CONSEIL D’ETAT
statuant
au contentieux
N° 447015
__________
M. CASSIA et autres ______
Ordonnance du 10 décembre 2020
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE JUGE DES RÉFÉRÉS
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés le 30 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. Paul Cassia, Mme Marianne Bildon, M. Philippe Touron, M. Frédéric Fruteau de Laclos, M. Guillaume Mazeau, M. Francis Kessler, Mme Sandra Laugier, M. Antoine Vauchez, Mme Elisabeth Cadenei-Taieb, M. Ronan de Calan, Mme Isabelle Hirtzlin, Mme Magali Bessone, M. Géraud Magrin, M. Laurent Jaffro, M. Antoine Mandel, M. Samuel François, M. Camille Salinesi, Mme Emmanuele Costard-Gautier, M. Pierre Brunet, Mme Géraldine Chavrier, M. Jean-Philippe Tropéano, Mme Carine Souveyet, M. Jean-François Chauvard, Mme Nathalie Sigot, Mme Marie Garrau, M. Emeric Lendjel, Mme Sophie Robin- Olivier, M. Paul Rateau, M. Benjamin Saunier, Mme Sophie Jallais, M. Boris Valentin, Mme Soraya Guénifi, Mme Myriam Tsikounas, Mme Nolwenn Ribreau, M. Patrick Dollat, Mme Chantal Jacquet, M. Xavier Lagarde, M. Jean Matringe, Mme Sabine Barles, Mme Claire Pignol, M. Florent Pratlong, Mme Cécile Oberle, Mme Laurence Jégouzo, Mme Sophie Lalanne, M. Emmanuel Charrier, Mme Soraya Messai-Bahri, Mme Florence Desprest, Mme Joan Divol, M. Julien Fretel, Mme Christine Mengin, Mme Alice Le Brigant, M. Joseph Morin, Mme Sophie Poirot-Delpech, Mme Laurence Burgorgue-Larsen, M. Yann Kerbrat, M. Arnaud Bertinet, Mme Maia Pomadere, M. Stéphane Marchand, Mme Annabel Desgrées du Loû, Mme Anne-Marie Leroyer, M. Jean-Marc Sorel, M. Paul Vo-Ha, Mme Sylvie Fol, M. Ridha Ben Hamza, MmeRaphaële Rivier, M. Jérôme Glachant, M. Alain Desdoigts, M.Christophe Ramaux, M. Michel Kaplan, M. Xavier Lagarde, Mme Marie-Xavière Catto, Mme Brigitte Lion, M. Pascal Beauvais, Mme Violaine Sebillotte, Mme Lucille Audiot, M. Alexandre Lefebvre, Mme Olga Kisseleva, Mme Carine Staropoli, Mme Delila Alam, Mme Pascale Goetschel, Mme Delphine Fenasse, Mme Laurence Bobis et Mme Adeline Gubler demandent au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, d’enjoindre au Premier ministre de modifier, dans un délai de trois jours, l’article 34 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire modifié par le décret n° 2020-1331 du
N° 447015 2
2novembre 2020 en prenant les mesures strictement proportionnées d’encadrement des enseignements et des réunions dans les établissements de l’enseignement public supérieur.
Ils soutiennent que :
– la condition d’urgence est satisfaite compte tenu de l’intérêt pour les étudiants de bénéficier d’un service public de qualité, des incidences sur la santé des étudiants et des personnels des établissements du supérieur et du début des vacances universitaires le 19 décembre 2020 ;
– l’interdiction pour les usagers du service public de l’enseignement de suivre une formation en « présentiel » porte une atteinte grave et manifestement illégale au principe de non-discrimination entre établissements publics d’enseignement, des établissements du secondaire et des formations professionnelles post-bac restant ouverts et accessibles à l’ensemble de leurs usagers ;
– cette interdiction qui s’applique de manière indifférenciée pour toutes les formations et tous les types d’enseignement universitaire, hors travaux pratiques, porte une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté personnelle, à l’impératif constitutionnel de protection de la santé et au droit au respect de la vie des usagers du service public de l’enseignement supérieur, l’impossibilité de suivre un enseignement en présentiel ayant des effets psychologiques et sociaux considérables pour les usagers des établissements du supérieur ;
– elle porte une atteinte grave et manifestement illégale au droit de participer collectivement à des enseignements et à la liberté de réunion et d’expression.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 décembre 2020, le ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête. Il soutient que la condition d’urgence n’est pas satisfaite et qu’il n’est porté atteinte à aucune atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
Par un mémoire en intervention, enregistré le 3 décembre 2020, l’association Coronavictimes conclut au rejet de la requête. Elle soutient que les requérants n’ont pas intérêt pour agir, que la condition d’urgence n’est pas satisfaite et qu’il n’est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
La requête a été communiquée au Premier ministre et à la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation qui n’ont pas produit d’observations.
Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part, M. Paul Cassia et autres, d’autre part, le Premier ministre, le ministre des solidarités et de la santé et la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ;
Ont été entendus lors de l’audience publique du 3 décembre 2020, à 15 heures : – M. Paul Cassia et M. Jérôme Glachant, requérants ;
– les représentants du ministre des solidarités et de la santé ; à l’issue de laquelle le juge des référés a prolongé l’instruction jusqu’au 5 décembre 2020 à 12 heures.
Par un nouveau mémoire, enregistré le 4 décembre 2020, M. Cassia et autres concluent à ce qu’il soit enjoint au Premier ministre de modifier, dans un délai de trois jours, l’article 34 du décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire modifié par le décret n° 2020-1331 du 2 novembre 2020, en prenant les mesures strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu applicables en cette période d’allègement confinement, pour encadrer ceux des enseignements et réunions dans les établissements de l’enseignement public supérieur susceptibles de s’y dérouler avant la fin du premier semestre 2020/2021 et dès le 4 janvier 2021. Ils reprennent les moyens de leur requête et soutiennent, en outre, que la condition d’urgence doit être appréciée au regard du fait que le référé-liberté est l’unique voie de recours effective pour contester la carence du Premier ministre à modifier le décret du 29 octobre 2020 dans le nouveau contexte de l’allègement du confinement, que les formations dispensées à l’université sont très diverses et que certaines pourraient être organisées en présentiel avant la fin du premier semestre universitaire, que le droit à l’instruction est une liberté fondamentale et que le droit de participer à des enseignements en est une composante, que l’interdiction des enseignements en présentiel jusqu’au 5 février 2021 n’est pas strictement proportionnée aux risques sanitaire et qu’il n’y a aucune difficulté pratique à ce qu’il soit enjoint au premier ministre d’autoriser au plus tôt les enseignements du supérieur à réaliser certains enseignements en présentiel.
fondamentales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la Constitution, et notamment, son préambule ;
– la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
– le code de la santé publique ;
– le code de l’éducation ;
– la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
– le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 ;
– le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ; – le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. »
2. L’association Coronavictimes justifie d’un intérêt suffisant pour intervenir dans la présente instance. Son intervention est, par suite, recevable.
Sur le cadre du litige :
3. Aux termes de l’article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 : « L’état d’urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ». L’article L. 3131-13 du même code précise que « L’état d’urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l’intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques. / (…) / La prorogation de l’état d’urgence sanitaire au-delà d’un mois ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques prévu à l’article L. 3131-19 ». Aux termes de l’article L. 3131-15 du même code : « Dans les circonscriptions territoriales où l’état d’urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : / (…) 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l’ouverture, y compris les conditions d’accès et de présence, d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public. » Ces mesures doivent être « strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu’elles ne sont plus nécessaires. »
4. L’émergence d’un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou Covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d’urgence de santé publique de portée internationale par l’Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit le ministre chargé de la santé puis le Premier ministre à prendre, à compter du 4 mars 2020, des mesures de plus en plus strictes destinées à réduire les risques de contagion. Pour faire face à l’aggravation de l’épidémie, la loi du 23 mars 2020 a créé un régime d’état d’urgence sanitaire, défini aux articles L. 3131-12 à L. 3131-20 du code de la santé publique, et a déclaré l’état d’urgence sanitaire pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020. La loi du 11 mai 2020 prorogeant l’état d’urgence sanitaire et complétant ces dispositions, a prorogé cet état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet 2020. L’évolution de la situation sanitaire a conduit à un assouplissement des mesures prises et la loi du 9 juillet 2020 a organisé un régime de sortie de cet état d’urgence.
5. Une nouvelle progression de l’épidémie a conduit le Président de la République à prendre le 14 octobre dernier, sur le fondement des articles L. 3131‐12 et L. 313-13 du code de la santé publique, un décret déclarant l’état d’urgence sanitaire à compter du 17 octobre sur l’ensemble du territoire national. Le 29 octobre 2020, le Premier ministre a pris, sur le fondement de l’article L. 3131-15 du code de la santé publique, un décret prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. L’article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire a prorogé l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 16 février 2021 inclus. Toutefois, l’évolution de la situation sanitaire a conduit le Premier ministre à procéder, par un décret du 27 novembre 2020, à un assouplissement des mesures précédemment prises.
Sur la demande de référé :
6. Aux termes de l’article 34 du décret contesté modifié par le 3° du I de l’article 1er du décret du 2 novembre 2020 : « L’accueil des usagers dans les établissements d’enseignement supérieur mentionnés au livre VII de la troisième partie du code de l’éducation est autorisé aux seules fins de permettre l’accès :/ 1° Aux formations lorsqu’elles ne peuvent être effectuées à distance compte tenu de leur caractère pratique dont la liste est arrêtée par le recteur de région académique ; / 2° Aux laboratoires et unités de recherche pour les doctorants ; 3° Aux bibliothèques et centres de documentation, sur rendez-vous ainsi que pour le retrait et la restitution de documents réservés;/ 4° Aux services administratifs, uniquement sur rendez-vous ou sur convocation de l’établissement ;/ 5° Aux services de médecine préventive et de promotion de la santé, aux services sociaux et aux activités sociales organisées par les associations étudiantes ; / 6° Aux locaux donnant accès à des équipements informatiques, uniquement sur rendez-vous ou sur convocation de l’établissement ; / 7° Aux exploitations agricoles mentionnées à l’article L. 812-1 du code rural et de la pêche maritime ».
7. Dans le dernier état de leurs écritures et ainsi qu’il a été dit à l’audience, M. Cassia et autres demandent au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de la justice administrative, d’enjoindre au Premier ministre de modifier, dans un délai de trois jours, les conditions d’accès des usagers aux établissements de l’enseignement supérieur prévues à l’article 34 du décret du 29 octobre 2020 dans le nouveau contexte de l’assouplissement des mesures de confinement afin de permettre d’y tenir plus d’enseignements en présence des étudiants avant la fin du premier semestre de l’année universitaire et dès le 4 janvier 2021.
8. En premier lieu, si certaines discriminations peuvent constituer des atteintes à une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, eu égard aux motifs qui les inspirent ou aux effets qu’elles produisent sur l’exercice d’une telle liberté, la méconnaissance du principe d’égalité ne révèle pas, par elle-même, une atteinte de cette nature. Par suite, la circonstance que les établissements de l’enseignement secondaire et des formations professionnelles post-bac puissent bénéficier d’un enseignement sur site ne peut conduire, en tout état de cause, le juge des référés à ordonner les mesures sollicitées sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative.
9. En deuxième lieu, le droit au respect de la vie, rappelé notamment par l’article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, constitue une liberté fondamentale au sens des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. Lorsque l’action ou la carence de l’autorité publique crée un danger caractérisé et imminent pour la vie des personnes, portant ainsi une atteinte grave et manifestement illégale à cette liberté fondamentale, le juge des référés peut, au titre de la procédure particulière prévue par cet article, prescrire toutes les mesures de nature à faire cesser le danger résultant de cette action ou de cette carence. Toutefois, ce juge ne peut, au titre de cette procédure particulière, qu’ordonner les mesures d’urgence qui lui apparaissent de nature à sauvegarder, dans un délai de quarante-huit heures, la liberté fondamentale à laquelle il est porté une atteinte grave et manifestement illégale. Le caractère manifestement illégal de l’atteinte doit s’apprécier notamment en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité administrative compétente et des mesures qu’elle a, dans ce cadre, déjà prises.
10. Il résulte de l’instruction que les restrictions d’accès aux établissements d’enseignement supérieur ont été décidées pour faire face à l’aggravation rapide de l’épidémie. La circulation du virus sur le territoire métropolitain reste, malgré l’amorce d’un recul du nombre de nouveaux cas positifs, à un niveau élevé. Au 1er décembre 2020, 2 230 571 cas ont été confirmés positifs au virus, en augmentation de 8 083 dans les dernières vingt-quatre heures, le taux de positivité des tests étant situé à 10,79 %. 53 506 décès liés à l’épidémie de covid-19 sont à déplorer, en hausse de 363 dans les dernières vingt-quatre heures. Le taux d’occupation des lits en réanimation par des patients atteints de la covid-19 reste à un niveau élevé avec près de 71 % en moyenne nationale mettant en tension l’ensemble du système de santé.
11. Si les requérants mettent en avant les effets psychologiques et sociaux d’un enseignement entièrement à distance sur les étudiants, ce qu’a d’ailleurs reconnu l’administration à l’audience et ce qui a conduit le Président de la République à évoquer une ouverture plus large des établissements d’enseignement supérieur dès le mois de janvier au vu de l’évolution de l’épidémie, le choix de limiter très fortement le nombre d’usagers accueillis dans ces établissements afin de limiter le brassage des populations et réduire ainsi la propagation du virus ne peut être regardé, en l’état de l’instruction et dans l’actuel contexte sanitaire rappelé au point 10, comme créant un danger caractérisé et imminent pour la vie des personnes. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions litigieuses porteraient une atteinte grave et manifestement illégale au droit à la vie ni, en tout état de cause, au droit à la santé et à liberté personnelle.
12. En troisième lieu, il résulte de l’instruction que les établissements d’enseignement supérieur ont mis en place des enseignements à distance pour leurs étudiants. Les dispositions contestées, explicitées par la circulaire de la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation du 30 octobre 2020, prévoient que les enseignements dont le caractère pratique rend impossible de les effectuer à distance restent délivrés sur site et que les étudiants ne disposant pas de l’équipement ou de la connexion nécessaires au suivi des enseignements à distance bénéficient d’un accès prioritaire aux salles de travail équipées en matériel informatique ou permettant un accès à internet. Par ailleurs, les bibliothèques et centres de documentation universitaires restent accessibles sur rendez-vous ainsi que pour le retrait et la restitution de documents réservés. Si les requérants soutiennent que le droit à participer à des enseignements sur site constitue une composante essentielle du droit à l’éducation, les modalités d’organisation arrêtées par les dispositions litigieuses permettent d’assurer l’accès à l’enseignement supérieur dans le contexte sanitaire rappelé au point 10.
13. En quatrième lieu, en vertu de l’article L. 811-1 du code de l’éducation, les usagers du service public de l’enseignement supérieur disposent « de la liberté d’information et d’expression à l’égard des problèmes politiques, économiques, sociaux et culturels. Ils exercent cette liberté à titre individuel et collectif dans des conditions qui ne portent pas atteinte aux activités d’enseignement et de recherche et qui ne troublent pas l’ordre public. / Des locaux sont mis à leur disposition. Les conditions d’utilisation de ces locaux sont définies, après consultation du conseil des études et de la vie universitaire, par le président ou le directeur de l’établissement et contrôlées par lui ».
14. Il résulte de ces dispositions que les établissements d’enseignement supérieur doivent veiller à la fois à l’exercice des libertés d’expression et de réunion des usagers du service public de l’enseignement supérieur et au maintien de l’ordre dans les locaux comme à l’indépendance intellectuelle et scientifique de l’établissement, dans une perspective d’expression du pluralisme des opinions. L’exercice de ces libertés doit également être concilié avec le respect de l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé.
15. Eu égard à la situation sanitaire rappelée au point 10, marquée par le maintien d’une circulation élevée du virus sur le territoire métropolitain et d’une tension très forte pesant sur le système de santé, le choix de limiter très fortement le nombre d’usagers accueillis dans les établissements d’enseignement supérieur ne peut être regardée, en l’état de l’instruction, comme portant une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés d’expression et de réunion de ces usagers.
16. Il résulte de ce qui précède que la requête présentée par M. Cassia et autres sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative doit être rejetée.
ORDONNE: ——————
Article 1er : L’intervention de l’association Coronavictimes est admise. Article 2 : La requête de M. Cassia et autres est rejetée.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. Paul Cassia, premier requérant dénommé, ainsi qu’au ministre des solidarités et de la santé.
Copie en sera adressée au Premier ministre et à la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Fait à Paris, le 10 décembre 2020 Signé : Mathieu Hérondart
La République mande et ordonne au au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme, Le secrétaire,
Sylvie Rahier