REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° C 04-47950 à H 04-47954 ;
Attendu qu’une procédure de redressement judiciaire a été ouverte le 2 juillet 1999 à l’égard de la société Essam, appartenant au groupe Finantec ; qu’un jugement du 24 septembre 1999 a prononcé la liquidation judiciaire de cette société ; que le liquidateur judiciaire a notifié aux salariés leur licenciement pour motif économique ; que ces derniers ont saisi la juridiction prud’homale de demandes en fixation des créances résultant, selon eux, d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le liquidateur leur a opposé la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l’article L. 621-125 du code de commerce ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le liquidateur fait grief aux arrêts attaqués (Douai, 29 septembre 2004) d’avoir déclaré recevables les actions des salariés, alors, selon le moyen :
1 / que méconnaît les termes du litige le juge qui modifie le fondement des prétentions d’une partie ; qu’en l’espèce, la juridiction prud’homale avait été saisie dans le cadre de l’article L. 621-125 du code de commerce, ce qui résulte des termes du jugement qui se réfère explicitement à la procédure de l’article L. 621-125 et de la saisine directe du bureau de jugement par application de cette disposition ; qu’en énonçant que les salariés n’avaient pas saisi la juridiction prud’homale de l’action mentionnée à l’article L. 621-125 du code de commerce, la cour d’appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 5 du nouveau code de procédure civile ;
2 / que la forclusion de l’article L. 621-125 du code de commerce est applicable dès lors que le litige porte sur l’inscription d’une créance d’indemnité pour rupture abusive du contrat de travail et que le salarié n’a pas saisi la juridiction prud’homale dans le délai de deux mois à compter de la publication de l’arrêté des créances dans un journal d’annonces légales ; qu’en déclarant les salariés recevables en leur action alors qu’elle avait constaté qu’ils avaient engagé leur action plus de deux mois après la publication de l’arrêté de créances dans un journal d’annonces légales, la cour d’appel a violé l’article L. 621-125 du code de commerce par défaut d’application et l’article L. 511-1 du code du travail par fausse application ;
Mais attendu que, sans méconnaître les termes du litige, la cour d’appel, qui a constaté que les salariés demandaient, conformément à l’article L. 511-1 du code du travail, la réparation du préjudice causé par l’irrégularité de fond de leur licenciement, a exactement décidé que leur action était distincte de celle ouverte par l’article L. 621-125 du code de commerce, alors applicable, en vertu duquel les salariés dont les créances ne figurent pas en tout ou en partie sur un relevé des créances, résultant du contrat de travail établi par le représentant des créanciers, peuvent saisir le conseil de prud’hommes de leur contestation ; qu’elle en a déduit, à bon droit, que les salariés ne pouvaient se voir opposer la fin de non-recevoir tirée de la forclusion prévue par l’article précité, quand bien même ils avaient directement saisi le bureau de jugement de leurs prétentions ; que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que le liquidateur reproche aux arrêts d’avoir déclaré la nullité du plan social et d’avoir, en conséquence, prononcé la nullité du licenciement économique des salariés, alors, selon le moyen, que la pertinence d’un plan social doit être appréciée en fonction des moyens dont disposent l’entreprise et le groupe auquel elle est intégrée ;
qu’en l’état de la liquidation judiciaire de l’entreprise se traduisant par la cessation définitive de son activité et de l’impossibilité de tout reclassement au sein du groupe auquel elle appartient en raison même de sa situation économique critique, l’objet du plan social est nécessairement réduit à des mesures de reclassement externe ; qu’en considérant comme insuffisant le plan social qui comportait des conventions de conversion, des conventions ASFNE, la mise en place d’une cellule de reclassement avec pour objectifs de mener des actions de bilan et d’évaluation des salariés ainsi qu’à les informer et faciliter leurs démarches auprès des différents organismes, sans examiner si la liquidation judiciaire de la société Essam sans reprise de l’activité de celle-ci et la situation économique du groupe Finantec qui a conduit à sa disparition en 2001 n’étaient pas de nature à limiter les propositions du plan social, la cour d’appel a entaché sa décision d’un défaut de base légale au regard de l’article L. 321-4-1 du code du travail ;
Mais attendu que si la pertinence d’un plan social s’apprécie en fonction des moyens dont dispose l’entreprise, il doit comporter des mesures précises et concrètes susceptibles d’assurer le reclassement des salariés à l’intérieur du groupe auquel la société appartient et, à défaut de postes disponibles, de faciliter les départs à l’extérieur du groupe ; que la cour d’appel, qui a constaté que le plan ne contenait aucune indication précise sur le nombre, la nature et la localisation des emplois existants dans le groupe et se bornait à prévoir des conventions de conversion ou ASFNE et à instaurer une cellule de reclassement dont la mission était l’évaluation des compétences, l’information et l’aide des salariés dans leurs démarches auprès des organismes sociaux, a pu décider que le plan ne répondait pas aux exigences de la loi ; que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Soinne, ès qualités, aux dépens ;
Vu l’article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze octobre deux mille six.