REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, enregistrée au secrétariat du Tribunal des conflits le 19 décembre 1990, une expédition du jugement du 29 novembre 1990 par lequel le tribunal administratif de Marseille a renvoyé au Tribunal des conflits le soin de déterminer l’ordre de juridiction compétent pour statuer sur la demande de Mme X… tendant à ce qu’il soit ordonné au maire de Marseille, officier de l’état civil, de lui remettre un livret de famille, en raison du risque de conflit négatif résultant de ce que, par arrêt du 9 mars 1988, la cour d’appel d’Aix-en-Provence, statuant en référé, avait déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître de cette demande ;
Vu ledit arrêt du 9 mars 1988 ;
Vu, enregistrées comme ci-dessus le 1er février 1991, les observations présentées pour la ville de Marseille et tendant à ce que la juridiction de l’ordre judiciaire soit déclarée compétente ;
Vu, enregistrées comme ci-dessus le 13 mars 1991, les observations du ministre de l’intérieur tendant à voir reconnaître la compétence de la juridiction judiciaire ;
Vu l’avis postal duquel il résulte que connaissance de la saisine du Tribunal des conflits a été donnée à Mme X…, qui n’a pas produit d’observations ; Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III ;
Vu la loi du 24 mai 1872 ;
Vu le décret du 26 octobre 1849 modifié et complété par le décret du 25 juillet 1960 ;
Vu le décret n° 74-449 du 15 mai 1974 ;
Après avoir entendu :
– le rapport de M. Saintoyant, membre du Tribunal,
– les observations de Me Guinard, avocat de la ville de Marseille,
– les conclusions de M. Stirn, Maître des requêtes, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que Mme X…, mère d’un enfant naturel né à Marseille, a demandé au maire de cette ville, officier de l’état civil, de lui remettre un livret de famille ; qu’à la suite du refus qui lui a été opposé, elle a saisi, d’une demande de délivrance du livret, le juge des référés judiciaire, qui s’est déclaré incompétent au motif que le refus procédait de l’exercice d’un pouvoir de l’administration ; que, statuant au principal, le tribunal administratif de Marseille, estimant qu’il appartenait aux juridictions de l’ordre judiciaire de se prononcer sur un litige relatif au fonctionnement des services de l’état civil, a renvoyé au Tribunal des conflits le soin de décider sur la question de compétence ;
Considérant qu’il résulte du décret du 15 mai 1974, d’une part, qu’un livret de famille, établi à la diligence d’un officier de l’état civil, doit être remis à la mère d’un enfant naturel, sur sa demande, lorsque la filiation maternelle est établie et, d’autre part, que chacun des extraits portés sur ce livret a la force probante qui s’attache aux extraits des actes de l’état civil ; qu’il s’ensuit qu’en raison des modalités de l’établissement de ce livret, de son objet et de ses effets, la demande, qui est relative au fonctionnement des services de l’état civil placé sous le contrôle de l’autorité judiciaire, ressortit à la juridiction judiciaire ;
Article 1er : Il est déclaré que les juridictions de l’ordre judiciaire sont compétentes pour statuer sur le litige qui oppose Mme X… au maire de Marseille, officier de l’état civil, et relatif à la délivrance d’un livret de famille.
Article 2 : L’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence en date du 9 mars 1988 est déclaré nul et non avenu. La cause et les parties sont renvoyées devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Article 3 : La procédure suivie devant le tribunal administratif de Marseille est déclarée nulle et non avenue, à l’exception du jugement du 29 novembre 1990 par lequel ce tribunal a renvoyé au Tribunal des conflits la question de compétence posée par le litige.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, chargé d’en assurer l’exécution.