fournisseurs d’accès à Internet aurait des conséquences significatives sur la concurrence, dès lors qu’elle aurait pour effet mécanique d’évincer les services non linéaires concurrents de certaines plateformes de distribution et qu’elle conférerait ainsi à la société Groupe Canal Plus une position dominante ; que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’à la date de la décision attaquée, l’entrée sur le marché des principaux éditeurs de services de VàD et VàDA étrangers et le développement du modèle de consommation par la télévision connectée, dit » over the top « , pouvaient être regardés comme raisonnablement prévisibles à une échéance rapprochée ;
102. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ressort tant des pièces du dossier que du procès-verbal de l’audience d’instruction que l’Autorité de la concurrence ne s’est pas fondée sur de simples éventualités mais a, comme il lui appartenait de le faire, caractérisé les risques concurrentiels de l’opération à partir d’une analyse prospective tenant compte de l’ensemble des données pertinentes et se fondant sur un scénario économique plausible ;
103. Considérant, dès lors, que l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de fait, ni erreur d’appréciation en estimant que l’opération notifiée avait un effet anticoncurrentiel de type congloméral entre le marché de distribution de services de télévision payante linéaire et les marchés de distribution de services de VàD et VàDA ;
S’agissant des marchés des départements et régions d’outre-mer :
104. Considérant que l’Autorité de la concurrence a estimé, d’une part qu’à la suite de l’opération notifiée, la société Groupe Canal Plus aurait la capacité de verrouiller les intrants des distributeurs concurrents sur les marchés des départements et régions d’outre-mer, d’autre part que cette opération renforcerait le pouvoir de marché de la société Groupe Canal Plus sur les marchés aval de distribution de services de télévision payante des départements et régions d’outre-mer ;
105. Considérant, en premier lieu, qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, l’opération notifiée permet à la société Groupe Canal Plus de verrouiller l’accès des distributeurs concurrents aux intrants dans des thématiques regardées comme essentielles à la composition d’une offre de télévision payante attractive ; que cette capacité de verrouillage se trouve renforcée s’agissant des marchés des départements et régions d’outre-mer en raison des exclusivités plus nombreuses que détient la société Groupe Canal Plus pour la distribution sur ces marchés ; que, par suite, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant qu’à la suite de l’opération notifiée, la société Groupe Canal Plus aurait la capacité de verrouiller l’accès aux intrants des distributeurs présents sur les marchés des départements et régions d’outre-mer ; qu’elle n’a pas davantage commis d’erreur d’appréciation en estimant que la société Groupe Canal Plus avait mis en oeuvre une stratégie de verrouillage des intrants de la société Parabole Réunion ayant conduit à la dégradation de l’attractivité des offres de cette société, dès lors qu’il ressort des pièces du dossier que la qualité des chaînes mises à disposition de cette société en vertu des engagements figurant dans la décision d’autorisation du 30 août 2006 a été volontairement dégradée par la société Groupe Canal Plus, que la société Parabole Réunion n’a pas bénéficié de l’augmentation du nombre de ménages équipés en télévision par satellite, cette croissance étant presque intégralement captée par la société Groupe Canal Plus, que les abonnés de la société Parabole Réunion tendent à se détourner des offres dites » premium » pour migrer vers les offres de base les moins chères et que, alors que la qualité des contenus est moteur d’abonnements et fidélise les clients, les consommateurs perçoivent les offres Canalsat comme étant de meilleure qualité que celles de la société Parabole Réunion, perçues comme moins chères ;
106. Considérant, en second lieu, qu’il ressort des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs pas contesté, que la société Groupe Canal Plus détient, respectivement, 69 % et 73 % des parts de marché en nombre d’abonnés sur les marchés de distribution de services de télévision payante de l’océan Indien et des Antilles-Guyane ; que, si la société Groupe Canal Plus soutient que l’entrée récente sur le marché des fournisseurs d’accès à Internet permet d’anticiper un développement de la pression concurrentielle similaire à celui qui a été observé sur le marché de métropole, il ressort des pièces du dossier que l’entrée sur le marché des fournisseurs d’accès à Internet n’est pas de nature, à elle seule, à créer les conditions d’une concurrence suffisante, dès lors que la société Groupe Canal Plus est susceptible de verrouiller l’accès de ces distributeurs aux intrants et que les rémunérations versées par la société Groupe Canal Plus à ces distributeurs les incitent à commercialiser les offres de cette société plutôt que leurs propres offres de second niveau ; qu’ainsi, eu égard à la part de marché de la société Groupe Canal Plus, à l’absence de puissance d’achat des consommateurs et à la capacité qu’a la société Groupe Canal Plus de freiner l’expansion des distributeurs tiers et de priver les consommateurs de la possibilité d’obtenir, auprès de ses concurrents, des offres réellement substituables à ses offres de télévision payante, l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que l’opération renforçait le pouvoir de marché de la société Groupe Canal Plus sur les marchés aval de services de télévision payante des départements et régions d’outre-mer, alors même qu’une concurrence plus importante que sur les marchés métropolitains aurait préexisté à l’opération sur ces marchés ;
En ce qui concerne les moyens tirés du caractère disproportionné des injonctions :
107. Considérant que, lorsque lui est notifiée une opération de concentration dont la réalisation est soumise à son autorisation, il incombe à l’Autorité de la concurrence d’user des pouvoirs d’interdiction, d’injonction, de prescription ou de subordination de son autorisation à la réalisation effective d’engagements pris devant elle par les parties, qui lui sont conférés par les dispositions des articles L. 430-6 et suivants du code de commerce, à proportion de ce qu’exige le maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération ;
108. Considérant, d’une part, que les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi soutiennent que certaines des injonctions prononcées par la décision attaquée sont disproportionnées par rapport aux effets anticoncurrentiels de l’opération notifiée qu’elles entendent prévenir ; que, d’autre part, les sociétés Numéricable et Parabole Réunion soutiennent que les injonctions figurant dans la décision attaquée sont insuffisantes pour prévenir certains des effets anticoncurrentiels de l’opération notifiée ;
S’agissant des moyens de la requête des sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi :
Quant aux injonctions relatives à l’acquisition de droits de diffusion de contenus cinématographiques et audiovisuels et à l’édition et la commercialisation de chaînes de cinéma :
109. Considérant que la décision attaquée enjoint aux parties de limiter la durée des contrats cadres conclus avec les studios américains pour l’achat de droits de diffusion de films en première ou deuxième fenêtre de télévision payante à trois ans, sans option de renouvellement en faveur de la société Groupe Canal Plus, de communiquer à tout éditeur en faisant la demande, dans un délai de 15 jours ouvrables, la date d’échéance des contrats cadres, de négocier et conclure des contrats cadres séparés, incluant une valorisation individuelle et excluant toute remise de couplage, pour les droits de diffusion de films en première fenêtre de télévision payante, les droits de diffusion de films en deuxième fenêtre de télévision payante et les droits de diffusion de séries américaines récentes, de ne pas conclure de contrats cadres d’achat de droits de diffusion avec les détenteurs de droits français, de ne mettre en oeuvre aucune discrimination entre les producteurs de films d’expression originale française et de conclure, avec les détenteurs de droits français, des contrats distincts pour les droits de diffusion de films en première fenêtre de télévision payante et les droits de diffusion de films en deuxième fenêtre de télévision payante ; qu’elle enjoint également aux parties de céder, dans un délai qu’elle fixe, à un acquéreur agréé par l’Autorité de la concurrence, l’ensemble des parts qu’elles détiennent dans le capital de la société OCS ou, dans l’hypothèse où les parties ne parviendraient pas à initier des négociations pour la cession de l’ensemble des parts qu’elles détiennent ou si l’acquéreur n’était pas agréé par leur associé ou par l’Autorité de la concurrence, de révoquer les membres du conseil de la société OCS proposés par la société Multithématiques, filiale de la société Groupe Canal Plus, et de les remplacer par des personnes indépendantes, de renoncer au bénéfice de la transmission des informations prévue par le pacte d’associés de la société OCS et de prévoir qu’une telle transmission ne se fera qu’au bénéfice des deux membres du conseil indépendants, de renoncer au bénéfice de la clause plafonnant les coûts prévus dans le budget annuel et de la clause de non concurrence, de renoncer au bénéfice du contrat cadre de prestation de services conclu entre la société OCS et la société Canal Plus France ainsi qu’à la réalisation de toute prestation de service identique, et de ne pas mettre en oeuvre de comportements ayant le même objet ou le même effet que les clauses, droits et contrats auxquels elles doivent renoncer ; qu’elle enjoint en outre aux parties de maintenir le contrat de distribution du bouquet Orange Cinéma Séries au sein de Canalsat et d’en respecter les stipulations jusqu’à son échéance ;
110. Considérant, en premier lieu, que la communication des dates d’échéance des contrats cadres mettra fin à une asymétrie d’information préjudiciable aux concurrents potentiels de la société Groupe Canal Plus et supprimera ainsi une barrière à l’entrée sur les marchés amont de droits de diffusion de contenus cinématographiques et audiovisuels ; que la limitation de la durée des contrats cadres à trois ans aura nécessairement pour effet de modifier le calendrier des négociations, et réduira ainsi une autre barrière à l’entrée identifiée par l’Autorité de la concurrence ; que la cession de la participation des parties dans le capital de la société OCS, ou la mise en oeuvre de l’injonction alternative, replacera cette société dans la situation d’un concurrent direct de la société Groupe Canal Plus sur les marchés amont de droits de diffusion et sur les marchés intermédiaires de l’édition de chaînes ; qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la mise en oeuvre de cette injonction affectera négativement la qualité des chaînes du bouquet OCS, ni qu’elle conduira la société OCS à se retirer des marchés amont et intermédiaires ; que la circonstance que la société Groupe France Télécom Orange ait fait part à l’Autorité de la concurrence de son choix de ne pas agréer d’autre associé, qui est postérieure à la décision attaquée, est sans incidence sur le caractère adapté de l’injonction à la date à laquelle elle a été prononcée ;
111. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que les injonctions prononcées soient identiques ou plus contraignantes que certains engagements qui figuraient dans la décision d’autorisation du 30 août 2006 et ont été respectés est, par elle-même, sans incidence sur le caractère nécessaire de ces injonctions, à la date de la décision attaquée, pour permettre le maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération ;
112. Considérant, en troisième lieu, qu’il n’est, en tout état de cause, pas établi que la communication des dates d’échéance des contrats cadres conduira la société Groupe Canal Plus à violer des clauses de confidentialité contenue dans ces contrats ; qu’en raison de l’existence d’une injonction alternative, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’obligation de cession des parts détenues dans la société OCS avant une échéance fixée par la décision attaquée conduira les parties à subir un préjudice grave du fait de la diminution de la valeur, au demeurant déjà faible, de ces parts à l’approche de cette échéance ; que, dès lors, d’une part, qu’elles seront représentées par des personnes indépendantes chargées de préserver leurs intérêts et pouvant s’opposer à d’éventuelles décisions de gestion leur portant préjudice, d’autre part, que la société Groupe France Telecom Orange, qui détient environ deux tiers des parts de la société OCS, n’aura aucune incitation à accentuer les déficits de cette société, il ne ressort pas des pièces du dossier que les parties risqueraient de subir un préjudice financier inacceptable du fait qu’elles resteront responsables des dettes de la société en nom collectif OCS ;
113. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les injonctions relatives à l’acquisition de droits de contenus cinématographiques et à l’édition de chaînes de cinéma ne sont pas adaptées, nécessaires et proportionnées ;
Quant aux injonctions relatives à la reprise des chaînes indépendantes et à la reprise des chaînes détenant des droits premium :
114. Considérant que la décision attaquée enjoint aux parties de reprendre dans l’offre Canalsat, ou toute offre s’y substituant ou s’y ajoutant, un nombre de chaînes indépendantes au moins égal à 55 % du nombre des chaînes distribuées par Canalsat, correspondant à des redevances représentant au moins 55 % du montant total des redevances versées par la société Groupe Canal Plus aux chaînes distribuées par Canalsat, d’assurer aux chaînes indépendantes des conditions de reprise techniques, commerciales et tarifaires sur Canalsat, ou toute offre s’y substituant ou s’y ajoutant, transparentes, objectives et non discriminatoires, similaires à celles offertes aux chaînes éditées par la société Groupe Canal Plus, et de réaliser une offre de référence pour la reprise des chaînes indépendantes dans l’offre Canalsat, agréée par l’Autorité de la concurrence, comprenant en particulier huit éléments détaillés par la décision ; qu’elle enjoint également aux parties d’établir une offre de référence pour les prestations de transport et de conclure des contrats distincts pour la distribution commerciale et les prestations de transports associées, sans subordonner la distribution commerciale d’une chaîne à la signature d’un contrat de prestation de transport ; qu’elle leur enjoint en outre de reprendre dans l’offre de Canalsat, ou toute offre s’y substituant ou s’y ajoutant, sur une base non exclusive, toute chaîne premium indépendante conventionnée en France, dans des conditions techniques et tarifaires transparentes, objectives et non discriminatoires, similaires aux conditions offertes aux chaînes éditées par la société Groupe Canal Plus présentant les mêmes caractéristiques ;
115. Considérant, en premier lieu, que l’obligation de distribuer une proportion minimale de chaînes indépendantes, qui n’impose pas qu’une telle distribution se fasse sur une base exclusive, n’aura pas pour effet d’inciter les éditeurs de chaînes indépendantes à ne pas rechercher d’autre distribution que la distribution dans l’offre Canalsat, mais compensera les effets de la puissance d’achat de la société Groupe Canal Plus sur les marchés intermédiaires et réduira sa capacité à verrouiller l’accès des éditeurs de chaînes à la clientèle ; qu’il ressort des pièces du dossier que l’obligation de publier une offre de référence pour la reprise des chaînes indépendantes n’affecte pas les accords conclus entre la société Groupe Canal Plus et les syndicats d’éditeurs de chaînes, mais aura, au contraire, pour effet de compléter et renforcer les clauses de ces accords, en réduisant ainsi l’opacité des conditions contractuelles proposées par la société Groupe Canal Plus aux éditeurs de chaînes ;
116. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que certaines injonctions prononcées soient identiques à des engagements qui figuraient dans la décision d’autorisation du 30 août 2006 et ont été respectés est, par elle-même, sans incidence sur le caractère nécessaire de ces injonctions, à la date de la décision attaquée, pour permettre le maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération ; que l’obligation de reprise des chaînes indépendantes dans des conditions transparentes, objectives et non discriminatoires similaires à celles offertes aux chaînes éditées par la société Groupe Canal Plus et qui sont comparables, qui permettra aux éditeurs de chaînes d’anticiper rationnellement les conditions de distribution dont ils pourront disposer dès le stade de l’achat de droits, ne saurait être regardée comme redondante par rapport à la procédure de règlement des différends du Conseil supérieur de l’audiovisuel prévue par l’article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;
117. Considérant, en troisième lieu, que ni la définition de la notion de » chaîne distribuée par Canalsat « , qui vise l’ensemble des chaînes distribuées dans l’offre Canalsat, ni celle de la notion de » chaîne détenant des droits premium en matière sportive « , dont l’encadrement résulte, ainsi qu’il ressort des pièces du dossier, de la circonstance que les droits premium en matière sportive sont vendus par lots, ni la circonstance que la notion de » chaîne indépendante » ne soit pas limitée aux chaînes françaises conventionnées avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel ne peuvent être regardées comme rendant impossible la mise en oeuvre des injonctions par la société Groupe Canal Plus ou comme donnant à ces injonctions un caractère disproportionné ; que par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’obligation de communication d’une offre de référence, qui ne constitue pas un engagement ferme et définitif d’achat mais uniquement la base d’une négociation commerciale, porterait une atteinte disproportionnée à la liberté d’entreprendre de la société Groupe Canal Plus au regard de l’objectif de maintien d’une concurrence suffisante qu’elle poursuit ; qu’il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus serait dans l’impossibilité de procéder à des comparaisons entre les conditions de reprise des différentes chaînes incluses dans l’offre Canalsat, ni qu’elle serait dans l’impossibilité de définir, dans l’offre de référence transmise aux éditeurs, les différentes composantes de la rémunération des chaînes ; que, notamment, la seule circonstance que la télévision de rattrapage ne faisait pas, à la date de la décision attaquée, l’objet d’une valorisation distincte, ne permet pas d’établir que la société Groupe Canal Plus ne serait pas capable de définir la valeur de ce service complémentaire bien identifié ;
118. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les injonctions relatives à la reprise des chaînes indépendantes ne sont pas adaptées, nécessaires et proportionnées ;
Quant aux injonctions relatives à la limitation des exclusivités :
119. Considérant que la décision attaquée enjoint à la société Groupe Canal Plus de valoriser de manière transparente et distincte, dans les contrats de distribution avec les éditeurs de chaînes, la distribution sur chaque plateforme propriétaire desservant plus de 500 000 abonnés, en identifiant de manière précise, le cas échéant, la valeur de l’exclusivité accordée pour la distribution sur chacune de ces plateformes, sans que cette valeur puisse varier en cas de perte de l’exclusivité sur une autre plateforme ; qu’elle enjoint également à cette société de formuler, dans les trois mois de la demande de reprise d’une chaîne, une offre conforme à ces principes et qui l’engagera, et de formuler des offres de distribution exclusive sur la base de critères économiques objectifs, transparents et non discriminatoires, prenant en compte le nombre d’abonnés desservis par les plateformes concernées ;
120. Considérant, en premier lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que ces injonctions auront durablement pour effet de diminuer la rémunération obtenue par les éditeurs de chaînes ; qu’à l’inverse, elles réduiront à la fois la capacité de la société Groupe Canal Plus à verrouiller l’accès des éditeurs de chaînes à la clientèle et sa capacité à verrouiller l’accès des distributeurs concurrents aux intrants, en permettant aux éditeurs de chaînes de faire jouer la concurrence sur chaque plateforme de distribution et de choisir, pour chaque plateforme, le mode de distribution le plus avantageux ; que contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, ce maintien d’un niveau de concurrence suffisant sur les marchés intermédiaires, en garantissant l’existence d’une concurrence suffisante sur les marchés aval de la distribution d’offres de télévision payante, permettra au consommateur de disposer d’un choix plus large, portant sur des offres de télévision payante diversifiées et à des prix moins élevés ;
121. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier et du procès-verbal de l’audience d’instruction qu’en l’état des marchés à la date de la décision attaquée, la société Groupe Canal Plus était la seule à pouvoir distribuer les chaînes de télévision reprises dans ses offres sur l’ensemble des plateformes de distribution ; que, par suite, le couplage des achats en exclusivité pour toutes les plateformes, en permettant à la seule société Groupe Canal Plus d’intégrer, dans son offre de reprise, une rémunération de la détention de l’exclusivité totale de distribution sans supporter le risque de n’obtenir qu’une exclusivité partielle avait pour effet, d’une part de réduire la capacité des distributeurs concurrents fournisseurs d’accès à Internet, qui ne diffusent les chaînes incluses dans leurs offres de télévision payante que sur leur propre plateforme, de formuler des offres de distribution compétitives, d’autre part de rendre très incertaine l’obtention par les éditeurs de chaînes d’une rémunération équivalente en cas de distribution non exclusive, ou même en cas de distribution exclusive par le propriétaire de chaque plateforme, les fournisseurs d’accès à Internet étant peu susceptibles de compenser collectivement les offres de la société Groupe Canal Plus sans pouvoir se coordonner ; que ces effets se trouvaient renforcés par la pratique de décotes particulièrement élevées en cas de perte de l’exclusivité ; que la valorisation séparée de la distribution sur chacun des modes de diffusion, qui aurait maintenu le principe d’un couplage des achats en exclusivité pour l’ensemble des plateformes de l’ADSL/fibre, mode de diffusion pour lequel la concurrence est la plus développée, n’aurait pas permis le développement d’une concurrence effective pour la distribution sur chaque plateforme et n’était donc pas susceptible, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, de remédier efficacement aux effets anticoncurrentiels identifiés par l’Autorité de la concurrence ; que les injonctions prononcées, qui imposent la séparation de la valorisation de la distribution plateforme par plateforme pour toutes les plateformes desservant plus de 500 000 abonnés, sont nécessaires au maintien d’une concurrence suffisante, à l’achat, sur les marchés d’édition et de commercialisation de chaînes thématiques et, par voie de conséquence, au maintien d’une concurrence suffisante sur le marché aval de distribution de services de télévision payante ;
122. Considérant, en troisième lieu, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus, qui connaît notamment, pour chaque plateforme de distribution desservant plus de 500 000 abonnés, le nombre d’abonnés à ses offres et le revenu moyen par client, serait dans l’impossibilité de valoriser séparément la distribution des chaînes pour chacune des plateformes de diffusion ; que la circonstance que la société Groupe Canal Plus soit susceptible de ne plus détenir l’exclusivité de distribution de certaines chaînes sur toutes les plateformes, qui résulterait directement de l’existence d’une concurrence effective sur les marchés intermédiaires, but poursuivi par les injonctions, n’est pas de nature à donner aux injonctions prononcées un caractère disproportionné ; qu’il en est de même de la circonstance que la société Groupe Canal Plus ne puisse plus intégrer, dans ses offres de distribution formulées plateforme par plateforme, une rémunération de la détention de l’exclusivité totale de distribution sans faire face au risque de ne pas obtenir une telle exclusivité ; que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier que la valorisation par plateforme des exclusivités retirerait à la société Groupe Canal Plus toute incitation à obtenir des exclusivités et lui imposerait, par suite, de renoncer à son activité de distribution de télévision payante via l’ADSL/fibre ; que si, dans l’hypothèse où elle ne détiendrait des exclusivités que sur certaines plateformes, la société Groupe Canal Plus devrait faire face à des coûts de gestion et de commercialisation de ses offres plus élevés, ces effets, qui résulteraient du libre jeu de la concurrence sur les marchés, n’auraient pas de conséquences graves sur la rentabilité des activités de distribution de télévision payante de la société Groupe Canal Plus, dès lors notamment que la valorisation par plateforme ne concerne que les plateformes desservant plus de 500 000 abonnés ; qu’ainsi, les injonctions prononcées, qui n’imposent pas à la société Groupe Canal Plus de renoncer à son modèle d’auto-distribution sur les plateformes tierces, ne peuvent être regardées comme imposant à la société Groupe Canal Plus des contraintes excessives au regard de l’objectif de maintien d’une concurrence effective qu’elles poursuivent ;
123. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les injonctions relatives à la limitation des exclusivités ne sont pas adaptées, nécessaires et proportionnées ;
Quant aux injonctions relatives au dégroupage des chaînes de cinéma du bouquet Canalsat éditées par la société Groupe Canal Plus :
124. Considérant que la décision attaquée enjoint aux parties de mettre à disposition de tous les distributeurs en faisant la demande, à l’unité ou par lots, dans des conditions tarifaires objectives, transparentes et non discriminatoires, toutes les chaînes cinéma que la société Groupe Canal Plus édite ou pourrait éditer, et de publier à cette fin une offre de référence décrivant les conditions tarifaires et techniques de cette mise à disposition ; qu’elle enjoint en outre aux parties de maintenir la qualité des chaînes ainsi dégroupées, de maintenir les chaînes Ciné + Frisson, Ciné + Emotion et Ciné + Famiz dans la catégorie réglementaire des chaînes de première diffusion et de maintenir le coût de grille des chaînes existantes à un niveau au moins égal à celui de 2011 ;
125. Considérant, en premier lieu, d’une part, qu’il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que l’Autorité de la concurrence a entendu prévenir, de façon autonome, les effets anticoncurrentiels de l’opération sur les marchés amont de droits de diffusion linéaire de contenus cinématographiques et audiovisuels et ses effets anticoncurrentiels sur le marché intermédiaire de l’édition de chaînes de cinéma ; qu’ainsi qu’il ressort de l’avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, le modèle économique de remontée de la chaîne de valeur par un distributeur fournisseur d’accès à Internet est un » modèle singulier non généralisable » ; que, dès lors, la circonstance que l’obligation de dégroupage de l’ensemble des chaînes de cinéma, qui contribuera à prévenir la mise en oeuvre, par la société Groupe Canal Plus, d’un verrouillage de l’accès des distributeurs concurrents sur le marché aval aux intrants dans la thématique du cinéma, soit susceptible de ne pas inciter ces distributeurs à remonter la chaîne de valeur pour concurrencer la société Groupe Canal Plus sur les marchés amont de droits de diffusion ne saurait conduire à regarder les injonctions concernées comme étant contradictoires ou inaptes à remédier aux effets anticoncurrentiels identifiés ;
126. Considérant, d’autre part, que contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, eu égard à la part du coût de grille des chaînes Ciné + dans l’ensemble des investissements de la société Groupe Canal Plus sur les marchés de droits de diffusion de contenus cinématographiques récents, l’obligation de maintien de coût de grille ne saurait être regardée comme imposant à la société Groupe Canal Plus de se maintenir en position de quasi-monopsone sur les marchés amont ;
127. Considérant, en deuxième lieu, qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, la société Groupe Canal Plus dispose d’une position dominante sur le marché d’édition de chaînes thématiques de cinéma ; que, si les injonctions relatives à l’acquisition de droits de diffusion de contenus cinématographiques et à l’édition et la commercialisation de chaînes de cinéma permettront de favoriser l’émergence de chaînes thématiques à contenu premium, qui pourront être reprises par les distributeurs tiers en vertu des injonctions relatives à la reprise des chaînes premium, ces seules injonctions n’auraient pas permis de garantir l’accès immédiat des distributeurs tiers à des chaînes de cinéma leur permettant de construire une offre concurrençant effectivement les offres de la société Groupe Canal Plus, qui distribue en exclusivité des chaînes de cinéma parmi les plus attractives du marché ; que, par suite, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, le dégroupage des chaînes de cinéma du bouquet Canalsat est nécessaire au maintien d’une concurrence suffisante sur le marché aval de la distribution de télévision payante ; que dès lors que la société Groupe Canal Plus a mis en oeuvre un verrouillage des intrants dans la thématique du cinéma en procédant notamment à une dégradation volontaire de la qualité des chaînes Ciné + mises à disposition des distributeurs tiers, la seule obligation de dégroupage des chaînes Ciné + déjà mises à disposition des distributeurs tiers, même complétée par une obligation de maintien de la qualité de ces chaînes, n’aurait pas permis de maintenir une concurrence suffisante sur ces marchés ; que la seule circonstance que le dégroupage de l’ensemble des chaînes de cinéma éditées par la société Groupe Canal Plus n’ait pas été considéré comme nécessaire lors de la première autorisation de l’opération en 2006 est, par elle-même, sans incidence sur le caractère nécessaire d’une telle injonction à la date de la décision attaquée ;
128. Considérant, en troisième lieu, que si les injonctions prononcées ne permettent plus à la société Groupe Canal Plus de se différencier des autres distributeurs par les chaînes qu’elle édite elle-même, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’une telle contrainte, qui résulte pour partie de la dégradation intentionnelle, par cette société, des chaînes qu’elle devait dégrouper en vertu des engagements figurant dans la décision du 30 août 2006 du ministre chargé de l’économie, aurait des conséquences graves sur la rentabilité de l’activité d’édition de chaînes de cinéma de la société Groupe Canal Plus ; que dès lors que les chaînes seront mises à disposition sur une base non exclusive, les distributeurs tiers ne pourront pas les utiliser pour la différenciation de leur offre au détriment de la société Groupe Canal Plus ; qu’ainsi, les injonctions prononcées ne peuvent être regardées comme imposant à la société Groupe Canal Plus des contraintes excessives au regard de l’objectif de maintien d’une concurrence effective qu’elles poursuivent ;
129. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les injonctions relatives au dégroupage des chaînes de cinéma du bouquet Canalsat éditées par la société Groupe Canal Plus ne sont pas adaptées, nécessaires et proportionnées ;
Quant aux injonctions relatives à la VàD et à la VàDA :
130. Considérant que la décision attaquée enjoint, d’une part, aux parties de conclure avec les studios américains et les détenteurs de droits français des contrats distincts pour l’acquisition de droits de diffusion pour la VàD ainsi que pour l’acquisition de droits de diffusion pour la VàDA et d’acheter ces droits sur une base non exclusive, sans les coupler avec les achats de droits de diffusion en télévision payante linéaire de contenus cinématographiques et audiovisuels, d’autre part, à la société Groupe Canal Plus de ne pas conclure de contrats d’acquisition de droits de diffusion en VàD et VàDA comportant une clause interdisant au détenteur de droits de céder ces droits pour un montant inférieur à celui qui lui a été consenti ; qu’elle enjoint également aux parties de céder les droits de diffusion en VàD et VàDA des films français et étrangers du catalogue de StudioCanal, et de tout catalogue que viendrait à détenir la société Groupe Canal Plus, à tout éditeur de service en faisant la demande, sur une base non exclusive et dans des conditions de marché normales ; qu’elle enjoint en outre aux parties de ne pas conclure de contrat prévoyant ou encourageant la présence exclusive ou privilégiée de l’offre VàD ou VàDA de la société Groupe Canal Plus sur les plateformes des fournisseurs d’accès à Internet, et, dans l’hypothèse où de tels contrats auraient déjà été conclus, de renoncer au bénéfice de toute clause ayant cet effet ;
131. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il résulte de ce qui a été dit précédemment qu’en l’état des marchés à la date de la décision attaquée, la société Groupe Canal Plus avait la capacité de mettre en oeuvre un verrouillage des marchés de droits de diffusion en VàD et VàDA et des marchés d’édition et de distribution de services de VàD et VàDA ; que les injonctions prononcées, qui permettront de prévenir la mise en oeuvre de tels effets de verrouillages, sont adaptées à l’objectif de maintien d’une concurrence suffisante sur ces marchés ;
132. Considérant, en deuxième lieu, qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, la circonstance que certaines injonctions prononcées soient identiques à des engagements qui figuraient dans la décision d’autorisation du 30 août 2006 et ont été respectés est, par elle-même, sans incidence sur le caractère nécessaire de ces injonctions, à la date de la décision attaquée, pour permettre le maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération ;
133. Considérant, en troisième lieu, que si la société Groupe Canal Plus soutient que l’obligation d’acheter les droits de diffusion en VàD et VàDA sur une base non exclusive la placerait dans une situation de faiblesse par rapport aux éditeurs et distributeurs étrangers qui entreront prochainement sur les marchés français de services de VàD et VàDA, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni du procès-verbal de l’audience d’instruction que l’entrée des principaux éditeurs de services de VàD et VàDA pouvait être regardée, à la date de la décision attaquée, comme raisonnablement prévisible à une échéance rapprochée ; qu’au demeurant, la décision attaquée prévoit elle-même que, dans l’hypothèse d’une modification significative des circonstances de fait remettant en cause l’analyse concurrentielle et la nécessité des injonctions, les parties pourront obtenir une levée ou une adaptation des injonctions dans la mesure rendue nécessaire par l’évolution des circonstances de fait ; que, dès lors, la seule circonstance que l’injonction concernée soit susceptible, avant sa date d’échéance, de devenir disproportionnée ne saurait conduire à la regarder comme illégale à la date de la décision attaquée ;
134. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les injonctions relatives à la VàD et à la VàDA ne sont pas adaptées, nécessaires et proportionnées ;
Quant aux injonctions relatives aux marchés des départements et régions d’outre-mer :
135. Considérant que la décision attaquée enjoint aux parties de ne pas conclure, pour les marchés des départements et régions d’outre-mer, de contrats spécifiques contenant des dispositions moins favorables pour les distributeurs que ceux conclus pour la métropole ;
136. Considérant que les sociétés requérantes soutiennent que cette injonction est entachée des mêmes illégalités que les injonctions applicables sur les marchés de métropole ; qu’il résulte de ce qui a été dit précédemment que ce moyen n’est pas fondé ;
Quant aux injonctions relatives aux obligations de séparation juridique et comptable :
137. Considérant que la décision attaquée enjoint aux parties de séparer les activités d’édition et de distribution de chaînes de la société Groupe Canal Plus au sein de filiales juridiquement distinctes et d’établir une comptabilité analytique permettant de séparer clairement les coûts et les revenus relatifs aux métiers de la société Groupe Canal Plus que sont la distribution, la technique et l’édition, en distinguant l’offre des chaînes Canal + de l’offre Canalsat ;
138. Considérant, en premier lieu, que si ces injonctions ne visent pas, en elles-mêmes, à prévenir un effet anticoncurrentiel de l’opération notifiée, elles permettront d’assurer le suivi de l’exécution, par la société Groupe Canal Plus, des injonctions prononcées par la décision attaquée ;
139. Considérant, en deuxième lieu, que les injonctions prononcées par la décision attaquée encadrent, d’une part, les modalités de rémunération des exclusivités, d’autre part, les conditions tarifaires de mise à disposition des chaînes de cinéma éditées par la société Groupe Canal Plus ; que le suivi de l’exécution de ces injonctions, et notamment du caractère objectif, transparent et non discriminatoire des offres de distribution de chaînes et des conditions tarifaires de mise à disposition des chaînes de cinéma, suppose de connaître, de façon isolée, les coûts de la seule activité d’édition et les coûts et revenus de la seule activité de distribution et implique, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, de contrôler, respectivement, les composantes du montant des rémunérations proposées par la société Groupe Canal Plus aux éditeurs de chaînes et les composantes du prix de gros des chaînes de cinéma dégroupées ; que la circonstance que le prix de gros des chaînes de cinéma mises à disposition en application des engagements figurant dans la décision d’autorisation du 30 août 2006 n’ait pas été contesté est sans incidence sur la nécessité de cette injonction ; que, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, il ne ressort pas des pièces du dossier que la seule tenue d’une comptabilité analytique apporterait, dans les circonstances de l’espèce, des garanties de transparence identiques à celles qu’apporte la séparation juridique et comptable des activités d’édition et de distribution et qui sont nécessaires ;
140. Considérant, en troisième lieu, que, d’une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la société Groupe Canal Plus serait dans l’impossibilité de tenir la comptabilité analytique imposée par les injonctions ; que, d’autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal de l’audience d’instruction, que les injonctions prononcées, qui, au demeurant, n’emporteront pas de difficulté majeure de réorganisation du groupe Canal Plus, n’auront pas pour effet, contrairement à ce que soutiennent les sociétés requérantes, d’imposer à la société Groupe Canal Plus de renoncer à son intégration verticale et aux mutualisations de coûts et gains d’efficacité permis par cette intégration ; qu’enfin, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni du procès-verbal de l’audience d’instruction que l’application de ces injonctions à la Société d’Edition de Canal Plus imposerait à la société Groupe Canal Plus de renoncer à l’auto-distribution de ses offres ;
141. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les injonctions relatives aux obligations de séparation juridique et comptable ne sont pas adaptées, nécessaires et proportionnées ;
Quant à la durée des injonctions :
142. Considérant qu’en vertu de la décision attaquée, les injonctions prononcées sont imposées pour une période de cinq ans et pourront, à l’issue de cette période, être imposées, en tout ou partie, pour une nouvelle période de cinq ans par décision motivée prise à l’issue d’une nouvelle analyse concurrentielle et d’un débat contradictoire avec les parties ;
143. Considérant qu’eu égard, d’une part, au nombre et à l’ampleur des effets anticoncurrentiels de l’opération, d’autre part, aux positions dont dispose la société Groupe Canal Plus sur l’ensemble des marchés concernés, et malgré l’évolution rapide de ces marchés, l’imposition d’une clause de rendez-vous à l’issue d’une période de cinq ans, dont la durée n’est, par elle-même, pas contestée, est proportionnée à l’objectif de maîtrise des effets propres de l’opération et de prévention des atteintes à la concurrence qui sont susceptibles d’en résulter ; qu’au demeurant, ainsi qu’il a été dit précédemment, la décision attaquée prévoit elle-même que les parties pourront obtenir une levée ou une adaptation des injonctions en cas de modification significative des circonstances de fait remettant en cause l’analyse concurrentielle et la nécessité des injonctions ;
S’agissant des moyens de la requête de la société Numéricable :
Quant à la prévention des effets anticoncurrentiels résultant du renforcement de la position de la société Groupe Canal Plus sur le marché de l’édition de chaînes premium et du verrouillage des intrants susceptible d’en résulter :
144. Considérant que la société Numéricable soutient que les injonctions prononcées par la décision attaquée sont insuffisantes pour prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération que constituent le renforcement de la position dominante de la société Groupe Canal Plus sur le marché de l’édition de chaînes premium et le verrouillage de l’accès des distributeurs tiers aux chaînes premium qui résulte de l’auto-distribution en exclusivité, par la société Groupe Canal Plus, des chaînes Canal +, seules chaînes premium existantes, dont elle est éditrice ;
145. Considérant, en premier lieu, que contrairement à ce que soutient la société Numéricable, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que l’Autorité de la concurrence n’a pas estimé que la contribution de la société Groupe Canal Plus au financement du cinéma français constituait une contribution au progrès économique résultant de l’opération de concentration ; qu’elle n’a relevé aucune contribution au progrès économique résultant de l’opération et compensant les atteintes à la concurrence qu’elle a identifiées ;
146. Considérant, en deuxième lieu, que si l’Autorité de la concurrence a relevé, dans la décision attaquée, que le modèle d’auto-distribution des chaînes Canal +, auquel les ayants droits sont attachés, offrait à la société Groupe Canal Plus une garantie lui permettant de maintenir un niveau élevé d’investissement dans les contenus cinématographiques et assurait une contribution plus élevée au financement du cinéma français, il ressort des termes mêmes de cette décision que ces mentions n’en constituaient pas des motifs mais entendaient uniquement répondre aux demandes, formulées durant l’instruction, tendant à ce qu’il soit enjoint à la société Groupe Canal Plus de dégrouper les chaînes Canal + ; que, par suite, les moyens tirés de ce que de telles mentions seraient entachées d’insuffisance de motivation et d’erreur d’appréciation ne peuvent qu’être écartés ;
147. Considérant, en troisième lieu, d’une part, qu’il ressort des pièces du dossier que les chaînes BeIn Sport, qui diffusent des contenus premium dans la thématique du sport, sont susceptibles, contrairement à ce que soutient la société Numéricable, de constituer une offre partiellement substituable à celle des chaînes premium Canal + ;
148. Considérant, d’autre part, qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, les injonctions nos 1 (a) à 1 (e) et les injonctions nos 2 (a) à 2 (c), relatives à l’acquisition de droits de contenus cinématographiques et à l’édition et la commercialisation de chaînes de cinéma, permettront non seulement de faciliter l’accès des éditeurs de chaînes aux marchés de droits de diffusion de contenus cinématographiques, et notamment de droits de diffusion en première fenêtre de télévision payante, mais encore de replacer la société OCS dans la situation d’un concurrent direct de la société Groupe Canal Plus sur les marchés amont de droits de diffusion linéaire et sur les marchés intermédiaires de l’édition de chaînes ; qu’ainsi, en vertu de ces injonctions, la société OCS aura la capacité de renforcer l’attractivité des chaînes qu’elle édite, sans que la société Groupe Canal Plus participe aux décisions relatives à sa stratégie éditoriale et commerciale ou puisse limiter ses investissements ; que, dès lors, si, à la date de la décision attaquée, les chaînes OCS diffusaient des contenus premium mais présentaient, en matière de cinéma, une attractivité inférieure aux chaînes Canal +, les injonctions prononcées par la décision attaquée les rendront susceptibles de constituer une offre partiellement substituable à celle des chaînes premium Canal + ;
149. Considérant, enfin, qu’en vertu de l’injonction n° 4 (a) prononcée par la décision attaquée, les chaînes premium indépendantes conventionnées en France ne pourront être distribuées en exclusivité par la société Groupe Canal Plus ; que, par suite, les distributeurs concurrents de la société Groupe Canal Plus pourront distribuer à la fois les chaînes diffusant des contenus premium dans la thématique du sport et les chaînes diffusant des contenus premium dans la thématique du cinéma ; que, dès lors, ils pourront composer une offre de télévision payante intégrant à la fois des contenus premium sportifs et cinématographiques, regardés comme indispensables à la constitution d’un bouquet de chaînes attractif, sans dépendre de la société Groupe Canal Plus ;
150. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’Autorité de la concurrence n’a commis ni erreur de droit ni erreur d’appréciation en estimant que les injonctions qu’elle a prononcées, dont la pertinence et l’efficacité doivent, dans cette mesure, être appréciées globalement, étaient de nature à prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération liés au renforcement de la position de la société Groupe Canal plus sur le marché de l’édition et la commercialisation de chaînes premium et au verrouillage des intrants susceptible d’en résulter ;
151. Considérant qu’ainsi qu’il a été dit précédemment, il n’appartenait à l’Autorité de la concurrence d’user de son pouvoir d’injonction qu’à proportion de ce qu’exigeait le maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération ; que, dès lors, la circonstance, à la supposer établie, que le dégroupage des chaînes Canal + n’empêcherait pas l’apparition de gains d’efficacité, ne nuirait pas au financement du cinéma français et profiterait tant aux consommateurs qu’à l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
Quant à la prévention d’autres effets anticoncurrentiels de l’opération notifiée :
152. Considérant, en premier lieu, qu’il ne ressort ni des pièces du dossier, ni du procès-verbal de l’audience d’instruction que la réalisation de l’opération notifiée donnerait à la société Groupe Canal Plus la capacité et l’incitation de ne pas auto-distribuer les chaînes Canal + sur l’ensemble des plateformes de télévision payante ou de les auto-distribuer dans des conditions qui ne seraient pas transparentes, objectives et non discriminatoires ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l’Autorité de la concurrence aurait dû prévenir un tel risque concurrentiel en enjoignant à la société Groupe Canal Plus d’auto-distribuer les chaînes Canal + sur les plateformes des distributeurs tiers en faisant la demande doit être écarté ;
153. Considérant, en second lieu, que les effets sur la concurrence de la prise de contrôle exclusif des sociétés Direct 8, Direct Star, Direct Productions, Direct Digital et Bolloré Intermédia par les sociétés Vivendi et Groupe Canal Plus ont été pris en compte par la décision n° 12-DCC-101 de l’Autorité de la concurrence du 23 juillet 2012 ; que dès lors, le moyen tiré de ce que l’Autorité de la concurrence aurait commis une erreur de droit en ne tenant pas compte, dans la décision attaquée, de l’entrée de la société Groupe Canal Plus sur le marché de la télévision gratuite pour lui enjoindre de mettre gratuitement les chaînes D8 et D17 à disposition des distributeurs tiers en faisant la demande ne peut qu’être écarté ;
En ce qui concerne les moyens de la requête de la société Parabole Réunion :
154. Considérant que la société Parabole Réunion soutient que les injonctions prononcées par la décision attaquée sont insuffisantes pour prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération sur les marchés aval des départements et régions d’outre-mer résultant du verrouillage de l’accès des distributeurs aux intrants essentiels pour constituer une offre de télévision payante attractive, et sont, par voie de conséquence, insuffisantes pour prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération résultant du renforcement de la position de la société Groupe Canal Plus sur le marché des services de télévision payante de l’océan Indien ;
155. Considérant, en premier lieu, que l’Autorité de la concurrence, à qui il appartenait uniquement d’assurer le maintien d’une concurrence suffisante sur les marchés affectés par l’opération de concentration notifiée, n’était pas tenue d’adopter des injonctions permettant à la société Parabole Réunion de retrouver la position concurrentielle dont elle disposait avant la réalisation de cette opération ; que dès lors, le moyen tiré de ce que les injonctions figurant dans la décision attaquée ne permettraient pas à cette société de retrouver une attractivité comparable à celle qui était la sienne en 2006 ne peut qu’être écarté ;
156. Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte de ce qui a été dit précédemment que les injonctions nos 1 (a) à 1 (e), 2 (a) à 2 (c) et 4 (a) prononcées par la décision attaquée, dont les effets sur les marchés aval des départements et régions d’outre-mer seront identiques aux effets sur les marchés aval de métropole, permettront aux distributeurs tiers de composer une offre de télévision payante intégrant à la fois des contenus premium sportifs et cinématographiques, regardés comme indispensables à la constitution d’un bouquet de chaînes attractif, sans dépendre de la société Groupe Canal Plus ; que, dès lors, doit être écarté le moyen tiré de ce que l’Autorité de la concurrence aurait commis une erreur d’appréciation en estimant que les injonctions qu’elle a prononcées étaient de nature à prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération liés au renforcement de la position de la société Groupe Canal Plus sur le marché de l’édition de chaînes premium et au verrouillage de l’accès des distributeurs des départements et régions d’outre-mer aux contenus premium ; que la circonstance que le dégroupage de la chaîne Canal + Réunion n’aurait pas eu de conséquences sur le financement du cinéma français est, par suite, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;
157. Considérant, en troisième lieu, que les injonctions relatives à l’acquisition de droits de diffusion linéaire de contenus cinématographiques et audiovisuels permettront aux éditeurs de chaînes d’accéder plus facilement à de tels droits, et leur donneront ainsi la capacité de composer des chaînes diversifiées et attractives ; que par ailleurs, ainsi qu’il a été dit précédemment, les injonctions relatives à la participation de la société Groupe Canal Plus dans la société OCS auront pour effet de replacer cette dernière société dans la situation d’un concurrent direct de la société Groupe Canal Plus ; que les injonctions relatives à la reprise des chaînes thématiques et à la reprise des chaînes premium garantiront aux éditeurs de chaînes des conditions de reprise objectives, transparentes et non discriminatoires et permettront ainsi, non seulement de faciliter l’entrée sur le marché en donnant aux éditeurs de chaînes une plus grande visibilité sur les conditions dans lesquelles ils pourraient obtenir une distribution mais encore d’assurer une plus grande pérennité des éditeurs de chaînes présents sur le marché ; que les injonctions relatives à la reprise des chaînes premium garantiront en outre, ainsi qu’il a été dit précédemment, que les distributeurs tiers auront accès aux chaînes disposant des contenus les plus attractifs ; que les injonctions relatives au dégroupage des chaînes de cinéma du bouquet Canalsat éditées par la société Groupe Canal Plus auront pour effet de rendre immédiatement accessibles, sur le marché intermédiaire, des chaînes thématiques de cinéma figurant parmi les plus attractives ; que les injonctions relatives à la limitation des exclusivités préviendront la préemption, par la société Groupe Canal Plus, des chaînes indépendantes en permettant aux distributeurs tiers propriétaires d’une plateforme desservant au moins 500 000 abonnés de concurrencer effectivement la société Groupe Canal Plus pour l’obtention d’exclusivités de distribution de chaînes ; que l’ensemble de ces injonctions permettra ainsi, d’une part, à l’ensemble des distributeurs d’avoir accès aux chaînes intégrant les contenus les plus attractifs, d’autre part, aux distributeurs tiers propriétaires d’une plateforme desservant au moins 500 000 abonnés de composer un bouquet de chaînes comprenant des exclusivités de distribution ; que l’injonction relative aux marchés des départements et régions d’outre-mer permettra aux distributeurs présents sur ces marchés d’être placés dans une situation au moins aussi favorable que celle des distributeurs présents sur les marchés de métropole ;
158. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la date de la décision attaquée, la société Parabole Réunion, dont la plateforme de distribution dessert moins de 500 000 abonnés, constituait le principal concurrent de la société Groupe Canal Plus sur le marché aval des services de télévision payante de l’océan Indien ; que, toutefois, certains fournisseurs d’accès à Internet dont la plateforme de distribution dessert plus de 500 000 abonnés étaient également présents sur ce marché et que la société Groupe France Télécom Orange, premier fournisseur d’accès à Internet concurrent de la société Groupe Canal Plus, tendait à développer sa position, notamment en complétant son offre de télévision par ADSL par une offre de télévision par satellite ; qu’ainsi, en vertu des injonctions dont les effets viennent d’être rappelés, la concurrence sur le marché aval des services de télévision payante de l’océan Indien pourra être animée, d’une part, par un distributeur offrant les chaînes qui intègrent les contenus les plus attractifs et, bien que n’ayant pas la capacité de concurrencer la société Groupe Canal Plus pour l’obtention d’exclusivités de distribution, pouvant offrir aux éditeurs de chaînes une distribution non exclusive, d’autre part par un distributeur offrant également les chaînes qui intègrent les contenus les plus attractifs et susceptible, non seulement d’offrir aux éditeurs de chaînes une distribution non exclusive, mais encore d’obtenir une distribution en exclusivité sur sa plateforme ; que les consommateurs du marché de l’océan Indien pourront, dans ce cadre, avoir accès à des offres diversifiées et de bonne qualité à des prix concurrentiels ;
159. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’Autorité de la concurrence n’a pas commis d’erreur d’appréciation en estimant que les injonctions qu’elle a prononcées, dont la pertinence et l’efficacité doivent, dans cette mesure, être appréciées globalement, étaient de nature à prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération liés au verrouillage de l’accès des distributeurs tiers aux intrants et au renforcement de la position de la société Groupe Canal Plus sur le marché aval des services de télévision payante sur le marché de l’océan Indien ;
160. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi, la société Parabole Réunion et la société Numéricable ne sont pas fondées à demander l’annulation de la décision de l’Autorité de la concurrence du 23 juillet 2012 relative à la prise de contrôle exclusif de TPS et Canalsatellite ;
Sur les conclusions de la requête de la société Parabole Réunion tendant à l’annulation de la décision du 28 août 2012 du ministre de l’économie et des finances :
161. Considérant qu’aux termes du II de l’article L. 430-7-1 du code de commerce : » Dans un délai de vingt-cinq jours ouvrés à compter de la date à laquelle il a reçu la décision de l’Autorité de la concurrence ou en a été informé en vertu de l’article L. 430-7, le ministre chargé de l’économie peut évoquer l’affaire et statuer sur l’opération en cause pour des motifs d’intérêt général autres que le maintien de la concurrence et, le cas échéant, compensant l’atteinte portée à cette dernière par l’opération. / Les motifs d’intérêt général autres que le maintien de la concurrence pouvant conduire le ministre chargé de l’économie à évoquer l’affaire sont, notamment, le développement industriel, la compétitivité des entreprises en cause au regard de la concurrence internationale ou la création ou le maintien de l’emploi. / Lorsqu’en vertu du présent II le ministre chargé de l’économie évoque une décision de l’Autorité de la concurrence, il prend une décision motivée statuant sur l’opération en cause après avoir entendu les observations des parties à l’opération de concentration. Cette décision peut éventuellement être conditionnée à la mise en oeuvre effective d’engagements. / Cette décision est transmise sans délai à l’Autorité de la concurrence. » ;
En ce qui concerne la légalité externe :
162. Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : » A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l’acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d ‘Etat et par délégation, l’ensemble des actes, à l’exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 1° Les (…) directeurs d’administration centrale (…) » ; que, par décret du 16 avril 2009, publié le lendemain au Journal officiel de la République française, Mme A…a été nommée directrice générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes ; que par suite, elle était compétente pour signer la décision attaquée, qui était relative aux affaires des services placés sous son autorité ;
En ce qui concerne la légalité interne :
163. Considérant, d’une part, que le ministre n’a pas commis d’erreur de fait en relevant que les éléments présentés par la société Parabole Réunion dans sa demande étaient, pour l’essentiel, relatifs à la nécessité de maintenir une concurrence suffisante ; qu’il résulte de la lettre des dispositions précitées de l’article L. 430-7-1 du code de commerce qu’il n’a pas commis d’erreur de droit en estimant qu’il ne lui appartenait pas de se prononcer sur un tel motif ;
164. Considérant, d’autre part, qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de l’Autorité de la concurrence du 23 juillet 2012 préjudicierait, comme le soutient la société Parabole Réunion, à l’intérêt général lié au maintien de l’emploi, ou à un intérêt général autre que le maintien de la concurrence ; que le ministre n’a, en conséquence, commis ni erreur de droit, ni erreur manifeste d’appréciation en décidant de ne pas faire usage du pouvoir d’évocation dont il dispose en vertu de l’article L. 430-7-1 du code de commerce ;
165. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Parabole Réunion n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision du 28 août 2012 du ministre de l’économie et des finances ;
Sur les conclusions à fin d’injonction de la requête de la société Parabole Réunion :
166. Considérant que la présente décision, qui rejette les conclusions à fin d’annulation de la société Parabole Réunion, n’appelle aucune mesure d’exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d’injonction présentées par la requérante doivent être rejetées ;
Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
167. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat (Autorité de la concurrence) qui n’est pas, dans les présentes instances, la partie perdante ; qu’en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’une part, de mettre à la charge des sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi la somme de 2 500 euros chacune à verser à l’Etat (Autorité de la concurrence) au titre de ces dispositions, d’autre part, de mettre à la charge de la société Parabole Réunion la somme de 3 000 euros à verser à l’Etat (Autorité de la concurrence) au titre de ces dispositions, enfin, de mettre à la charge de la société Numéricable la somme de 3 000 euros à verser à l’Etat (Autorité de la concurrence) au titre de ces dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les interventions de la société Métropole Télévision (M6) et des sociétés Télévision Française 1 (TF1), TF1 Vidéo, TF1 Thématiques, Eurosport France SA, Histoire, Société paneuropéenne d’édition et d’exploitation de documentaires, Société d’exploitation de documentaires et TV Breizh dans l’affaire n° 362347 sont admises.
Article 2 : La requête des sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi, la requête de la société Parabole Réunion et la requête de la société Numéricable sont rejetées.
Article 3 : Les sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi verseront à l’Etat (Autorité de la concurrence) la somme de 2 500 euros chacune au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La société Parabole Réunion et la société Numéricable verseront à l’Etat (Autorité de la concurrence) la somme de 3 000 euros chacune au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : La présente décision sera notifiée aux sociétés Groupe Canal Plus et Vivendi Universal, à la société Parabole Réunion, à la société Numéricable, à l’Autorité de la concurrence, au ministre de l’économie et des finances, à la société Télévision Française 1 (TF1) et à la société Métropole Télévision (M6).
Copie en sera adressée pour information à la ministre de la culture et de la communication, au Conseil supérieur de l’audiovisuel et à l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
Les sociétés TF1 Vidéo, TF1 Thématiques, Eurosport France SA, Histoire, Société Paneuropéenne d’édition et d’exploitation de documentaires, Société d’exploitation de documentaires et TV Breizh seront informées de la présente décision par la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d’Etat.
ECLI:FR:CEASS:2012:362347.20121221