« Le seul responsable de cette affaire, c’est moi et moi seul ! […] Celui qui a fait confiance à Alexandre Benalla, c’est moi, le Président de la République. Celui qui a été au courant et a validé l’ordre, la sanction de mes subordonnés, c’est moi et personne d’autre».1
Cette affirmation du Président de la République, loin d’être anodine, pose la question de l’entourage du chef de l’État et l’implication de ce dernier dans l’organisation de la présidence de la République.
Alexandre Benalla a été nommé le 15 mai 2017 en tant que chargé de missions, adjoint au chef de cabinet à la présidence de la République. Si son implication dans des opérations de maintien de l’ordre le 1er mai 2018 a déclenché les prémisses de cette affaire, d’autres dysfonctionnements importants2 sont apparus soulevant la question de sa fonction exacte et du périmètre des missions qu’il exerçait au sein de l’Elysée. Sa nomination en tant que collaborateur du Président de la République3, son interférence dans le fonctionnement des administrations placées sous l’autorité du Gouvernement soulèvent la problématique plus générale de la tension entre une constitution parlementaire et une pratique présidentialiste.
Les constituants de 1958 ont d’abord instauré un parlementarisme rationnalisé octroyant des pouvoirs considérables au Gouvernement, en échange desquels celui-ci est responsable politiquement devant le Parlement. La présidentialisation du régime4 s’est progressivement opérée par l’élection au suffrage universel direct du Président de la République instauré en 19625 puis par l’adoption du quinquennat6 et le renversement du calendrier électoral7 garantissant en pratique une majorité parlementaire favorable au chef de l’État. Cela a justifié factuellement, si ce n’est constitutionnellement, une extension des pouvoirs présidentiels. Tous les présidents successifs ont dès lors estimé qu’ils étaient « l’homme de la nation »((DE GAULLE Ch., Discours et messages, T. IV, Pour l’effort (août 1962-décembre 1965), Plon, 1970, p. 162.)), le « chef incontesté de l’exécutif ((POMPIDOU G., Le nœud gordien, Plon, 1974, p. 63.)) », dans un « régime présidentialiste ((GISCARD D’ESTAING V., Réunion de presse du 25 juillet 1974, reproduit dans Le Monde, 27 juillet 1974.)) » où « les grandes orientations »8 doivent être données par le chef de l’État qui « gouverne ((SARKOZY N., Discours d’Épinal, reproduit dans Le Monde, 12 juillet 2007.)) ». Si la doctrine parle même d’hyper-présidence sous Nicolas Sarkozy9, François Hollande se positionne également en tant que chef de l’exécutif en indiquant lors de ses vœux au Gouvernement en janvier 2014 : « Les objectifs que j’ai fixés lors de mes vœux aux Français sont désormais les vôtres ».
Aucune de ces révisions n’est pourtant venue modifier la répartition juridique des pouvoirs au sein de l’État. La Constitution de 1958 reste de nature parlementaire dans sa rédaction initiale et différencie clairement les fonctions présidentielles et gouvernementales. Les articles 5, 19, 20 ou encore 21 de la constitution sont inchangés. En d’autres termes, juridiquement, le Premier ministre dirige toujours l’action du Gouvernement, lequel détermine et conduit la politique de la nation. Selon le texte constituant, le Président a essentiellement pour fonction d’arbitrer les conflits les plus graves10 et d’assurer la continuité du fonctionnement des pouvoirs publics et il détient à cet égard des compétences dont l’exercice est dispensé de contreseing11. Hormis le cas de l’article 16, il s’agit de « pouvoirs de régulation du fonctionnement des pouvoirs publics et non pas, à proprement parler, des pouvoirs de gouvernement 12». En dehors de ces cas, et conformément à un régime parlementaire, tous les actes du Président sont soumis à contreseing, octroyant responsabilité et pouvoir au Gouvernement13. Pourtant, en pratique, le chef de l’État s’est progressivement octroyé des pouvoirs dont il ne disposait pas constitutionnellement.
Si la plupart des écrits consacrent sont consacrés à la captation des pouvoirs du Gouvernement par le Président de la République14, peu font le lien entre l’amoindrissement des pouvoirs gouvernementaux et l’hypertrophie actuelle des services de la présidence de la République due au rôle que le chef de l’État s’octroie désormais dans le cadre du fonctionnement et de l’organisation desdits services. Services dont le Président use pour empiéter et s’accaparer les compétences gouvernementales.
Quelle est la véritable nature juridique de la présidence de la République ? Est-ce un organe administratif ? Son expansion modifie-t-elle la répartition des pouvoirs au sein de l’exécutif ? Quel rôle joue le chef de l’État dans la mise en place de ses services ? Détient-il les prérogatives d’un chef de service ? Si la réponse est positive, cela est-il légitime ? Est-ce en accord avec notre constitution et l’Etat de droit ?
Il importe d’interroger la nature juridique exacte des services de la présidence de la République et la qualité du chef de l’État en son sein (I). Il apparait que les pouvoirs du Président de la République en tant que chef de service ne sont pas conformes à la constitution. Éminemment politique, la mobilisation de ces pouvoirs semble un angle mort dans notre État de droit (II).
I – La présidence de la République : organe présidentialiste assis sur un service administratif du régime parlementaire
Dans le cadre de ses pouvoirs constitutionnels, le chef de l’État est assisté par les services de la présidence de la République. L’analyse du fonctionnement et de l’organisation de ces services montre qu’à défaut d’être un organe constitutionnel, il rassemble toutes les caractéristiques d’un organe administratif (A) dont le chef de service, véritable autorité administrative, est bien le Président de la République (B).
A – La présidence de la République : une représentation équivoque d’un organe administratif
La nature administrative de la présidence relève à la fois de la reconnaissance de ce régime par différents organes de l’État (a) et du comportement adopté désormais par les services qui y sont rattachés et que sanctionnent de récentes réformes (b).
1 – La reconnaissance extrinsèque de la nature administrative de la présidence
Le terme « présidence de la République » n’apparaît pas dans la constitution. Cet organe rattaché au chef de l’État ne peut dès lors être défini que de manière indirecte, sa création n’ayant fait l’objet d’aucun acte juridique.
Sous les Républiques précédentes, la présidence était une structure légère15, principalement en charge de l’intendance et des services « domestiques », ce en adéquation avec les pouvoirs limités du chef de l’État. Au cours de la IIIème République, aucun texte ne fixe la composition et les attributions des services reliés au Président de la République. Seule une distinction traditionnelle est opérée entre la maison militaire, comptant entre six et dix membres, et la maison civile, oscillant entre quatre et sept personnes16. Le chef de l’État ne dispose donc que d’un entourage très modeste. Le même constat peut-être effectué sous la IVème République, la maison civile de René Coty comprenant seulement un secrétaire général, un directeur de cabinet, un directeur du secrétariat général et trois chargés de mission17.
Désormais l’hypertrophie de la présidence en fait une structure administrative plus conséquente et de nombreux documents y font référence attestant factuellement de son existence. Les lois de finances prévoient ainsi dans le budget général de l’État, un crédit affecté à la présidence de la République, elle-même incluse dans la catégorie des pouvoirs publics18. De la même manière, la Cour des comptes établit annuellement un rapport remis au Président de la République sur les comptes et la gestion des services de la présidence de la République19. Ce contrôle annuel effectué en vertu des articles L.111-2 et L.111-3 du code des juridictions financières permet de conclure de manière inductive que la Cour des comptes considère la présidence de la République comme un organe administratif puisqu’elle s’arroge le droit de la contrôler. En effet, ces articles indiquent expressément que la Cour des comptes contrôle « les services et organismes relevant de sa compétence ((Code des juridictions financières, art. L.111-2.)) », que sont les « services de l’État et les autres personnes morales de droit public, sous réserve de la compétence attribuée aux chambres régionales et territoriales des comptes et sous réserves des dispositions de l’article L. 131-3 ((Code des juridictions financières, art. L.111-3.)) ». Le caractère public de la présidence est par ailleurs corroboré par le fait que son fonctionnement dépend uniquement des finances publiques, son contrôle budgétaire étant par ailleurs effectué par le Parlement, au travers des commissions des finances des deux assemblées20 et des commissions des lois21 saisies pour avis chaque année. Enfin, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), interrogée par la commission des lois du Sénat, a clairement indiqué que les actes administratifs pris par les services de l’Élysée ne sont pas dérogatoires au droit commun et qu’ils constituent des « documents administratifs communicables à toute personne au titre du droit d’accès aux documents dont chaque citoyen peut se prévaloir22 ». En tout état de cause, il apparaît bien que la présidence de la République soit un organe administratif mais évidemment dépourvu de personnalité juridique car rattaché au Président de la République.
Le renforcement de la fonction présidentielle sous la Vème République a été transposé aux services de la présidence. Le rapport de la Cour des comptes rendu le 12 juillet 2019 fait état au 31 décembre 2018, d’un effectif physique de 816 agents23, dont une cinquantaine de collaborateurs directs. Ces personnes se retrouvent principalement dans trois structures, que certains auteurs qualifient d’ailleurs de services administratifs24 et que sont le Secrétariat général de la présidence de la République, le Cabinet et l’État major particulier. Le Cabinet, composé de 47 membres25 nommés discrétionnairement par le chef de l’État, est un organisme à vocation politique qui s’occupe notamment de l’organisation de l’emploi du temps et des déplacements du Président ainsi que de la rémunération du personnel élyséen. Les collaborateurs, conseillers techniques et chargés de missions, qui ont pour fonction principale de traiter les dossiers sensibles, n’apparaissent pas dans le cabinet de la présidence. Cette mission est en réalité assurée par le Secrétariat général de la présidence, les deux entités formant alors l’équivalent d’un cabinet ministériel26. L’État major comprend quant à lui et sous l’autorité d’un chef d’état major, des représentants des trois armées. Il assiste et informe le Président pour toutes les questions relatives au milieu militaire et paramilitaire et prépare les réunions du Conseil de défense en liaison avec les services de Matignon et du ministère de l’Intérieur. Si ces trois services se maintiennent au fil des présidences, chaque chef d’État apporte des innovations dans l’organisation de son entourage en fonction de ses attentes et de sa volonté d’influencer les décisions politiques27. Aucune règle spécifique n’existe en la matière et le Président reste donc entièrement libre de nommer autant de collaborateurs qu’il l’entend, aux fonctions qu’il détermine lui-même28.
2 – La clarification administrative intrinsèque de la présidence sur fond de crise
Cette instabilité organique associée à une absence de volonté interne d’encadrement juridique en fait un appareil protéiforme dont la composition et les compétences ne sont pas définies. Toutefois, si l’Élysée semble être un objet juridique insaisissable, les nécessités de son fonctionnement le poussent progressivement à adopter des règles d’organisation qui s’apparentent à celles encadrant les organes administratifs. Entreprise avant l’affaire Benalla, mais sans nul doute accélérée par cette dernière, une opération de réforme des services de la présidence a eu lieu au 1er avril 2019. Auparavant composée de dix-sept services, la présidence est désormais organisée, à l’instar des ministères, en plusieurs directions placées sous l’autorité d’un directeur général des services dont la fonction n’a été rétablie que le 10 septembre 201829. Ce poste, présent dans toute administration bureaucratique, a été confié à Jérôme Rivoisy et sa création a sans nul doute été motivée par les dysfonctionnements constatés au cours de l’affaire Benalla30. L’organigramme des services de la présidence reste peu détaillé mais il montre cependant la création de quatre directions dont on peut d’ailleurs questionner l’origine, laissée à la discrétion du Président de la République. De manière générale, le décret du 15 juin 1987 relatif à l’organisation des services d’administration centrale indique que « l’organisation des services centraux de chaque ministère en directions générales, directions et services est fixée par décret ((Décret n° 87-389 du 15 juin 1987 relatif à l’organisation des services d’administration centrale, modifié par Décret n° 2008-208 du 29 février 2008, JORF, n° 0053 du 2 mars 2008, texte n° 5, art. 2.)) ». Si rien n’est précisé concernant l’organisation de l’Elysée, reste qu’en tant qu’organe administratif de l’administration centrale, son organisation en directions aurait sans doute dû relever d’un décret du Premier ministre qui, selon l’article 20 de la constitution, dispose de l’administration. Or c’est par simple arrêté du Président de la République, dont le niveau dans la hiérarchie des normes juridiques n’est pas établi, que cette organisation s’est réalisée et non par l’acte juridique majeur de l’exécutif.
L’effectif de ces directions se répartit en 119 agents pour la seule direction de la communication, 219 agents pour la direction des opérations, 95 agents pour la direction des ressources et de la modernisation et 346 agents pour la direction de la sécurité31. Cette dernière direction est le point d’orgue de cette réforme puisqu’elle regroupe sous une seule direction le commandement militaire du palais32 et le groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR). La Cour des comptes avait soulevé dans ses derniers rapports un problème de structuration et d’organisation des services de sécurité de la présidence en termes notamment de gouvernance et de bonne gestion33. C’est pour pallier ces déficiences que le Président de la République avait lancé au début de l’année 2018 ce projet de réforme, entérinée par deux arrêtés du 20 août 2019 nommant respectivement le colonel Benoît Ferrant à la tête de la direction de la présidence34 et le commissaire divisionnaire Georges Salinas en tant que chef du GSPR35. À cette époque, la crainte était fondée d’une autonomisation des dispositifs de sécurité où le GSPR se serait trouvé détaché du service de la protection (SDLP) afin de s’affranchir de la tutelle du ministère de l’Intérieur36. Le rapport effectué par le Sénat à l’occasion de l’affaire Benalla n’a pu, sur la base des informations qui lui ont été fournies, déterminer exactement le contenu du projet initial mais indique que si l’option d’une autonomisation avait été envisagée, elle aurait déséquilibré profondément l’organisation de la sécurité du Président37. Il est difficile de savoir si les répercussions de l’affaire Benalla en sont la cause, mais la réforme finalement intervenue en 2019 maintient le lien organique entre la nouvelle direction de la sécurité et le ministère de l’Intérieur. Si la présidence de la République reste la seule autorité d’emploi, les policiers et gendarmes de cette nouvelle direction continuent, par le biais d’une convention-cadre de mise à disposition temporaire38, de relever du ministère pour leur gestion administrative39. À cet égard, une singularité doit être relevée puisque la mise à disposition ne peut normalement être réalisée qu’au profit d’une administration d’État, d’un établissement public administratif d’État, d’un organisme d’intérêt général public ou privé, d’une organisation internationale ou d’une association qui assure une mission d’intérêt général40. Si la présidence de la République n’est pas une administration d’État, il est difficile de comprendre pourquoi un tel dispositif juridique s’applique.
Un autre exemple relatif au budget de la présidence de la République montre sa tendance à se conformer désormais aux règles administratives. Multiplié par plus de 37 entre 1994 et 2001, le budget de l’Élysée est ainsi passé de 2.9 à 112.5 millions d’euros41. Les services de la présidence ont finalement choisi de se doter d’un règlement budgétaire et comptable42 en vigueur depuis le 1er janvier 2017 et reprenant largement les normes applicables à la gestion publique et notamment les dispositions du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique43. À ce titre, les services de la présidence bénéficient comme tout autre service administratif d’un ordonnateur et d’un comptable44, dont ils étaient jusqu’à présent dépourvus. Or, en tant que service administratif45, la présidence dispose nécessairement d’un chef de service.
B – Le chef de l’État : chef de service de la présidence distinct de ses fonctions constitutionnelles
La constitution confère au Président un rôle de gardien des institutions et d’arbitre des conflits. En ce sens, il n’a pas vocation à exercer le pouvoir gouvernemental (a). Le texte constituant est en revanche silencieux sur le statut de chef de service de la présidence que s’attribue aujourd’hui le chef de l’État (b).
1 – Le chef de l’État : organe constitutionnel aux pouvoirs non gouvernementaux
Autorité constitutionnelle revalorisée sous la Vème République, le chef de l’État détient de la Constitution de nombreux pouvoirs lui permettant d’agir en différentes qualités selon les attributions qu’il exerce et les missions qu’il conduit. Il peut ainsi intervenir en tant qu’autorité politique46, diplomatique47, militaire48, législative49 voire judiciaire50. Pour ce faire, le Président de la République possède des pouvoirs décisionnels réels dans l’exercice desquels il est habilité à agir seul51, sans contreseing ministériel52, à titre d’incarnation du pouvoir étatique53. En dehors de ces cas, il détient les pouvoirs formels d’un chef d’État parlementaire qui sont soumis à contreseing54. Or, le contreseing « fait passer le véritable pouvoir du signataire irresponsable au contresignataire responsable ((COLLIARD J.-C., « Que peut le président ? », Pouvoirs, n° 68, 1994, p. 17.)) ». Même si la pratique présidentialiste sous la Vème République reflète de moins en moins cette réalité juridique, « gouvernement et parlement [appliquant] la politique d’un Président qui ne se veut responsable que devant le peuple ((FERAL F., « Les relations entre les pouvoirs sous la Vème République », dans La Constitution de la Vème République, op.cit., p. 94.)) », cette interprétation du contreseing est en adéquation avec la rédaction juridique parlementaire du texte constitutionnel. Ainsi que l’indique Georges Burdeau, « s’il ne lui est pas interdit d’agir, il ne peut le faire que par personne interposée, c’est-à-dire en usant, éventuellement, de son ascendant sur le Premier ministre. Mais normalement, le Président n’a pas la gestion des affaires55 ». L’article 19 de la constitution indique en effet que « les actes du Président de la République autres que ceux prévus aux articles 8 (1er alinéa), 11, 12, 16, 18, 54, 56 et 61 sont contresignés par le Premier ministre et, le cas échéant, par les ministres responsables ». D’un point de vue sémantique, cet article est limpide. Il pose un principe, celui du contreseing de tous les actes présidentiels par le Premier ministre ou les ministres responsables et huit exceptions56. Comme dans l’ensemble des textes juridiques français, l’indicatif a valeur d’impératif, ce qui signifie que tous les actes du président doivent être contresignés à l’exception de ceux qui en sont expressément dispensés57.
Appartenant, au même titre que le Premier ministre et les différents ministères à l’administration centrale d’État, certains des pouvoirs du chef de l’État ont logiquement une dimension administrative. Considéré comme une autorité administrative d’exception58, le Président de la République dispose du pouvoir réglementaire et d’un pouvoir de nomination aux emplois publics. En vertu de l’article 13 alinéa 1, il est titulaire du pouvoir administratif réglementaire au niveau national qu’il exerce par voie de décrets ou d’ordonnances59. Il dispose également de pouvoirs de nomination. Selon la distinction opérée par l’article 19 de la Constitution, ce pouvoir réglementaire et la grande majorité des nominations soumises à la signature du Président sont en réalité des compétences purement formelles, puisque soumises à contreseing. Il en est ainsi des décrets de nomination adoptés en vertu de l’article 1360 de la constitution61, mais également de la nomination des ministres62, des personnalités qualifiées siégeant au Conseil supérieur de la magistrature63 ou encore du défenseur des droits64. En définitive, les seuls pouvoirs réels de nomination octroyés au Président par la constitution sont la nomination du Premier ministre65 et celle de trois membres du Conseil constitutionnel dont le président66. Si le chef de l’État exerce effectivement dans ces deux cas un pouvoir décisionnel, il n’en reste pas moins que ces nominations sont conditionnées, l’une par la configuration partisane de l’Assemblée nationale, l’autre par la nécessaire obtention d’un avis conforme de la commission des lois de chaque assemblée67.
Or, à côté des actes administratifs de nature réglementaire du Président prévus par la constitution et pour la majeure partie soumis à contreseing, le chef de l’État prend de manière totalement discrétionnaire des actes administratifs dans le cadre de la gestion et de l’organisation des services de la présidence de la République.
2 – Le Président : organe administratif chef de service de sa « Maison »
La constitution indique clairement que le Gouvernement « dispose de l’administration ». Le ministre est l’autorité première en matière administrative et se trouve à la tête d’une administration centrale dont il est le chef direct68. Ordonnateur principal des dépenses et des recettes, il est en charge de l’exécution du budget de son ministère voté par le Parlement. En tant que chef de service, il dispose d’un pouvoir hiérarchique sur les personnels de son administration. L’exercice de ce pouvoir prend la forme d’ordres, de circulaires ou d’instructions. Il décide du recrutement de ses agents et de leurs carrières. Par ailleurs, s’il ne bénéficie pas d’un pouvoir réglementaire autonome de principe, seuls des lois ou des règlements pouvant lui confier le pouvoir réglementaire69, une exception existe concernant l’organisation des services de son ministère. Depuis 1936, le Conseil d’Etat estime que « même dans le cas où les ministres ne tiennent d’aucune disposition législative un pouvoir réglementaire, il leur appartient comme à tout chef de service, de prendre les mesures nécessaires au bon fonctionnement de l’administration placée sous son autorité ((CE, 7 février 1936, Jamart, n° 43321, publié au recueil Lebon.)) ». De la même manière, le Premier ministre dirige l’action du Gouvernement. L’article 21 attribue au Premier ministre le pouvoir réglementaire, la nomination aux emplois civils et militaires et l’exécution des lois. Il y a là l’essentiel des pouvoirs et attributions nécessaires pour lui reconnaître la qualité de chef de l’administration, faisant de lui l’autorité administrative de droit commun70.
Pourtant, au titre d’une véritable coutume constitutionnelle71, les nominations et révocation des collaborateurs directs du chef de l’État sont prononcées par ce dernier discrétionnairement par le biais d’arrêtés72. En outre, il prend lui-même la décision portant règlement budgétaire et comptable de la présidence de la République qui indique clairement en son article 11 que « le directeur de cabinet du Président de la République est nommé par décret du Président de la République. Ce dernier lui donne délégation de signature pour les actes relatifs à la gestion administrative et budgétaire de la présidence de la République. Il est ordonnateur des recettes et des dépenses de la présidence de la République ((Décision du 29 mars 2019 portant règlement budgétaire et comptable de la présidence de la République.)) ». Cet article laisse entrapercevoir deux caractéristiques inhérentes à un chef de service, la délégation de signature et la qualité d’ordonnateur du budget de ses services. En effet, si le chef de l’État donne délégation de signature c’est évidemment parce qu’il dispose des prérogatives qu’il délègue. Le chef de l’État est donc ordonnateur principal de l’exécution des recettes et des dépenses des services de la présidence de la République. Ses fonctions ne lui permettant pas d’assurer l’ensemble des tâches matérielles, il dispose comme tout chef de service de la délégation de signature. Technique par excellence de l’organisation administrative traditionnelle visant à renforcer l’efficacité de l’administration, elle autorise certains agents subalternes à signer des décisions au nom de l’autorité délégante qui continue cependant à en assumer le contrôle et la responsabilité. Nommé dans un premier temps par le Président même73, le comptable de la présidence est désormais nommé par le secrétaire général74. Le 25 février 2019, Emmanuel Macron a également signé un arrêté donnant délégation de signature au directeur de cabinet, Patrick Strzoda concernant « tous actes et décisions concernant la gestion administrative et budgétaire de la présidence de la République, les actes relatifs à la gestion des personnels, le recrutement, la fin de fonctions des personnels, les actes relatifs à la gestion budgétaire et comptable, le règlement budgétaire et comptable, l’ordonnancement des dépenses et des recettes, les marchés publics et les actes se rapportant à leur exécution ((Arrêté du 25 février 2019 portant délégation de signature, JORF, n° 0048, 26 février 2019, texte n° 6.)) ». Nul doute, qu’il y a ici toutes les attributions d’un chef de service.
Cependant ni la loi, ni la constitution, ni le gouvernement n’ont nommé le Président de la République en tant que chef de service. C’est donc incidemment son élection au suffrage universel direct, proclamée par le Conseil constitutionnel qui est la base juridique de sa nomination en tant que chef de service, à l’instar de l’élection municipale par laquelle le maire devient chef de l’administration municipale. Factuellement chef de service, la définition de ses actes de commandement n’est cependant pas définie. Or, pour édicter un acte administratif unilatéral, les autorités administratives doivent y être habilitées juridiquement75. Cela soulève inévitablement des questions quant au contrôle de la conformité « de l’un des aspects du principe de légalité, qui exige d’un acte individuel ne puisse être pris que conformément et en application d’un acte général à caractère réglementaire ((VERRIER P., Les services de la présidence de la République, PUF, 1971, p. 19.)) ».Véritable auteur d’actes administratifs, qui doivent être nettement distingués des pouvoirs de signature et de nomination octroyés par la constitution, le chef de l’État semble dès lors disposer d’un pouvoir réel lorsqu’il s’agit du fonctionnement interne de la présidence de la République. En outre, et contrairement aux ministres qui restent soumis au droit de la fonction publique d’État et à l’ouverture de postes pour tout recrutement, il n’existe pas de statut de fonctionnaires de la présidence de la République76. Le Président a donc tout loisir de choisir librement ses collaborateurs sans recourir notamment aux procédures d’ouverture de postes budgétaires ou de concours de la fonction publique. S’il est de tradition constitutionnelle que les collaborateurs du Président soient nommés de façon discrétionnaire à l’instar des membres du cabinet du Premier ministre77, l’extension des pouvoirs du Président en tant que chef de service et le développement continu de la présidence et des prérogatives qu’elle détient soulèvent des questions quant à l’État de droit.
II – La présidence de la République : une extension croissante des fonctions et des compétences administratives face à l’État de droit
Les interrogations entourant les services de la présidence et le rôle du chef de l’État au sein de ses services soulèvent inévitablement des questions relatives aux fondements juridiques de l’administration de la présidence et aux dérives que cela serait susceptible d’engendrer (A) ainsi qu’à l’étendue du contrôle des actes pris par le Président de la République en sa qualité de chef de service (B).
A – Les fondements juridiques ambigus de l’administration de la présidence de la République
La majorité des pouvoirs relatifs à l’organisation et au fonctionnement de l’administration centrale repose en régime parlementaire sur le gouvernement (a), mais l’administration de la présidence de la République rompt avec les principes et les fondements du régime parlementaire (b).
1 – Les principes et les fondements de l’administration gouvernementale en régime parlementaire
L’organisation des administrations centrales de l’État dépend du pouvoir réglementaire78. Une illustration peut en être donnée avec deux services primordiaux du gouvernement, le Secrétariat général du gouvernement (SGG) et le secrétariat général des affaires européennes (SGAE). Le premier est créé par la loi de finances du 24 décembre 1934 en son article 23 et par le décret du 31 janvier 193579. Le service est alors composé de dix fonctionnaires et de quinze chargés de mission dont l’un est secrétaire général. Ce service est toutefois caractérisé par sa discrétion puisque ses fonctions ne sont définies ni dans la constitution ni dans une loi. Elles font uniquement l’objet d’un règlement intérieur des travaux du Gouvernement adopté en Conseil des ministres le 3 février 1947 et fixant de manière sommaire le rôle du secrétaire général du gouvernement dans la tenue de l’organisation des travaux du Conseil des ministres, des conseils de cabinet ou encore des réunions interministérielles80. La plupart des services sont cependant organisés de manière beaucoup plus détaillée. Le décret du 17 octobre 200581 précise ainsi clairement les attributions du SGAE82 qui, sous l’autorité du Premier ministre, a notamment pour fonction d’instruire et de préparer les positions exprimées par la France au sein des institutions de l’Union européenne, d’assurer le suivi interministériel de la transposition des directives et des décisions-cadres ou de coordonner le dispositif interministériel permettant l’information du Parlement européen sur les positions de négociations du Gouvernement83.
En revanche, aucune loi ni aucun décret n’institue les services de la présidence de la République dont l’organisation et le fonctionnement échappent à tout encadrement juridique84.Émergeant du néant, le risque est alors que la liste des compétences de cet organe soit étendue sans limite et selon la seule volonté politique du chef de l’État ou de ses subordonnés, engendrant l’augmentation des compétences du Président et de ses services au détriment des autres organes de l’administration centrale. En 1980, Samy Cohen estimait que les services de la présidence, bien que prestigieux, restaient trop modestes pour exercer de véritables fonctions d’autorité susceptibles de détrôner les services du Premier ministre et des divers ministères85. Si la remarque semblait justifiée à l’époque, l’évolution de la pratique présidentialiste et le renforcement constant des structures de la présidence ne permettent plus d’être aussi catégorique.
2 – La rupture de l’administration de la présidence de la République avec les principes d’une administration parlementaire
Le Président intervient aujourd’hui ouvertement dans les affaires politiques du pays, nécessitant de ce fait une assistance de plus en plus conséquente86. Ainsi, en raison de l’implication de plus en plus prégnante du chef de l’État dans la politique du pays, le Secrétariat général de la présidence, organisme à vocation administrative, voit sa composition et son rôle s’accentuer progressivement sous la Vème République87. Les membres du Secrétariat sont répartis par pôles de compétences en fonction des centres d’intérêts du chef de l’État et dans l’objectif de suivre les affaires des différents départements ministériels88. S’érigeant en gardien des promesses électorales du Président89, il semble que cet entourage, uniquement investi par le chef de l’État, ait désormais pour mission de contrôler l’action gouvernementale90, contrairement à la constitution qui ne délègue ce pouvoir qu’au seul Parlement91.
Le rapport d’enquête de la commission des lois du Sénat portant sur l’affaire Benalla montre également les possibilités de dérives92. L’influence des chargés de mission de l’Élysée dans le déroulement de cette affaire pousse à se questionner sur l’étendue du périmètre des interventions des collaborateurs de la présidence de la République au sein de l’exécutif. Il a été constaté un empiètement sur les missions des membres des cabinets ministériels et des responsables d’administration placés normalement sous la seule autorité du Premier ministre et des membres du Gouvernement. L’autorité de fait exercée par Alexandre Benalla sur les agents de police ou de gendarmerie93, tout comme l’appropriation de certaines missions diplomatiques par le secrétaire général de la présidence au détriment des ambassadeurs ou du ministère des affaires étrangères94 contreviennent directement à l’article 20 de la constitution.
Le domaine de la sécurité nationale constitue un autre exemple éloquent d’expansion des services de la présidence. Formalisé par décret du 24 décembre 200995, le Conseil national du renseignement, chargé de définir les orientations stratégiques et les priorités en matière de renseignement, a été placé sous la présidence du chef de l’État96. Une nouvelle étape est franchie en 2017 avec la création de la coordination nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme97. Cette extension des services de la présidence98 par la présidentialisation du domaine de la sécurité nationale99 est pourtant en contradiction avec la constitution et la législation. L’article L. 1131-1 du code de la défense indique en effet expressément que « le Premier ministre dirige l’action du Gouvernement en matière de sécurité nationale ». Or, le décret de 2017 indique en son article 1 que le coordinateur national « transmet les instructions du Président de la République aux ministres responsables de ces services et s’assure de leur mise en œuvre ». Ces instructions sont-elles des ordres directs du Président ou sont-elles contresignées par le Premier ministre ? S’agit-il d’actes administratifs unilatéraux ? Affranchies du contreseing, elles seraient en contradiction avec les articles 13, 19, 20 et 21 de la constitution100, le Conseil d’État ayant précisé que la présidence d’un Conseil par le chef de l’État n’était pas inconstitutionnelle à la condition que celui-ci ne dispose d’aucun pouvoir administratif ou budgétaire non soumis à contreseing101. Force est de constater que le chef de l’État étend progressivement ses services et que le gouvernement sous forme de décret avalise la volonté présidentielle. Un système complexe se développe où l’on ignore si les organes ainsi crées sont des organes gouvernementaux ou présidentiels.
Les nouvelles règles encadrant l’organisation des administrations centrales renforcent cette pratique présidentialiste. D’une part, par décret du 18 mai 2017, le cabinet des ministres est désormais limité à dix conseillers, celui des ministres délégués à huit et celui des secrétaires d’État à cinq102, quand le cabinet de la présidence ne connaît aucune restriction juridique et compte quarante-sept membres. Ce décret est un décret simple du Président, là où habituellement l’organisation de l’administration gouvernementale relève presque exclusivement103 de la compétence du Premier ministre et des membres du gouvernement104. C’est la première fois dans l’histoire de la Vème République que le chef de l’État prend une telle initiative politique105, corroborant l’idée d’un interventionnisme accru de ce dernier dans le domaine gouvernemental. D’autre part, en vertu d’une circulaire du 24 mai 2017106, certains conseillers de l’Élysée sont désormais communs au cabinet du premier ministre. Le projet de loi de finances pour 2019 indique un nombre de douze conseillers conjoints au 31 décembre 2017. Cela soulève des interrogations quant à la répartition des pouvoirs au sein de l’exécutif et de l’administration centrale, ce d’autant plus que seul le Gouvernement est responsable devant le Parlement. La pratique des conseillers conjoints pose la question de savoir si la position adoptée par ces derniers relève du Gouvernement ou engage le Président au titre d’une décision personnelle s’exprimant via son collaborateur. Dans ce cas, les décisions ainsi prises échapperaient à tout contrôle parlementaire et seraient en outre susceptibles d’empiéter sur la répartition constitutionnelle des compétences entre les deux têtes de l’exécutif.
L’hypertrophie des services de la présidence et l’incertitude entourant son fonctionnement posent par ailleurs d’autres problématiques concernant le contrôle des actes pris par le Président de la République en tant que chef de service.
B – La question du contrôle des actes administratifs du Président chef de service
La violation des principes administratifs parlementaires par le fonctionnement marginal de la présidence ne soulève aucun problème d’État de droit majeur s’il ne s’agit que de gérer la domesticité de la « maison du Président » et son intendance. Toutefois, l’extension phénoménale des moyens et des pouvoirs de la présidence en fait un instrument de conquête et de confiscation du pouvoir gouvernemental. Dès lors les arguments consistant à dispenser de tout contrôle ces pouvoirs gouvernementaux (a) sont un grave danger pour l’État de droit, qu’heureusement n’avalisent pas les juridictions (b).
1 – L’argument hasardeux du statut d’actes de gouvernement et de l’application de l’article 67 à l’administration de la présidence
Au cours de l’affaire Benalla, l’entourage du Président de la République a mis en avant l’inconstitutionnalité des contrôles parlementaires du Sénat, en s’appuyant notamment sur le principe de « la séparation des pouvoirs ». Quels sont les fondements juridiques d’une telle posture ? Il semble que deux arguments fallacieux ont alors été confusément évoqués, celui de l’acte de gouvernement et celui de l’irresponsabilité du chef de l’État établie par l’article 67 de la constitution.
Depuis le début de la IIIème République, certains actes de l’exécutif, qualifiés d’actes de gouvernement, échappent à tout contrôle de légalité du juge administratif en raison de leur haute opportunité politique. Ainsi, si en 1962, le Conseil d’État se déclare compétent pour contrôler la légalité des actes du Président de la République dont le caractère administratif découle de la nature administrative de leur auteur107, il déclare la même année que la décision de recourir à l’article 16 de la constitution constitue un acte de gouvernement dont il ne saurait apprécier ni la validité ni la durée108. Michel Virally estime que les actes de gouvernement sont « rebelles à toute définition ((VIRALLY M., « L’introuvable « acte de gouvernement » », RDP, 1952, p. 318)) » et ils sont souvent remis en question109 ; il est cependant possible d’en esquisser une liste au travers de la jurisprudence qui a eu pour inclinaison d’en définir toujours plus clairement les contours110. Ainsi sont traditionnellement considérés comme des actes de gouvernement, ceux concernant les rapports de l’exécutif avec le Parlement, les décisions du Président de la République affectant les relations entre les pouvoirs constitutionnels et les actes mettant en cause les rapports du gouvernement avec un État étranger ou un organisme international111. La théorie des actes de gouvernement fait que les juridictions administratives refusent d’interférer dans les relations existantes entre les différents pouvoirs ou de s’immiscer dans l’action diplomatique considérée comme une prérogative exclusive de l’exécutif112.
Pour ce qui concerne le principe constitutionnel de séparation des pouvoirs, l’Assemblée nationale a proposé la mise en place d’une mission budgétaire particulière pour les pouvoirs publics, via l’article 7 de la LOLF. Ces pouvoirs publics regroupent effectivement la présidence de la République comme l’Assemblée nationale et le Sénat, la chaîne parlementaire, le Conseil constitutionnel et la Cour de justice de la République. Dans une décision du 9 avril 1999113, le Conseil d’État refuse de connaître de la décision de nomination d’un membre du Conseil constitutionnel au motif qu’il s’agit d’un acte de gouvernement. Par extension, les arrêtés de nomination des collaborateurs du Président de la République pourraient-ils être considérés comme des actes de gouvernement ? Plaider en faveur de cette solution paraît fantaisiste et revient à considérer que les actes administratifs pris par le Président pour gérer ses services de la présidence de la République seraient des décisions affectant les relations entre les pouvoirs constitutionnels et seraient donc insusceptibles de recours114.
Peut-on sérieusement, par syllogisme, appliquer ce statut constitutionnel aux actes de nomination de certains membres des services de la présidence ? Contrairement à la nomination des membres du Conseil constitutionnel, celle des collaborateurs du Président ne relève en rien des relations diplomatiques ou de l’équilibre des pouvoirs qui sont réglés par la constitution. Tout au plus pourrait-on leur donner un caractère discrétionnaire ce qui ne dispenserait d’ailleurs en rien d’un contrôle minimum115.
En second lieu, des contestations ont émané de l’entourage de l’Élysée et des membres du gouvernement au motif que l’enquête effectuée par la commission du Sénat portait atteinte au principe de séparation des pouvoirs et à l’indépendance de l’administration de la présidence116. Ils s’appuyaient en cela sur l’article 67 de la constitution conférant une irresponsabilité juridictionnelle au chef de l’État. Or, et ainsi que l’indique la Cour de Cassation dans un arrêt du 19 décembre 2002, la protection « du chef de l’État ne peut pas s’étendre à l’ensemble des actes et faits commis par les services et personnels de la présidence de la République ((Cass., Ch. Crim., 19 décembre 2012, n° 12-81.043.)) ». Elle ne saurait concerner ses collaborateurs que pour les actes effectués au nom et sur les ordres du Président de la République pour les besoins de son action politique117. De surcroît, cette irresponsabilité ne concerne le Président qu’au regard des pouvoirs qu’il détient de la Constitution et dans la pratique, son intervention s’étend à des domaines que la constitution ne prévoit pas. Lorsque le chef de l’État agit non plus en tant qu’organe constitutionnel mais en tant qu’organe administratif chef de service, les actes formés en cette qualité ne relèvent en rien de l’article 67, a fortiori lorsque ces actes ont été formés par ses collaborateurs délégués et on peut seulement admettre qu’il s’agit d’actes discrétionnaires. Cela ne remet nullement en cause l’irresponsabilité du chef de l’État en tant qu’organe constitutionnel car ce n’est pas la personne qui est ici en cause mais l’organe administratif. Les actes pris par le Président en vertu de ses pouvoirs constitutionnels demeurent évidemment exclus de tout contrôle, sauf procédure de destitution devant la Haute Cour. En revanche, rien ne s’oppose juridiquement à « ce que les actes relevant de la gestion administrative de l’Élysée, qu’il s’agisse de la gestion des personnels, de l’organisation des services ou encore de la passation de marchés publics, fassent l’objet d’un contrôle par la représentation nationale, au même titre que tout autre service administratif ((JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information, op.cit., p. 105.)) », auquel s’ajoutent le contrôle minimum de la juridiction administrative et les vérifications de la juridiction financière.
Dès lors ni l’acte de gouvernement ni l’irresponsabilité du chef de l’État n’apparaissent en relation avec le statut de l’administration de la présidence et l’extension présidentialiste du champ de ces actes demande au contraire que soit renforcé le contrôle de leur légalité.
2 – Le contrôle des empiétements de la présidence sur le domaine gouvernemental
Questionner la légitimité des pouvoirs dont le Président s’est ainsi doté, c’est donc également s’interroger sur le contrôle de ses actes. La tradition constitutionnelle parlementaire fait qu’aujourd’hui aucun critère, établi légalement ou réglementairement, ne vient régler les conditions de la nomination des membres élyséens. Par ailleurs, si la nomination du secrétaire général et des conseillers du chef de l’État est prononcée par arrêté du Président au Journal officiel, la nomination des autres membres ne fait l’objet d’aucune publication, rendant impossible leur contrôle118. La même opacité caractérise l’emploi, les missions et les conditions de rémunération des collaborateurs de la présidence119. Pourtant, s’appuyant sur les travaux parlementaires à l’origine de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) estime que l’intention du législateur est claire « de ne pas limiter les obligations déclaratives aux seuls conseillers nommés par arrêté publié au Journal officiel ((NADAL J.-L., Courrier du président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique relatif aux obligations de déclarations des conseillers et chargés de mission de la présidence de la République, op.cit.)) ».
Comme nous l’avons vu, la présidence de la République apparaît clairement comme un organe administratif dont le chef de service est le Président de la République. Aucune raison juridique ne permet de justifier que les actes pris dans le cadre de la gestion administrative de l’Élysée dérogent au droit de la fonction publique et ne puissent être contrôlés. L’arrêt Canal reconnait dès 1962 la possibilité pour le juge administratif de contrôler la légalité des actes administratifs du Président de la République. L’arrêt Avrillier du 4 avril 2001 va plus loin puisque le Conseil d’État se reconnaît compétent pour connaître de la légalité d’un arrêté de nomination du chef de l’État120, démontrant par la même la possibilité pour le juge d’encadrer les compétences dont le chef de l’État fait la conquête dans le silence de la constitution. Pour que ces contrôles, qu’ils soient juridictionnels ou effectués par des autorités indépendantes telles que l’HATVP, puissent être réalisés, les ambigüités qui entourent ces actes devraient être levées. S’agissant évidemment de contrats de droit public, rémunérés par des deniers publics, il serait d’abord urgent et légitime de généraliser leur publication en précisant notamment leur statut, leurs fonctions et leur grille de rémunération.
Si la Constitution de 1958 et ses réformes successives avaient établi un régime présidentiel, il n’y aurait pas lieu de s’interroger sur les pouvoirs gouvernementaux et administratifs du chef de l’État tels qu’ils apparaissent dans la gestion des services de la présidence. Cependant, et malgré les nombreuses libertés présidentialistes qui se sont opérées depuis son origine, la constitution reste et demeure juridiquement une constitution parlementaire, . Pourtant depuis l’instauration du quinquennat, le fossé s’est progressivement approfondi entre le droit et la pratique politique et c’est à l’occasion d’une affaire subalterne que ce malaise nous apparaît, plus d’ailleurs dans sa dimension juridico-administrative que dans sa portée factuelle.
En effet le chaînage juridique entre la constitutionnalité et la légalité est un pilier de la République savamment édifié depuis le Second Empire et ciselé par le Conseil d’État. Outre les pouvoirs constitués, c’est la légalité de l’administration qui doit être contrôlée et à travers elle les actes des gouvernants. Le chef de l’État ne peut gouverner en État de droit si la légalité de ses actes administratifs n’est pas contrôlée. On voit bien en effet que c’est par l’extension administrative de la présidence et de ses services que le pouvoir inconstitutionnel du Président phagocyte les pouvoirs de commandement administratifs du gouvernement, en contradiction avec la lettre de notre constitution.
En définitive, le Président ne peut jouer à la fois sur son statut d’arbitre irresponsable et sur sa posture de chef de gouvernement effectif mais pour laquelle il s’affranchirait des fondements et des principes du droit administratif républicain : un tel déséquilibre des pouvoirs constitue désormais une question pour la démocratie elle-même.
- Allocution du Président de la République Emmanuel Macron, à la Maison de l’Amérique latine à Paris devant les députés de la majorité, 24 juillet 2018. [↩]
- Il en est ainsi de la délivrance d’un permis de port d’armes, de sa nomination comme lieutenant-colonel ou de l’attribution de passeports diplomatiques. Cf. JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale sur la mission d’information sur les conditions dans lesquelles des personnes n’appartenant pas aux forces de sécurité intérieure ont pu ou peuvent être associées à l’exercice de leurs missions de maintien de l’ordre et de protection de hautes personnalités et le régime des sanctions applicables en cas de manquement, Sénat, session ordinaire de 2018-2019, n° 324, enregistré à la Présidence du Sénat le 20 février 2019. [↩]
- Aucun texte législatif ou réglementaire ne vient encadrer les conditions de nomination des membres du cabinet présidentiel, qui pour la plupart ne font pas l’objet d’arrêtés publiés au Journal officiel. Cf. NADAL J.-L., Courrier du président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique relatif aux obligations de déclarations des conseillers et chargés de mission de la présidence de la République, 27 juillet 2018. [↩]
- Il importe de distinguer le présidentialisme et le régime présidentiel. Le présidentialisme « désigne une situation où le chef de l’État se trouve placé en situation de contrôler l’ensemble des institutions gouvernantes (pouvoir exécutif aussi bien que le Parlement, alors que le [régime présidentiel] évoque un système où, par l’effet d’une séparation stricte des pouvoirs, les instances législatives conservent une importante marge d’autonomie par rapport à un Président qui n’est, en fait, que le maître incontesté du pouvoir exécutif ». Cf. CONSTANS L., « Le problème de l’équilibre des pouvoirs », dans La Constitution de la Vème République, Cahiers de l’Université de Perpignan, n° 9, 1990, p. 97. [↩]
- Initiée en 1962 avec l’élection du chef de l’État au suffrage universel direct, la présidentialisation du régime s’est depuis « développée sans que la loi fondamentale évolue de telle manière que des contrepoids au pouvoir présidentiel soient mis en place ». Cf en ce sens : Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la 5ème République, Une Vème République plus démocratique, JORF, n° 252, 30 octobre 2007, p. 17699, texte n°1, Introduction, §3 ; Loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel, JORF, 7 novembre 1962, p. 10762. [↩]
- Loi constitutionnelle n° 2000-964 du 2 octobre 2000 relative à la durée du mandat du Président de la République, JORF, n° 229, 3 octobre 2000, p. 15582, texte n° 1. [↩]
- Cette inversion place les élections législatives seulement deux mois après l’élection présidentielle. [↩]
- CHIRAC J., Interview télévisée auprès de la journaliste Elise Lucet pour France 3, 5 juin 2002. [↩]
- CHEVALLIER J.-J., CARCASSONNE G., DUHAMEL O., Histoire de la Vème République,1958-2012, Dalloz, coll. Classic, 2012, p. 549 et s. [↩]
- Le Président veille au respect de la Constitution, assure par son arbitrage le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et la continuité de l’État et est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités. Cf. Constitution du 4 octobre 1958, art. 5. [↩]
- Constitution du 4 octobre 1958, art. 19. [↩]
- CONSTANS L., « Le problème de l’équilibre des pouvoirs », op.cit., p. 117. [↩]
- « La référence au contreseing me paraît être le critère entre les pouvoirs traditionnels d’un chef d’Etat parlementaire, pouvoirs nominaux, puisque l’exigence du contreseing conduit à transférer, en fait, leur exercice au Gouvernement, et les pouvoirs que le président de la République détient [….] à titre d’incarnation du pouvoir étatique ». Cf. BURDEAU G., Droit constitutionnel et institutions politiques, LGDJ, 9ème éd., 1961, p. 534. [↩]
- Cf en ce sens : SPONCHIADO L., La compétence de nomination du président de la Cinquième République, Dalloz, coll. Bibliothèque parlementaire et constitutionnelle, 2017 ; COHENDET M.-A., Le Président de la République, Dalloz, coll. Connaissances du droit, 2012 ; MILACIC S., « Les ambiguïtés du rapport français au président de la République », Constitutions, 2013, p. 17 et s. ; CARON M., « Une intrusion du chef de l’État dans le droit gouvernemental », AJDA, 2017, p. 1494 et s. [↩]
- France Archives, « Archives de la présidence de la République sous la IIIe République (1871-1940), [En ligne], URL : https://francearchives.fr/findingaid/84dbf6aa2156dd8a695b9f23d28af70822af40a0 [↩]
- Ibidem. [↩]
- LE BÉGUEC G., « Les entourages du chef de l’État sous la IIIème et 4ème Républiques », Histoire@Politique, n° 8, 2009, p. 79. [↩]
- Cf. notamment Loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 (1), JORF, n° 0302 du 30 décembre 2018, texte n° 1 ; Projet de loi de finances pour 2020, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 27 septembre 2019, n° 2272. [↩]
- Cour des comptes, Les comptes et la gestion des services de la Présidence de la République (exercice 2018), 12 juillet 2019. [↩]
- Cf. par exemple : DE MONTGOLFIER A., Rapport général fait au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale pour 2019, tome III, « Les moyens des politiques publiques et les dispositions spéciales, annexe n° 22, Pouvoirs publics, n° 147, Sénat, session ordinaire 2018-2019, enregistré à la présidence du Sénat le 22 novembre 2018. [↩]
- Cf. par exemple : SUEUR J.-P., Avis présenté au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d’administration générale (1) sur le projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale pour 2019, tome XI, Pouvoirs publics, n° 153, Sénat, session ordinaire 2018-2019, enregistré à la présidence du Sénat le 22 novembre 2018. [↩]
- Renseignement fourni par la (CADA). Cf. JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information, op.cit., p. 104. [↩]
- Cour des comptes, Les comptes et la gestion des services de la présidence de la République (exercice 2018), op.cit., p. 14. [↩]
- DEBBASCH C., COLIN F., Droit administratif, Economica, 10ème éd., 2011, p. 128. [↩]
- Les plus représentatifs étant un directeur de cabinet, un chef de cabinet et un secrétaire particulier. Cf. Cour des comptes, Les comptes et la gestion des services de la présidence de la République (exercice 2018), op.cit., p. 15. [↩]
- Les Présidents Pompidou et Giscard d’Estaing avaient d’ailleurs fusionné le cabinet et le secrétariat général. Cf. FOUCAUD. F., « Le secrétaire général de l’Élysée : éclairage sur la présidentialisation du régime », RDP 2010, p. 1035. [↩]
- OBERDORFF H., KADA N., Les institutions administratives, Sirey, coll. Université, 2019, p. 72. [↩]
- FOUCAUD. F., « Le secrétaire général de l’Élysée : éclairage sur la présidentialisation du régime », op.cit., p. 1036. [↩]
- Ce poste n’existait plus sous la présidence de François Hollande. [↩]
- DE MONTGOLFIER A., Rapport général fait au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances, adopté par l’Assemblée nationale pour 2019, tome III, « Les moyens des politiques publiques et les dispositions spéciales, annexe n° 22, Pouvoirs publics, n° 147, Sénat, session ordinaire 2018-2019, enregistré à la présidence du Sénat le 22 novembre 2018, p. 15. [↩]
- Cour des comptes, Les comptes et la gestion des services de la présidence de la République (exercice 2018), op.cit., p. 15. [↩]
- Chargé de la sécurisation du palais de l’Élysée et de la sécurité rapprochée du Président et des proches au sein des résidences présidentielles. [↩]
- Cour des comptes, Les comptes et la gestion des services de la présidence de la République (exercice 2017), 24 juillet 2018. [↩]
- Arrêté du 20 août 2019 portant nomination à la présidence de la République, JORF, n° 0193, 21 août 2019, texte n° 1 [↩]
- Arrêté du 20 août 2019 portant nomination à la présidence de la République, JORF, n° 0193, 21 août 2019, texte n° 2. [↩]
- JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information, op.cit., p. 94 à 95. [↩]
- Ibid., p. 97. [↩]
- Une mise à disposition permet aux fonctionnaires de travailler en dehors de leur administration d’origine sans rompre le lien avec cette dernière. Conservant leur corps ou cadre d’emploi, ils continuent à percevoir leur rémunération dans leur administration d’origine. [↩]
- Arrêté du 20 août 2019 portant nomination à la présidence de la République, JORF, n° 0193, 21 août 2019, texte n° 1 : « Le Président de la République, Vu la convention-cadre de mise à disposition temporaire de personnels du ministère de l’intérieur (police et gendarmerie nationale) auprès de la direction de la sécurité de la présidence de la République, et ses annexes, en date du 19 avril 2019 […] » ; Arrêté du 20 août 2019 portant nomination à la présidence de la République, JORF, n° 0193, 21 août 2019, texte n° 2. [↩]
- Décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions des fonctionnaires de l’État et à certaines modalités de mise à disposition et de cessation définitive de fonctions, JORF, 20 septembre 1985, p. 10813, modifié par Décret n° 98-854 du 16 septembre 1998, JORF, n° 220, 23 septembre 1998, p. 14536. [↩]
- COHENDET M.-A., Le Président de la République, Dalloz, coll. Connaissances du droit, 2012, p. 30. [↩]
- Décision du 29 novembre 2016 portant règlement budgétaire et comptable de la présidence de la République ; Décision du 29 mars 2019 portant règlement budgétaire et comptable de la présidence de la République. [↩]
- Décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable public, JORF, n° 0262 du 10 novembre 2012, p. 17713, texte n° 6. [↩]
- Décision du 7 janvier 2019 portant nomination du comptable de la présidence de la République. [↩]
- DEBBASCH Ch., COLIN F., Droit administratif, op. cit., p. 128. [↩]
- Constitution du 4 octobre 1958, notamment art. 8, 9, 18 ou 30. [↩]
- Constitution du 4 octobre 1958, art. 14, 52 al.1, 53. [↩]
- Constitution du 4 octobre 1958, art. 15. [↩]
- CE Sect., 12 février 1960, Société Eky, Rec., p. 101 : les ordonnances de l’art. 92 de la Constitution sont prises par le chef de l’État « dans l’exercice du pouvoir législatif » et sont donc de nature législative. CE Ass., 2 mars 1962, Rubin de Servens, GAJA : les mesures prises par le Président de la République en application de l’article 16 de la Constitution dans le domaine normalement réservé au législateur par l’article 34 de la Constitution sont des actes législatifs. [↩]
- Constitution du 4 octobre 1958, art. 17 ; CE, 14 mars 1924, Société de navigation à vapeur du Lloyd de Trieste, Rec., p. 304. [↩]
- Il est cependant à noter que sa faculté à prendre des décisions seul ne le dispense pas dans certains cas de devoir recourir à l’avis de certaines institutions (art. 8 al. 1, 11, 12 et 16 de la Constitution). [↩]
- MELIN-SOUCRAMANIEN F., PACTET P., Droit constitutionnel 2020, Sirey, coll. Université, 38ème éd., 2019, p. 463. [↩]
- BURDEAU G., Droit constitutionnel et institutions politiques, op.cit., p. 453. [↩]
- Il en est ainsi notamment de la nomination et de la révocation des membres du Gouvernement (art. 8 al. 2), de la signature des décrets et des ordonnances (art. 13 al. 1), de la nomination aux emplois civils et militaires (art. 13 al. 2, 3 et 4), du droit de grâce (art. 17), de l’ouverture et de la clôture des sessions extraordinaires du Parlement (art. 30) ou encore de l’initiative en matière de révision constitutionnelle (art. 89). [↩]
- BURDEAU G., Cours de droit constitutionnel et d’institutions politiques, Les cours de droit, 1962, p. 534. [↩]
- SPONCHIADO L., La compétence de nomination du Président de la Ve République, op.cit., p. 63. [↩]
- COHENDET M.-A., Le Président de la République, Dalloz, coll. Connaissances du droit, 2012, p. 43. [↩]
- Par opposition au Premier ministre, autorité administrative de principe. Cf. GOHIN O., Institutions administratives, LGDJ, coll. Manuel, 5ème éd., 2006, p. 98. [↩]
- Il signe les décrets délibérés en Conseil des ministres et signe les ordonnances de l’article 38 de la Constitution, qui conservent une valeur réglementaire tant qu’elles n’ont pas été ratifiées par le Parlement. Elles acquièrent à ce moment là valeur législative. CE, 8 septembre 2000, Hoffer et autres, Rec., p. 585. [↩]
- Il faut noter que l’article 13 de la Constitution a été complété lors de la révision de la Constitution du 23 juillet 2008. Lorsque les fonctions ont une « importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président s’exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la république ne peut procéder à une nomination lorsque l’addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquième des suffrages exprimés au sein des deux commissions ». [↩]
- L’article 13 de la Constitution distingue les nominations effectuées par le Président en Conseil des ministres, celles directement faites par lui et celles pour lesquelles, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, un avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée est demandé. [↩]
- Constitution du 4 octobre 1958, art. 8 al. 2. [↩]
- Ibid., art. 65. [↩]
- Ibid., art. 71-1 al. 4. [↩]
- Ibid., art. 8 al. 1. [↩]
- Ibid., art. 8 al. 1. [↩]
- SPONCHIADO L., La compétence de nomination du président de la Cinquième République, op.cit., p. 116 à 122. [↩]
- FRIER P.-L., PETIT J., Droit administratif, LJDG, Précis Domat, Droit public, 11ème éd., 2018, p. 154. [↩]
- MAILLARD DESGRÉES DU LOÛ D., Institutions administratives, PUF, coll. Thémis droit, 2011, p. 279. [↩]
- GOHIN O., Institutions administratives, LGDJ, coll. Manuel, 5ème éd., 2006, p. 110. [↩]
- GOHIN O., Institutions administratives, LGDJ, coll. Manuel, 5ème éd., 2006, p.106. [↩]
- Cf. Arrêté du 18 septembre 2017 relatif à la composition du cabinet du Président de la République, JORF, 19 septembre 2017, texte 1 ; Arrêté du 11 janvier 2019 portant cessation de fonctions à la présidence de la République ; Arrêté du 5 février 2019 portant nomination et cessation de fonctions à la présidence de la République, JORF, 6 février 2019, texte n° 2 ; [↩]
- Décision du 29 novembre 2016 portant nomination du comptable de la présidence de la République prise par le Président de la République François Hollande. [↩]
- Décision du 7 janvier 2019 portant nomination du comptable de la présidence de la République, prise par Alexis Kohler. [↩]
- SERRAND P., Droit administratif. Tome 1. Les actions administratives, PUF, coll. Droit fondamental, 2015, p. 210 et s. [↩]
- OBERDORFF H., KADA N., Les institutions administratives, op.cit., p. 76. [↩]
- MAGNON X., « L’organisation particulière du Secrétariat général de l’Élysée et du cabinet du Premier ministre », dans EYMERI-DOUZANS J.-M., BIOY X., et MOUTON S. (dir.), Le règne des entourages. Cabinets et conseillers de l’exécutif, Les Presses SciencesPo, 2015, p. 359. [↩]
- Décret n° 87-389 du 15 juin 1987 relatif à l’organisation des services d’administration centrale, op.cit, art. 2 et 3. [↩]
- Secrétariat général du gouvernement, Mission des archives, « Archives des services du premier ministre – Coordination gouvernementale », Etat thématique des versements conservés aux Archives nationales, Paris, 2018, p. 4 à 5. [↩]
- Ce texte n’est aujourd’hui plus en vigueur. Cf. Ibidem. [↩]
- Décret du premier ministre n° 2005-1283 du 17 octobre 2005 relatif au comité interministériel sur l’Europe et au secrétariat général des affaires européennes, JORF, 18 octobre 2005, texte 1. [↩]
- Le SGAE remplace le Secrétariat général du Comité interministériel (SGCI) institué en 1948. [↩]
- Ibid., art. 2. [↩]
- MAGNON X., « L’organisation particulière du Secrétariat général de l’Élysée et du cabinet du Premier ministre », op.cit., p. 359. [↩]
- COHEN S., Les conseillers du président – de Charles de Gaulle à Valéry Giscard d’Estaing, PUF, 1980, p. 81. [↩]
- FOUCAUD F., « Le secrétaire général de l’Élysée : éclairage sur la présidentialisation du régime », op.cit., p. 1031. [↩]
- Cour des comptes, Les comptes et la gestion des services de la présidence de la République (exercice 2018), op. cit., p. 75. [↩]
- OBERDORFF H., KADA N., Les institutions administratives, op.cit., p. 76. [↩]
- ARDANT Ph., MATHIEU B., Institutions politiques et droit constitutionnel, Lextenso, 2008, p. 452. [↩]
- SERRAND P., Manuel d’institutions administratives françaises, op.cit., p. 152. [↩]
- Constitution du 4 octobre 1958, art. 24. [↩]
- JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information, op.cit., p. 87 à 89. [↩]
- JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information, op.cit., p. 11. [↩]
- MAILLARD DESGRÉES DU LOÛ D., Institutions administratives, op.cit., p. 264. [↩]
- Décret n° 2009-1657 du 24 décembre 2009 relatif au conseil de défense et de sécurité national et au secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, JORF, n° 0301, 29 décembre 2009, p. 22561, texte n° 1. [↩]
- JOURNES C., « Les dispositifs français de lutte contre le terrorisme », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, n° 3, 2010, p. 747. [↩]
- Décret n° 2017-1095 du 14 juin 2017 relatif au coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme, à la coordination nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme et au centre national du contre-terrorisme, JORF, n° 0139, 15 juin 2017, texte n° 1. [↩]
- La coordination nationale du renseignement et de la lutte contre le terrorisme sont inscrites dans l’organigramme de l’Élysée. [↩]
- DE MAISON-ROUGE O., Le droit du renseignement. Renseignement d’État, renseignement économique, Lexis Nexis, 2016, p. 48. [↩]
- URVOAS J.-J., Rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, après engagement de la procédure accélérée, sur le projet de loi (n° 2669) relatif au renseignement, n° 2697, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 2 avril 2015. [↩]
- CE, 04 mai 2011, n° 338944 ; Voir aussi pour l’obligation de contreseing des actes réglementaires du Président : CE Ass., 27 avril 1962, Sicard et autres, n° 50032. [↩]
- Décret n° 2017-1063 du 18 mai 2017 relatif aux cabinets ministériels. [↩]
- Pour des raisons politiques, la chef de l’État peut choisir d’intervenir dans certains domaines de l’organisation gouvernementale, en inscrivant par exemple un projet de décret à l’ordre du jour du conseil des ministres, quand bien-même celui-ci ne relève pas de son domaine réservé et ce en application de la jurisprudence Meyet de 1992. Toutefois, ces actes restent ici, une fois encore, contresignés. Cf. CARON M., L’autonomie organisationnelle du gouvernement. Recherche sur le droit gouvernemental de la Vème République, LGDJ, 2015, p. 405 à 408. [↩]
- CARON M., « Une intrusion du chef de l’État dans le droit gouvernemental. Le décret du 18 mai 2017 réglementant les effectifs des cabinets ministériels », AJDA, 2017, p. 1494. [↩]
- L’initiative est plus politique que juridique car d’après la Conseil d’État, le Premier ministre a le pouvoir de modifier ce décret présidentiel. Cependant, s’il le peut juridiquement, il ne le fera probablement pas politiquement. CE, 27 avril 1962, Sicard et autres, op.cit. [↩]
- Circulaire du 24 mai 2017 relative à une méthode de travail gouvernemental exemplaire, collégiale et efficace, JORF, n° 0123 du 25 mai 2017, texte n° 7. [↩]
- CE Ass., 19 octobre 1962, Canal, Robin et Godot, Rec. 552. Le recours pour excès de pouvoir est possible contre les ordonnances du Président de la République pris en matière législative. [↩]
- CE Ass., 2 mars 1962, Rubin de Servens et autres, Rec. 143. Le Conseil d’État précise également dans cet arrêt que les décisions prises en vertu de l’article 16 au cours de sa période d’application sont insusceptibles de recours si elles ont une nature législative (prises dans le champ de l’article 34 de la Constitution) mais seront soumises au contrôle du juge de l’excès de pouvoir si elles ont une nature réglementaire (prises dans la champ de l’article 37 de la Constitution). [↩]
- FAVOREU L., « Pour en finir avec la « théorie » des actes de Gouvernement », dans Mélanges en l’honneur de Pierre Pactet, Dalloz, 2003, p. 607. [↩]
- Le domaine des actes de gouvernement a été restreint depuis l’arrêt du conseil d’État Prince Napoléon du 19 février 1875 qui abandonna le critère jugé excessivement large du seul « mobile politique » [↩]
- LONG M. et al., Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 17ème éd., 2009, p. 19 à 27. [↩]
- Les grands arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 22ème éd., 2019, p. 26 et 27. [↩]
- CE Ass., 9 avril 1999, Mme Ba, Rec. p. 124. [↩]
- Ibid., p. 19. [↩]
- Les actes discrétionnaires peuvent faire l’objet du contrôle minimum, les décisions ne devant pas « reposer sur des faits matériellement inexacts, sur une erreur de droit, sur une erreur manifeste d’appréciation ou être entachée de détournement de pouvoir ». Cf. CE Sect., 25 avril 1980, Institut technique de Dunkerque, n° 15244, Rec., p. 196. [↩]
- JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information, op.cit., p. 100 et s. [↩]
- JOURDA M., SUEUR J.-P., Rapport d’information, op.cit., Ibid., p. 104. [↩]
- NADAL J.-L., Courrier du président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique relatif aux obligations de déclarations des conseillers et chargés de mission de la présidence de la République, op.cit. [↩]
- FOUCAUD F., « Le secrétaire général de l’Élysée : éclairage sur la présidentialisation du régime », op.cit., p. 1036. [↩]
- CE, Avrillier, 4 avril 2001, n° 223135. [↩]
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