Contexte : Par cet arrêt rendu le 27 septembre 2016, la chambre criminelle de la Cour de cassation rappelle que le refus de se soumettre à des traitements médicaux ne saurait être opposé à la victime pour réduire son droit à réparation.
Litige : Le 27 juillet 2007, un couple est victime d’un accident de la circulation. Le mari décède après un temps de coma. Les juges du fond doivent évaluer le préjudice de sa veuve. Elle est notamment déboutée de sa demande en réparation des souffrances qu’elle a subies pendant la période de coma de son mari.
Solution : La chambre criminelle casse l’arrêt de la cour d’appel de Versailles en considérant que :
« Vu les articles 16-3 et 1382 du code civil ;
Attendu que le refus d’une personne, victime du préjudice résultant d’un accident dont un conducteur a été reconnu responsable, de se soumettre à des traitements médicaux, qui ne peuvent être pratiqués sans son consentement, ne peut entraîner la perte ou la diminution de son droit à indemnisation de l’intégralité des préjudices résultant de l’infraction ;
Attendu que, pour limiter la réparation du préjudice universitaire de Mme Z… causé par la mort accidentelle de son mari, l’arrêt, par motifs propres et adoptés, relève qu’en ayant délibérément interrompu les traitements antidépresseurs et thérapeutiques qui lui étaient préconisés par les experts et en poursuivant une autoprescription médicamenteuse, la blessée a participé à la dégradation de son état psychologique, ruinant toute possibilité de restaurer la poursuite de ses études engagées avant l’accident ;
Mais attendu qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ».
Analyse : La Cour de cassation rappelle ici un droit fondamental qu’elle puise dans les articles 16-3 et 1382 (devenu 1240 depuis l’ordonnance du 10 février 2016) et qui a été consacré par la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades : le droit de refuser de se soigner.
Ce droit est énoncé en des termes parfaitement clairs par l’article L. 1111-4 du code de la santé publique qui dispose : « Toute personne a le droit de refuser ou de ne pas recevoir un traitement« .
Du point de vue de la réparation des dommages, ce principe empêche le débiteur de la dette de réparation de se prévaloir du refus de la victime de suivre un traitement médical, y compris s’il n’implique aucun geste invasif, pour réduire l’étendue de son indemnisation.
En l’occurence, la souffrance de cette femme doit être réparée dans toute son étendue, peu importe si elle aurait pu être réduite en suivant un traitement antidépresseur.