Traduit de l’italien par Philippe Cossalter, professeur de droit public à l’Université de la Sarre. Extrait de Sabino CASSESE, Tre maestri del diritto pubblico, Università degli studi Suor Orsola Benincasa, Editoriale Scientifica (collection « Lezioni magistrali », n° 57), 2012, p. 11-31. Titre original : « Auf der gefahrenvollen Strasse des öffentlichen Rechts. La « rivoluzione scientifica » di Vittorio Emanuele Orlando ».
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1. Un jeune palermitain à la recherche d’un droit national
L’unification avait été faite en 1861, sans constitution. Il fallait, selon Cavour, « faire l’Italie pour la constituer ensuite ». Le Statut albertin avait donc été adopté, dans un esprit de Restauration. La législation des premières années avait pour but de créer un marché économique national1. La législation d’unification administrative était ensuite intervenue en 1865, laissant de côté la question constitutionnelle. Il manquait encore un « droit national » et « une science du droit public national ». Une « révolution scientifique » était nécessaire : il fallait poser les bases conceptuelles du nouvel ordre juridique auquel avait donné vie « le sang des martyrs et le conseil des hommes d’Etat »2. C’est à cette tâche que s’attela un jeune palermitain de vingt-cinq ans, Vittorio Emanuele Orlando, qui y consacra douze ans de sa vie, de 1885 à 1897, dans trois leçons inaugurales universitaires en 1885 (Modène), 1886 (Messine) et 1889 (Palerme), deux manuels (les « Principes de droit constitutionnel » en 1889 et « Principes de droit administratif » en 1891), une revue (les « Archives de droit public » (Archivio di diritto pubblico), fondée en 1896) et un traité (le « Premier traité complet de droit administratif » (Primo trattato completo del diritto amministrativo), commencé en 1897)3. À partir de 1897 le jeune palermitain, déjà connu et apprécié, y compris à l’étranger (à tel point que l’un de ses articles sur la représentation avait été publié, en 1895, dans la seconde année de la « Revue du droit public et de la science politique ») sera, durant trente ans membre du Parlement ; il sera ministre durant dix ans (à l’Instruction, à la Justice et à l’Intérieur) ; il sera Président du Conseil des ministres pendant la Première guerre mondiale. Redevenu parlementaire il participera avec « une énergie intacte » aux travaux de l’Assemblée constituante puis du Sénat jusqu’à sa mort en 1952 à l’âge de 92 ans. On peut appliquer à Orlando l’observation qu’il fit lui-même à propos de Giolitti4 : sa vie se confond presque avec l’histoire politique de l’Italie, pour une longue période de temps.
De toute l’activité du scientifique et du politique je me propose de n’évoquer que le « manifeste » dans lequel il expose son programme de rénovation, d’en examiner la portée et l’inspiration, d’en évaluer les limites et l’actualité5.
2. Les critères techniques pour la reconstruction juridique du droit public : dessein scientifique et projet politique
Le point de départ de la leçon palermitaine de 1889 est le constat des « graves imperfections » du droit public : celui-ci abuse des aspects philosophique et exégétique. Les juristes sont trop philosophes et sociologues, et pas assez jurisconsultes. Une « réforme essentielle » (définie comme une « révision critique fondamentale ») est nécessaire. Cette réforme doit s’inspirer du droit privé, qui a atteint un plus grand degré de perfection grâce au droit romain et à « l’œuvre merveilleux » de Labéon, Cujas, Publius Salvius Iulianus, Savigny, Papinien, Pothier. Et Orlando de considérer que « le droit public droit être envisagé, au même titre que le droit privé, comme un système de principes juridiques systématiquement ordonnés ». « La rigueur du système est une condition essentielle à la science juridique ». Le système précède la loi : « si la loi suppose la préexistence d’un système organique le système ne découle pas de la loi »6.
Le droit privé donc, comme système de principes juridiques, est un moyen de perfectionnement du droit public. Mais d’où Orlando tire-t-il cette formulation systématique du droit privé romain ? L’on a déjà noté qu’il cite ensemble Labéon, Papinien et Savigny. Dans un autre passage de sa leçon Orlando exprime son « profond respect pour le nom de Savigny » et reconnait que l’Allemagne est la « patrie du système ». Ainsi, l’inspiration d’Orlando n’est pas le droit romain en tant que tel, mais plutôt la « réinterprétation » du « Système du droit romain d’aujourd’hui » à laquelle Savigny a procédé et dont le premier volume avait été publié en italien par Vittorio Scialoja en 1886, à peine trois ans avant la leçon palermitaine7.
A côté de l’inspiration scientifique, qui le conduit à citer l’exemple du droit privé romain dans sa version savinienne et donc systématique, Orlando suit une seconde voie que l’on peut dire politique. Il insiste sur ce point dans la partie finale de sa leçon inaugurale : « nous ne devons pas nous préoccuper d’un Etat idéal, mais d’un Etat existant, non de la souveraineté d’une idée, mais de la souveraineté des pouvoirs constitués, non des droits de l’homme, mais de la protection juridique de la sphère individuelle […] ». « La merveilleuse histoire du Risorgimento nous a légué un Etat national et libre. S’il ne nous a pas été donné d’y participer, il nous a été confié une autre tâche très délicate et solennelle […]. Le sang des martyrs et le conseil des hommes d’Etat nous a donné l’Etat italien, l’école juridique doit maintenant créer la science du droit public italien ». Ceci est un « devoir sacré ». « Cette unité de l’Etat si longtemps désirée, il ne suffit pas qu’elle reçoive une reconnaissance politique ; il faut aussi qu’elle vive de la vie du droit, de notre droit, d’un droit national ». Il faut « apporter une puissante contribution à la formation d’un droit public national ». Les universités doivent être le « centre moteur de ce mouvement ».
Orlando reviendra constamment, durant les soixante années suivantes, sur le « manifeste » de 1889, presque toujours pour en souligner l’aspect de la « révolution scientifique ». Il le fera en 1897, dans sa Préface au traité de droit administratif8 ; dans les nouvelles éditions des « principes de droit constitutionnel »9, dans lesquelles il reconnaitra appartenir à l’école historique fondée par Savigny ; en 1909, dans la « présentation » du premier numéro de la Revue de droit public10 ; en 1925, dans les « notes de l’auteur de 1925 à l’auteur de 1885 » ; en 1939, dans l’article « A nouveau sur la méthode en droit public, avec une attention particulière à l’œuvre de Santi Romano » ; en 1949, dans la « Préface de l’auteur » au recueil de ses écrits réunis sous le titre de « Droit public général »11 ; en 1949, dans son « introduction » à la traduction italienne de la « Théorie générale de l’Etat » de Georg Jellinek12 ; enfin, dans les « Développements historiques du droit administratif en Italie de 1890 à 1950 », prémices aux « Principes de droit administratif » dans leur édition de 195213.
Les nombreuses études historiques du « manifeste » orlandien s’accordent pour reconnaître qu’il constitue une nette rupture. Qu’il suscita de nombreuses réactions14 , mais qu’il a vaincu dans le monde scientifique, dans le sens que la doctrine du droit public italien a continué à étudier selon le paradigme orlandien et a reconnu sa « paternité ». Mais certains en ont fait une interprétation réductrice, l’utilisant comme une « indication du chemin à suivre », et non comme un « plan de reconstruction » ni comme un « énoncé de principes de reconstruction »15 (en effet, dans sa leçon inaugurale palermitaine Orlando se limite à mentionner l’importance des concepts de personnalité juridique de l’Etat et de droit publics subjectifs).
Personne n’a tenté d’examiner les doctrines contemporaines dans d’autres ordres juridiques et d’autres cultures. Par exemple, personne n’a cherché à se demande pourquoi, en 1894, en présentant la revue destinée à devenir la plus importante d’Europe, et qui ne s’appelait pas par hasard « Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger », Ferdinand Larnaude écrit : « Pour traiter les questions de droit constitutionnel, de droit administratif, même de droit international, il faut être jurisconsulte. […] Mais il n’en est pas de même de la science politique, et la science politique me paraît un complément indispensable des études de droit public »16. Et personne n’a noté que dans l’aire culturelle germanique certains prenaient des orientations toutes différentes. Ainsi Hugo Preuss, né la même année qu’Orlando, développe dans sa thèse d’habilitation aux fonctions de professeur en 1889 –donc la même année que la leçon orlandienne – l’idée que les pouvoirs publics dans l’Etat moderne sont disposés sur plusieurs plans ; ce qui lui permet de soutenir en 1912 que « des Volksstaat wendet sich gegen den Obrigkeitsstaat » et de développer pour la première fois en Allemagne la théorie du pluralisme17.
Je crois aujourd’hui que le dessein d’Orlando doit être envisagé moins comme l’écriture d’un chapitre de l’histoire de la science du droit public qu’un moment de la construction de l’Etat18. La référence au droit privé, dans sa reconstruction opérée par Von Savigny, n’est pas très originale par rapport à d’autres aspects de l’œuvre d’Orlando. La référence au droit romain est avant tout un thème nationaliste. L’appel aux institutions positives (« nous ne devons pas nous préoccuper d’un Etat idéal, mais d’un Etat existant »). Enfin, l’appel à coopérer à la « vie du droit, d’un droit qui soit le nôtre, d’un droit national » à travers la création, au sein de l’Université, d’une science du droit public.
C’est là que réside l’importance du dessein orlandien, dans cette fonction politique de la méthode juridique19. Orlando eut une attitude patriotique, il se sentit le continuateur des patriotes et des hommes d’Etat du Risorgimento ; il eut le sentiment des carences constitutionnelles du nouvel Etat ; durant la décennie d’universitaire destinée à préparer les trente années de sa carrière de parlementaire, il s’applique à construire une science permettant de procurer une base conceptuelle aux nouvelles institutions, il bat le rappel des juristes pour qu’ils travaillent avec une méthode systématique sur les nouvelles institutions. Il était convaincu de faire ainsi œuvre de constituant, car « la loi suppose le système organique du droit » ; « pour le juriste, qui ne voit dans la loi que la reproduction d’un principe juridique dont il doit avoir la connaissance et la conscience préalables, la loi ne peut être prise en compte que comme l’expression du principe juridique qu’elle déclare, et donc du système juridique qui la sous-tend ». En qualité de constructeur du système, le juriste vient donc avant le législateur, il établit les coordonnées selon lesquelles ce dernier va se mouvoir. En un mot, la science est appelée à jouer un rôle supérieur à celui du législateur, un rôle de type constitutionnel.
C’est pour cela que l’on ne peut pas percevoir de continuité et de cohérence entre l’activité d’Orlando constructeur du système et celle du législateur. La première s’inspirait de principes supérieurs, tandis que la seconde était liée aux circonstances20.
3. Deux « compagnons de voyage » : Scialoja et Savigny
Orlando ne fut pas seul à faire entendre sa voix en faveur de nouvelles institutions pour le nouvel Etat. Il eut deux illustres prédécesseurs : Scialoja et Savigny.
Observons les dates. Les trois leçons inaugurales orlandiennes datent de 1885, 1886 et 1889. La leçon prononcée à Camerino par Scialoja date de 1879. La publication du premier volume du « Système » de Savigny, dans la traduction italienne assurée par Scialoja, date de 1886 (l’original allemand de l’œuvre avait été publié entre 1840 et 1849).
La leçon inaugurale « du droit positif et de l’équité » de Vittorio Scialoja, prononcée vers la fin 1879 et publiée en 188021. Mais il y a plus. Scialoja observe en ouverture que « le droit vraiment digne de ce nom émerge avec l’Etat […] ». Celui-ci émet des « règles générales » qui sont « sanctionnées par le consentement mutuel de ceux qui forment l’Etat ». Il termine en observant : « Nous croyons que la soumission de la volonté individuelle, des opinions personnelles face à la volonté de l’Etat, quel qu’il soit, est l’œuvre d’un bon citoyen ; ce n’est qu’ainsi que nous garderons intacte cette liberté, conquise à tant de peine par nos pères ». « Ceux qui, comme moi, défendent le pur droit positif, ont souvent été accusés d’étroitesse d’esprit et de manque d’idéaux ». Ce n’est pourtant qu’ainsi « que l’on pourra rendre à la patrie son antique grandeur ».
Certains des thèmes orlandiens sont présents dans ces extraits : rappel de la formation récente de l’Etat ; place importante réservée à la loi (et dévaluation conséquente de l’équité) ; défense du droit positif ; nationalisme. Le droit romain devient implicitement la base pour la construction de toutes les branches du droit : en 1930, rendant hommage à son élève Oreste Ranelletti, Scialoja notera che « l’on apprend le droit administratif en faisant l’exégèse du Corpus Juris »22.
Les affinités entre Orlando et Savigny sont encore plus fortes. Nous avons vu qu’en 1889 Orlando reconnaît à Savigny une place spéciale. Il y revient en écrivant en 1939 en l’honneur de Santi Romano : Savigny est un « esprit exceptionnel »23. Il faut se souvenir que durant les années universitaires 1892-1893 et 1893-1894, Orlando assura un cours d’Institutions du droit romain, qui fit l’objet d’une publication24.
En premier lieu, Savigny explique l’importance de « se servir du droit romain comme moyen de perfectionnement de l’état de notre droit » ((F.C. SAVIGNY, Sistema, précité pp. 16-17.)). De cette manière l’on peut « travailler avec le concours de la force des siècles passés » ((F.C. SAVIGNY, Sistema, précité p. 3)). Orlando aussi considère que l’état du droit de son temps nécessite une « révolution scientifique » et que son perfectionnement peut provenir de l’étude du droit romain. Les deux auteurs font référence à la pandectique.
En second lieu, Savigny considère que « le vice capital de nos conditions juridiques actuelles provient d’une séparation toujours plus marquée entre la théorie et la pratique » ((F.C. SAVIGNY, Sistema, précité p. 13.)); le droit romain est le moyen de rétablir l’unité entre théorie et pratique. Une fois rétablie cette unité, « le théoricien conserve et cultive l’intelligence de la pratique et le praticien l’intelligence de la théorie » ((Ce sont les mots par lesquels l’auteur anonyme de la traduction du « Beruf » au XIXème siècle résume la position du juriste allemand : Della Vita e delle Opere di Savigny e della importanza della Scuola Storica, in : F.C. SAVIGNY, La vocation del nostro tempo per la legislazione e la giurisprudenza, Vérone, 1857, p. 65.)).
En troisième lieu Savigny soutient que « dans notre science, toute réussite se fonde sur le respect des principes fondamentaux. C’est précisément en cela que réside la grandeur des juristes romains ». C’est pour cela que « toute leur manière de procéder possède une exactitude que l’on ne rencontre dans aucun autre champ scientifique en dehors de la mathématique, si bien que l’on peut dire sans exagérer qu’ils calculent avec leurs concepts »25. « La forme qui doit être adoptée pour atteindre le but fixé est la méthode systématique ». « A mes yeux l’essence de la méthode systématique réside dans la reconnaissance et l’exposé du lien intime et des affinités unissant les concepts juridiques et les règles particulières dans un grand ensemble ». « Tous les rapports juridiques dans la riche et vivante réalité forment un tout organique que nous sommes contraints de décomposer pour en comprendre chacune des parties puis les expliquer aux autres »26. Il a été justement observé que la méthode systématique de Savigny « vise à comprendre comme un tout unitaire la totalité des normes juridiques et des institutions juridiques sur lesquelles elles se fondent »27 et que « l’idée de système est […] une sorte de modèle supra historique, qui peut être valable dans différentes périodes et circonstances, avec des adaptation et des développements, mais doté d’une fixité de ses paradigmes fondamentaux similaire à celle qui caractérise les catégories jusnaturalistes »28.
Dernier élément commun à Savigny et Orlando, qui ne sont pas par hasard de grands juristes en même temps que des politiciens actifs, le nationalisme. Comme cela a été noté, « Savigny envisage dès l’origine l’étude du droit romain comme faisant partie de la fondation d’un droit positif national […] » ((M. BRUTTI, Vittorio Scialoja…, précité p. 4. Sur le nationalisme de Savigny, F. DE MARINI, Introduction in : F. DE MARINI (dir.), Savigny, Bologne, 1980, pp. 12-13. Sur la méthode systématique allemande et Savigny, il existe une abondante littérature : parmi les écrits récents A. TROMBETTA, Savigny e il sistema. Alla ricerca dell’ordine giuridico, Bari, 2008 et les pages de F. MARINELLI, Scienza e storia del diritto civile, Rome-Bari, 2009, 113 s.)).
4. Le chemin périlleux d’Orlando
Le chemin dans lequel Orlando s’engageait était particulièrement accidenté. Voyons où se trouvaient les dangers, en examinant séparément son dessein politique et son programme scientifique.
Le dessein politique, celui de donner un solide ensemble de principes au nouvel Etat, dans le cadre duquel puisse prendre place sa législation, comportait un rejet du constitutionnalisme, qui pouvait être un dangereux concurrent à l’action du « Juristenrecht » défendu par Orlando. Ce dernier observe, dans sa leçon inaugurale de 1889 que « tous ces statuts ou chartes constitutionnelles sont ce que l’on peut imaginer de pire, étrange recueil de définitions abstraites, de maximes trop générales, qui des nuages des déclarations de droits transcendantales tombent soudainement dans les plus humbles sphères des matières les plus insignifiantes ». Cette position anticonstitutionnelle sera maintenue fermement devant l’Assemblée constituante, jusqu’à la déclaration antieuropéenne d’Orlando à la fin de sa carrière qui déplut tant à De Gasperi : « nous ne voulons pas mourir européen »29.
Dans la position orlandienne se reflète l’aversion typique des libéraux anglais pour le constitutionnalisme à la française, fondé sur les révolutions et les proclamations de droits au sein de chartes constitutionnelles, par opposition à la tradition anglaise, fondée sur les transformations progressives et pacifiques et sur la protection juridictionnelle des droits. Cette position reflète également le refus d’un droit supérieur, qui pourrait limiter le législateur de tous les jours, et qui pourrait assumer cette fonction ordonnatrice qu’Orlando réservait à l’Université et à la science du droit public ((V. les fines observations sur la confiance très limitée d’Orlando dans le législateur et la conscience de ses limites, ainsi que sur le pouvoir constituant qu’il assignait à la doctrine : M. FIORAVANTI, Popolo e Stato, précité, pp. 109 s.)).
Les signes de l’orgueil « constituant » d’Orlando se voient dans la manière dont il soutiendra durant des décennies des thèses manifestement opposées aux développements du droit positif, celle de la représentation politique comme choix des personnalités les plus qualifiées, celle des entités locales vus comme des organes de l’Etat, celle de la justice administrative comme activité administrative contentieuse. Il resta convaincu que « notre système positif de droit administratif n’a pas été modifié dans ses structures porteuses » ((M.S. GIANNINI, recension de V.E. ORLANDO, Principi di diritto amministrativo, in : Rivista trimestrale di diritto pubblico, 1953, n° 1 p. 148.)) de la période giolitienne à la République.
Le programme scientifique d’Orlando, à son tour, était vide ; il consistait plutôt dans l’idée d’un programme. Il se limitait à souhaiter l’unité de la théorie et de la pratique, les analyses systématiques, le modèle romanistique dans sa version savignienne.
Orlando acceptait sans critique la reconstruction savignienne, selon laquelle le droit romain avait une « forme classique, cohérente, achevée », indépendamment des juristes, considérés dans un certain sens comme des « personnes interchangeables ».
Mais le droit romain était-il vraiment un « rigoureux calcul de concepts », n’était-il pas plutôt fondé sur « la problématique de thèses provisoires et susceptibles d’être discutées » ? Le droit romain ne laissait-il pas beaucoup de place au droit dialectique, fondé sur la discussion, n’était-il pas « lié à des règles découlant de la pratique », caractérisé par « la nécessité constante d’être appliqué à des cas concrets », attentif au rattachement de toute solution juridique à un procès »30 au fond plus proche du « judge-made-law » anglosaxon et de son approche casuistique, que de reconstructions bien ordonnées fruit de l’esprit systématique et géométrique de Savigny ?
Mais outre son nationalisme paradoxal, qui se fondait sur la lecture du droit romain à travers les lunettes logico-mathématiques de l’allemand Savigny (ce dernier étant critiqué par Hegel pour avoir réduit les Pandectes à des axiomes mathématiques), Orlando étudiait un Etat idéal « qui commande et ne vaut que parce qu’il a la force de faire respecter ses commandements » ((V.E. ORLANDO, Sul concetto di Stato, in : V.E. ORLANDO, Diritto pubblico generale, précité, p. 220 )). Mais l’Etat italien réel du XIXème siècle dans lequel Orlando mature son projet scientifique était celui d’un pouvoir politique à la base électorale très restreinte : Orlando se présenta aux élections une première fois en 1895, remporta 403 suffrages et fut battu par un fidèle de Crispi, qui avait obtenu 685 voix ; il se représenta en 1897 et fut élu avec 685 voix, contre 511 à son opposant31. C’était un Etat dans lequel la grande majorité de la population était analphabète, le clivage entre Nord et Sud extrêmement fort, les émigrants très nombreux et les structures administratives trop faibles. Dans quelle mesure « l’exemple immortel de logique juridique » fourni par le droit romain comme « modèle de droit privé à base de liberté individuelle » vanté par Vittorio Scialoja dans la « Préface » à sa traduction du premier volume du « Système » de Savigny pouvait-il fournir des instruments pour la formation d’une classe dirigeante apte à gérer les très difficiles conditions de la société italienne de ce temps ? La logique pratique du capitalisme naissant ou la logique militaire de l’armée, qui étaient les seules ressources technico-administratives utilisables à l’époque, n’auraient-elles pas été plus utiles pour prendre en compte les règles de fonctionnement d’un système défaillant et les corriger ?
En somme « la théorie italienne de l’Etat est une transposition forcée de concepts et d’idéologies en contraste singulier avec la réalité de l’Etat italien dans lequel le « leadership » de l’administration piémontaise, unique composante où était présente une tradition étatique, était voué à se dissoudre rapidement pour laisser place à une « méridionalisation de l’Etat », c’est-à-dire la conquête de l’appareil administratif par cette partie de l’Italie où était les moins présentes cette culture et cette tradition étatiques. L’on pourrait dire que l’objectif de cette forte approche étatiste de la culture juridique et politique était d’établir un « standard » idéal qui n’a jamais été atteint, mais qu’elle a fini par « couvrir » d’un voile idéologique les faiblesses du corps réel de l’Etat »32.
5. La vocation et les défis de notre temps pour l’étude du droit public
Que reste-t-il aujourd’hui de l’enseignement d’Orlando ? Qu’est-ce qui a survécu de l’école nationale du droit public ? Quels autres défis se présentent à nous ((Pour un bilan, bien que limité au droit administratif et ne concernant pas la période contemporaine : A. SANDULLI, Costruire lo Stato,… précité et A. MASSERA, « Il contributo originale della dottrina italiana al diritto amministrativo », in : Diritto amministrativo, 2010, n° 4 pp. 761 s. V. aussi, par référence à d’autres cultures juridiques R. ZIMMERMANN, « Savigny’s Legacy. Legal History, Comparative Law, and the Emergence of a European Legal Science », in : The Law Quarterly, 1996, vol. 112, octobre, pp. 576 s.; M.O GIROLAMI, « The vanity of dogmatizing », in Constitutional Commentary, 2010 vo. 27 n° 1, pp. 201 s.; v. aussi le numéro special du German Law Journal, 2011, vol. 12, n° 2 consacré à « The Many Fates of Legal Positivism ».)) ?
En premier lieu, le droit romain n’a plus aucune importance pratique, il ne fait plus l’objet d’exégèses, il ne fait plus partie que de l’histoire du droit et fait l’objet de recherches philosophiques33. Il constitue un patrimoine énorme, à condition de ne le considérer que comme le produit de l’histoire et comme l’objet d’analyses historiographiques constamment renouvelées. Le droit contemporain contient les traces du droit romain mais je doute que l’on puisse dire (comme l’affirmait Scialoja) que le droit romain, s’il n’est pas appliqué formellement, est substantiellement encore en vigueur. Même des institutions juridiques d’origine romaine ont une signification et une fonction différentes, la mémoire et la perception de leurs origines se sont perdues car l’étude du droit romain est toujours plus limitée, moins approfondie (spécialement en dehors d’Italie)34.
En second lieu la référence exclusivement nationale des sciences juridiques en général et du droit public en particulier est dépassée par la formation de pouvoirs publics supranationaux et par l’intégration des ordres juridiques nationaux dans des ordres sectoriels globaux. Cela a mené à la création de communautés de chercheurs qui se constituent parallèlement à la formation des communautés de politiques, de fonctionnaires, de juges nationaux, communautés entre lesquels s’exercent de continuelles interactions liant les divers ordres juridiques et constituant des fabriques juridiques communes.
Troisième développement : la science juridique va au-delà du positivisme légal ou normativiste. Pour le juriste positiviste le droit était la « law in books », il était composé de lois entendues comme le produit de la volonté des Etats. Le juriste se concevait lui-même comme un simple interprète. Désormais l’étude du droit législatif est intégrée avec l’étude de la « law in action », et l’étude des lois avec celle des décisions juridictionnelles. La science juridique a ouvert ses horizons à l’examen des pratiques légales et de tous les types de « soft law ». Elle n’envisage plus la norme seulement comme un commandement ou une interdiction, mais aussi comme une promotion, une incitation, une régulation. Elle est moins préoccupée par le système, et plus orientée vers l’examen des problèmes ; moins intéressée par la construction d’ordres logico-juridiques, et plus curieuse de comprendre le fonctionnement des diverses parties de la machine juridique. Elle est passée d’un examen statique à une étude dynamique. La science juridique prend en compte les valeurs qui sous-tendent les normes ((En 1990 E. Cheli faisait justement observer que les chercheurs en droit administratif italien de la quatrième génération suivaient trois lignes directrices : « la réintégration du droit public dans l’aire des sciences sociales ; la réévaluation des fins pratiques de la science, et de la politique du droit ; la recherche des fondements et de l’épaisseur historique des « institutions juridiques », dont découlent la négation de la validité de la vision systématique, le regain de l’analyse jurisprudentielle, la valorisation des fins pratiques de la science juridique (E. CHELI, Modello costituzionale, précité, 104-105) )).
En quatrième lieu, tandis que le droit public traditionnel reconnaissait l’Etat comme objet principal de son propre examen, l’attention se porte désormais sur le citoyen.
Peut-on être satisfaits de ces évolutions ? Bien qu’elles soient importantes, je pense que l’on ne peut pas s’en contenter. D’abord, il est nécessaire d’aller plus résolument au-delà du nationalisme juridique et au-delà de la simple comparaison. Le droit public est désormais fondé sur certains principes communs, tels que le principe de proportionnalité, les droits de la défense et l’obligation de motivation, le principe de ragionevolezza ((Le principe de ragionevolezza tiré par la Cour constitutionnelle italienne de l’article 3 de la Constitution, est un principe de pondération des buts avec les moyens employés. Il est parfois traduit par « rationnalité », mais est en règle générale conservé en italien dans les traductions en langue étrangère. NDT)), le due process of law, la protection de certains droits fondamentaux, conventionnellement appelés droits humains. Ces principes sont diversement mis en œuvre dans les ordres juridiques nationaux ou supranationaux, mais ils ont des racines communes. Ils opèrent dans des contextes divers, qui en influencent les usages. Ils sont étudiés grâce à des méthodes de « wertende Rechtsvergleichung » (analyse critique de comparaison des droits).
Notre seconde mission est de tenir compte de la tendance de tous les ordres juridiques à l’interpénétration, donnant lieu à des constructions définies couramment mais improprement comme étant « multiniveaux ». Si la génération précédant la nôtre a travaillé à la reconnaissance de la primauté du droit constitutionnel sur le droit administratif (« Verwaltungsrecht als konkretisiertes Verfassungsrecht »), notre devoir est de reconnaître l’importance croissante des ordres juridiques supranationaux. Par conséquent, un droit public qui place l’Etat au centre de son raisonnement doit s’accompagner d’un droit public dont le centre est constitué par un réseau complexe d’ordres juridiques, régionaux et globaux.
Notre troisième mission est de reconstruire l’unité du droit public, perdue avec la spécialisation de ses diverses branches, les droits constitutionnel, administratif, international, fiscal, chacun ayant été attrait dans la compétence de juridictions sectorielles (cour constitutionnelle, justice administrative, cours internationales, juridictions financières).
Des missions de ce type doivent prendre en compte le fait que la création par voie législative d’un espace européen de recherche (art. 179.1 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne) conduit à la création d’un espace juridique européen de recherche, qui contribuera à la fin de l’isolement de la science juridique et au développement de la comparaison (je dirais, au-delà de la comparaison35 ). Cela nécessitera de faire les comptes avec la culture juridique américaine, réduira la fragmentation et augmentera le pluralisme de la science juridique. Mais cela n’est pas possible si l’on se cramponne au « constructivisme doctrinal » qui implique une redécouverte de Savigny, l’adhésion à une idée du droit comme système rationnel et organique dont dérivent les décisions sur les situations concrètes, en un mot le néo-pandectisme36.
L’œuvre d’Orlando, son projet politique, son programme scientifique, peuvent nous aider à suivre ce chemin, mais uniquement si nous parvenons à les replacer dans leur contexte historique, à en comprendre l’ambition et les limites, à nous libérer de leur précieux héritage.
- S. CASSESE, « Fare l’Italia per costruirla poi ». Le continuità dello Stato, in : Rivista trimestrale di diritto pubblico, 2010, n° 2, pp. 305 s. [↩]
- Les trois extraits entre guillements sont extraits de V.E. ORLANDO, I criteri tecnici per la ricostruzione giuridica del diritto pubblico (1889), reprint V.E. ORLANDO, Diritto pubblico generale. Scritti Vari (1881-1940), Milan, 1954, pp. 3 s. [↩]
- A la production scientifique directe doit être ajoutée l’activité d’organisation d’une Ecole, au sens large (son seul élève fut Santi Romano) et la forte présence dans le choix des futurs professeurs, ainsi que le dialogue avec la jurisprudence (Orlando fut avocat jusqu’à sa mort, même s’il semble qu’il développa principalement son activité devant la Cour de cassation). [↩]
- V.E. ORLANDO, Memorie (1915-1919), Milan 1960, p. 277. [↩]
- Sur Orlando il existe désormais une vaste littérature, même si certains écrits sont encore inédits et qu’il n’existe pas de bonne réédition des écrits édités ni d’une bibliographie satisfaisante. Nous nous contenterons de citer M. FIORAVANTI, La vicenda intelletuale del « Giovane Orlando » (1881-1897), Florence, 1979, reprint : Popolo e Stato negli scritti giovanili di Vittorio Emanuele Orlando, in FIORAVANTI, La scienza del diritto pubblico. Dottrine dello Stato e della costituzione tra Otto e Novecento, I, Milan, 2001, p. 67; G. CIANFEROTTI, Il pensiero di V.E. Orlando e la giuspubblicistica italiana fra Ottocento e Novecento, Milan, 1980 ; P. GROSSI, Scienza giuridica italiana. Un profilo storico, Milan, 2000, pp. 28-37 ; A. SANDULLI, Costruire lo Stato. La scienza del diritto amministrativo in Italia (1800-1945), Milan, 2009. Pour le centenaire de la leçon inaugurale palermitaine, G. REBUFFA, I lessici e il tempo della prolusione di Vittorio Emmanuele Orlando, A. Massera, L’influenza della cultura tedesca sulla prolusione orlandiana, G. AZZARITI, La prolusione orlandiana e la scienza del diritto amministrativo anteriore al 1889, G. CIANFEROTTI, La prolusione di Orlando. Il paradigma pandettistico, i nuovi giuristi universitari e lo Stato liberale, in Rivista trimestrale di diritto pubblico, 1989 n° 4, respectivement p. 919, 937, 968 et 995. [↩]
- Cette identification du caractère systématique à la méthode scientifique est si forte chez Orlando que, réunissant ses « scritti vari (1881-1940 », il ajoute en sous-titre au volume « coordonnés en système ». [↩]
- F.C. VON SAVIGNY, Sistema del diritto romano attuale, traduction de l’original allemand par Vittorio Scialoja, I, Turin, 1886. [↩]
- V.E. ORLANDO, Prefazione, in V.E. Orlando (dir.), Primo trattato completo di diritto amministrativo italiano, Milan, 1897, pp. V s. [↩]
- V.E. ORLANDO, Principii di diritto costituzionale, Florence, IV ed., 1905, pp. 5 s. où il souligne que la “nouvelle tendance” était “radicale dans ses objectifs” et visait à une “instauratio ab imis” ; v. aussi V.E. ORLANDO, Diritto costituzionale. Lezioni, rédigée par A. Campobassi, 1905-1906, pp. 3 s (il s’agit d’une édition lithographique des leçons prononcées par Orlandi et recueillies par Campobassi ; parmi elle la « leçon inaugurale » tient une place particulière). [↩]
- Il nostro compito, in : Rivista di diritto pubblico, A. I, 1909, pp. 1 s., signé par ORLANDI, LUZZATTI, SALANDRA, CODACCI-PISANELLI, CALISSE, CORRADINI, D’AMELIO. [↩]
- V.E. ORLANDO, Diritto pubblico generale, cit. VII s. [↩]
- V.E. ORLANDO, Introduzione generale, in : G. JELLINEK, La dottrina generale del diritto dello Stato, traduction italienne, Milan, 1949, pp. III s. [↩]
- V.E. ORLANDO, Sviluppi storici del diritto amministrativo in Italia dal 1890 al 1950, in V.E. ORLANDO, Principii di diritto amministrativo, nouvelle édition (S. Lessona), Florence, 1952, pp. V s. [↩]
- Sujet qui n’a pas été assez étudié : v. cependant P. BENEDUCE, « Punto di vista amministrativo » e Stato di diritto : aspetti del germanesimo dei giuristi italiani alla fine dell’Ottocento, Annali dell’Istituto storico italo-germanico in Trento, 1984, X, pp. 119 s. [↩]
- M.S. GIANNINI, Profili storici della scienza del diritto amministrativo, in : Studi sassaresi, 1940, XVIII, 66, reprint in : Quaderni fiorentini per la storia del pensiero giuridico moderno, 1973, n° 2, pp. 179 s. [↩]
- A. LE DIVELLEC, « La fondation et les débuts de la Revue de droit public et de la science politique (1894-1914) », Revue du droit public et de la science politique, 2011, n° 2, p. 525. [↩]
- Sur Preuss v. récemment A. VOSSKHULE, « Hugo Preuss als Vordenker einer Verfassungstheorie del Pluralismus », Der Staat, 2011, B. 50, Heft 2, spéc. pp. 256, 262 et 264. [↩]
- Au-delà du dessein culturel, le « juriste constructeur » apporte son soutien au jeune édifice étatique. P. GROSSI, Scienza giuridica, précité, pp. 28 s. [↩]
- Fonction que j’ai déjà soulignée en 1971, mais seulement en référence à la « canalisation » du consensus à l’égard des institutions du nouvel Etat. (S. CASSESE, Cultura e politica del diritto amministrativo, Bologne, 1971, p. 29. Traduction française par Marcel Morabito, Culture et politique du droit administratif, Dalloz (coll. Rivages du droit), 2008 NDT). Sur le projet politique qui sous-tendait l’œuvre d’Orlando, E. CHELI, Modello costituzionale e scienza amministrativa, in : Vari, La necessaria discontinuità. Immagini del diritto pubblico, Bologne, 1990, p. 100. [↩]
- Mais c’est un point qui mériterait des études plus approfondies. Il serait nécessaire d’examiner systématiquement l’activité scientifique et politique d’Orlando : y ut-il un programme « politique » traduisant de manière cohérente le projet de l’école italienne du droit public ? Quels furent les rapports avec Giolitti qui fut le « dominus » de la scène parlementaire de l’époque ? [↩]
- CAMERINO, Savini, 1880. 100.), a déjà été mise en parallèle avec les trois leçons d’Orlando, en raison de la commune inspiration du « paradigme pandectiste » ((G. CIANFEROTTI, Storia della letteratura amministrativa italiana I. Dall’Unità alla fine dell’Ottocento. Autonomie locali. Amministrazione e Costituzione, Milan, 1998, p. 750. [↩]
- V. SCIALOJA, Onoranze a Oreste Ranelletti, in V. SCIALOJA, Scritti e discorsi politici, II, Roma, 1936, 318. [↩]
- V.E. ORLANDO, “Ancora del metodo in diritto pubblico con particolare riguardo all’opera di Santi Romano”, in : V.E. ORLANDO, Diritto pubblico generale. Scritti vari (1881-1940), p. 49. [↩]
- V.E. ORLANDO, Corso di istituzioni di diritto romano, Palerme, 1894. [↩]
- F.C. SAVIGNY, La vocazione…, cité dans la traduction de A. SCHIAVONE, Alle origini del diritto borghese. Hegel contro Savigny, Rome-Bari, 1984, p. 71. [↩]
- F.C. SAVIGNY, Sistema… précité, pp. 20-21. [↩]
- K. LARENZ, Storia del metodo nella scienza giuridica, traduction, Milan, 1966, 15. [↩]
- M. BRUTTI, Vittorio Scialoja. Diritto romano e sistema nel tardo Ottocento, in : Serie IV, Fol. CV, “Bullettino del diritto romano”, 2011, p. 13. [↩]
- V. F. GRASSI ORSINI, Orlando, profilo dell’uomo politico e dello statista : la fortuna e la virtù, in : Sénat de la République – Archivio storico, Vittorio Emanuele Orlando. Discorsi parlamentari, Bologne, 2002, p. 117. [↩]
- Les extraits rapportés sont issus de M. BRUTTI, L’independenza dei giuristi (dallo ius controversum all’autorità del principe), in : F. MILAZZO (dir.), Ius controversum e Auctoritas principis. Giuristi, Principe e Diritto nel primo Impero, Naples, 2003 pp. 403-405. [↩]
- Données issues de F. GRASSI ORSINI, Orlando…, précité, pp. 35 et 37. [↩]
- S. CASSESE, « Fare l’Italia per costruirla poi ». Le continuità dello Stato, in : Rivista trimestrale di diritto pubblico, 2011, A. LXI, Fasc. 2, 327. [↩]
- Je parcours ainsi les divers aspects de l’importance du droit romain mis en exergue par Scialoja dans sa « Préface » précitée à la traduction du premier volume du Système de Savigny, pp. XXI-XXII [↩]
- S. CASSESE, L’anatra di Goethe, in Index, 2011, pp. 26 s. et « La storia, compagna necessaria del diritto », Le carte e la storia, 2009, A. XV, n° 2, pp. 5 s. [↩]
- S. CASSESE, Il mondo nuovo del diritto. Un giurista e il suo tempo, Bologne, 2008 p. 147 : « […] il faut avoir le courage d’aller au-delà de la comparaison. Celle-ci, au fond, est basée sur la conception positive et nationaliste du droit, en ce qu’elle étudie des systèmes juridiques nationaux. Un pas supplémentaire est fait par ceux qui s’intéressent aux « familles » de systèmes juridiques (anglo-saxonne, romano-germanique, asiatique, etc…) ou par ceux qui se sont mis à la recherche de principe communs à plusieurs systèmes (le « common core »). Mais cela ne suffit pas. Il est nécessaire de partir de plus haut, de l’universalité du droit. Reconnaître les racines communes et les contextes différents. Etudier la circulation non seulement des institutions, mais également des idées et des cultures. Examiner les influences réciproques et les migrations. Analyser la formation des institutions supra-étatiques, qui permettent la circulation des cultures et des droits. Adjoindre à la comparaison horizontale d’ordres nationaux (français, anglais, américain) la comparaison verticale d’ordres superposés (italien, européen, organisation mondiale du commerce) ». [↩]
- V. les importantes contributions de R. ZIMMERMANN, Savigny’s Legacy, précité et d’A. VON BOGDANDY, Deutsche Rechtswissenschaft im europaïschen Rechtsraum, in Juristenzeitung, 2011, 66 n° 1, pp. 1 s. qui, avec des accents et des développements différents militent pour le développement d’une science juridique européenne, pluraliste et fondée sur la comparaison, ma avec des références à un noyau central de caractère systématique, sur le modèle savignien [↩]