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You are here: Home / Table des matières / Droit français / Libertés publiques / §2. Une complémentarité nouvelle des juges permettant une protection optimale des droits et libertés

§2. Une complémentarité nouvelle des juges permettant une protection optimale des droits et libertés

Citer : Christophe De Bernardinis, '§2. Une complémentarité nouvelle des juges permettant une protection optimale des droits et libertés, ' : Revue générale du droit on line, 2021, numéro 55436 (www.revuegeneraledudroit.eu/?p=55436)


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432 • La complémentarité des deux juges ordinaires dans leur action tendant à protéger les droits et libertés se situe d’abord dans les nouveaux pouvoirs du juge administratif qui permettent de le placer sur un pied d’égalité avec le juge judiciaire dans les garanties offertes au justiciable (A). Mais l’élément le plus manifeste de cette complémentarité reste le nouvel exercice des questions préjudicielles pratiqué entre les deux juges. La question préjudicielle est celle qui n’est pas susceptible de relever de la compétence de la juridiction saisie au principal et qui impose la saisine d’un autre tribunal pour la régler. Le renvoi à la juridiction d’exception s’impose dès lors que la réponse à la question est nécessaire à l’issue du litige et qu’elle soulève une difficulté sérieuse. Alors que ce mode de communication était devenu un outil de plus en plus critiqué de par la perturbation du procès engendré et le non-respect du principe du délai raisonnable pour régler le litige, l’augmentation du nombre d’exceptions à l’obligation de sa mise en œuvre témoigne d’une nouvelle perception des choses dans le dynamisme du dialogue des juges et, corrélativement, dans la protection des droits et libertés (B).

A – Des pouvoirs du juge administratif aujourd’hui aussi performants que ceux du juge judiciaire

433 • La répartition des compétences entre juge administratif et juge judiciaire a été profondément renouvelée dans la fonction de gardien des libertés mais elle n’a été possible que parce que le juge administratif a su adopter son office pour le rendre plus effectif dans la protection des libertés. Les recours tels qu’ils ont été appliqués devant le juge administratif jusqu’à la fin du XXème siècle ont révélé, en dépit de leurs mérites, des insuffisances au niveau de l’efficacité de la protection des libertés par comparaison à ce que pouvait faire les recours devant le juge judiciaire. Le recours pour excès de pouvoir permet d’annuler les décisions administratives qui n’ont pas respecté les droits et libertés mais, il n’est pas, en principe, suspensif et, compte tenu des délais de jugement, des décisions peuvent être annulées alors que des atteintes irréversibles aux libertés continuent à être portées. Pour autant, ces dernières années, le modèle classique a connu des changements profonds sous l’influence du juge européen et, en parallèle, du juge constitutionnel. Pour être l’équivalent voire le complément au juge judiciaire, le Conseil d’Etat s’est donné la possibilité de disposer d’une nouvelle légitimité pour devenir, lui aussi, un protecteur des droits et libertés. Il est, aujourd’hui, dans ce rôle grâce à une emprise plus directe et plus forte sur l’action administrative notamment par le biais des nouvelles procédures d’urgence (1). Si cette emprise a, à l’origine, été donnée et validée par le législateur, cela n’a pas empêché le juge de dépasser les considérations légales pour adapter son office d’une optique objective à une optique plus subjective de protection des libertés (2).

1 – Une emprise plus directe et plus forte du juge administratif sur l’action administrative
a) La mise en place des référés d’urgence et du référé liberté
i) Les référés avant l’an 2000 : des procédures moins efficaces que celle du juge civil

434 • C’est d’abord grâce à l’office du législateur que l’on a pu assister à une augmentation des pouvoirs du juge administratif. C’est, avant tout, un manque de moyens pour assurer la rapidité de l’exécution des sentences du juge administratif qui faisait défaut. C’est le caractère exécutoire des actes administratifs qui a longtemps donné, par principe, un effet non suspensif aux recours dans le but d’éviter les contentieux purement dilatoires (Cf. M. Lei, Le principe de l’absence d’effet suspensif des recours contentieux en droit administratif, Thèse, Université de Toulon, 2018). Pour faire face à ces défauts, des procédures d’urgence ont été établies comme le sursis à exécution ou la procédure du « déféré liberté », procédure qui, à l’initiative du préfet, permet au juge administratif de suspendre, dans un délai de 48 heures, l’exécution d’un acte d’une collectivité territoriale de « nature à compromettre  l’exercice d’une liberté publique ou individuelle » (Articles L. 2136-1, L. 3132-1 et L. 4142-1 du CGCT depuis la loi n°82-213 du 2 mars 1982 (JO, 3 mars 1982, p.730) relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions). Ces procédures étaient, néanmoins, tenues de « ne pas faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative » (CE, 27 novembre 1967, Chambre syndicale cochers et chauffeurs voitures de place, req. n°54962 et n°54963, Rec. CE, tables p. 889) et n’étaient pas équivalentes dans l’efficacité à celles existantes devant le juge civil des référés (Voir les articles 484 à 492-1, 808 à 811, 848 à 852 du Code de procédure civile). Il était donc logique de soumettre à ce dernier, par le biais d’une conception très large de la notion de voie de fait, de nombreux litiges mettant en cause l’administration. Les mêmes dispositions (juge unique, délai bref) sont retenues, progressivement, devant le juge administratif,  à partir de 1990, pour le contentieux des mesures d’éloignement des étrangers, permettant de contester des arrêtés de reconduite à la frontière (Art. 1er de la loi n°90-34 du 10 janvier 1990 (JO, 12 janvier 1990, p. 489) modifiant l’ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d’entrée et de séjour des étrangers en France) et, depuis 2006, des obligations de quitter le territoire français (Loi n°2006-911 du 24 juillet 2006 (JO, 25 juillet 2006, p.11047) relative à l’immigration et à l’intégration).

ii) Les référés après l’an 2000 : une nouvelle culture de l’urgence et une institution centrale caractérisée par le référé liberté

435 • Ces procédures spécifiques ont préfiguré la réforme d’ensemble des procédures de référé mis en place par le législateur en l’an 2000 (loi n°2000-597 du 30 juin 2000 (JO, 1er juillet 2000, p. 9948) relative au référé devant les juridictions administratives) dans le sillage de laquelle s’est développée une véritable culture de l’urgence au sein des juridictions administratives. Si les référés généraux (référé suspension et référé mesures utiles) n’ont pas vocation à protéger les droits et libertés et qu’il existe, à travers les procédures d’urgence, certains recours au fond pour protéger les droits et libertés (par exemple, le recours suspensif en annulation contre les décisions de refus d’entrée en France au titre de l’asile de l’article L. 213-9 CESEDA), l’institution centrale est forcément la procédure du référé liberté (art. L. 521-2 CJA) permettant au juge d’« ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale ». Le juge, dans cette hypothèse, n’a, a priori, pas de limites dans l’exercice de son pouvoir de décision, la possibilité de prendre « toutes mesures » impliquant a priori la possibilité de prendre « n’importe quel mesure ». En pratique, le juge peut tout d’abord suspendre la décision de l’administration portant atteinte à la liberté fondamentale comme, par exemple, l’exécution d’un arrêté de reconduite à la frontière (CE, ord., 24 novembre 2010, Eddomairi, req. n°344411) ou l’application d’un régime de fouille corporelle intégrale pratiqué quotidiennement sur le requérant (CE, ord., 20 mai 2010, Ministre d’Etat, Garde des sceaux, Ministre de la justice et des libertés, req. n°339259).

b) L’efficacité des pouvoirs d’injonction du juge du référé liberté et la possibilité de prendre des décisions définitives
i) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des avancées certaines

436 • Là où se manifeste réellement l’étendue des pouvoirs du juge administratif des référés, c’est dans la possibilité de prononcer des injonctions envers l’administration pour mettre fin à l’atteinte aux droits et libertés, au besoin sous astreinte. Ces injonctions peuvent aboutir ou se traduire par des obligations d’agir en cas de carence, des obligations de cesser un agissement liberticide ou d’interdire préventivement un tel agissement. Elles peuvent être très contraignantes pour l’administration comme, par exemple, en matière de détention dans les établissements pénitentiaires. Cela fait maintenant un certain moment que les associations, le Conseil de l’Europe ou le Contrôleur général des lieux de privation de liberté dénoncent la surpopulation et l’insalubrité qui règnent dans les établissements pénitentiaires français. Cette situation amène à la méconnaissance de certains droits fondamentaux (par ex., le droit à la vie privée en raison du manque d’intimité et de l’étroitesse des lieux : CourEDH, 19 avril 2001, Peers contre Grèce, req. n°28524/95 ou le droit de ne pas subir de traitement inhumain et dégradant en raison du manque d’hygiène : CourEDH, 25 avril 2013, Canali contre France,  req. n°40119/09)et les détenus ont surtout agit d’un point de vue individuel pour les faire respecter. Ce n’est que plus récemment que des démarches collectives ont été entreprises pour faire respecter les droits fondamentaux des détenus dans leur ensemble Il y a Une 1ère ordonnance remarquée a concerné la prison des Baumettes à Marseille en 2012 où le juge du référé-liberté avait ordonné à l’administration de procéder, dans un délai de 10 jours, à la détermination des mesures nécessaires à l’éradication des animaux nuisibles présents dans les locaux du centre pénitentiaire (CE, ord., 22 décembre 2012, Section française de l’Observatoire international des prisons, req. n° 364584, Rec. CE, p. 496, D. 2013, p. 1304, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon,  AJ pénal 2013, p. 232, obs. E. Péchillon,  JCP 2013, G, n°87, note O. Le Bot). Quelques années après, c’est la maison d’arrêt de Nîmes qui fait à son tour l’objet d’une procédure identique. L’ordonnance rendue par le juge administratif disposant, s’agissant des pouvoirs du juge, que celui-ci puisse ordonner à l’autorité administrative de prendre des mesures d’organisation du service relativement aux conditions matérielles d’installation des détenus durant la nuit, l’accès aux produits d’entretien des cellules et à des draps et couvertures propres ou encore à la dotation de l’accueil des familles d’un moyen d’alarme ou la modification du système sécurité incendie (CE, ord., 30 juillet 2015, Section française de l’Observatoire international des prisons, req. n°392043 et n° 392044, AJDA 2015, p. 2216, note O. Le Bot).  Enfin, plus récemment, la 3ème décision rendue par le Conseil d’Etat dans ce domaine a concerné la maison d’arrêt de Fresnes (CE, ord., 28 juillet 2017, Section française de l’Observatoire international des prisons, req. n°410677, Rec. CE, p. 290, concl. E. Crépey, AJDA 2017, p. 2540, note O. Le Bot, AJ pénal 2017, p. 456, obs. J.-P. Céré) où huit injonctions sur diverses mesures tendant notamment à l’amélioration de l’entretien et de la propreté de la maison d’arrêt ont été ordonnées (par ex., l’obligation faites à l’administration d’engager des actions de destruction des nuisibles, de faire des travaux permettant la distribution d’eau chaude, de prendre les moyens pour que les repas soient servis chauds, ou encore de procéder au nettoyage régulier des parloirs et lieux de circulation). Le juge confirmant, par là-même, certains pouvoirs dont dispose le juge du référé-liberté comme celui d’ordonner des mesures d’organisation du service ou celui de prendre plusieurs mesures successives sur une situation donnée.

ii) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des limites persistantes pour ne pas faire acte d’administrateur

437 • Si le juge administratif du référé liberté peut obliger l’administration à prendre des mesures destinées à améliorer les conditions de détention, il n’a pas toujours la possibilité effective de mettre rapidement un terme à tout traitement contraire aux droits et libertés. Il y a certaines limites à l’office du juge en ce domaine. Même s’il reconnait l’atteinte manifeste à une liberté fondamentale, il considère souvent qu’elle « doit s’apprécier en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité administrative compétente » (CE, ord., 22 décembre 2012, Section française de l’Observatoire international des prisons précité ou CE, ord., 30 juill. 2015, Section française de l’Observatoire international des prisons précité où le juge se cantonne alors d’enjoindre à l’administration pénitentiaire de prendre, « dans les meilleurs délais, toutes les mesures qui apparaîtraient de nature à améliorer, dans l’attente d’une solution pérenne, les conditions matérielles d’installation des détenus durant la nuit ») ou « des mesures déjà mises en œuvres par celle-ci » (voir, par ex., CE, ord., 10 février 2012, Fofana, req. n°356456, AJDA 2012, p. 716, note A. Duranthon, AJDI 2012, p. 411, étude R. Piastra, JCP 2012, A, n°2059, note O. Le Bot). De même, il a pu être rappelé récemment qu’il n’appartient pas au juge du référé liberté, qui est un juge de l’urgence dont les mesures doivent produire des effets dans des délais brefs, d’ordonner à l’administration de prendre des mesures structurelles (CE, 28 juillet 2017, Section française de l’Observatoire international des prisons, req. n°410677 précité). Le juge ne peut donc ordonner de changements structurels ou des travaux lourds parce que les effets de ses mesures n’interviendraient pas immédiatement (par ex., hors du cadre pénitentiaire, créer un centre d’accueil des migrants ou des centres de distribution alimentaire : CE, 31 juillet 2017, Commune de Calais, Ministre de l’Intérieur, req. n°412125 et n°412171, JCP 2017, A, act., n°570, note C. Friedrich, AJDA 2017, p. 1594, note J.-M. Pastor, D. 2018, p. 313, obs. N. Joubert, AJCT 2018, p. 51, obs. E. Péchillon).

iii) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des limites persistantes compensées par un contrôle de proportionnalité in concreto

438 • S’il y a des limites dans l’office du juge du référé liberté, cela ne l’empêche pas de procéder à un contrôle poussé in concreto des mesures pouvant être autorisées. Dans ce but, le juge fait très attention aux injonctions prononcées et opère un bilan de proportionnalité in concreto entre les atteintes aux droits et libertés des détenus et les spécificités intrinsèques des centres pénitentiaires ainsi que les actions entreprises pour atténuer les atteintes. Il a ainsi pu considérer, dans une décision récente à propos du centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly en Guyane et contrairement à ce qui avait été déjà décidé dans d’autres décisions, que le cloisonnement partiel des toilettes dans les cellules et la rénovation des cours de promenade dans les quartiers disciplinaire et d’isolement sont des mesures qui peuvent « soit être réalisées à bref délai, sans exiger de travaux lourds de nature structurelle, soit donner lieu à des aménagements provisoires dans l’attente de solutions pérennes » (CE, ord., 4 avril 2019, Garde des Sceaux, Ministre de la justice contre Section française de l’OIP, req. n° 428747). Même si le Conseil d’Etat ne retient pas l’obligation d’information du requérant sur l’état d’avancement des mesures ordonnées, il étend quand même de façon conséquente les mesures provisoires pouvant être ordonnées.

iv) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : la question du pouvoir de remédier à la carence ou la passivité de l’administration

439 • Outre la question des conditions de détention, le juge des référés a admis depuis un certain temps maintenant qu’un comportement passif de l’administration pouvait porter atteinte à une liberté fondamentale. Il en a jugé ainsi à propos de l’accueil en matière d’asile (CE, ord., 23 mars 2009, Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire contre Gaghiev et Mme Gaghieva, req. n°325884, Rec. CE, p. 789), de l’hébergement d’urgence (CE, ord., 10 février 2012, Fofana, req. n°356456, Fofana précité), de l’accueil des migrants (CE 23 novembre 2015, Ministre de l’intérieur, req. n°394540, AJDA 2016, p. 556, note J. Schmitz, RDSS 2016, p. 90, note D. Roman et S. Slama) ou encore de la prise en charge de mineurs placés (CE, ord., 27 juillet 2016, Département du Nord, req. n°4000508). S’il a jugé de même pour les conditions de détention (CE, ord., 22 décembre 2012, Section française de l’observatoire international des prisons précité), ce n’est que depuis 2011 qu’on a admis qu’il pouvait y remédier par le biais d’injonctions (CE, sect., 16 novembre 2011, Ville de Paris et Société d’économie mixte PariSeine, req. n°353172 et n°353173, Rec. CE, p. 553, RFDA 2012, p. 269, concl. D. Botteghi, JCP 2012, A, n°2017, note B. Pacteau, AJCT 2012, p. 156, obs. L. Moreau, DA 2012, n°18, note B. Spitz). Auparavant, le juge se contentait de la réparation, en plein contentieux, du préjudice engendré par la passivité ou la carence de l’administration (…). Cette réparation, arrivant a posteriori, n’était pas toujours de nature à satisfaire les justiciables d’où l’évolution de 2011 même s’il fallait préserver l’action de l’administration. Il semble maintenant que le Conseil d’Etat n’ait plus de réticences à utiliser son pouvoir d’injonction dans ce domaine quand des mesures utiles peuvent être prises dans un délai bref. Il le fait à propos du défaut de certains droits créances (par ex., même avant la décision de 2011 : CE, ord., 23 mars 2009, Ministre de l’Immigration contre Mme Gaghieva et M. Gaghiev, req. n°325884 précité à propos du droit des demandeurs d’asile de se voir proposer par l’administration des conditions matérielles d’accueil décentes pendant l’examen de leur demande, Cf. O. Le Bot, « L’effectivité des droits sociaux dans le cadre des procédures d’urgence », RDH 2012, n° 1 ou L. Corre, « Les « droits-créances » et le référé-liberté », DA 2012, n° 2, étude n°3) du défaut de mesures matérielles dans les conditions de détention (CE, 28 juillet 2017, Section française de l’Observatoire international des prisons, n°410677 précité) ou encore le défaut de règlementation dans la prise en charge par les autorités publiques des exilés stationnés à Calais (CE, 31 juillet 2017, Commune de Calais, Ministre de l’Intérieur, à propos de la carence concernant l’hygiène et l’alimentation en eau potable) (Voir, pour un commentaire de ces décisions : C. Friedrich, « Le référé liberté en carence de l’administration », RDP 2018, p. 1297 et suiv.). A noter que lorsque l’atteinte résulte d’une absence d’acte ou d’action positive de la part de l’administration, le juge est conduit à s’appuyer sur un certain nombre d’éléments matériels pour déterminer le seuil de l’atteinte aux droits et libertés comme par exemple l’existence de capacités matérielles pour l’administration d’agir autrement (ce n’était pas le cas dans CE, 1er février 2019, Union départementale de Paris du syndicat de la Confédération générale du travail, req. n°427386 ; Cf. D. Fallon, « Rejet du recours contre l’utilisation des lanceurs de balles de défense », AJDA 2019, p. 1401 et suiv.)

v) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : les limites du référé liberté mis en avant par le juge européen (1)

439-1 • Le juge européen a souligné, tout récemment, avec l’arrêt J. M. B. Contre France, les limites du référé liberté et le non-respect du droit à un recours effectif pour faire cesser les atteintes à la dignité de la personne dans les prisons françaises (CourEDH, 30 janvier 2020, J. M. B. contre France, req. n°9671/15). Si l’arrêt Yengo contre France (CourEDH, 21 mai 2015, Yengo contre France, req. n° 50494/12, AJDA 2015, p. 1289, tribune A. Jacquemet-Gauché et S. Gauché) avait laissé espérer que le référé-liberté puisse constituer un recours préventif effectif au sens de l’article 13 ConvEDH, l’arrêt J. M. B. contre France dément cette analyse. C’est, paradoxalement, d’abord le juge judiciaire qui a réagi à la décision européenne en mettant en avant qu’il appartient désormais « au juge judiciaire, gardien de la liberté individuelle, de faire vérifier les allégations de conditions indignes de détention formulées par un détenu sous réserve que celles-ci soient crédibles, précises, actuelles et personnelles – l’indignité d’une détention provisoire pouvant alors constituer un obstacle à sa poursuite » (Cass., Crim. 8 juillet 2020, M. M. V., n° de pourvoi : 20-81.739, D. 2020, p. 1774, note J. Falxa, et p. 1643, obs. J. Pradel, AJ pénal 2020, p. 404, note J. Frinchaboy, voir, spécialement, D. Zerouki-Cottin, « L’indignité des conditions de détention, ou les ressources infinies du contrôle de conventionnalité », RSC 2021, p. 517 et suiv.). Des QPC ont été parallèlement transmises au juge constitutionnel qui a jugé qu’il incombait au législateur, avant le 1er mars 2021, de garantir aux personnes placées en détention provisoire la possibilité de saisir un juge afin de mettre fin aux conditions de détention attentatoires à la dignité de la personne humaine, lorsque celles-ci existent (CC, n° 2020-858/859 QPC, 2 octobre 2020, M. Geoffrey F. et autre [Conditions d’incarcération des détenus], JO, 3 octobre 2020, texte n°106).  Le Conseil d’Etat s’est ensuite enfin prononcé. Il reconnait un principe d’exécution loyale des arrêts du juge européen mais il estime qu’il ne lui appartient pas de créer une voie de réexamen des décisions juridictionnelles administratives à la suite d’un arrêt de condamnation du juge européen et il renvoie, en conséquence, le législateur à ses responsabilités (CE, 19 octobre 2020, Garde des sceaux, ministre de la justice contre Section française de l’Observatoire international des prisons, req. n° 439372).

vi) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : les limites du référé liberté mis en avant par le juge européen (2)

439-2 • Ce faisant, le juge administratif maintient sa jurisprudence aux termes de laquelle, d’une part, le juge du référé-liberté ne peut pas ordonner de mesures d’ordre structurel insusceptibles d’être mises en œuvre à très bref délai et, d’autre part, les mesures qu’il prononce doivent s’apprécier en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité administrative compétente. Si cette position a été plutôt critiquée (Voir, par ex., J. Schmitz, « L’entêtement carcéral du juge du référé liberté », AJDA 2021, p. 41 et suiv. et « Dialogue des juges en matière de conditions de détention provisoire – La sourde oreille du juge du référé-liberté », AJDA 2021, p. 694 et suiv.), le juge européen a jugé, par la suite et pour la première fois, que le recours indemnitaire ouvert devant le juge administratif à raison de conditions de détention indignes est, lui, in abstracto effectif au regard de l’article 13 ConvEDH même si la France a été condamné in concreto en raison de la modestie de l’indemnité (CourEDH, 19 novembre 2020, Barbotin contre France, req. n° 25338/16), le Conseil d’Etat a également renvoyé au juge constitutionnel une QPC relative à la situation spécifique des personnes « définitivement condamnées ». Si la réponse de ce dernier a été identique à celle donnée en octobre 2020 et qu’elle a produit les mêmes effets (CC, n° 2021-898 QPC, 16 avril 2021, Section française de l’observatoire international des prisons [Conditions d’incarcération des détenus II], JO, 17 avril 2021, texte n° 68), elle s’est avérée être sans véritable objet puisque le législateur est entre temps  intervenue (Loi n°2021-403 du 8 avril 2021 (JO, 9 avril 2021, texte n°3) tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention) et a instauré le recours attendu devant le juge de la liberté et de la détention (nouvel article 803-8 dans le Code de procédure pénale). Reste à savoir si la nouvelle voie ainsi mise en place sera réellement effective (voir, par ex., J. Mouchette, « Une voie de recours dédiée aux conditions indignes de détention : vraie avancée ou impasse contentieuse ? », Europe des droits et libertés 2021, 1, n° 3, p. 114).

vii) L’exemple de la détention dans des centres d’accueil des étrangers

440 • Le juge des référés a opéré de même concernant l’hébergement des migrants au centre d’accueil de Calais où le juge a, par exemple, enjoint, d’abord à l’Etat, de procéder à un recensement des mineurs isolés en situation de détresse puis, ensuite, à la commune de Calais et toujours à l’Etat, de procéder à des mesures de salubrité comme l’obligation de créer des accès pour les services d’urgence, de ramasser des ordures, nettoyer le site ou encore installer des points d’eau et des latrines supplémentaires et ceci dans un délai de 8 jours (CE, ord., 23 novembre 2015, Associations Médecins du monde, Secours Catholique-Caritas France et autres, req. n°395540, AJDA 2016, p. 556, note J. Schmitz, D. 2016, p. 336, obs. K. Parrot Voir M. Anglivie, « La relative consécration d’obligations étatiques dans la « jungle » calaisienne », RDH 2015, 22 décembre). On a pu voir que les décisions ultérieures ont été prises dans le même sens (CE, 31 juillet 2017, Commune de Calais, Ministre de l’Intérieur précité ou CE, 8 novembre 2017, GISTI, req. n°406256, JCP 2017, A, act., n°562, note C. Friedrich, AJDA 2017, p. 2408, comm. S. Roussel et C. Nicolas et p. 2224, note J.-M. Pastor) faisant dire à certains que Calais était devenue la « terre d’élection du juge du référé-liberté » (H. Pauliat, « Calais, terre d’élection du juge du référé-liberté », JCP 2017, A, act., n°260 ; voir, de manière plus large : J. Tribolo, « La crise migratoire dans le Calaisis : de quelques usages de la police administrative », RFDA 2021, p. 547 et suiv.). A noter que, récemment, la CourEDH a jugé que la France avait violé la ConvEDH en laissant à l’abandon dans la « jungle de Calais » un jeune Afghan âgé de onze ans (CourEDH, 28 février 2019, Khan contre France, req. n°12267/16, Cf. A.-B. Paire, « La carence française face à l’extrême vulnérabilité d’un mineur étranger isolé dans la lande de Calais », D. 2019, p. 1092 et suiv., par ex., CourEDH, 12 juillet 2016, A. M. et autres contre France, req. n°24587/12) ou en opérant une rétention administrative d’une mère et de son nourrisson, alors âgé de 4 mois, pendant 11 jours (CourEDH, 22 juillet 2021, M. D. et A. D. contre France, req. n°57035/18).

viii) L’exemple lié aux refus d’ouverture ou aux fermetures de mosquée (1)

441 • Le juge du référé liberté peut aussi utiliser son pouvoir d’injonction concernant le refus du maire d’autoriser l’ouverture d’une mosquée. Cela a, par exemple, été le cas à propos de la « mosquée de Fréjus » où le Conseil d’Etat va très loin dans l’exercice de son pouvoir d’injonction. Après une 1ère décision en référé, le maire s’était abstenu de réexaminer la demande dans un délai déterminé, comme la décision du juge, devenue définitive, lui imposait de le faire. Le Conseil d’Etat lui a, en conséquence, obligé de délivrer une autorisation provisoire et a mis le maire en situation de compétence liée puisque ce dernier ne disposait plus de liberté de choix par rapport au contenu de la décision (CE, ord., 9 novembre 2015, Association Musulmane El Fath, req. n°394333, AJDA 2016, p. 385, note E. Debaets, AJCT 2016, p. 552, étude C. Alonso ; voir, aussi, CE, ord., 19 janv. 2016, Association musulmane El Fath, req.    n° 396003). La liberté de culte est, en effet, susceptible de faire peser sur la collectivité publique une obligation positive de fournir aux individus les moyens effectifs de pratiquer leur religion (Cf. En ce sens : CourEDH, 29 juin 2007, Folgero et autres contre Norvège, req. n°15472/02) obligation reprise en droit français par le Conseil d’Etat (CE, ord., 30 juin 2016, Association culturelle et cultuelle Nice La plaine « Institut Niçois En Nour » contre Ville de Nice, req. n°400841, AJDA 2016, p. 2048, note M. Comte, AJCT 2016, p. 552, étude C. Alonso) même si les débats sont aujourd’hui très marquants eu égard au principe de laïcité (Cf. les commentaires opposés entre les rédacteurs de l’AJDA et Michel Bouleau concernant la décision CE 7 mars 2019, Association « Bien Vivre à Garbejaïre Valbonne » et Mme A. B., req. n°417629 qui précise les conditions dans lesquelles une commune peut mettre à disposition des locaux lui appartenant à une association cultuelle pour l’exercice d’un culte : C. Malverti et C. Beaufils, « Le domaine (privé) des dieux », AJDA 2019, p. 980 et suiv. et M. Bouleau, « Liberté de culte et laïcité », D. 2019, p. 1460 et suiv.).

ix) L’exemple lié aux refus d’ouverture ou aux fermetures de mosquée (2)

441-1 • A noter aussi que le juge administratif peut même adresser des injonctions à des personnes privées à condition toutefois qu’il existe un texte particulier en ce sens et que cela soit justifié par les nécessités de l’ordre public (CE, 9 décembre 2003, Aguillon et autres, req. n° 262186, RFDA 2004, p. 308, concl. J.-H. Stahl et note P. Cassia, AJDA 2004, p. 1138, note O. Le Bot, JCP 2004, A, n°1034, note J. Moreau et n°1096, note D. Maillard Desgrées du Loû). En sens inverse, les fermetures de lieux de culte récentes établies à des fins punitives (on songe à la mosquée de Pantin à la suite de l’attentat de Samuel Paty) amènent à changer l’équilibre entre principe de sécurité et liberté de culte, la mesure de police étant limitée, jusque-là, par le législateur à des fins préventives (voir, en ce sens, J. Jeanneney, « La résurgence des fermetures punitives de lieux de culte », RFDA 2021, p. 519 et suiv.). Si ces fermetures de l’extérieur sont appréhendées sévèrement par le juge et doivent être proportionnées à l’objectif qui leur est attaché, le Conseil d’Etat, va assez loin don son office pour justifier la fermeture. Il est allé, par exemple, jusqu’à juger contra legem pour justifier son interprétation extensive du fait générateur dans le cas de la fermeture de la mosquée de Pantin. La loi limite explicitement les faits générateurs de la fermeture aux idées ou théories diffusées dans le lieu de culte. Or, la diffusion d’idées répréhensibles est matérialisée même si diffusé à l’extérieur des lieux de culte ou s’il existe une « fréquentation du lieu de culte par des tiers prônant ces idées ou théories » (CE, ord., 25 novembre 2020, Fédération musulmane de Pantin, req. n° 446303).

x) Des décisions en référé non définitives mais qui présentent, le plus souvent et indirectement, un caractère définitif

442 • Statuant à titre provisoire (art. L. 511-1 CJA), le juge des référés ne peut normalement adopter une décision définitive, comme un jugement d’annulation d’une décision administrative ou l’attribution de dommages et intérêts. Il s’agit là d’un effet classique attaché à une ordonnance de référé qu’on retrouve en procédure civile (art. 484 NCPC). Il a, par exemple, été jugé que le juge du référé-liberté ne saurait adresser à l’Administration une injonction qui produirait des effets identiques à l’annulation d’une décision administrative (CE, 1er mars 2001, Paturel, req. n° 230794, Rec. CE, tables, p. 1134). Mais la mise en œuvre par le juge des référés du pouvoir d’injonction pour assurer la règle de droit le conduit souvent à anticiper une éventuelle annulation au fond. Dans le même sens, les décisions du juge des référés, qui ne sont normalement pas revêtues de l’autorité de chose jugée, sont néanmoins exécutoires et obligatoires et ont, souvent, en pratique, un caractère définitif. Par exemple, l’administration ne peut, en conséquence, reprendre la même décision sans avoir remédié au défaut que le juge des référés avait pris en considération pour prendre sa décision (CE, sect., 5 novembre 2003, Association convention Vie et nature pour une écologie radicale, req. n°259339, Rec. CE, p. 444, concl. F. Lamy, AJDA 2003, p. 2253, chron. F. Donnat et D. Casas et p. 2225, tribune P. Cassia, RFDA 2004, p. 601, concl. F. Lamy). Les mesures d’exécution ordonnées par le juge ont souvent aussi vocation à durer dans la mesure où ni l’annulation, ni la réparation au principal ne permettent d’assurer l’exécution de la règle de droit. Il y a beaucoup d’exemples où le juge du fond confirme non seulement l’appréciation du juge de l’urgence mais aussi les mesures d’exécution prises par ce dernier en annulant l’acte (CE, 14 mai 2014, Société Addmedica, req. n° 363195, Rec. CE, tables, p. 814, AJDA 2014, p. 1955, note D. Connil). Enfin, pour les cas où aucune mesure provisoire ne serait susceptible de restaurer l’administré dans ses libertés fondamentales, le juge pourra enjoindre à l’administration fautive « toute disposition », fut-elle irréversible (par exemple, en ce qui concerne la liberté syndicale : CE, ord., 31 mai 2007, Syndicat CFDT Interco 28, req. n°298293, Rec. CE, p. 223, AJDA 2007, p. 1237, chron. F. Lenica et J. Boucher s’agissant de la décision du juge d’ordonner le retour provisoire des requérants dans leur local syndical jusqu’à ce qu’il soit statué sur leurs droits ; Cf. B. Plessix, « Le caractère provisoire des mesures prononcées en référé », RFDA 2007, p. 76).

xi) Un juge du référé liberté administrateur ?

442-1 • Si le passage du provisoire au définitif est une réalité qui concerne tous les référés administratifs, il y a immanquablement un « glissement d’un juge du fond – administrateur vers un juge des référés-administrateur » ( C. Lantero, « La loi du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives Bilan critique d’une réforme exemplaire – Présentation et quelques réflexions sur les concurrences et complémentarités du juge des référés et du juge du fond », RFDA 2021, p. 639 et suiv.). Le côté très attractif du juge du référé liberté en a fait « un juge de régulation sociale au quotidien, intervenant de plus en plus en qualité de seul interlocuteur d’une administration défaillante » (Ibid.). S’il s’interdit d’être encore un juge administrateur quand l’administration agit et s’il s’interdit de remettre en cause les choix de politique publique, il est moins scrupuleux en cas de carence de l’administration. Sans toucher spécifiquement au structurel, il a été amené à imposer de réaliser un diagnostic des opérations de lutte à mener contre des animaux nuisibles et de dératiser une prison (CE, 22 décembre 2012, SFOIP, req. n°364584, op. cit., voir  N. Ferran et S. Slama, « Les ordonnances sur les Baumettes font entrer la défense de la cause des détenus dans une nouvelle ère », D. 2013, p. 488 et suiv.), d’améliorer l’accès, pour les détenus, aux produits d’entretien des cellules ainsi qu’à des draps et à des couvertures propres (TA Guyane, ord., 23 février 2019, SFOIP, req. n°1900211) d’entreprendre des travaux de rénovation dans une maison d’arrêt (CE, 30 juill. 2015, SFOIP, req.  n°392043, op. cit.) voire encore d’installer des points d’eau dans un camp de migrants (CE, 31 juillet 2017, Commune de Calais, req. n°412125, op. cit.). Il est allé jusqu’à participer à l’exercice du pouvoir normatif normalement dévolu aux autorités publiques et s’introduire ainsi « au cœur de la norme de police » (M. Bartolucci, « Le pouvoir d’injonction du juge administratif revisité par les circonstances exceptionnelles de la crise sanitaire du Covid-19 », op. cit.). Il a pu ordonner que la norme juridique soit respectée (en contraignant le ministère de l’Intérieur à rétablir en Île-de-France, dans un délai de 5 jours, l’enregistrement des demandes d’asile : CE, ord., 30 avril 2020, Office français de l’immigration et de l’intégration, req. n°440250,) ou clarifiée voire modifiée (en estimant que le confinement mis en place jusqu’ici n’est pas assez strict en même temps qu’il est trop ambigu, du moins sur certains de ses aspects : CE, ord., 22 mars 2020, Syndicat jeunes médecins, req. n°439674, op. cit.). Si, comme le président Stirn, on peut estimer pudiquement que ce type d’injonctions « aident en réalité l’administration à bien remplir sa tâche » (B. Stirn, « Le référé et le virus », RFDA 2020, p. 634 et suiv.), il ne faudrait pas non plus qu’on se dirige « vers une administration par ordonnance » (C. Lantero, op. cit.).

 

c) La perception large de la notion de liberté fondamentale par le juge du référé liberté
i) Une notion la plupart du temps définie sur le fondement d’une norme constitutionnelle

443 • La procédure du référé liberté s’applique aussi à toute atteinte (décision, agissement, action positive ou abstention) portée à une liberté fondamentale, cette « liberté fondamentale » étant définie de manière propre au référé avec un champ d’application assez extensif. Si la notion suscite beaucoup d’interrogations (L. Favoreu, « La notion de liberté fondamentale devant le juge administratif des référés », D. 2001, chron., p. 1739 ; F. Brenet, « Vers l’émergence d’un droit administratif des libertés fondamentales ? », RDP 2004, p. 212 ; P. Wachsmann, « L’atteinte grave à une liberté fondamentale », RFDA 2007, p. 58), il faut noter que le Conseil d’Etat a surtout privilégié la source constitutionnelle à chaque fois qu’il s’est agi de ranger une liberté parmi celles que permet de protéger l’institution du référé-liberté. Par exemple, le principe de libre administration des collectivités territoriales (art. 72 C°) est rangé de façon assez inattendue au nombre des libertés fondamentales (CE, 18 janvier 2001, Commune de Venelles et Morbelli, req. n° 22947, RFDA 2001, p. 681, note M. Verpeaux, p. 153, chron. M. Guyomar et P. Collin où le principe est violé par l’exercice anticipé de ses compétences par un établissement public de coopération intercommunale ; Cf. O. Le Bot, « L’utilisation du référé-liberté par les collectivités territoriales », AJDA 2016, p. 592). Mais tous les droits et libertés à statut constitutionnel ne sont pas nécessairement éligibles au titre du référé-liberté. Ainsi, le Conseil d’Etat semble avoir implicitement refusé le statut de liberté fondamentale à certains droits-créances comme le droit d’obtenir un emploi (al. 5 du préambule de la Constitution de 1946 selon lequel « chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi », Cf. CE, 27 juin 2002, Centre hospitalier général de Troyes, req. n° 248076, AJDA 2002, p. 965, obs. E. Royer) ou le droit à la protection de la santé (al. 11 du préambule de la Constitution de 1946. Cf. CE, 8 septembre 2005, Ministre de la justice contre Bunel, req. n° 284803, Rec. CE, p. 388, AJDA 2006, p. 376, note M. Laudijois).

ii) Une notion parfois définie sur le fondement de normes européennes

444 • Le juge administratif peut aussi découvrir la source de la liberté fondamentale en dehors des dispositions constitutionnelles et notamment en faisant référence aux normes européennes. Par exemple, le droit au respect de la vie tel que défini par l’article 2 ConvEDH a été identifié comme tel (CE, sect., 16 novembre 2011, Ville de Paris, req. n° 353172 et n° 353173, JCP 2012, G, n°1, note O. Le Bot, JCP 2012, A, n° 2017, note B. Pacteau) alors que ce droit n’est pas consacré dans son aspect général par les sources constitutionnelles. Ce droit à la vie étant, par la suite, rattaché au droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants de l’art. 3 ConvEDH (CE, 22 décembre 2012, Section française de l’observatoire international, req. n°364584, JCP 2013, G, n°87, note O. Le Bot, JCP 2013, A, n°2017, note G. Koubi) ou au droit au respect de la vie privée et familiale de l’art. 8 ConvEDH (CE, Ass., 24 juin 2014, Lambert (II), Rec. CE, p. 175, concl. R. Keller, RFDA 2014, p. 657, concl. R. Keller et p. 702, note P. Delvolvé, AJDA 2014, p. 1225, trib. P. Cassia et p. 1669, note D. Truchet, RDP 2016, p. 41, note M. Canedot-Paris, JCP 2014, A, n°825, note F. Viala et n°2844, étude H. Pauliat, D. Bordessoule et S. Moreau). Pour finir, le juge bénéficie d’une totale liberté dans le choix des éléments qu’il va définir en tant que libertés fondamentales tout en sachant qu’il est également libre de définir leur contenu matériel. Il peut définir un contenu qui s’accorde avec la jurisprudence constitutionnelle voire européenne mais il peut tout aussi bien s’en départir ce qui fait qu’on ne peut jamais être sur des limites de la notion.

iii) Une notion qui reste source d’interrogations impérissables

445 • Parmi les interrogations qui persistent aujourd’hui, il faut noter toute une série de libertés consacrées par les juges du fond mais qui n’ont pas eu la confirmation du Conseil d’Etat en tant que juge d’appel. On peut citer tout d’abord la liberté d’aider autrui dans un but humanitaire. Consacrée par le juge des référés du tribunal administratif de Besançon à propos d’une demande de suspension d’un arrêté « anti-mendicité » pris par le maire de la ville (TA Besançon, ord., 28 août 2018, M. Guardado, req. n°1801454 où c’est d’ailleurs la 1ère fois que le juge du référé-liberté est saisi dans le cadre du contentieux des arrêtés anti-mendicité au lieu d’un contentieux de légalité classique), l’ordonnance s’inspire assez directement de la décision QPC du 6 juillet 2018 par laquelle le Conseil constitutionnel a consacré le caractère constitutionnel du principe de fraternité (CC, n°2018-717/718 QPC, 6 juillet 2018, M. Cédric Herrou et autres [Délit d’aide à l’entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d’un étranger], JO, 7 juillet 2018, texte n° 107 ; voir, par ex., M. Borgetto, « La Fraternité devant le Conseil constitutionnel », JCP 2018, G, n°876). Cette audace du juge de première instance devait être confirmée en appel mais le Conseil d’Etat a jugé finalement le litige sans objet en raison l’abrogation en cours d’instance de l’arrêté contesté (CE, 6 septembre 2018, M. Guardado contre Commune de Besançon, req. n°423725, voir A. Pena, « L’entrée de la fraternité en droit administratif : entre acceptation du principe et restriction procédurale », D. 2019, p. 774 et suiv.). On peut citer aussi au rang des cas posant souci, la reconnaissance toujours lancinante du principe d’égalité comme liberté fondamentale. Le Conseil d’Etat a rappelé, dans « l’affaire des silhouettes » (125 panneaux en contreplaqué représentant des silhouettes féminines et, dans certains cas, des parties de l’anatomie féminine dans diverses positions et des accessoires avaient été placées à divers endroits de la ville de Dannemarie (Haut-Rhin) pour célébrer l’année de la femme), que la violation du principe d’égalité, aux multiples facettes (en l’espèce l’égalité homme/femme), n’est pas constitutive en soi d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale (CE, 1er septembre 2017, « Commune de Dannemarie contre Association « Les Effronté-e-s » », req. n°413607, D. 2017, p. 1711 et suiv., obs. E. Maupin, AJCT 2017, p. 413, note J.-D. Dreyfus, DA 2017, n°11, n°46, comm. V. Hipeau, CCE 2017, n°10, n°82, comm. A. Lepage, JCP 2018, A, n°2025, note V. Donier ; voir, plus particulièrement,  M. Carpentier, « Affaire des silhouettes : la salutaire mise au point du juge des référés du Conseil d’Etat », AJDA 2017, p. 2076 et suiv. ; Cf. Décision de référence CE, ord., 26 juin 2003, Conseil départemental de parents d’élèves de Meurthe-et-Moselle, req. n°257938). C’est le principe de respect de la dignité humaine qui est retenu dans l’analyse, celui-ci étant déjà expressément reconnu par le Conseil d’Etat comme une liberté fondamentale (CE, ord., 22 décembre 2012, Section française de l’Observatoire international des prisons, req. n°364584, ; CE, ord., 5 juillet 2017, Département du Nord, req. n°411826). Le Conseil d’Etat a récemment confirmé sa jurisprudence dans le cadre de l’urgence sanitaire en réitérant l’impossibilité d’invoquer le principe d’égalité lors de la procédure du référé (Voir CE, 10 décembre 2020, Paul Cassia et autres, req. n°447015 à propos de l’absence de mesure permettant le retour des étudiants dans les universités ; voir, par exemple, A. Bonfort, « Le juge des référés n’a pas imposé le retour des étudiants à l’université », AJDA 2021, p. 985 et suiv.).

d) La possibilité pour le juge du référé liberté de mettre en avant l’exception d’inconstitutionnalité
i) Une extension initiale substantielle de l’office du juge du référé-liberté malgré l’interdiction d’opérer un jugement de valeur sur la loi

446 • De manière générale, le juge administratif ne s’interdit pas de prendre appui sur l’œuvre du législateur en faveur des libertés pour consacrer certaines de ces « libertés fondamentales » mais, eu égard au principe de l’écran législatif, il s’interdisait à tout jugement de valeur sur la loi tout particulièrement dans le cadre d’une procédure d’urgence. Il en a jugé ainsi dans le cadre d’un référé suspension (CE, 30 décembre 2002, Ministre de l’aménagement du territoire et de l’environnement contre Carminati, req. n°240430, Rec. CE, p. 510, AJDA 2003, p. 1065, note O. Le Bot ; un rappel a été effectué à propos de la demande de suspension de la loi du 20 novembre 2015 prorogeant l’état d’urgence : CE, 27 janvier 2016, Ligue des droits de l’homme et autres, req. n° 396220) avant de l’étendre au référé liberté (CE, ord., 9 décembre 2005, Allouache, req. n° 287777, Rec. CE, p. 562). Le juge des référés n’est pas autorisé à contrôler la compatibilité d’une disposition législative avec une loi ou une norme de droit supranational (droit international, droit européen, droit de l’Union). Mais le juge des référés du Conseil d’Etat a, aujourd’hui, étendu, de façon substantielle, l’office du juge du référé-liberté appelé à se prononcer, à titre incident, comme juge de la loi. Il a notamment affirmé le caractère opérant de la QPC en référé-liberté tout comme la possibilité de contrôler la compatibilité d’une loi avec une règle de droit de l’Union (CE, ord., 16 juin 2010, Diakité, req. n°340250, AJDA 2010, p. 1335, chron. S.-J. Lieber et D. Botteghi et p. 1663, note O. Le Bot, JCP 2010, G, n°739, note P. Cassia).

ii) Une QPC susceptible d’être soulevée en référé si la condition d’urgence est remplie

447 • La possibilité de contester une disposition législative dans le cadre d’un référé a été initié par le législateur  puisque ce dernier prévoit que la QPC est susceptible d’être soulevée « à l’occasion d’une instance devant le Conseil d’Etat », ce qui n’est pas limitatif du type de recours (article 23-5 de l’ordonnance n° 58-1067du 7 novembre 1958 (JO, 9 novembre 1958, p. 10129) portant loi organique sur le Conseil constitutionnel tel que modifié par la loi organique n°2009-1523 du 10 décembre 2009 (JO, 11 décembre 2009, p. 21379) relative à l’application de l’article 61-1 C°). Elle peut être soulevée en 1ère instance ou en appel. L’admission de la QPC en matière de référé liberté n’allait pourtant pas de soi eu égard à la différence de cette procédure avec celle de droit commun de l’art. L. 521-1 CJA. Dans le cadre de la procédure classique, la réponse apportée par le Conseil constitutionnel interviendra alors que le litige est toujours pendant devant la juridiction et la décision sera, par conséquent, utile à la résolution du litige. C’est différent dans le cadre du référé liberté dans la mesure où la réponse à la QPC ne pourra intervenir que lorsque le litige pendant devant le juge des référés a pris fin. Le délai de 48 heures qui est imparti au juge pour statuer exclut, dans ce cadre, qu’il soit sursis à statuer en attendant la décision du Conseil constitutionnel. A travers son office, le juge des référés peut transmettre ou renvoyer la QPC sans sursoir à statuer (art. 23-3 et 23-5 de l’ordonnance n°58-1067 précité). Le Conseil d’Etat a néanmoins précisé que le juge des référés, même saisi d’une QPC, est tenu par la condition de l’urgence. Le juge administratif, saisi d’une requête en référé, peut donc, en toute hypothèse, la rejeter pour défaut d’urgence (CE, 21 octobre 2010, Conférence nationale des présidents des unions régionales des médecins libéraux, req. n°343527). Faute d’urgence, ou en tout état de cause si la requête est irrecevable, il n’y a pas lieu pour le juge des référés de statuer sur la transmission ou le renvoi de la QPC (CE, ord., 19 novembre 2010, Benzoni, req. n° 344014). Le juge est même réputé avoir refusé de transmettre la QPC, même si les termes de son ordonnance ne l’indiquent pas expressément (Voir, dans le cadre d’un référé suspension, CE, 29 avril 2013, Agopian, req. n°366058). En revanche, si le rejet en vertu du tri est appuyé sur un manque manifeste de fondement de la requête, la QPC devra néanmoins être examinée comme les autres moyens de la requête (CE, 16 janvier 2015, Lehuédé, req. n° 374070).

iii) Une QPC susceptible d’être soulevée même si le litige peut prendre fin sans la réponse

448 • Il y a, néanmoins, au surplus, un problème d’articulation des 2 procédures ensuite si la condition de l’urgence et les autres conditions de recevabilité sont remplies. Le juge des référés devra statuer sans attendre la décision relative à la QPC (la durée de l’instruction de cette dernière étant de 3 mois) soit en rejetant la requête, soit en ordonnant toute mesure provisoire. Même si cela peut sembler paradoxal de mettre fin au litige sans la réponse de la QPC, cette dernière peut néanmoins avoir plus tard certains effets juridiques. Le Conseil constitutionnel peut, d’abord, dans sa réponse à la QPC, indiquer les effets dans le temps de sa décision sur le jugement qui aura été à l’origine du renvoi. Il peut, notamment fixer la date de l’abrogation ou déterminer les « conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause » (art. 62 al. 2 C°). De même, le requérant dispose également de la faculté d’introduire une nouvelle instance en cas de circonstance de droit nouvelle pour qu’il puisse être tenu compte de la décision du Conseil constitutionnel (CC, n°2009-595 DC, 3 décembre 2009, Loi organique relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution, JO, 11 décembre 2009, p. 21381, Rec. CC, p. 206, considérant n°18).

e) La possibilité pour le juge du référé liberté de mettre en avant l’exception d’inconventionnalité in abstracto et in concreto
i) Une 1ère exception admise pour le droit de l’Union : l’arrêt Diakité

449 • Outre l’exception d’inconstitutionnalité, le juge des référés peut également mettre en avant l’exception d’inconventionnalité. C’est la décision « Carminati » précitée qui avait d’abord jugé que l’office du juge du référé-suspension ne lui permettait pas de suspendre un acte administratif au motif qu’il aurait eu un doute sérieux sur la conventionalité d’une disposition législative. Si plusieurs ordonnances firent application de cette décision, cela n’empêchait pas les questions ou les interrogations quant à la solution retenue (voir, par exemple, R. Abraham, « L’application des traités internationaux et l’office du juge des référés administratifs », Mélanges Labetoulle, Paris, Dalloz, 2007, p. 1 ou T.-X. Girardot, « Le retour de la loi écran devant le juge des référés », AJDA 2006, p. 1875). Une 1ère exception a néanmoins rapidement été admise, toujours dans le cadre d’un référé suspension, le juge acceptant de juger de la compatibilité d’une loi avec une disposition conventionnelle dans le cas où la décision d’un juge saisi au principal ou à titre préjudiciel aurait déjà écarté la loi pour le motif d’inconventionnalité invoqué (Cf. TA Lyon, ord., 23 mai 2003, Jacques Murzeau, AJDA 2003, p. 1786, note J.-P. Markus ou CE, 21 octobre 2005, Association Aides, req. n° 285577, AJDA 2006, p. 944, note H. Rihal). Puis une 2nde exception a vu le jour. Invité par le Conseil constitutionnel (CC, n°2010-605 DC, 12 mai 2010, Loi relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, JO, 13 mai 2010, p. 8897, Rec. CC, p. 78, cons. n°14), le Conseil d’Etat s’est résolu, à modifier sa position s’agissant du droit de l’Union (CE, 16 juin 2010, Diakité, req. n°340250, précité). Plusieurs considérations plaidaient en ce sens et notamment le fait que le juge administratif ne pouvait tirer toute une série de conséquences de la supériorité des traités dans l’ordre juridique interne sans forcément impliquer le juge des référés. Le contrôle du juge de l’urgence était néanmoins limité au seul droit de l’Union qui bénéficiait ainsi d’un traitement préférentiel, la référence à la ConvEDH n’étant, notamment, pas permise.

ii) Une 2nde exception admise pour le droit de la ConvEDH : les arrêts Lambert et Domenjoud

450 • A l’origine, la jurisprudence « Carminati », fondée sur la pratique traditionnelle du contrôle objectif de norme à norme (et imprégnée à ce titre de l’écran législatif), ne pouvait que mal s’articuler avec l’idée du contrôle in concreto propre à la ConvEDH, qui conduit à rechercher, non pas si l’un des textes (législatif ou réglementaire) appliqué est incompatible avec la ConvEDH, mais si la décision finale porte une atteinte prohibée à un droit garanti par la Convention, quel que soit le niveau de la norme à laquelle cette atteinte est imputable. Cela n’a pas empêché le Conseil d’Etat de contourner d’abord cette jurisprudence chaque fois que l’affaire soulevait des enjeux importants. La préoccupation pour le juge des référés libertés de ne pas laisser sans sanction la méconnaissance manifeste des droits proclamés par la Convention militait en ce sens. C’est dans une affaire particulière et dramatique où la vie humaine était en jeu, l’affaire « Lambert » (CE, 24 juin 2014, Lambert (I), req. n° 375081, Rec. CE, p. 32, concl. R. Keller, AJDA 2014, p. 1484, chron. A. Bretonneau et J. Lessi et p. 1669, note D. Truchet, RFDA 2014, concl. R. Keller), que le juge de l’urgence a, purement et simplement, compte tenu du caractère exceptionnel des enjeux, décidé d’ignorer l’interdiction de connaître, en référé, du moyen d’incompatibilité de la loi avec les stipulations de la ConvEDH, plus précisément les articles 2 ConvEDH (droit à la vie) et 8 ConvEDH (droit au respect de la vie privée et familiale). Le juge allant même plus loin qu’à travers l’ordonnance « Diakité » en ne reprenant pas le critère de la « méconnaissance manifeste » des dispositions, critère commandé par l’objet même du contrôle exercé dans le cadre du référé liberté mais critère restrictif qui faisait que l’argument tiré de l’exception d’inconventionnalité n’avait pratiquement que peu de chance d’être reçu par le juge de l’urgence. L’atteinte au droit à la vie a de tels effets que le juge ne saurait se contenter de s’assurer d’une méconnaissance manifeste. La dérogation à la jurisprudence « Carminati » s’est étendue à d’autres dispositions conventionnelles à l’occasion du contrôle indirect de la loi du 3 avril 1955 sur l’état d’urgence, les mesures mises en place dans ce cadre étant contrôlé au regard de l’article 5 ConvEDH (droit à la liberté et à la sûreté) et de l’article 2 du protocole additionnel à la ConvEDH (liberté d’aller et venir) (CE, sect., 11 décembre 2015, Cédric Domenjoud, req. n°395009, précité). Le moyen tiré de ce que la loi serait incompatible avec les stipulations européennes a été écarté au fond en étant assorti d’un « en tout état de cause » montrant l’embarras du juge (Cf. conclusions A. Bretonneau sous CE, 31 mai 2016, Gonzales Gomez, req. n° 396848 , RFDA 2016, p. 740).

iii) Une 2nde exception admise pour le droit de la ConvEDH : l’arrêt Gonzales Gomez

451 • Les exceptions se sont révélées finalement assez nombreuses pour que le principe d’exclusion de la ConvEDH soit maintenu. L’exception d’inconventionnalité a clairement été établie dans un arrêt du 31 mai 2016 Gonzales Gomez (CE, Ass., 31 mai 2016, Gonzalez Gomez, req. n° 396848, AJDA 2016, p. 1398, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, D. 2016, p. 1472, note H. Fulchiron et p. 1477, note B. Haftel, RFDA 2016, p. 740, concl. A. Bretonneau et p. 754, note P. Delvolvé, JCP 2016, G, n°864, note J.-P. Vauthier et F. Vialla). Il revient, maintenant, au juge des référés de veiller à ce qu’aucune atteinte grave et manifestement illégale ne résulte, notamment, « de l’application de dispositions législatives qui sont manifestement incompatibles avec les engagements européens ou internationaux de la France, ou dont la mise en œuvre entraînerait des conséquences manifestement contraires aux exigences nées de ces engagements » (cons. n°2). L’arrêt d’espèce concernait le jugement de la légalité du refus opposé par l’administration à la demande d’une veuve de faire transférer de France en Espagne les gamètes de son mari, récemment et brusquement décédé d’une maladie grave, afin d’y bénéficier d’une fécondation in vitro. L’application de la loi française conduisait donc à refuser l’exportation demandée. Le Conseil d’Etat, saisi en appel d’une demande de référé-liberté, a cependant, suspendu ce refus et enjoint de procéder à l’exportation des gamètes vers l’Espagne en opérant un contrôle de conventionnalité in concreto de la loi au regard de l’art. 8 ConvEDH (droit au respect de la vie privée et familiale).

iv) La généralisation du contrôle de conventionnalité in concreto

452 • Si le contrôle de conventionnalité est ainsi établi, il faut aussi relever, comme peut le noter Pierre Delvolvé, que « cette petite révolution, tant attendue, est éclipsée par un autre aspect de la décision, structurant pour tout le droit et le contentieux administratif : la généralisation du contrôle de conventionalité in concreto » » (P. Delvolvé, « Droits subjectifs contre interdit législatif », note sous CE, Ass., 31 mai 2016, Gonzales Gomez, req. n°396848, RFDA 2016, p. 754). En effet, dans son considérant de principe, le Conseil d’Etat distingue, « plus clairement qu’il ne l’avait jamais fait auparavant, un étage in abstracto de contrôle de conventionnalité et un étage in concreto » (Ibid.). La loi peut donc être écartée soit parce qu’elle est par elle-même incompatible avec le traité, le contrôle du juge portant sur le contenu de la loi (in abstracto) soit parce que, tout en étant compatible dans la généralité des cas, son application au cas d’espèce n’est pas compatible avec les exigences conventionnelles, le contrôle du juge portant alors sur l’application de la loi aux circonstances particulières (in concreto). On peut ainsi dire que « le contrôle de validité de la loi a donc été complété par un contrôle de son application valide », (X. Dupré de Boulois, « Contrôle de conventionnalité in concreto : à quoi joue le Conseil d’Etat ? », RDLF 2018, chron. n°4). Un tel contrôle n’avait jusque-là été réservé qu’à quelques hypothèses particulières notamment dans les cas où l’administration dispose d’un large pouvoir discrétionnaire ou d’importantes prérogatives (ex : cas du pouvoir de l’administration d’affectation unilatéral des fonctionnaires et militaires où le juge vérifie, pour les militaires et policiers, qu’une affectation particulière n’est pas contraire au droit à la vie privée et familiale : CE, 10 décembre 2003, Bouley, req. n° 235640, ou CE, 2 février 2011, Ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration contre Le Rasle, req. n°326768). Ce contrôle implique dorénavant clairement un contrôle de proportionnalité de 2nd rang, pour vérifier que l’application d’une exigence légale ou réglementaire ne porte pas au cas d’espèce une atteinte disproportionnée à un droit protégé par la Convention.

v) La généralisation d’un contrôle de proportionnalité de 2nd rang

453 • La question de la concrétisation de ce contrôle in concreto est d’autant plus primordiale dans la mesure où elle fait l’objet d’un débat très important chez les privatistes (Cf. Par ex., P. Jestaz, J.-P. Marguénaud et C. Jamin, « Révolution tranquille à la Cour de cassation », D. 2014, p. 2061, F. Chénedé, « Contre-révolution tranquille à la Cour de cassation ? », D. 2016, p. 796, P. Puig, « L’excès de proportionnalité », RTD civ. 2016, p. 70, H. Fulchiron, « Flexibilité de la règle, souplesse du droit. À propos du contrôle de proportionnalité », D. 2016, p. 1376) depuis que la Cour de cassation a procédé à un contrôle de proportionnalité même nature sur le modèle du juge européen (Cass, 1ère civ., 4 décembre 2013, n° pourvoi : 12-26.066, D. 2014, p. 179, obs. C. de la Cour, note F. Chénedé, p. 1342, obs. J.-J. Lemouland et D. Vigneau, RTDCiv. 2014, p. 88, obs. J. Hauser et p. 307, obs. J.-P. Marguénaud). Ce contrôle ayant depuis lors été appliqué à de nombreuses reprises, à propos, par exemple, du cas d’une condamantion pour contrefaçon qui ne serait pas conforme à la recherche d’un juste équilibre entre le droit d’auteur et la liberté d’expression artistique de celui qui a réutilisé l’oeuvre (Cass., 1ère civ., 15 mai 2015, n° pourvoi : 13-7.391, D.2015, p. 1672, note A. Bensamoun et P. Sirinelli, RTDCom 2015, p. 509, obs. F. Pollaud-Dulian), d’une contestation de paternité et l’absence d’appréciation in concreto du juste équilibre dans la mise en oeuvre de l’article 8 de la ConvEDH entre le droit revendiqué par l’enfant et les intérêts des héritiers du père supposé(Cass., 1ère civ., 10 juin 2015, n° pourvoi : 14-20.790, D. 2015, p. 2365, note H. Fulchiron, RTDCiv. 2015, p. 596, obs. J. Hauser). Au final, il faut noter que ce nouveau contrôle de conventionnalité en référé liberté s’exercera, a fortiori, à travers le contrôle opéré par les juges du fond mais aussi à propos de toute disposition législative ou réglementaire ou à propos de tout engagement européen ou international des autorités françaises.

vi) Un contrôle in concreto finalement limité ou, tout le moins, cantonné

454 • Le contrôle de conventionalité in concreto permet au juge d’aller à l’encontre de la disposition législative ou de juger contra legem en faisant des circonstances de l’espèce des éléments quasi normatifs dans le raisonnement mené. La loi peut désormais être écartée dans une situation particulière en tout temps ou tout lieu au motif qu’elle aurait des effets excessivement indésirables.  Cela a suscité beaucoup de polémiques du côté des privatistes (qui ont pu parler, par ex., de « retour du gouvernement des juges ou de l’équité des parlements d’Ancien Régime », d’ « insécurité juridique » ou encore de « porte ouverte à la fraude à la loi » : V. Vigneau, « Libres propos d’un juge sur le contrôle de proportionnalité », D. 2017, p. 123 et suiv. ; P.-Y. Gautier, « Retour au Moyen-Âge : le droit moral dévasté par la balance des intérêts », Dalloz IP/IT 2019, p. 101 et suiv. ; F. Chénedé, « Contre-révolution tranquille à la Cour de cassation ? », D. 2016, p. 796 et suiv.) comme du côté des publicistes (O. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, « Contrôle de conventionnalité : in concreto veritas ? », AJDA 2016, p. 1398 et suiv.) qui évoquent les questions relatives à la place et à l’office du juge : la subjectivité du juge, la sécurité juridique et les rapports entre le juge et le Parlement ou P. Delvolvé, « Droits subjectifs contre interdit législatif », RFDA 2016, p. 754 et suiv. où, pour l’auteur,  qui évoque la confusion entre pouvoir législatif et pouvoir juridictionnel, « ce n’est pas seulement un changement d’analyse, de méthode, de mode de raisonnement ; c’est un changement de modèle ou, pour le dire en terme apparemment savant, un changement de « paradigme » ».). On ne sait pas si les critiques ont été entendues mais des décisions plus récentes se sont inscrits à rebours de l’évolution alors entamé depuis 2014 et 2016 que ce soit du côté de la Cour de cassation (Cass., 3ème civ., 21 décembre 2017, n° de pourvoi : 16-25.406, FS-P+B+I (rejet), RDI 2018, p. 215, obs. E. Gavin-Millan-Oosterlynck, ; Cass., 1ère civ., 7 novembre 2018, FS-P+B+I, n° de pourvoi : 17-25.938, AJ fam. 2018, p. 685 et suiv., obs. J. Houssier, Dalloz actualité 2018, 21 novembre 2018, obs. L. Gareil, D. 2019, p. 505 et suiv., obs. M. Douchy-Oudot, RTDCiv. 2019, p. 87 et suiv., obs. A.-M. Leroyer) ou du Conseil d’Etat (CE, 4 décembre 2017, Société Endered, req. n°379685 ou CE, 28 décembre 2017, Molenat, req. n°396571). L’idée générale étant, au-delà des cas différents, de poser des bornes au contrôle. Les deux hautes juridictions « mettent certaines règles « hors contrôle » » en se livrant « à une entreprise de « cantonnement » » pour « éviter une remise en cause systématique de la règle de droit au motif que son application in casu porterait une atteinte disproportionnée aux droits et libertés » (H. Fulchiron, « Cadrer le contrôle de proportionnalité : des règles « hors contrôle » ? », D. 2018, p. 467 et suiv.).

vii) Un contrôle in concreto qui ne serait pas exercé dans tous les cas

455 • Pour certains, il ressortirait de cette jurisprudence que certains interdits législatifs apparaissent plus importants que d’autres, c’est-à-dire qu’il serait impossible de les écarter ponctuellement (X. Dupré de Boulois, « Contrôle de conventionnalité in concreto : à quoi joue le Conseil d’Etat ? », RDLF 2018, chron. n°4) Si l’on prend l’exemple de la jurisprudence « Gonzalez Gomez », le Conseil d’Etat a confirmé la solution visant, en présence de circonstances particulières, à écarter, ponctuellement, la prohibition de l’insémination post mortem (voir CE, 4 décembre 2018, Mme C. D., épouse B., req. n°425446, AJ fam. 2019, p. 64, obs. A. Dionisi-Peyrusse ; CE, 13 juin 2018, Mme B. A. contre APHP, req. n°421333 ; CAA Versailles, 5 mars 2018, Agence de la biomédecine, req. n°17VE00824). Par contre, pour rester dans le même domaine, il n’a pas écarté, même ponctuellement en raison de circonstances particulières, le principe de l’anonymat du don de gamètes (Cf. CE, 28 décembre 2017, Molenatprécité). La question de l’interdiction de l’assistance médicale à la procréation (AMP) aux femmes seules ou en couple qui ne répondrait pas à une infertilité pathologique fait aussi partie de ces interdits législatifs qui pourraient être écarté ponctuellement par le juge. La CourEDH a préféré laisser les institutions françaises trancher la question (Cf. CourEDH, 8 février 2018, Charron et Merle-Montet, req. n°22612/15 ; CourEDH, 6 février 2018, Bonnaud et Lecoq contre France, req. n°6190/11) : voir J.-P. Marguénaud, « Le refus de la procréation médicalement assistée à un couple d’homosexuelles mariées ou la subsidiarité otage de la proportionnalité », RTDCiv. 2018, p. 349 et suiv. ou H. Fulchiron, « Le contrôle de proportionnalité au service du principe de subsidiarité », D. 2018, p. 649 et suiv.) Or, le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 28 septembre 2018 (CE, 28 septembre 2018, Mme A. C. et Mme D. B. contre Centre d’assistance médicale à la procréation du CHU de Toulouse, req. n°421899) a refusé de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de savoir si l’impossibilité d’accéder à l’AMP pour un couple de femmes est conforme au principe d’égalité, la question n’étant, selon lui,  ni nouvelle ni sérieuse. La décision ainsi prise est ainsi un signe du nouveau cadrage ainsi opéré ou des limites pesant sur le nouveau contrôle alors que certains militeraient pour une prise de position plus audacieuse en la matière eu égard à la jurisprudence «Gonzalez Gomez» (par ex., T. Escach-Dubourg, « Pas encore d’AMP pour toutes ! », AJDA 2019, p. 533 et suiv. ou H. Fulchiron, « Le contrôle de proportionnalité au service du principe de subsidiarité », précité).

f) Le dépassement, au final, des limites légales à l’action du juge dans le cadre du référé liberté
i) Un juge des référés qui se permet d’aller plus vite que le juge du fond

456 • Plusieurs décisions récentes du juge vont dans le sens de cette volonté de dépasser les limites légales posées à l’action du juge dans le cadre du référé liberté. On a vu que, dans le sens contraire de la volonté certaine du législateur et de la lettre de l’article L. 521-2 CJA, le juge du référé liberté s’était déclaré compétent pour obliger l’administration à mettre fin à une atteinte grave et manifestement illégale au droit de propriété même si cette atteinte avait le caractère de voie de fait (Cf. CE, ord., 23 janv. 2013, Commune de Chirongui, req. n°365262 précité et TC, 17 juin 2013, Bergoend contre Société ERDF Annecy Leman,req. n°3911 précité). On a vu, également, que le juge de l’urgence est allé au-delà du principe visant à ce qu’il ne statue que par des mesures provisoires, il peut, en effet, fixer des mesures définitives lorsqu’aucune mesure provisoire n’est susceptible de sauvegarder l’exercice effectif de la liberté fondamentale en cause (CE, 31 mai 2007, Syndicat CFDT Interco 28, req. n°298293 précité). Il a également été amené, pour être le plus rapide possible, à mettre en avant le fait que le délai de 48 heures, pas plus qu’il ne constitue un délai butoir prescrit à peine de dessaisissement, n’a pas le caractère d’un délai plancher qu’il conviendrait pour le juge d’épuiser avant de se prononcer. Les ordonnances rendues dans l’affaire « Dieudonné » (CE, ord., 9 janvier 2014, Ministre de l’intérieur contre Société Les Productions de la Plume, req. n°374508 puis CE, 10 janvier 2014, req. n°374528 et CE, 11 janvier 2014, Sarl les Productions de la Plume et Dieudonné M’Bala M’Bala, req. n°374552, AJDA 2014, p. 129, tribune B. Seiller, p. 473, tribune C. Broyelle, note J. Petit, AJCT 2014, p. 157, obs. G. Le Chatelier, D. 2014, obs. J.-M. Pastor, RFDA 2014, p. 87, note O. Gohin) ont ainsi, malgré les critiques émises à son encontre (il n’y avait pas, dans les deux cas d’espèce, remise en cause de la liberté d’expression de manière générale mais bel et bien une interdiction de propos qui étaient pénalement répréhensibles et, plus précisément, comme le rappelle l ’ordonnance n° 374508, ceux faisant  « l’apologie des discriminations, persécutions et exterminations perpétrées au cours de la Seconde Guerre mondiale »), été vues comme une remise en cause des déboires temporels malheureux de l’affaire Benjamin (CE, Sec., 19 mai 1933, Sieur Benjamin et Syndicat d’initiative de Nevers, req. n°17413, Rec. CE, p. 541, D. 1933, 3, 354, concl. Michel) où le juge de l’excès de pouvoir, avait été incapable d’éviter la tenue des conférences (il a fallu attendre 1936 pour que M. Benjamin obtienne une contrepartie quant au fait que le juge de l’excès de pouvoir n’avait pas pu éviter la tenue des conférences : CE, sect., 3 avril 1936, Syndicat d’initiative de Nevers et Benjamin, Rec. CE, p. 453).

ii) Un juge des référés qui se permet d’agir plus efficacement que le juge du fond

457 • Le juge des référés n’a pas seulement fait en sorte d’agir plus vite, il a également développé son office pour être plus efficace. Il s’est ainsi reconnu le pouvoir de suspendre l’exécution de la décision attaquée à titre conservatoire, avant de statuer sur le référé, revenant ainsi à donner un effet suspensif à sa saisine ce qui a notamment été le cas dans l’affaire Lambert (CE, Ass., 14 février 2014, Lambert, req. n° 375081, n° 375090 et n° 375091, AJDA 2014, p. 790, chron. A. Bretonneau et J. Lessi, p. 1225, tribune P. Cassia, RFDA 2014, p. 255, concl. R. Keller et CE, Ass., 24 juin 2014, Lambert, req. n°375081, RFDA 2014, p. 657, concl. R. Keller, et p. 702, note P. Delvolvé, AJDA 2014, p. 1669, note D. Truchet, D. 2014, p. 1856, note D. Vigneau, RDP 2015, p. 41, note M. Canedo-Paris, JCP 2014, A, n°2283, note G. Koerckel, n°2284, comm. H. Pauliat, D. Bordessoule, S. Tragneux-Signol et S. Moreau). Le Conseil d’Etat a aussi fixé, dans le cadre du contentieux des mesures relatives à l’état d’urgence, le principe de la présomption d’urgence lorsqu’il faut statuer sur une demande de suspension, en référé liberté, d’une mesure d’assignation à résidence (CE, sect., 11 décembre 2015, Domenjoud, req. n°395009, précité). Cette présomption d’urgence fait en sorte d’ouvrir ainsi largement l’audience du juge du référé liberté. Le juge a enfin été amené à effectuer un plein contrôle de légalité sur la décision portant atteinte à la liberté. Par principe, seule une illégalité manifeste l’autorise à agir. Le juge ne se limite pas, par conséquent, à un contrôle de l’erreur manifeste. Il a fonctionné de la sorte dans son contrôle de la décision d’arrêt de traitement dans l’affaire Lambert (CE, Ass., 14 février 2014, Lambert, req. n° 375081, n° 375090 et n° 375091 précité et CE, Ass., 24 juin 2014, Lambert, req. n°375081 précité) mais aussi, dans le cadre des mesures prise à travers l’état d’urgence, pour caractériser les comportements constituant une menace pour la sécurité et l’ordre public (CE, 23 décembre 2015, M. B., req. n°395229 ; CE, ord., 18 janvier 2016, M. B., req. n°396066 ; CE, ord., 29 janvier 2016, M. B. A., req. n°396280).

iii) Les dangers de l’extension toujours généralisée des pouvoirs du juge du référé liberté : l’exemple de la crise sanitaire

457-1 • La quasi-totalité des requérants ont choisi le référé liberté pour mettre en cause les mesures sanitaires prises durant la crise accentuant encore ce doublement du juge du fond au profit du juge de l’urgence. Les requérants ont prioritisé le référé liberté dans la mesure où l’objet de leur requête ne se limitait pas à faire cesser une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale mais visait aussi à enjoindre à l’autorité administrative d’agir dans un sens déterminé.

On a pu relever, par ailleurs, et contrairement aux apparences, le dépassement de l’office classique du juge sur cette question notamment jusqu’à participer à l’exercice du pouvoir normatif normalement dévolu aux autorités publiques et fixer lui-même la mesure de police en ordonnant le respect de la norme juridique ou sa clarification voire sa modification. Si certains ont mis en avant cette avancée toujours en continu des pouvoirs du juge (X. Dupré de Boulois, « On nous change… notre référé-liberté », op. cit.) voire souligner que le juge pourrait encore « mieux exploiter certaines potentialités de cette procédure » (O. Le Bot, « Le référé-liberté est-il victime de son succès ? », RFDA 2021, p. 657 et suiv.), d’autres ont déploré « la surévaluation préoccupante du rôle du juge » (P. Caille, « Ce que la crise sanitaire nous (re)dit du référé-liberté », Civitas Europa 2020, n°45, p. 149 et suiv.) ou « le spectre du gouvernement des juges » (C. Broyelle, « Regard sur le référé-liberté à l’occasion de la crise sanitaire », AJDA 2020, p. 1355 et suiv.). Le juge est, en effet, peut-être allé au-delà de sa fonction dévolue par le code de justice administrative « au point que le prétoire du juge du référé a pu apparaître comme le dernier forum d’une vie démocratique suspendue par l’épidémie » (B. Stirn, « Le référé et le virus », op. cit.) et « aux yeux de nombreux pourfendeurs de l’action gouvernementale, comme l’ultime espoir de sa censure » (P. Caille, op. cit.). Il ne serait forcément pas opportun pour lui de jouer un rôle politique au détriment des représentants du peuple, seul compte le rappel des limites à ne pas dépasser par les autorités publiques. S’« il a été dit du référé-liberté qu’il serait parvenu à l’« âge adulte » […], il ne faudrait pas qu’il fasse, plus vite que prévu, sa crise de la quarantaine » (P. Caille, op. cit.).

2. Le dépassement des limites légales pour adapter l’office du juge à une optique plus subjective de protection des droits et libertés

458 • Il faut évoquer ici tout un ensemble plus général de pouvoirs que le juge administratif s’est autorisé à exercer dans l’optique d’un contrôle plus effectif des droits et libertés. Le juge s’est ainsi attaché à contrôler, de manière croissante, la sphère de discrétionnarité de l’administration, notamment en développant son pouvoir d’injonction, en réduisant la théorie des actes de gouvernement ou celle des mesures d’ordre intérieur ou encore en développant son contrôle normal au détriment de celui de l’erreur manifeste d’appréciation ou de disproportion manifeste dans tous les contentieux relatifs aux droits et libertés.

a) Du pouvoir d’injonction légale au pouvoir d’injonction jurisprudentielle
i) Des conditions de recevabilité des demandes d’astreintes de plus en plus larges

459 • Dans le cadre du recours pour excès de pouvoir, la loi du 16 juillet 1980 (loi n°80-539 du 16 juillet 1980 (JO, 17 juillet 1980, p. 1799) relative aux astreintes prononcées en matière administrative et à l’exécution des jugements par les personnes morales de droit public)a établi un mécanisme original permettant au Conseil d’Etat, et depuis la loi du 8 février 1995 (loi n°95-125 du 8 février 1995 (JO, 9 février 1995, p. 2175) relative à l’organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative), à toutes les juridictions administratives, d’émettre, d’office ou sur demande des bénéficiaires de la décision  une astreinte pour l’exécution de la décision (art. L. 911-4 et L.911-5 CJA). Ce sont les voies d’exécution de droit privé qui sont transposées dans le contentieux administratif. Elles ont d’abord eu droit à une interprétation restrictive puisque le Conseil d’Etat a, au début, pas du tout retenules demandes d’astreintes formulées si le refus d’exécution n’avait pas été lui-même attaqué dans le délai de recours pour excès de pouvoir (CE, 2 juillet 1982, Rouzaud, req. n°35367, Rec. CE, p. 264 ou CE, sect., 5 mai 1986, David, req. n°63851, Rec. CE, p. 130). Mais l’augmentation importante des demandes a abouti à celles des astreintes prononcées et liquidées, y compris contre l’Etat (CE, 11 mars 1994, Soulat, req. 144575, Rec. CE, p. 115 ou CE, 28 avril 2006, Dellas, req. n°242727), ce qui a débouché sur une meilleure exécution des décisions de justice par l’administration. Le juge administratif n’a pas arrêté depuis d’élargir les conditions de recevabilité des demandes d’astreinte. Il a admis, par exemple, la demande d’un requérant non partie au litige initial mais ayant intérêt à l’exécution du jugement (CE, sect., 7 janvier 1994, Ledoux, req. n°120263, Rec. CE, p. 11) ou accepté de prononcer plusieurs astreintes pour obtenir l’exécution d’une même décision (CE, 28 décembre 2005, Union syndicale des magistrats administratifs, req. n° 274527).

ii) Un pouvoir d’injonction qui aboutit, au final, à protéger les droits et libertés

460 • Dans le même sens, la reconnaissance du pouvoir d’injonction par la loi du 8 février 1995 précitée n’est pas juste établie pour protéger les droits et libertés mais, en lui-même, ce pouvoir d’injonction fait partie du droit à l’exécution des décisions de justice qui est un aspect du droit à un recours effectif d’où le lien avec les droits et libertés, la chose jugée et les mesures qui l’accompagnent amenant à concrétiser alors un droit ou une liberté. On peut citer, à titre d’illustration, l’annulation du refus de prendre les mesures positives nécessaires à la réalisation de droits créances qui pourra déboucher sur l’injonction de prendre ces mesures. Cette nouvelle possibilité dans l’office du juge a amené, ce dernier, dans le contentieux de l’annulation, à faire évoluer quelque peu sa charge dans un sens plus direct vers le respect des droits et libertés. Par le biais des injonctions « préventives », le juge peut, lorsqu’il annule une décision, ordonner à l’administration de prendre une mesure d’exécution dans un sens déterminé (art. L. 911-1 CJA) ou de procéder à une nouvelle instruction de la demande litigieuse (art. L. 911-2 CJA). Il fait ainsi en sorte de confier une portée utile à ces décisions en prévenant tout risque d’inertie administrative. Il a, par exemple, déterminé que l’administration ne pouvait plus retirer une décision illégale mais non annulée, au nom du principe de sécurité juridique (CE, Ass., 26 octobre 2001, Ternon, Rec. CE, p. 497). Ce même principe lui permettant, aussi, d’imposer à l’administration l’édiction de mesures provisoires dans les actes réglementaires(CE, Ass., 24 mars 2006, Société KPMG, req. n°288460, Rec. CE, p. 154, AJDA 2006, p. 1028, chron. C. Landais et F. Lenica, RFDA 2006, p. 463, concl. Y. Aguila, BJCP 2006, p. 173, concl. Y. Aguila) dans certaines limites liées à sa compétence mais avec effet immédiat sur les situations en cours (CE, sect., 13 décembre 2006, Lacroix, req. n°287845). Il va aussi jusqu’à déterminer la date d’effet dans le temps de ses décisions d’annulation en précisant à l’administration les solutions envisageables (CE, 11 janvier 2006, Association des familles des victimes de saturnisme, req. n°267251, Rec. CE, p. 11) voire moduler dans le temps les conséquences de ses arrêts en faisant annuler un acte seulement pour l’avenir pour éviter « les conséquences manifestement excessives de la rétroactivité […] pour les divers intérêts publics et privés en présence » (CE, Ass., 11 mai 2004, Association AC !, req. n°255886, Rec. CE, p. 197 ; CE, sect., 27 oct. 2006, Société Techna, req. n°260767).

iii) Un juge administratif qui se reconnait le pouvoir de prononcer des injonctions d’office

461 • On a donné au juge administratif tous les moyens pour qu’il soit l’égal du juge judicaire et pour qu’il puisse exercer complètement son office mais, au-delà des possibilités légales nouvellement données, ce dernier a aussi fait évoluer son office pour une protection plus effective des droits et libertés. Alors que le législateur confiait, en 1995, l’initiative du pouvoir d’injonction au justiciable et subordonnait sa mise en œuvre à une bonne formulation de sa demande puisque le justiciable doit indiquer, dans sa demande, les mesures d’exécution qu’il entend obtenir (art. L. 911-1 CJA), le juge se reconnaît désormais le pouvoir de prononcer d’office des injonctions dont il détermine le contenu en dépassant ainsi les limites légales des moyens qui lui ont été attribuées. Cet exercice d’office du pouvoir d’injonction constitue, par exemple, l’objet même du recours DALO (loi n°2007-290 du 5 mars 2007(JO, 6 mars 2007, p.4190) instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale). Il les prononce, dans certains cas, d’office sans forcément les nommer pour assurer l’exécution concrète de ses décisions de justice. La pratique a été inaugurée dans les arrêts Société Toulouse football club(CE, sect., 25 juin 2001, Société Toulouse Football Club, req. n°234363, Rec. CE, p. 281, AJDA 2001, p.887, note G. Simon, RFDA 2003, p.47, étude J.-M. Duval), Vassilikiotis (CE, Ass., 29 juin 2001, Vassilikiotis, req. n°213229, Rec. CE, p.303, concl. Lamy, AJDA 2001, p.1046, chron. M. Guyomar et P. Collin) et Titran (CE, 27 juillet 2001, Titran, req. n°222509, Rec. CE, p. 411, AJDA 2001, p.1046, chron. M. Guyomar et P. Collin). Le législateur a, aujourd’hui, reconnu et validé la pratique (loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 (JO, 24 mars 2019, texte n°2) de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice).

iv) Des injonctions qui se multiplient au cœur des trois référés d’urgence

462 • Le phénomène d’injonction jurisprudentielle existe sur une échelle limitée dans le cadre du recours pour excès de pouvoir mais de telles injonctions se sont multipliées au cœur des trois référés-urgence. L’injonction, à côté de la suspension d’un acte administratif, constitue l’objet essentiel des saisines du juge des référés liberté, suspension et mesures utiles. Par exemple, pour donner toute son efficacité à la suspension, le juge du référé suspension, quand il suspend une décision de rejet, s’est reconnu le pouvoir d’assortir sa décision de l’indication des obligations en découlant pour l’administration, et cela de sa propre initiative, ce qui revient à prononcer une injonction d’office (Voir, par ex., CE, 27 juillet 2001, Vedel, req. n°232603, Rec. CE, p. 416). Le référé-mesures utilesconstitue certainement, au regard de son domaine extrêmement large et des conditions exigées pour sa mise en œuvre, la voie d’exécution de principe devant le juge administratif mais c’est sur le référé liberté, comme on a pu le voir par ailleurs, que reposent les potentialités les plus importantes. Le juge du référé liberté n’est pas ainsi lié par la demande et peut enjoindre des mesures non sollicitées dès lors qu’elles sont nécessaires pour la sauvegarde d’une liberté fondamentale (CE, 30 mars 2007, Ville de Lyon, req. n° 304053, Ville de Lyon, Rec. CE, tables, p. 1013, AJDA 2007, p. 1242, note S. Damarey). De plus, la reconnaissance de ce qui relève d’une liberté fondamentale est, au surplus et comme déjà vu, admise de façon très large (Cf. P. Wachsmann, « L’atteinte grave à une liberté fondamentale », RFDA 2007, p. 58), le justiciable pouvant trouver ainsi auprès du juge une voie de droit permettant de contraindre les autorités administratives à adopter des mesures d’exécution (CE, 5 septembre 2011, Ministre de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration contre Medina Bermudez, req. n° 351710, Rec. CE, tables, p. 1081, AJDA 2012, p. 115, note K.-H. Voizard à propos d’une injonction au préfet de fournir à des demandeurs d’asile, dans les 48 heures, un lieu d’hébergement). A noter aussi que les injonctions jurisprudentielles, au regard de leur contenu, vont aussi au-delà de la simple indication des mesures qu’implique nécessairement la décision du juge et peuvent aussi assurer la concrétisation du droit.

v) Des motifs qui indiquent et ordonnent l’exécution des mesures nécessaires

463 • Ce n’est certes pas la 1ère fois que le juge de la légalité prend l’initiative de préciser les obligations découlant pour l’administration de l’annulation prononcée (il l’a fait dans l’arrêt CE, 26 décembre 1925, Rodière, req. n°88369, Rec. CE, p. 1065, S.1925.3.49, note M. Hauriou, RDP 1926, p. 32 concl. J. Cahen-Salvador) mais le juge se sert aussi, à propos des injonctions jurisprudentielles, de la technique des motifs, soutien nécessaire de sa décision, pour indiquer et ordonner, dans son dispositif, l’exécution des mesures qu’implique la règle de droit méconnue par l’administration. Cette technique marque clairement la volonté du juge d’ordonner à l’administration un comportement précis et déroge, en conséquence, singulièrement à l’interdiction de statuer ultra petita. Le juge a, par exemple, annulé une note du ministère de l’intérieur invitant les préfets à mettre en œuvre un dispositif transitoire de traitement des demandes d’asile présentées par des étrangers placés en rétention administrative en vue de leur éloignement dans l’attente de l’intervention d’une loi visant à mettre en conformité les procédures applicables aux demandeurs d’asile avec les exigences du droit européen (CE, 30 juillet 2014, La CIMADE, req. n°375430, AJDA 2014, p. 1630, obs. D. Poupeau). Dans l’article 1er du dispositif de sa décision, le juge rappelle que l’annulation s’accompagne, pour l’autorité administrative, des obligations mentionnées au point 20 de la décision. L’annulation pour excès de pouvoir de la note ministérielle ayant pour conséquence l’obligation pour l’autorité administrative, dans l’attente, de procéder au cas par cas à un examen préalable des demandes d’asile présentées par des personnes placées en rétention administrative afin de déterminer la procédure d’instruction qu’elles appellent ainsi que la nécessité du maintien en rétention de ces personnes.

vi) Des injonctions jurisprudentielles qui portent, dorénavant, plus directement, sur l’exécution de la règle de droit

464 • Enfin, et pour terminer, les injonctions jurisprudentielles ne sont plus le simple accessoire de la décision de justice (contrairement aux injonctions légales comme mentionné aux articles L. 911-1 et suivants du CJA) et portent, plus largement et plus directement, sur l’exécution de la règle de droit. Si l’exécution des décisions a longtemps relevé d’une initiative ou d’une prérogative de l’administration, le juge administratif s’est, aujourd’hui, approprié cette exécution dans l’optique d’une meilleure protection. Dans l’économie générale des dispositions du CJA, l’exécution par voie judiciaire n’a qu’un caractère subsidiairepuisque le juge ne s’occupe de l’exécution que s’il a fait droit à la demande principale (le rejet des conclusions principales entraînant automatiquement celui des conclusions à fin d’injonction) et que si toutes les conditions posées par le CJA sont remplies. Les injonctions jurisprudentielles fonctionnent, elles, comme une véritable voie d’exécution dont l’unique but est de contraindre une partie à s’exécuter. Il y a ainsi des conséquences autres dans la procédure de mise en œuvre comme, par exemple, l’idée selon laquelle l’injonction n’est pas conditionnée par la contestation, par le requérant, d’une décision administrative (a contrario pour les injonctions légales : CE, 20 juin 2012, Ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration contre Ketsopa, req. n° 346073, Rec. CE, tables, p. 797, AJDA 2012, p. 1259). A noter, pour terminer, que les injonctions se sont multipliées sur cette question pendant la crise sanitaire, on rappelle, comme exposé précédemment, que le juge est allé jusqu’à participer à l’exercice du pouvoir normatif normalement dévolu aux autorités publiques et fixer lui-même la mesure de police en ordonnant le respect de la norme juridique ou sa clarification voire sa modification.

b) La réduction de la théorie des actes de gouvernement
i) Des actes qui échappent normalement à tout contrôle juridictionnel

465 • Malgré le développement du contrôle du juge sur tous les actes pris par l’Etat, la théorie des actes de gouvernementreste encore aujourd’hui toujours bien vivante (en témoigne un des derniers arrêts en date : CE, 23 avril 2019, Mme B. C. et autres contre Ministre de l’Europe et des affaires étrangères, req. n°429668 429669, 429674 et 429701 où le juge des référés du Conseil d’Etat refuse d’ordonner le rapatriement de ressortissantes françaises et de leurs enfants retenus en Syrie dans la mesure où cela obligeait la tenue de négociations avec des autorités étrangères ou une intervention sur un territoire étranger qui ne sont pas détachables de la conduite des relations internationales de la France et un juge ne peut connaître des actes de gouvernement). Si de tels actes ont toujours été difficiles à cerner ou à définir, le juge procédant en la matière davantage par affirmation que par démonstration, il y a néanmoins une constante dans la répartition en 2 grandes catégories de ces actes. Il y a, d’un côté, les actes relatifs aux rapports entre les pouvoirs publics constitutionnels et de l’autre côté, les actes relatifs à la conduite des relations diplomatiques ou internationales de la France. Ces actes, de par leur statut, échappent à tout contrôle juridictionnel. Cette incompétence du juge étant la conséquence, selon la doctrine, soit du caractère essentiellement politique de ses actes (Cf. Par ex., P. Duez, Les actes de gouvernement, Paris, Sirey, 1935, rééd. Dalloz, 2006 et M. Viralli, « L’introuvable acte de gouvernement », RDP 1952, p. 317 ; par ex : CE, 27 mai 2019,Association française des riverains de l’aéroport de Genève, req. n°422069 à propos d’un accord relatif à la délégation consentie par la France à la Suisse pour la fourniture des services de la circulation aérienne dans une partie de l’espace aérien français, la redéfinition des modalités de concertation de cet accord constituant une décision qui n’est pas détachable de l’exercice des pouvoirs du gouvernement dans la conduite des relations diplomatiques de la France) soit de l’absence de nature administrative de ses actes même si pris par des autorités administratives (R. Chapus, « L’acte de gouvernement, monstre ou victime ? », D. 1958, 2, p. 5 et L. Favoreu, « Pour en finir avec la « théorie » des actes de gouvernement », Mélanges Pactet, Paris, Dalloz, 2003, p. 607). La justification de l’absence de contrôle pouvant résulter, dans ce 2nd cas, par la nature constitutionnelle de ces actes (E. Carpentier, « Permanence et unité de la notion d’acte de gouvernement », AJDA 2015, p. 799).

ii) Des tentatives de contrôle : la théorie de « l’acte détachable »

466 • Si cela fait longtemps que la doctrine parle de mise à mort de l’acte eu égard à l’atteinte à l’Etat de droit (Cf. P. Duez, Les actes de gouvernement, précité et M. Waline, Traité élémentaire de droit administratif, Sirey, 1951, 6ème éd.,, p. 108 qualifiant la liste de ces actes de « peau de chagrin ») et si le Conseil d’Etat a déjà intégré la nécessité de trouver un équilibre entre le droit et la politique en ayant dégagé la théorie de « l’acte détachable » (Cf., par ex. : CE, 27 juin 1924, Goldschmidt et Strauss, Rec. CE, p. 607 ; CE, 4 février 1926, Dame Caraco, D. 1927, 3, p. 1 ; CE, 28 janvier 1948, Lecanu, Rec. CE, p. 41, RDP 1948, p. 472, note M. Waline ; CE, sect., 25 septembre 1998, Mégret, Rec. CE, p. 340, RDP 1999, p. 254, concl. C. Maugüé, RFDA 1999, p. 345, note L. Baghestani-Perrey et M. Verpeaux), le débat est néanmoins quelque peu renouvelé par l’atteinte excessive que pourrait porter aujourd’hui l’injusticiabilité de ces actes aux exigences grandissantes en matière de protection des droits et libertés fondamentaux tel que consacré à la fois par le juge constitutionnel et le juge européen. La conformité de l’immunité contentieuse pourrait être contesté, dans ce cadre, par rapport tout d’abord à la Constitution ou par rapport à la ConvEDH.

iii) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la Constitution : un refus du Conseil d’État malgré une possible ouverture

467 • Si le Conseil constitutionnel ne s’est jamais prononcé, le juge administratif n’a pas eu non plus à traiter du renvoi d’une éventuelle QPC sur le statut contentieux des actes de gouvernement. Deux décisions du Conseil d’Etat ont néanmoins témoigné de ce que le caractère prioritaire conféré à la QPC ne saurait tenir en échec les règles classiques du contentieux administratif. Dans sa 1ère décision (CE, 20 janvier 2014, M. Philippe K., req. n°372883) le Conseil d’Etat a refusé de renvoyer une QPC au motif que le recours principal à l’occasion duquel est soulevée la QPC conteste la légalité d’un acte de gouvernement et que le juge ne pouvait avoir compétence pour se prononcer au principal et donc, conjointement, sur les questions accessoires. Dans la 2nde décision de la Section du contentieux (CE, Sect., 12 février 2014, Jean-Louis M. et Jacques B., req. n°373545), ce n’est pas à travers la question de la compétence que le Conseil d’Etat ne renvoie pas au Conseil constitutionnel la QPC présentée au soutien du recours. Il juge, en effet, ce dernier compétent pour contrôler les actes soumis (3 lettres, celle du Premier ministre adressée au Président du Sénat, celle du Président du Sénat adressée aux sénateurs et celle du Président de l’Assemblée nationale adressée aux députés, relatives à la liste des partis et groupements politiques éligibles à la seconde fraction de l’aide publique). C’est, plutôt, sur le terrain de la recevabilité des conclusions déposées par les requérants que se place le Conseil d’Etat, ces conclusions n’étant pas dirigées contre des décisions à proprement parler. Cet arrêt témoigne néanmoins d’une ouverture possible de la porte du prétoire du juge constitutionnel.

iv) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la Constitution : un refus confirmé par la Cour de cassation

468 • La Cour de cassation a, quant à elle, eu l’occasion de confirmer le refus de contestation par rapport à la Constitution à propos de l’affaire tenant à la répression de la contestation du génocide arménien. Une décision-cadre du Conseil de l’UE a été adoptée faisant en sorte que la xénophobie et le racisme soient passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives au sein de l’Union européenne (Décision n° 2008/913/JAI du 28 novembre 2008, (JOUE (L) n° 328 p. 55) sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal). Le législateur en 2001 (loi n° 2001-70 du 29 janvier 2001(JO, 30 janvier 2001, p. 1590) relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915) a bien reconnu officiellement le génocide arménien de 1915 mais, si cette reconnaissance a une portée symbolique évidente, la contestation de ce génocide ne constitue pas un délit (seule la contestation du génocide juif perpétré durant la seconde guerre mondiale constitue un délit : article 24 bis de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881 (JO, 30 juillet 1881, p. 4201), introduit par la loi « Gayssot »(loi n° 90-615 du 13 juillet 1990 (JO, 14 juillet 1990, p. 8333) tendant à réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe), incrimine et réprime d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende la contestation de l’existence des seuls crimes nazis, à l’exclusion des autres crimes contre l’humanité, et notamment ceux reconnus par les lois précédemment citées). Les requérants ont alors initié une 1èreprocédure devant le Conseil d’Etat en formant un recours pour excès de pouvoir contre une décision implicite par laquelle le Premier ministre avait refusé de déposer un projet de loi de transposition tendant à l’instauration de ces incriminations. Le Conseil d’Etat s’est déclaré incompétent eu égard au caractère « d’acte de gouvernement » de la décision litigieuse (CE, 26 novembre 2012, Krikorian et autres, req. n°350492). Une 2nde procédure a été initié devant le juge judiciaire. Ce dernier s’est également déclarer incompétent tout en rejetant une QPC. Pour le juge judiciaire, l’une des conditions requise pour un renvoi n’est pas remplie, celle qui veut que l’immunité contentieuse doit résulter d’une loi ou même de l’interprétation jurisprudentielle d’une telle loi. L’immunité en question résulte simplement d’une solution jurisprudentielle qui ne peut faire l’objet d’une QPC.  Il est pourtant évident que l’injusticiabilité de tels actes soulève une grave difficulté au titre des dispositions de l’article 16 DDHC (selon lequel « Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n’est pas assurée ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution ») instaurant un « droit au recours » devant une juridiction (CC, n° 93‑325 DC, 13 août 1993, Loi relative à la maîtrise de l’immigration et aux conditions d’entrée, d’accueil et de séjour des étrangers en France, JO, 18 août 1993, p. 11722, Rec. CC, p. 224, cons. n°3), ce droit au recours devant être d’autant plus « effectif » (CC, n° 96‑373 DC, 9 avril 1996, Loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française, JO, 13 avril 1996, p. 5724, Rec. CC, p. 43, cons. n°83).

v) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la ConvEDH

469 • La conformité de l’immunité contentieuse pourrait être contestée aussi par rapport à la ConvEDH. Il est également indéniable que cette dernière prive les administrés de leur droit au recours tel que consacré par l’article 13 ConvEDH (En ce sens, par ex., M. Vonsy, « Actes de gouvernement et droit au juge », RFDA 2008, p. 728 et suiv. ou J.-F. Flauss, « Des répercussions de l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme sur le droit du contentieux administratif », LPA 1989, 4 août, n° 93, p. 27) ou le droit de saisir un tribunal en rapprochement avec le droit à un tribunal indépendant ou impartial de l’article 6-1 ConvEDH. Certes, le droit au recours n’est pas un droit général ou absolu mais est lié à la protection des droits et libertés reconnus par la ConvEDH. Le droit au recours n’a vocation à être reconnu que lorsque ces droits sont potentiellement atteints. Lorsque ce n’est pas le cas (les effets des actes de gouvernement étant généralement limités à la sphère constitutionnelle ou internationale), la Cour juge à l’absence de violation des dispositions de la ConvEDH (Voir en ce sens : ComEDH, 4 décembre 1995, Tauira et autres contre France, req. n°28204/95 à propos de la décision de reprendre les essais nucléaires, l’article 13 ConvEDH ne pouvant être invoqué dès lors qu’aucun grief défendable n’était soulevé ; CourEDH, 14 décembre 2006, Markovic et autres contre Italie, req. n°1398/03). C’est également en ce sens qu’a jugé récemment le Conseil d’Etat à propos de la décision du Gouvernement français de reconnaitre le statut diplomatique à une institution étrangère, l’injusticiabilité d’une telle décision n’étant pas contraire à la ConvEDH (CE, 30 décembre 2015, Dupin, req. n° 384321, Rec. CE, p. 486, DA 2016, n°6, comm n°35, G. Eveillard). Mais celui-ci tient néanmoins compte, d’une certaine manière, de la garantie procédurale tenant aux droits et libertés. Cet argument fait probablement partie des principales raisons amenant à ce que, depuis longtemps, le Conseil d’Etat dénie la qualification d’acte de gouvernement à certains actes dont les effets dépassent le cadre de la sphère internationale ou constitutionnelle pour atteindre plus significativement les droits et libertés des personnes.

vi) Un Conseil d’État qui rejette la qualification d’acte de gouvernement en présence d’atteinte aux droits et libertés : l’exemple du décret d’extradition

470 • Le décret d’extradition a longtemps été considéré comme un acte de gouvernement insusceptible de recours. Il constitue désormais un acte détachable des relations diplomatiques et peut donc faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir (CE, Ass., 28 mai 1937, Decerf, req. n°54631, Rec. CE, p. 534, S. 1937, 3, p. 73, note P. Laroque ; CE, Ass., 30 mai 1952, Dame Kirkwood, req. n°16690, Rec. CE, p. 291, RDP 1952, p. 781, concl. M. Letourneur, note M. Waline, S. 1953, 3, p. 33, note P. Bouzat). De même, la demande d’extradition formée par le gouvernement français ne constitue plus, depuis la décision du Conseil d’Etat Legros, un acte de gouvernement (CE, 21 juillet 1972, Legros, req. n°82147, Rec. CE, p. 554) même s’il n’appartient qu’au juge judiciaire d’en connaître dans la mesure où un tel acte n’est pas séparable de la procédure judiciaire dans le cadre et pour les fins de laquelle il a été formulé. Le juge administratif est également compétent pour connaître d’un recours formé contre la décision du garde des Sceaux, ministre de la Justice, ordonnant la remise aux autorités de l’Etat requérant d’une personne objet d’un décret d’extradition et prise pour l’exécution de ce décret (CE, 29 juillet 1994, Saniman, req. n°156288, Rec. CE, p. 367) ou pour connaitre de la décision de rejeter une demande d’extradition, qui n’est plus qualifiée d’acte de gouvernement (CE, Ass., 15 oct. 1993, Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord et Gouverneur colonie royale de Hong Kong, req. n°142578, Rec. CE, p. 268, concl. C. Vigouroux, AJDA 1993, p. 848, chron. C. Maugüé et L. Touvet, D. 1994, jurispr. p. 108, note F. Julien-Laferrière, RFDA 1994, p. 21, note H. Labayle). Cette solution a été étendue, enfin, au retrait d’un décret d’extradition (CE, 14 décembre 1994, Confédération helvétique, req. n°156490, Rec. CE, p. 549, AJDA 1995, p. 56, concl. C. Vigouroux, RDP 1995, p. 781, note J. Chappez, RFDA 1995, p. 109, obs. H. Labayle).

vii) Un Conseil d’État qui tend à limiter les déclarations d’incompétence quand il y a atteinte aux droits et libertés des personnes

471 • Le juge tend aussi à limiter les déclarations d’incompétence lorsque l’acte matériellement constitutionnel qui lui est soumis porte atteinte aux droits et libertés des personnes. On peut, à cet égard, citer d’abord, la jurisprudence des nominations au tour extérieur, le Conseil constitutionnel ayant affirmé que cette nomination ne pouvait porter atteinte à l’article 6 DDHC (selon lequel notamment « tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents »), le Conseil d’Etat a décidé d’exercer un contrôle restreint ou minimum (Cf. Par exemple : CE, Ass., 16 décembre 1988, Bleton contre Sarazin (1èreespèce), req. n°77713 et Association générale des administrateurs civils contre Dupavillon (2nde espèce), req. n°71862, n°71942, n°72000, Rec. CE, p. 450, concl. C. Vigouroux). On peut citer aussi une jurisprudence relative au respect du droit à des élections libres (tel que consacré par l’article 3 du 1er Protocole additionnel à la ConvEDH) qui admet la compétence du juge pour contrôler le refus implicite du 1er ministre d’organiser des élections législatives partielles (CE, Sect., 23 avril 1997, MmeRichard, req. n°186045, RFDA 1997, p. 692, concl. J.-C. Bonichot et note R. Ghevontian) ou une jurisprudence où le Conseil d’Etat se déclare compétent pour juger de la décision du Ministre de la Justice sanctionnant un magistrat par une mise à la retraite d’office (CE, Sect., 20 juin 2003, Stilinovic, req. n°248242, Rec. CE, p. 258, concl. F. Lamy) (Cf. pour l’ensemble de la jurisprudence citée E. Carpentier, « L’« acte de gouvernement » n’est pas insaisissable », RFDA 2006, p. 661).

viii) La pression de plus en plus forte quant à la mise en place d’un contentieux subjectif : l’affaire du « rapatriement des femmes et enfants de djihadistes en Syrie » (1)

472 • L’approche du juge administratif dans le contentieux des actes de gouvernement reste essentiellement objective. L’analyse repose toujours sur l’objet particulier des actes de gouvernement. Comme ils sont relatifs qu’à la conduite des relations internationales ou qu’aux rapports entretenus par les pouvoirs publics, ils ne peuvent être de nature à porter atteinte aux droits des requérants. L’approche constitutionnelle et européenne concernant la protection des droits et libertés appelle pourtant à une approche plus subjective du juge dans ce domaine, une approche qui tient davantage compte des circonstances particulières propres à chaque cas d’espèce. Préconisée il y a quelque temps déjà par la doctrine (Voir, par ex., F. Melleray, « L’immunité juridictionnelle des actes de gouvernement en question. Le droit français confronté aux développements récents du droit espagnol », RFDA 2001, p. 1097 et suiv.), cette approche continue à être mise en avant aujourd’hui (par ex., C. Saunier, « La théorie des actes de gouvernement face aux droits fondamentaux », DA 2019, n°7, comm. n°38). La pression est de plus en plus forte en témoigne l’affaire précitée concernant les femmes et enfants dans les camps en Syrie. Le juge des référés, pour ne pas évoquer la situation particulière des requérants quant à la violation des droits et libertés, qu’ils soient constitutionnels comme l’intérêt supérieur des enfants (CC, n°2018-768 QPC, 21 mars 2019, M. Adama S. [Examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge], JO, 22 mars 2019, texte n°82) ou européens comme la garantie du droit à ne pas subir des traitements inhumains et dégradants (art. 3 ConvEDH), du droit à la liberté et de la sûreté (art. 5 ConvEDH), du droit au procès équitable (art. 6 ConvEDH) ou  du droit au recours effectif (art. 13 ConvEDH),  a retenu l’absence d’autorité de l’Etat français sur les individus placés dans les camps en Syrie, les camps syriens ne se trouvant pas sous la juridiction de l’Etat français.

La pression de plus en plus forte quant à la mise en place d’un contentieux subjectif : l’affaire du « rapatriement des femmes et enfants de djihadistes en Syrie » (2)

472-1 • Si l’argument du juge des référés prête à discussion (il semble aujourd’hui établi que le critère territorial n’est pas suffisant en soi pour apprécier la juridiction d’un Etat concernant les obligations liées au respect des droits et libertés, celles-ci s’imposant à l’Etat français que les ressortissants se trouvent sur le territoire national ou à l’étranger), la décision ainsi que l’attitude des autorités françaises ont été assez unanimement critiquées que ce soit par le défenseur des droits (Défenseur des droits, n°2019-129, 22 mai 2019, https://juridique.defenseurdesdroits.fr), la haute-commissaire aux droits de l’homme de l’ONU (Cf. Par ex. J. Hourdeaux « Rapatriement des familles de djihadistes : le rappel à l’ordre de Michelle Bachelet », https://www.mediapart.fr, 29 juin 2019) la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe (Dunja Mijatović, « Les Etats membres du Conseil de l’Europe devraient rapatrier d’urgence leurs ressortissants mineurs bloqués dans le nord de la Syrie », https://www.coe.int/fr) ou une tribune commune de la Fédération internationale des droits de l’Homme, la Ligue des droits de l’Homme, le Syndicat des avocats de France, le Syndicat de la magistrature et de plusieurs universitaires et avocats (https://drive.google.com, 02 juillet 2019). A noter qu’une audience lourde d’enjeux est pendante devant la formation la plus solennelle du juge européen. Celui-ci devrait se prononcer pour la 1ère fois sur cette complexe question du rapatriement des familles françaises de djihadistes, l’arrêt étant susceptible d’avoir d’importantes conséquences pour l’ensemble des Etats parties à la ConvEDH quant à l’étendue de leurs obligations conventionnelles et quant à la justiciabilité conséquente des actes du gouvernement (voir, par ex., F. Merloz, « La question inédite du rapatriement des familles françaises de djihadistes devant la CEDH », Dalloz actualités 2021, 4 octobre).

c) La réduction des cas de mesures d’ordre intérieur
i) Des mesures qui remettent en cause les droits et libertés

473 • La notion de mesure d’ordre intérieur (MOI) désigne une catégorie particulière d’actes administratifs individuels qui ne font pas grief parce que leur effet juridique est jugé insuffisamment important pour qu’ils puissent être contestés devant un juge. Si la construction jurisprudentielle est ancienne (Cf., par ex., la décision de faire entrer un militaire à l’hôpital pour raisons de santé : CE, 3 avril 1914, Digard, Rec. CE, p. 44, la décision de l’autorité militaire octroyant ou refusant une permission par l’autorité militaire : CE, 18 octobre 1918, Voltine, Rec. CE, p. 908, la décision amenant à noter les fonctionnaires : CE, 5 novembre 1920, Crabe, Rec. CE, p. 930), il y a 4 milieux de prédilection de ces MOI : le domaine scolaire et universitaire, le domaine de la fonction publique, le domaine militaire et le domaine pénitentiaire. Ils ont comme caractéristique commune de voir, en leur sein, le champ et l’existence de ces mesures considérablement se réduire, l’évolution jurisprudentielle amenant à restreindre au maximum cette catégorie de mesures dans ce cadre. L’attitude du juge à leur égard est d’abord plus libérale sur la notion de « faire grief » et prend en compte de la nature et la gravité de la mesure attaquée. Le juge considère, ensuite, que nombre de ces mesures remettent en cause les libertés et les droits fondamentaux des intéressés et que, dès lors, ceux-ci seraient privés de leur droit au recours si lesdites mesures étaient insusceptibles de tout recours contentieux. L’influence de la jurisprudence de la CourEDH est ici particulièrement nette.

ii) Le cas des mesures prises à l’intérieur des établissements scolaires ou universitaires

474 • Pour ce qui concerne les décisions prises à l’intérieur des établissements scolaires ou universitaires, sont dorénavant susceptibles d’un recours contentieux et ne relèvent plus de la catégorie des MOI parce que susceptible d’avoir des incidences sur la situation des élèves, les décisions portant refus d’accès à une option d’enseignement (CE, sect., 5 novembre 1982, Attard, req. n°23394, Rec. CE, p. 374, AJDA 1982, p. 701, chron. B. Lasserre et J.-M. Delarue, D. 1983, p. 122, concl. O. Dutheillet de Lamothe), les décisions relatives à l’expression, par les élèves, de leurs opinions politiques et religieuses(CE, 2 novembre 1992, Kherouaa, Kachour, Balo et Kézic, req. no 130394, Rec. CE, p. 389, RFDA 1993, p. 112, concl. D. Kessler, AJDA 1992, p. 788, chron. C. Maugüé et R. Schwartz, D. 1993, p. 108, note G. Koubi, JCP 1993, II, n° 21998, note P. Tedeschi, RDP 1993, p. 220, note P. Sabourin), le refus d’admission en classe supérieure (CE, 6 juillet 1949, Andrade, Rec. CE, p. 331), un changement d’orientation (CE, 11 février 193, Mathis, req. n°38176, Rec. CE, p. 813), une décision d’exclusion temporaire (CE, 1er décembre 1971, Ministre de l’éducation nationale contre Humblot, Rec. CE, p. 733) ou définitive(CE, 26 janvier 1966, Davin, req. n°64709, Rec. CE, p. 626) ou encore les décisions relatives à la tenue de réunions à caractère politique dans les locaux scolaires (CE, 8 novembre 1985, Ministre de l’éducation nationale contre Rulent, req. n°55594, Rec. CE,  p. 316). Seules continuent de relever encore de la catégorie des MOI, les mesures qui n’ont pas d’incidence sur la scolarité de l’élève comme la punition d’un élève (CE, 8 mars 2006, Fédération des conseils de parents d’élèves des écoles publiques, req. n°275551, Rec. CE, p. 112, AJDA 2006, p. 1107, concl. R. Keller, DA 2006, p. 97, note A. Taillefait) la décision qui répartit les élèves dans les sections d’une école maternelle (CE, 30 septembre 1994, Sulzer, req. n°135686, Rec. CE, p. 1097) ou la décision d’affectation d’un élève dans une classe qui ne porte pas de préjudice à son orientation future (CAA Bordeaux, 21 octobre 2014, M. K. contre collège Paul Cézanne de Montrabé, req. n°13BX00067 ; CE, sect., 5 novembre 1982, Attard, req. n°23394 précité). Cette dernière décision étant susceptible de recours que lorsqu’elle peut avoir des conséquences psychologiques sur les élèves (cas de l’affectation dans des classes séparées de jumeaux : CAA Versailles, 17 février 2005, M. et Mme Do Patrocinio, req. n°03VE02976, AJDA 2005, p. 895, note G. Pellissier).

iii) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : les mesures susceptibles de recours

475 • Pour ce qui concerne les décisions prises dans le cadre de la fonction publique à l’égard des agents publics, les MOI traduisent l’exercice par l’administration de son pouvoir d’organisation du service et concernent essentiellement l’affectation des agents. Ces décisions ne constituent pas des MOI et sont susceptibles de recours quand elles vont au-delà de simples modifications de fonction. C’est le cas, par exemple, lorsque l’agent est privé d’une partie de sa rémunération (CE, 4 juillet 1958, Commune d’Anglet contre Dame Coret, req. n°39089, Rec. CE, p. 411 ou CE, 25 septembre 1995, Rispail, req. n°116085, Rec. CE, tables, p. 955), de ses attributions ou responsabilités (CE, sect., 4 mars 1977, Rondeau, req. n°02014, Rec. CE, p. 126, RA 1977, p. 267, concl. D. Labetoulle même si la perte de fonctions d’encadrement n’implique pas « par elle-même » une perte de responsabilités : CAA Lyon, 13 décembre 2016, M. B. contre Commune de Caluire-et-Cuire, req. n°15LY03070) ou de certains avantages comme l’usage d’un logement de fonction (CE, 22 mai 1981, Commune de Chennevières-sur-Marne, req. n°17330, Rec. CE, tables, p. 647). C’est également le cas lorsque la décision porte atteinte au statut de l’agent public ou aux prérogatives que les agents tirent de leur statut comme la répartition des fonctions d’enseignement entre des professeurs d’université (CE, 11 juin 2003, Lejeune, req. n°228683, AJDA 2003, p. 1992, concl. R. Schwartz ou CE, 12 décembre 1984, Melki, req. n°17130) ou l’atteinte à leurs perspectives de carrière (CE, 5 avril 1991, Imbert-Quaretta, req. n°96513, Rec. CE, tables, p. 999 ou CE, 28 décembre 2005, Kaiser, req. n°267646).

iv) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : les mesures insusceptibles de recours

476 • Si les décisions entrainent de simples modifications de fonctions sans priver l’agent d’une partie de ses attributions ou de sa rémunération et sans porter atteinte à son statut, à ses prérogatives ou à ses responsabilités, les décisions continuent de rentrer dans la catégorie des MOI. C’est le cas, par exemple, d’une décision affectant le directeur d’un restaurant universitaire à la direction d’une résidence universitaire qui présente les mêmes avantages pécuniaires et les mêmes garanties de carrière (CE, 18 mars 1996, M. Biard, req. n°141089), d’une décision amenant à la mutation d’un agent d’un secrétariat à un autre sans modification géographique (CE, 8 mars 1999, Mme Butler, req. n°17134, Rec. CE, p. 843), d’un changement d’affectation d’un service à un autre au sein de la même direction là encore sans perte d’avantages pécuniaires ni d’avancement de carrières (CE, 17 décembre 2008, Département des Ardennes contre Touchon, req. n°294362, Rec. CE, p. 778, AJDA 2009, p. 1504, note S. Deliancourt). Ont également été qualifié de MOI la décision amenant à établir des remontrances envers l’agent sans être portées au dossier de l’intéressé (CE, 25 janvier 2006, Marc-Antoine, req. n°275070, Rec. CE, p. 29) ou la décision de l’administration de refuser à l’un de ses agents une autorisation d’absence pour commodité personnelle sans retenue sur traitement (CE, 11 mai 2011, Caisse des dépôts et consignations, req. n°337280, AJDA 2011, p. 994, obs. M.-C. de Montecler). Enfin, les modifications d’affectation ou de tâches à accomplir sont toujours constitutives de MOI dès lors qu’elles ne portent pas atteinte aux droits et prérogatives des fonctionnaires et n’emportent pas de perte de responsabilités ou perte de rémunération (CE, 7 décembre 2018, M. A. B. contre Président du Conseil régional de la région Nord-Pas-de-Calais, req. n°401812 ; CE, 1er février 2017, Mme A. contre Commune de Cournon-d’Auvergne, req. n°396810).

v) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : une nouvelle réduction récente qui pose la question de la disparition de ces mesures

477 • Le Conseil d’Etat a récemment opéré une nouvelle réduction du périmètre des MOI dont les potentialités peuvent s’avérer très large. Par deux décisions rapprochées dans le temps, le juge administratif est venu ajouter deux exceptions à la qualification de MOI à savoir l’hypothèse où le changement d’affectation de l’agent public se traduirait d’abord par une discrimination mais aussi l’hypothèse dans laquelle une telle mesure porterait, ensuite, « atteinte à l’exercice des droits et libertés fondamentaux des agents publics concernés » (CE, sect., 25 septembre 2015, Mme Bourjolly contre DIRECCTE de Paris, req. n° 372624, cons. n°5, AJDA 2015, p. 2147, chron. L. Dutheillet de Lamothe et G. Odinet, AJFP 2016, p. 39, comm. C. Fortier, RFDA 2015, p. 1107, concl. G. Pellissier, JCP 2015, A, n°2344, concl. G. Pelissier, comm. S. Deygas, RFDA 2016, p. 75, note B. Defoort et CE, 7 octobre 2015, Mme A. contre CHRU de Lille, req. n°377036, cons. n°3, JCP 2015, A, n°2344, comm. S. Deygas, AJFP 2016, p. 154). L’exception tenant à la notion de discrimination ayant été précédemment rappelé par un arrêt en date du 15 avril 2015 (CE, 15 avril 2015, Mme A. contre directeur régional Guadeloupe Pôle emploi, req. n°373893, Rec. CE, p. 146, concl. E. Bokdam-Tognettti, AJDA 2015, p. 1926, note C. Chauvet, AJCT 2015, p. 408, obs. M.-C. Rouault). Ces arrêts et la formulation de leurs considérants de principe, même s’ils qualifient les décisions de MOI, peuvent être paradoxalement compris comme annonçant, à nouveau, « la mort prochaine de la catégorie des mesures dites « d’ordre intérieur » » (B. Defoort, « L’ordre intérieur à bout de souffle », RFDA 2016, p. 75, note sous CE, sect., 25 septembre 2015, Mme B. contre DIRECCTE de Paris précité) voire, dans une perspective inverse, « admettre purement et simplement la recevabilité du recours contre toutes les mesures dites « d’ordre intérieur », mais de n’exercer, sur celles dont les effets sont insuffisants, qu’un contrôle minimum afin de préserver le plus largement possible le pouvoir discrétionnaire de l’administration » (Ibid.).

vi) Le cas des mesures prises à l’égard des militaires

478 • Pour ce qui concerne les décisions prises dans le cadre de la fonction publique à l’égard des militaires, c’est la décision « Hardoin », pris à propos d’une sanction disciplinaire de 10 jours d’arrêt pour état d’ivresse après une escale, qui a amené à réduire drastiquement les MOI en ce domaine (CE, Ass., 17 février 1995, Hardoin, req. n°107766, Rec. CE, p. 82, AJDA 1995, p. 379, chron. L. Touvet et J.-H. Stahl, D. 1995, p. 381, note N. Belloubet-Frier, RFDA 1995, p. 353, concl. P. Frydman, p. 421 et p. 822, note F. Moderne, RDP 1995, p. 1338, note O. Gohin, RSC 1995, p. 381, obs. P. Couvrat, JCP 1995, G, II, n°22426, note F. Lascombe et M. Bernard). Les mesures de police interne et les punitions étaient couvertes, traditionnellement, par les nécessités tenant à la discipline voire la raison d’Etat. Le Conseil d’Etat avait jugé ainsi, quel que soit la gravité de la punition, pour 60 jours d’arrêts de forteresse (CE, sect., 11 juillet 1947, Dewavrin, Rec. CE, p. 307) comme pour des arrêts de rigueurs(CE, 19 janvier 1966, Le Maout, Rec. CE, p. 875), décisions dont la solution de principe avait été maintes fois confirmée depuis (par ex., CE, 13 juillet 1968, Chenal, Rec. CE, p. 446). C’est l’atteinte à la liberté du militaire et l’incidence de la décision sur sa carrière qui justifient la recevabilité du recours. La recevabilité du recours a été établi, par la suite, en plus de la punition de jours d’arrêts, à propos d’un blâme prononcé contre un militaire ou à propos d’une décision de report de permissions, ces reports ou refus de permission (CE, 29 juillet 1998, Brochot-Denys, req. n°180767, AJFP 1999, p. 20, note M. Braud) étant jusqu’alors, selon une jurisprudence constante, insusceptible de recours contentieux (CE, 18 octobre 1918, Voltine, Rec. CE, p. 908). Depuis la réforme du statut général (loi n° 2005-270 du 24 mars 2005 modifiée (JO, 26 mars 2005, p. 5098) portant statut général des militaires qui abroge la loi n°72-662 du 13 juillet 1972 (JO, 14 juillet1972, p. 7430)) qui unifie les sanctions et punitions militaires, plus beaucoup de mesures rentrent encore dans la catégorie des MOI mise à part, comme l’avait déjà relevé le commissaire du gouvernement Patrick Frydmann (dans ces conclusions dans l’affaire Hardoin précitée), l’avertissement qui est une punition non inscrite au dossier du militaire contrairement à la totalité des autres sanctions (Cf. Art. R. 4137-33 Code de la défense et la jurisprudence CE, 8 février 1999, Etienne, req. n°180856, Rec. CE, p. 936 qui confirme cette solution). Seules subsistent en tant que MOI des mesures ou décisions qui n’ont pas le caractère de sanction comme le refus d’audition devant la commission des recours des militaires (CE, 19 mai 2004, Raveneau, req. n°255339, Rec. CE, p. 801) ou l’ordre donné à un gendarme de s’abstenir de toute communication avec la presse (CE, 7 juin 2006, Matelly, req. n°275601).

vii) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : l’arrêt Marie et ses suites

479 • Pour ce qui concerne les décisions prises au sein de l’institution pénitentiaire, on peut dire que c’est dans ce domaine que l’évolution de la jurisprudence est la plus perceptible, le nombre de MOI diminuant chaque jour et même les sanctions disciplinaires les plus faibles étant désormais susceptibles de faire l’objet d’un recours juridictionnel. Le point de départ de cette évolution date, comme pour les militaires, de 1995 avec l’arrêt « Marie » rendu le même jour que l’arrêt « Hardoin » (CE, Ass., 17 février 1995, Marie, req. n°97754, Rec. CE, p. 85, concl. P. Frydmann, AJDA 1995, p. 379, chron. L. Touvet et J.-H. Stahl, D. 1995, p. 381, note N. Belloubet-Frier, RFDA 1995, p. 353, concl. P. Frydman, p. 421 et p. 822, note F. Moderne, RDP 1995, p. 1338, note O. Gohin, JCP 1995, G, II, n°22426, note F. Lascombe et M. Bernard, RSC 1995, p. 381, obs. P. Couvrat). Le juge y déclare que la punition de cellule constitue une décision faisant grief susceptible de recours. Le Conseil d’Etat a estimé, par la suite, que le placement à l’isolement d’un détenu constituait également une décision susceptible de faire l’objet d’un recours (CE, 30 juillet 2003, Garde des Sceaux contre Remli, req. n°252712, Rec. CE, p. 366, AJDA 2003, p. 2090, note D. Costa, D. 2003, p. 2331, note M. Herzog-Evans, RSC 2005, p. 390, obs. P. Poncela) y compris lorsqu’il était prononcé à titre provisoire ou préventif ou pour une courte durée (CE, 17 décembre 2008, Société française de l’Observatoire international des prisons, req. n°296786, Rec. CE, p. 463, AJDA 2008, p. 2364, obs. M.-C. Montecler, D. 2009, p. 1376, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon, JCP 2009, G, II, n°10049, note S. Merenne).

viii) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : les arrêts Planchenault, Boussouar et Payet, une nouvelle « grille » de réflexion

480 • Le juge a ensuite, dans trois arrêts rendus le même jour, fixé, plus clairement, une certaine « grille » de réflexion matérialisant son mode de raisonnement (CE, Ass., 14 décembre 2007, Planchenault, Boussouar, Payet, req. n°290420, n°290730, n°306432, Rec. CE, p. 474, p. 495, p. 498,AJDA 2008, p. 128, chron. J. Boucher et B. Bourgeois-Machureau, D. 2008, p. 820, note M. Herzog-Evans et p. 1015, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon, AJ pénal 2008, p. 100, obs. E. Péchillon, RFDA 2008, p. 87, concl. M. Guyomar et p. 104, concl. C. Landais, RSC 2008, p. 404, chron. P. Poncela, RDP 2009, p. 217, art. C. Groulier). Il va ainsi, chaque fois, procéder à une analyse à la fois matérielle et juridique. Sa 1ère approche est une analyse in abstracto de la situation l’amenant à raisonner par catégorie de décisions et non au cas par cas. L’arrêt Payet considère, par exemple, que toute mesure instituant un « régime de détention spécifique » est susceptible d’être exclue de la catégorie des MOI simplement en raison de la nature objective de la mesure. En revanche, dans les arrêts Boussouar et Planchenault, le juge considère que la seule nature préventive d’une décision non disciplinaire ne suffit pas à identifier une MOI. La 2nde approchedonne lieu à un examen in concreto qui amène à admettre la recevabilité du recours dès lors que la mesure a un effet sur la situation juridique ou matérielle de son destinataire et, si cette approche conduit à retenir la qualification de MOI, de vérifier, encore, au cas par cas, si la mesure met en cause des « libertés et droits fondamentaux des détenus ».

ix) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : une ouverture toujours plus large

481 • Suivant la « grille » précédemment décrite, des recours ont pu être jugés recevables à propos du transfert d’une maison centrale à une maison d’arrêt en raison de modalités d’incarcération différentes (CE, Ass., 14 décembre 2007, Boussouar, req. n°290730 précité et CE, 9 avril 1998, Rogier, req. n° 308221, AJDA 2008, p. 1827, note D. Costa) ou même concernant un changement d’affectation entre établissements de même nature dans la mesure où cela entraine un bouleversement des liens familiaux (CE, 27 mai 2009, Miloudi, req. n°322148, Rec. CE, p. 209, AJDA 2009, p. 1076, note S. Brondel). C’est le cas aussi pour une décision de déclassement d’emploi (CE, Ass., 14 décembre 2007, Planchenault, req. n°290420 précité) ou pour une décision de soumettre un détenu à des rotations de sécurité (CE, Ass., 14 décembre 2007, Payet, req. n°306432 précité). On peut encore signaler des recours possibles contre les décisions d’inscrire ou de maintenir un détenu sur le répertoire des détenus particulièrement signalés (CE, 30 novembre 2009, Garde des sceaux, ministre de la justice contre Kehli, req. n°318589, Rec. CE, p. 480, AJDA 2010, p. 994, étude M. Moliner-Dubost, AJ pénal 2010, p. 43, obs. E. Péchillon), contre une décision fixant les modalités du droit de visite (CE 26 novembre 2010, Ministre d’Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés contre Bompard, req. n°329564, Rec. CE, p. 465, AJDA 2011, p. 678, note M. Poujol) ou encore contre une décision soumettant un détenu au régime différencié « portes fermées » (CE, 28 mars 2011, Garde des sceaux, ministre de la justice contre Bennay, req. n°316977, Rec. CE, p. 137, AJDA 2011, p. 1364, chron. X. Domino et A. Bretonneau, D. 2012, p. 1294, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillonn, AJ pénal 2011, p. 408, note G. Cliquennois et M. Herzog-Evans et CE, 6 décembre 2012, Garde des sceaux, Ministre de la justice et des libertés contre David, req. n°344995, Rec. CE, p. 397, AJDA 2012, p. 2352, obs. D. Poupeau).

x) Des mesures d’ordre intérieur qui persistent néanmoins

482 • Les dernières décisions en date témoignent d’une ouverture toujours plus large puisqu’elles ont autorisé le recours contre une simple sanction d’avertissement prise par le président de la commission de discipline (CE, 21 mai 2014, n° 359672, Garde des sceaux, ministre de la justice, req. n°359672, Rec. CE, p. 139, AJDA 2014, p. 1065, obs. D. Poupeau, JCP 2014, G, n°662, obs. M. Touzeil-Divina) ou contre la décision de retenue administrative du matériel informatique d’un détenu (CE, 9 novembre 2015, M. D. contre Centre pénitentiaire de Caen, req. n°383712, AJDA 2016, p. 53, concl. A. Bretonneau). Mais toutes les MOI n’ont cependant pas disparu. Certaines mesures demeurent qualifiées comme telles, par exemple, les décisions qui n’aggravent pas la situation des détenus, soient qu’elles soient neutres à cet égard ou constituent une amélioration (CE, 23 février 2000, Glaziou, req. n°155607), les décisions refusant de donner suite à la demande d’un détenu de changer d’établissement (CE, 13 novembre 2013, Agamemnon, req. n°338720, et Puci, req. n° 355742, Rec. CE, p. 683, AJDA 2013, p. 2287, obs. D. Poupeau,  RFDA 2014, p. 965, note D. Pollet-Panoussis) ou encore les décisions de contrôler l’équipement informatique d’un détenu et de lui refuser l’autorisation d’acquérir un nouveau système d’exploitation (CE, 9 novembre 2015, M. D. contre Centre pénitentiaire de Caen, req. n°383712 précité). On peut encore citer les mesures de translation (destinées à assurer la mise à disposition de la justice d’une personne prévenue) qui, décidées afin de permettre le bon déroulement des procédures judiciaires dans le respect des dispositions relatives à la compétence territoriale des juridictions, n’apportent aucune restriction aux droits des détenus (CE, 20 mars 2017, Section française de l’Observatoire international des prisons, req. n°395126)

d) Le développement du contrôle normal dans les contentieux touchant aux droits et libertés
i) Un changement dans l’intensité du contrôle concernant 3 catégories de sanctions

483 • Après avoir diminué progressivement le flot des MOI notamment parce que portant atteinte à des droits et libertés, le juge administratif s’est aussi employé à développer un autre pan du contentieux : le contrôle même des sanctions prononcées à la fois par les autorités disciplinaires mais aussi les autorités administratives. Certaines faiblesses tenant notamment aux possibilités offertes par le recours pour excès de pouvoir ont alors été mises en avant dans le but d’une protection optimum des droits et libertés et le juge administratif a dû adapter son office mais il faut noter, comme le relève Jean-Marc Sauvé, que s’il y a eu « un changement de paradigme dans l’office du juge administratif » (J.-M. Sauvé, « Le juge administratif et les droits fondamentaux », AJDA 2016, p. 2420), « ce dernier n’a pas renoncé à son office historique de juge de la légalité objective. Il n’y a pas eu substitution, inversion ou abandon de rôle, mais complémentarité et enrichissement du rôle initial du juge. Au total, le juge administratif français a conservé ses acquis historiques, tout en sachant combler ses insuffisances » (Ibid.). Il n’y a pas, à proprement parler, de jurisprudence globale en matière de sanctions mais plutôt une distinction entre trois catégories de sanctions qui coexistent et auxquelles est appliquée un contrôle à l’intensité différente.

ii) Le cas des sanctions infligées aux administrés : les arrêts Le Cun et Alstom

484 • La 1ère catégorie concerne les sanctions administratives infligées aux administrés. Depuis la décision « Alstom »(CE, Ass., 16 févr. 2009, Société Alstom, req. n°274000, Rec. CE, p. 25, concl. C. Legras, AJDA 2009, p. 583, chron. S.-J. Lieber et D. Botteghi, AJ pénal 2009, p. 189, obs. E. Péchillon, RFDA 2009, p. 259, concl. C. Legras, RFDA 2012, p. 257, étude J. Martinez-Mehlinger, JCP 2009, A, n°2009, note D. Bailleul), cette catégorie relève du plein contentieux qui implique non seulement un plein contrôle de la sanction mais également une possibilité de substitution de la sanction par le juge en cas de disproportion constatée. Les droits fondamentaux impriment ainsi une marque de plus en plus nette sur les garanties de procédure attachées à l’exercice du pouvoir de sanction, notamment celles prises par les autorités de régulation en la matière. C’est d’abord l’arrêt « Le Cun » rendu en Assemblée à propos d’une décision de sanction pécuniaire prononcée par l’ancien Conseil des bourses de valeur qui avait constitué la 1ère manifestation jurisprudentielle de cette emprise. Le Conseil d’Etat renonçant, pour la 1èrefois, au contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation et étendant son office à l’examen de la pleine et entière proportionnalité de la sanction (CE, Ass., 1er mars 1991, Le Cun, req. n°112820, AJDA 1991, p. 358, chron. R. Schwartz et C. Maugüé, AJDA 1992, p. 15, chron. J.-F. Flauss, RFDA 1991, p. 612, concl. M. de Saint-Pulgent, RTD com 1991, p. 582, obs. J.-C. Dubarry et E. Loquin).

iii) Le cas des sanctions infligées aux administrés : les recours de pleine juridiction contre les décisions de sanction des autorités de régulation (art. L. 311-4 CJA)

485 • Le principe jurisprudentiel de l’arrêt « Alstom » reprend et étend une solution déjà dégagée par le législateur en ce qui concerne plusieurs autorités de régulation. L’article L. 311-4 CJA précise, à cet égard, aujourd’hui, que le Conseil d’Etat connaît, en 1er et dernier ressort, des recours de pleine juridiction contre les décisions de sanction prises par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (article L. 612-16 IV du Code monétaire et financier), celles prises par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) (art. L. 5-3 et L. 36-11 CPCE), celles prises par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) (art. 42-1 et art. 42-8 de la loi no 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée), celles prises par la Commission de régulation de l’énergie (CRE) (art. L. 134-34 du Code de l’énergie), celles prises par l’Autorité des marchés financiers (AMF) à l’encontre des prestataires de services d’investissement agréés  soit les professionnels des marchés financiers (R. 621-45 du Code monétaire et financier). A cela, il faut ajouter, par exemple, les   recours contre les décisions de sanction de la CNIL (art. 41 de la oi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés) ou encore de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER) (art. L. 2135-8 Code des transports).

iv) Le cas des sanctions infligées aux administrés : le cas des recours devant la Cour d’appel de Paris et sa procédure matériellement administrative

486 • Pour les autres autorités de régulation, c’est le juge judiciaire, et plus précisément la Cour d’appel de Paris, qui est compétente pour connaitre des recours contre les décisions de sanctions. C’est le cas pour les sanctions prononcées contre toute les personnes qui ne sont pas des professionnels des marchés financiers, comme, par exemple, les émetteurs et auteurs de manquement d’initié (art. L. 621-30 du Code monétaire et financier), les sanctions prises par l’Autorité de la Concurrence (en vertu des articles L. 464-7 et L. 464-8 du Code de commerce) ou encore les sanctions pécuniaires prises par la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (HADOPI) (art. L 331-32 du Code de la propriété intellectuelle). A noter néanmoins que la procédure devant cette Cour est en principe régie par le Code de procédure civile (ou les règles particulières du Code de commerce), elle est matériellement administrative, le contentieux demeure un contentieux objectif de la légalité dans lequel l’office du juge et ses pouvoirs sont déterminés par la loi de l’annulation ou de la réformation de la décision (administrative) unilatérale de l’Autorité (Voir, par exemple, P. Delvolvé, « La cour d’appel de Paris, juridiction administrative », Mélanges Auby, Paris, Dalloz, 1992, p. 47; Y. Gaudemet, « Le pouvoir de réformation de la Cour d’appel de Paris dans le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence », JCP 1999, G, n°50).

v) Le cas des sanctions professionnelles infligées aux membres d’une profession réglementée

487 • La 2nde catégorie concerne les sanctions professionnelles infligées aux membres d’une profession réglementéequi relèvent du contrôle normal du juge de l’excès de pouvoir qui permet d’effectuer, au-delà la qualification juridique des faits constituant les motifs de la sanction, un véritable contrôle de proportionnalité de la sanction quant à sa nature et son quantum. Le juge recherche en réalité la sanction que lui-même aurait pu imposer (Voir, en ce sens, A. Charron, note sous CE, 13 novembre 2013, Dahan, LPA 2014, n°25, p. 6 et D. Pellis-Panoussis, note sous CE, 1er juin 2015, Boromée, RFDA 2016, p. 1212). La catégorie est assez large. Ce sont d’abord les sanctions infligées aux membres des ordres professionnels qui bénéficient d’un contrôle normal (voir, par ex., CE, 23 juillet 2010, Manuceau, req. n°330308, Rec. CE, p. 343, AJDA 2010, p. 2050, concl. R. Keller à propos de la radiation administrative du tableau de l’ordre des médecins ; CE, 7 juin 2017, M. B. A. contre Conseil national de l’ordre des médecins, req. n°403567, RDSS 2017, p. 882, concl. F. Dieu ou CE, 19 décembre 2018, M. B. A. contre Conseil de l’ordre national des médecins, req. n°418096, RDSS 2019, p. 346, note P. Curier-Roche à propos, dans les deux décisions, de la suspension d’un praticien ; voir, aussi, de manière générale, M. Deguergue, « La sanction des manquements à la déontologie », RDSS 2018, p. 161 et suiv. et, dernièrement, CE, 3 décembre 2020, M. B. A., req. n°431987, RDSS 2021, p.174, obs. P. Curier-Roche). Les sanctions peuvent aussi concernées des élèves de l’enseignement public (CE, 27 novembre 1996, Ligue islamique du nord et époux Chabou, req. n°170207, Rec. CE, p. 461, RFDA 1997, p. 151, note C. Durand-Prinborgne), des pilotes d’avions (CE, 28 février 1997 Monka, req. n°172280), des experts en automobile (CE, sect., 22 juin 2007, Arfi, req. n°272650, Rec. CE, p. 263, concl. M. Guyomar, RFDA 2007, concl. M. Guyomar), des magistrats du parquet (CE, 27 mai 2009, Hontang, req. n°310493, Rec. CE, p. 207, DA 2009, n°104, comm. F. Melleray, AJDA 2009, p. 1070, obs. S. Brondel) et du siège (CE 30 juin 2010, Mme Ponsard, req. n°325319, Rec. CE, tables, p. 934, AJDA 2010, p. 1345, obs. S. Brondel), des conseillers de prud’hommes (CE, 20 mai 2011, Lecat, req. n°332451, Rec. CE, tables, p. 1100-1177, AJDA 2011, p. 1864) des sportifs (CE 2 mars 2010, , Fédération française d’athlétisme, req. n°324439, Rec. CE, tables, p. 925, AJDA 2010, p. 664, chron. S.-J. Lieber et D. Botteghi ; CAA de Nancy, 31 janvier 2017, M. B. C. contre Fédération française de football, req. n°15NC02188 AJDA 2017 p.1566, concl. J.-M. Favret pour des licenciés ; CAA de Paris, 7 juin 2018, M. E. G. contre Fédération française de vol à voile (FFVV), req. n°17PA01790 pour un instructeur, voir J. Sorin, « Le juge administratif exerce un contrôle normal sur les sanctions disciplinaires infligées par les fédérations sportives », AJDA 2018, p. 1535 et suiv.) des maires (CE 2 mars 2010, Dalongeville, req. n°328843, Rec. CE, p. 65, AJDA 2010, p. 664, chron. S.-J. Lieber et D. Botteghi) ou encore un membre de l’ordre national du mérite après sa condamnation pour violences conjugales (CE, 28 mars 2014, M. B. A., req. n°377004).

vi) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les fonctionnaires

488 • La 3ème catégorie concerne les sanctions disciplinaires institutionnelles visant notamment les fonctionnaires, les détenus ou les militaires. Les sanctions correspondantes ont longtemps relevé du contrôle restreint du juge de l’excès de pouvoir pour les fonctionnaires (CE, sect., 9 juin 1978, Lebon, req. n°05911, Rec. CE, p. 245, AJDA 1978, p. 573, concl. B. Genevois, obs. S. Salon, D. 1979, jurispr. p. 30, note B. Pacteau, JCP 1979, II, n°19159, note S. Rials, RA 1978, p. 634, note F. Moderne, RDP 1979, p. 227, note J.-M. Auby), celles prononcées contre les détenus (CE, 20 mai 2011, Letona Biteri, req. n°326084, Rec. CE, p. 246, AJDA 2011, p. 1364, chron. X. Domino et A. Bretonneau, AJ pénal 2012, p. 177, obs. M. Herzog-Evans, RSC 2012, p. 208, chron. P. Poncela) ou les militaires (CE, 12 janvier 2011, Mattely, req. n°338461, Rec. CE, p. 899, AJDA 2011, p. 623, note E. Aubin). Ce n’est que récemment que le juge opère un contrôle normal sur la sanction. Ce contrôle a d’abord été admis pour les sanctions prises à l’égard des fonctionnaires (CE, Ass., 13 novembre 2013, Dahan, req. n°347704, Rec. CE, p. 279, AJDA 2013, p. 2432, chron. A. Bretonneau et J. Lessi, D. 2013, p. 2699, obs. M.-C. de Montecler, AJFP 2014, p. 5, concl. R. Keller, note C. Fortier, AJCT 2015, p. 511, étude G. Le Chatelier, RFDA 2013, p. 1175, concl. R. Keller, DA 2014, n°11, comm. A. Duranthon, JCP 2014, G, n°149, note C. Vautrot-Schwartz, JCP 2014, A, n°2093, note D. Jean-Pierre) notamment parce que les litiges relatifs à la situation des fonctionnaires entraient, depuis peu, dans le champ de l’article 6-1 ConvEDH à travers la notion de droits et obligations de caractère civil (CEDH, 19 avril 2007, Vilho Eskelinen et autres contre Finlande, req. n° 63235/00, AJDA 2007, p. 1360, note F. Rolin et p. 1918, chron. J.-F. Flauss, AJFP 2007, p. 246, note A. Fitte-Duval, RFDA 2007, p. 1031, note G. Gonzalez).

vii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les détenus (1)

489 • Le contrôle normal a également été admis pour les sanctions prises à l’égard des détenus (CE, 1er juin 2015, Boromée, req. n°380449, Rec. CE, p. 185, concl. A. Bretonneau, AJDA 2015, p. 1596, concl. A. Bretonneau, D. 2016, p. 1220, obs. J.-P. Céré, M. H.-Evans et E. Péchillon, AJ pénal 2015, p. 447, obs. E. Péchillon, DA 2015, n°61, comm. G. Eveillard, JCP 2015, A, n°705, obs. A. Langelier). Il n’y a, par contre, pas de lien particulier avec les obligations européennes qui a été mis en avant car, par principe, les sanctions disciplinaires pénitentiaires ne relèvent pas de l’article 6-1 ConvEDH. La CourEDH a fait application des critères classiques et alternatifs d’inclusion dans le champ de la matière pénale (tels qu’énoncés dans l’arrêt CourEDH, 8 juin 1976, Engel et autres contre Pays-Bas, req. n°5100/74, série A, n°22, § 82 et 83 et tels qu’appliqués au contexte carcéral dans l’arrêt CourEDH, 28 juin 1984, Campbell et Fell contre Royaume-Uni, req. n°7819/77, série A, n°80, § 68 et 69) en concluant que, eu égard à la qualification interne de l’infraction, la nature de l’accusation et le degré de sévérité de la sanction, seules relevaient du volet pénal les sanctions pénitentiaires ayant pour effet d’allonger la durée de la détention (CourEDH, 20 janvier 2011, Payet contre France, req. n° 19606/08, AJDA 2011, p. 1993, chron. L. Burgorgue-Larsen, D. 2011, p. 643, obs. S. Lavric, note J.-P. Céré, p. 1306, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon, AJ pénal 2011, p. 88, note M. Herzog-Evans, RFDA 2012, p. 455, chron. H. Labayle, F. Sudre, X. Dupré de Boulois et L. Milano, RSC 2011, p. 718, obs. J.-P. Marguénaud et CourEDH, 3 novembre 2011, Cocaign contre France, req. n°32010/07, D. 2012, p. 1294, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon, AJ pénal 2011, p. 605, obs. J.-P. Céré, RSC 2012, p. 263, obs. J.-P. Marguénaud).

vii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les détenus (2)

490 • Si on tient compte de la jurisprudence européenne, l’ensemble des sanctions disciplinaires applicables aux détenus ne peut relever de la protection de l’article 6-1 ConvEDH. Le Conseil d’Etat a jugé en ce sens en décidant que des crédits de réduction de peine pouvant être retirés à chaque condamné (art. 720 Code de procédure pénale) relevaient de la matière pénale (Cf. CE, 24 octobre 2014, M. B. contre Garde des Sceaux, Ministre de la justice, req. n°368580, AJDA 2014, p. 2092, obs. J.-M. Pastor, AJ pénal 2015, p. 39, note J.-P. Céré) contrairement aux autres sanctions disciplinaires (Cf. CE, 11 juillet 2012, Section française de l’observatoire international des prisons, req. n°347146 qui confirme que, hors le cas mentionné, l’article 6-1 ConvEDH n’est pas applicable à la procédure disciplinaire pénitentiaire). Comme peut le noter Delphine Pollet-Panoussis, plus que les obligations imposées par le droit européen, c’est plutôt « la recherche d’une cohérence jurisprudentielle globale en matière de sanctions et le mouvement général en faveur de l’amélioration des droits des détenus […] qui expliquent que la juridiction administrative suprême soit revenue sur sa position traditionnelle » (D. Pollet-Panoussis, « Les sanctions disciplinaires pénitentiaires soumises à un contrôle entier du juge de l’excès de pouvoir », note sous CE, 1er juin 2016, Boromée, RFDA 2016, p. 1212).  L’équilibre étant assuré notamment lorsqu’on observe le contrôle opéré par le juge sur certaines mesures de police à l’encontre des détenus qui sont souvent assez proche, dans leur consistance, des mesures disciplinaires prises à l’encontre des détenus. On peut citer, par exemple, le contrôle normal effectué sur les mesures de fouille (CE 14 novembre 2008, El Shennawy, req. n°315622, Rec. CE, p. 417, AJDA 2008, p. 2389, chron. E. Geffray et S.-J. Lieber, D. 2008, p. 3013, obs. E. Royer, D. 2009, p. 1376, obs. J.-P. Céré, M. Herzog-Evans et E. Péchillon, AJ pénal 2009, p. 89, obs. É. Péchillon, RFDA 2009, p. 957, obs. D. Pollet-Panoussis), de refus de suspension ou de retrait de permis de visite (CE, 20 février 2013, Théron, req. n°364081, AJDA 2013, p. 444, obs. D. Poupeau) ou encore, dans le cadre de l’état d’urgence, le contrôle normal effectué sur les décisions de déchéance de nationalité (CE, 8 juin 2016, M. A., req. n°394348, AJDA 2016, p. 1758, concl. X. Domino, D. 2016, p. 1310, obs. J.-M. Pastor, RFDA 2016, p. 1188, note J. Lepoutre) ou sur les perquisitions administratives (CE, 06 juillet 2016, MM. A.E, D.M. et P.C. contre Préfet du Val-d’Oise et Préfet des Hauts-de-Seine, req. n°398234, AJDA 2016, p. 1364, obs. M.-C. Montecler).

viii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les militaires

491 • Les arrêts « Dahan » et « Boromée » ont été confirmés dernièrement concernant les mesures disciplinaires prises à l’encontre d’un militaire (CE, 25 janvier 2016, Lieutenant-Colonel M. A., req. n°391178, AJFP 2016, note J.-C. Videlin) alors que le Conseil d’Etat n’avait jusqu’alors appliqué son contrôle normal que pour des sanctions prises à l’encontre d’agents publics civils. L’arrêt n’est en réalité qu’une application de la décision Dahan dans la mesure où cette dernière jurisprudence concernait l’ensemble des « faits reprochés à des agents publics » ce que sont en définitive les militaires qui étaient donc déjà concernés en 2013. Cette jurisprudence a été confirmée à propos de la radiation des cadres d’un général pour avoir participé, à Calais, à une manifestation interdite contre la politique migratoire du gouvernement. Le juge administratif procédant à un contrôle normal des manquements à l’obligation de réserve de cet officier général (CE, 22 septembre 2017, Général Christian Piquemal, req. n°404921, voir J. Charruau, « L’exceptionnelle radiation des cadres d’un général trop bavard », AJDA 2018, p. 229 et suiv.). Cette jurisprudence parachève l’évolution entreprise depuis le début des années 1990 en matière de protection des droits et rappelle que pour les sanctions disciplinaires proprement dites à l’encontre des professionnels ou des fonctionnaires, c’est le recours pour excès de pouvoir qui doit s’exercer et non le recours de plein contentieux qui, au-delà du contrôle entier, permettrait au juge de substituer sa propre décision à celle de l’administration en cas de disproportion avérée. La possibilité de réformation de la décision qu’offrirait ce recours permettrait notamment de moduler l’intensité de la sanction et de prendre en compte, notamment, des circonstances atténuantes voire aggravantes.

ix) Des discussions doctrinales quant à la faiblesse supposée du recours pour excès de pouvoir

492 • Une partie non négligeable des discussions doctrinales s’est portée aujourd’hui sur la capacité du recours pour excès de pouvoir à protéger efficacement les droits et libertés et à répondre aux exigences constitutionnelles ou conventionnelles en ce domaine (Cf. Par ex., M. Bernard, « Le recours pour excès de pouvoir est-il frappé à mort ? », AJDA 1995, p. 190 ; J. Martinez-Mehlinger, « Vers l’« atomisation » du recours pour excès de pouvoir dans le contentieux des sanctions administratives »,RFDA 2012, p.257 ou encore S.-J. Bieber et D. Botteghi, « L’étoile du recours pour excès de pouvoir pâlirait-elle encore ? », AJDA 2009, p. 583). A défaut de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, moins mise en avant en la matière, c’est surtout celle relative à la CourEDH qui pose question. Le juge européen utilise, depuis longtemps, la notion de « pleine juridiction » dans ses exigences, l’organe de pleine juridiction devant être à même « de réformer en tous points, en fait comme en droit, la décision entreprise rendue par l’organe inférieur » (CourEDH, 10 février 1983, Albert et Le Compte contre Belgique, série A, n° 58, req. n°7299/75, § 29). Dès lors, la conventionnalité du recours pour excès de pouvoir poserait question car se limitant à l’annulation de la décision et n’autorisant pas le pouvoir de réformation (Cf. C. Mamontoff, « La notion de pleine juridiction au sens de l’article 6 de la ConvEDH et ses implications en matière de sanctions administratives », RFDA 1999, p. 1004 et R. Tinière, « La notion de « pleine de juridiction » au sens de la ConvEDH et l’office du juge administratif », RFDA 2009, p. 279). Mais il a été montré depuis qu’il faut davantage nuancer l’interprétation de la Cour, cette dernière n’exigeant pas un réel pouvoir de réformation à partir du moment où le juge à la faculté de se prononcer sur tous les éléments du litige, ceux relatifs aux faits comme ceux relatifs au droit (Voir, en ce sens, notamment, M. Melchior, « La notion de pleine juridiction en matière civile dans la jurisprudence de la CourEDH », Mélanges Vélu, t. 3, Bruxelles, Bruylant, 1992, p. 1328). De plus, la position de la CourEDH est différente selon que la sanction prise appartienne à la matière civile, où elle se satisfait du seul pouvoir d’annulation du juge sans exiger la réformation (CourEDH, 23 octobre 1995, Schmautzer contre Autriche, req. n°15523/89, §36, Gradinger contre Autriche, req. n°15963/90, §44 ou, plus récemment, dans un cas concernant la France : CourEDH, 29 octobre 2009, Chaudet contre France, req. n°49037/06, §37), ou à la matière pénale qui est seule touchée par l’obligation du pouvoir de réformation. Seules les sanctions prises à l’égard des détenus, appartenant à la matière pénale, seraient susceptible de relever alors de ce pouvoir de réformation mais on a vu que l’article 6-1 ConvEDH ne leur était pas applicable (CE, 30 juillet 2003, Section française de l’observatoire international des prisons, req. n°253973, précité). A voir à l’avenir sachant que la position du Conseil d’Etat à cet égard est quelque peu menacée et que beaucoup d’auteurs appellent à la mise en place d’un contrôle de plein contentieux pour le rendre plus conforme au droit européen eu égard à la question du pouvoir de réformation (Cf. En ce sens, J.-P. Céré, « La procédure disciplinaire pénitentiaire à l’épreuve de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme », AJ Pénal 2012, p. 533 et suiv. ; D. Pollet-Panoussis, « Les sanctions disciplinaires pénitentiaires soumises à un contrôle entier du juge de l’excès de pouvoir », RFDA 2016, p. 1212 et suiv. ; A. Planchard, « Le contrôle de proportionnalité des sanctions disciplinaires franchit les portes des prisons », RDH 2015, juillet).

x) Des incidences sur le contrôle opéré par le juge de cassation : l’ambiguïté de l’arrêt Bonnemaison

493 • Pour terminer sur la question, le passage du contrôle restreint de l’erreur manifeste d’appréciation au contrôle normal ainsi opéré sur le contrôle opéré par les juges du fond n’entraîne pas nécessairement des incidences sur le contrôle du juge de cassation à proprement parler. En contentieux administratif, l’appréciation des faits est insusceptible de discussion devant le jugede cassation (CE, sect., 2 février 1945, Moineau, req. n°76127, Rec. CE, p. 27) sauf si les faits ont été dénaturés par le juge du fond (CE, Ass., 4 janvier 1952, Simon, Rec. CE, p. 13, concl. M. Letourneur). En conséquence, en matière de sanctions disciplinaires, ce dernier se limitait traditionnellement à sanctionner l’écart choquant ou déplacé entre la faute et la sanction à travers l’examen de la dénaturation (CE, 30 mai 2011, Mme Ottaviani, req. n°339496, AJDA 2011, p. 2246, note J. Petit). De par l’évolution précédemment décrite, la doctrine a été amené à considérer, qu’à terme, une évolution similaire conduirait le juge de cassation à développer son contrôle comme sa jurisprudence a pu l’établir en faveur des juges du fond (R. Keller,« Le contrôle normal des sanctions disciplinaires par le juge de l’excès de pouvoir », concl sous CE, Ass., 13 novembre 2013, Dahan, RFDA 2013, p. 1175 ou A. Bretonneau, J. Lessi,« Sanctions infligées aux agents publics : M. Lebon sort du Recueil », chronique sous CE, Ass., 13 novembre 2013, Dahan, AJDA 2013, p. 2432). Si un contrôle normal au fond n’a pas à déboucher mécaniquement sur un contrôle de la qualification juridique en cassation, c’est à l’occasion de la célèbre affaire « Bonnemaison » que le Conseil d’Etat a, pour la 1ère fois, apporté des éclaircissements sur ce point. Alors que le rapporteur public invitait le Conseil d’Etat à exercer un contrôle de légalité sur l’appréciation des juges du fond du choix de la sanction donc procéder à la qualification juridique en cassation, celui-ci n’a pas totalement franchi le pas. Il a préféré choisir une formule intermédiaire entre la dénaturation et la qualification consistant à vérifier que la sanction retenue par les juges du fond « n’est pas hors de proportion avec la faute commise et qu’elle a pu dès lors être légalement prise » (CE, Ass., 30 décembre 2014, Bonnemaison, req. no381245, Rec. CE, p. 443, AJDA 2015, p. 749, chron. J. Lessi et L. Dutheillet de Lamothe, RFDA 2015, p. 67, concl. R. Keller, D. 2015, p. 81, obs. Vialla).

xi) Des incidences sur le contrôle opéré par le juge de cassation : la portée de l’arrêt Bonnemaison

494 • Le juge administratif a transposé logiquement le revirement de jurisprudence intervenu dans l’arrêt « Dahan » précité à propos des sanctions prononcées dans la fonction publique aux sanctions disciplinaires infligées par les chambres disciplinaires nationales des ordres professionnels médicaux mais, en raison du contrôle de cassation qui est alors opéré, il y a, comme on a pu le voir avec l’arrêt « Bonnemaison », quelques différences dans le contrôle alors opéré. La portée de la formule assez délicate à appréhender dans l’arrêt « Bonnemaison » a, par la suite, été précisée par une décision du 27 février 2015 « La Poste » (CE, 27 février 2015, La Poste, req. no 376598, AJDA 2015, p. 1047, concl. X. Domino). Le juge de cassation effectue maintenant une recherche de l’erreur manifeste dans la qualification juridique des faits opérée par les juges du fond sur le point de savoir si la sanction contestée est proportionnée à la gravité des faits reprochés à l’agent. Il s’agit, en quelque sorte, comme le note Xavier Domino, d’un « mini-contrôle de qualification juridique des faits » ou, pour le dire autrement, d’un « super contrôle de dénaturation » (X. Domino, « Le contrôle du juge de cassation en matière de sanctions contre les fonctionnaires », AJDA 2015, p. 1047). Le contrôle opéré par le Conseil d’Etat, bien que limité à la « disproportion manifeste », peut être appréhendé ainsi comme une nouvelle garantie pour le justiciable et tend à rapprocher, en matière de sanctions, le recours pour excès de pouvoir et le recours en cassation. Le Conseil d’Etat a ainsi, pour la 1ère fois, censuré, une décision prononçant une sanction disciplinaire du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche infligées à un enseignant chercheur hors de proportion avec les fautes commises (CE, 6 avril 2016, Université Lyon II contre M. B., req. no389821, AJFP 2016, p. 231, note E. Aubin). Il n’est donc pas interdit de penser que cette jurisprudence constitue une étape intermédiaire avant que le Conseil d’Etat, en tant que juge de cassation, dans quelque temps, n’opte pour un contrôle équivalent à celui du juge de l’excès de pouvoir en acceptant un contrôle de la qualification juridique. Même s’il est pour l’instant limité à la disproportion flagrante des sanctions, il n’en constitue pas moins un progrès significatif de l’Etat de droit (voir, par ex., CE, 27 juillet 2015, EHPAD de Beuzeville, req. n°370414, JCP 2015, A, n°2284, comm. V. Vioujas où le juge met en avant que la disproportion manifeste peut procéder d’une sévérité excessive mais également d’une annulation aboutissant à ce que, en cas de reprise de la procédure, l’administration ne puisse plus prononcer qu’une sanction exagérément légère au regard des faits reprochés).

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Table des matières

  • A – Des pouvoirs du juge administratif aujourd’hui aussi performants que ceux du juge judiciaire
    • 1 – Une emprise plus directe et plus forte du juge administratif sur l’action administrative
      • a) La mise en place des référés d’urgence et du référé liberté
      • i) Les référés avant l’an 2000 : des procédures moins efficaces que celle du juge civil
      • ii) Les référés après l’an 2000 : une nouvelle culture de l’urgence et une institution centrale caractérisée par le référé liberté
      • b) L’efficacité des pouvoirs d’injonction du juge du référé liberté et la possibilité de prendre des décisions définitives
      • i) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des avancées certaines
      • ii) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des limites persistantes pour ne pas faire acte d’administrateur
      • iii) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des limites persistantes compensées par un contrôle de proportionnalité in concreto
      • iv) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : la question du pouvoir de remédier à la carence ou la passivité de l’administration
      • v) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : les limites du référé liberté mis en avant par le juge européen (1)
      • vi) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : les limites du référé liberté mis en avant par le juge européen (2)
      • vii) L’exemple de la détention dans des centres d’accueil des étrangers
      • viii) L’exemple lié aux refus d’ouverture ou aux fermetures de mosquée (1)
      • ix) L’exemple lié aux refus d’ouverture ou aux fermetures de mosquée (2)
      • x) Des décisions en référé non définitives mais qui présentent, le plus souvent et indirectement, un caractère définitif
      • xi) Un juge du référé liberté administrateur ?
      • c) La perception large de la notion de liberté fondamentale par le juge du référé liberté
      • i) Une notion la plupart du temps définie sur le fondement d’une norme constitutionnelle
      • ii) Une notion parfois définie sur le fondement de normes européennes
      • iii) Une notion qui reste source d’interrogations impérissables
      • d) La possibilité pour le juge du référé liberté de mettre en avant l’exception d’inconstitutionnalité
      • i) Une extension initiale substantielle de l’office du juge du référé-liberté malgré l’interdiction d’opérer un jugement de valeur sur la loi
      • ii) Une QPC susceptible d’être soulevée en référé si la condition d’urgence est remplie
      • iii) Une QPC susceptible d’être soulevée même si le litige peut prendre fin sans la réponse
      • e) La possibilité pour le juge du référé liberté de mettre en avant l’exception d’inconventionnalité in abstracto et in concreto
      • i) Une 1ère exception admise pour le droit de l’Union : l’arrêt Diakité
      • ii) Une 2nde exception admise pour le droit de la ConvEDH : les arrêts Lambert et Domenjoud
      • iii) Une 2nde exception admise pour le droit de la ConvEDH : l’arrêt Gonzales Gomez
      • iv) La généralisation du contrôle de conventionnalité in concreto
      • v) La généralisation d’un contrôle de proportionnalité de 2nd rang
      • vi) Un contrôle in concreto finalement limité ou, tout le moins, cantonné
      • vii) Un contrôle in concreto qui ne serait pas exercé dans tous les cas
      • f) Le dépassement, au final, des limites légales à l’action du juge dans le cadre du référé liberté
      • i) Un juge des référés qui se permet d’aller plus vite que le juge du fond
      • ii) Un juge des référés qui se permet d’agir plus efficacement que le juge du fond
      • iii) Les dangers de l’extension toujours généralisée des pouvoirs du juge du référé liberté : l’exemple de la crise sanitaire
    • 2. Le dépassement des limites légales pour adapter l’office du juge à une optique plus subjective de protection des droits et libertés
      • a) Du pouvoir d’injonction légale au pouvoir d’injonction jurisprudentielle
      • i) Des conditions de recevabilité des demandes d’astreintes de plus en plus larges
      • ii) Un pouvoir d’injonction qui aboutit, au final, à protéger les droits et libertés
      • iii) Un juge administratif qui se reconnait le pouvoir de prononcer des injonctions d’office
      • iv) Des injonctions qui se multiplient au cœur des trois référés d’urgence
      • v) Des motifs qui indiquent et ordonnent l’exécution des mesures nécessaires
      • vi) Des injonctions jurisprudentielles qui portent, dorénavant, plus directement, sur l’exécution de la règle de droit
      • b) La réduction de la théorie des actes de gouvernement
      • i) Des actes qui échappent normalement à tout contrôle juridictionnel
      • ii) Des tentatives de contrôle : la théorie de « l’acte détachable »
      • iii) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la Constitution : un refus du Conseil d’État malgré une possible ouverture
      • iv) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la Constitution : un refus confirmé par la Cour de cassation
      • v) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la ConvEDH
      • vi) Un Conseil d’État qui rejette la qualification d’acte de gouvernement en présence d’atteinte aux droits et libertés : l’exemple du décret d’extradition
      • vii) Un Conseil d’État qui tend à limiter les déclarations d’incompétence quand il y a atteinte aux droits et libertés des personnes
      • viii) La pression de plus en plus forte quant à la mise en place d’un contentieux subjectif : l’affaire du « rapatriement des femmes et enfants de djihadistes en Syrie » (1)
      • La pression de plus en plus forte quant à la mise en place d’un contentieux subjectif : l’affaire du « rapatriement des femmes et enfants de djihadistes en Syrie » (2)
      • c) La réduction des cas de mesures d’ordre intérieur
      • i) Des mesures qui remettent en cause les droits et libertés
      • ii) Le cas des mesures prises à l’intérieur des établissements scolaires ou universitaires
      • iii) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : les mesures susceptibles de recours
      • iv) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : les mesures insusceptibles de recours
      • v) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : une nouvelle réduction récente qui pose la question de la disparition de ces mesures
      • vi) Le cas des mesures prises à l’égard des militaires
      • vii) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : l’arrêt Marie et ses suites
      • viii) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : les arrêts Planchenault, Boussouar et Payet, une nouvelle « grille » de réflexion
      • ix) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : une ouverture toujours plus large
      • x) Des mesures d’ordre intérieur qui persistent néanmoins
      • d) Le développement du contrôle normal dans les contentieux touchant aux droits et libertés
      • i) Un changement dans l’intensité du contrôle concernant 3 catégories de sanctions
      • ii) Le cas des sanctions infligées aux administrés : les arrêts Le Cun et Alstom
      • iii) Le cas des sanctions infligées aux administrés : les recours de pleine juridiction contre les décisions de sanction des autorités de régulation (art. L. 311-4 CJA)
      • iv) Le cas des sanctions infligées aux administrés : le cas des recours devant la Cour d’appel de Paris et sa procédure matériellement administrative
      • v) Le cas des sanctions professionnelles infligées aux membres d’une profession réglementée
      • vi) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les fonctionnaires
      • vii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les détenus (1)
      • vii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les détenus (2)
      • viii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les militaires
      • ix) Des discussions doctrinales quant à la faiblesse supposée du recours pour excès de pouvoir
      • x) Des incidences sur le contrôle opéré par le juge de cassation : l’ambiguïté de l’arrêt Bonnemaison
      • xi) Des incidences sur le contrôle opéré par le juge de cassation : la portée de l’arrêt Bonnemaison

About Christophe De Bernardinis

Maître de conférences en droit public à l'Université de Lorraine (Metz)

L'auteur

Christophe De Bernardinis

Maître de conférences en droit public à l'Université de Lorraine (Metz)

Table des matières

  • La protection des droits fondamentaux en France, 2ème édition
  • Chapitre 1. La formation du statut et de la protection : la notion de « droits fondamentaux » et l’avènement du « pouvoir juridictionnel »
    • Section 1. L’importation de la notion de droits fondamentaux en France
      • §1. L’éviction progressive des concepts de « droits de l’homme » et de « libertés publiques »
        • A. Des concepts liés aux « droits de l’homme » peu précis et peu opératoires
        • B. Une notion de « libertés publiques » qui a peu à peu révélé ses limites
      • §2. L’émergence progressive de la notion de « droits fondamentaux »
        • A. Les prémisses de l’implantation de la notion
        • B. La confirmation de l’implantation de la notion
    • Section 2. La formalisation de la protection des droits fondamentaux : l’avènement du « pouvoir juridictionnel »
      • §1. Le rôle initial et particulier joué par le législateur dans la protection des droits fondamentaux
        • A. Des droits fondamentaux à l’abri de l’action du législateur dans la plupart des pays étrangers
        • B. Des droits fondamentaux placés en dessous des droits garantis par le législateur en France
      • §2. Le retour en force du « juge » et l’avènement du nouvel équilibre des pouvoirs préservant les droits et libertés
        • A. La mise en place du contrôle juridictionnel de la loi
        • B. Le nouvel équilibre des pouvoirs permettant la préservation des droits et libertés
  • Chapitre 2. La consolidation de la protection des droits et libertés : le dialogue horizontal entre les juges internes
    • Section 1. Le dialogue entre le juge judiciaire et le juge administratif
      • §1. Une concurrence initiale apparente dans la protection des droits et libertés
        • A. Une compétence de principe du juge judiciaire fixée par défaut
        • B. Un rééquilibrage de la fonction vers le juge administratif
      • §2. Une complémentarité nouvelle des juges permettant une protection optimale des droits et libertés
        • A. Des pouvoirs du juge administratif aujourd’hui aussi performants que ceux du juge judiciaire
        • B. L’augmentation des exceptions à l’obligation de renvoi des questions préjudicielles et l’approfondissement corrélatif du dialogue des juges
    • Section 2. Le dialogue entre les juges ordinaires et le Conseil constitutionnel
      • §1. L’autorité des décisions du Conseil constitutionnel comme gage de cohérence dans la protection des droits et libertés
        • A. Dans le cadre de son contrôle a priori
        • B. Dans le cadre de son contrôle a posteriori
      • §2. L’apport du contrôle a posteriori à la protection des droits et libertés : un État de droit approfondi et renouvelé
        • A. Les difficultés initiales d’appréhension de la QPC
        • B. L’apport fondamental de la QPC : l’accroissement des garanties dans la protection des droits et libertés
  • Chapitre 3. L’optimisation de la protection : le dialogue vertical entre juges internes et européens et le dialogue supra national entre juges européens
    • Section 1. Le dialogue vertical entre les juges internes et les juges européens
      • §1. Le juge constitutionnel et l’application du droit européen
        • A. Le juge constitutionnel et les droits fondamentaux consacrés dans l’ordre communautaire
        • B. Le juge constitutionnel et les droits fondamentaux consacrés par la ConvEDH
      • §2. Des juges ordinaires, juges de droit commun des garanties européennes
        • A. Juges ordinaires et droit de l’Union européenne
        • B. Juges ordinaires et droit européen
    • Section 2. Le dialogue supra national entre juge de l’Union et juge européen
      • §1. Des rapports qui se sont développés avec l’utilisation, principale, croissante et diversifiée de la CDFUE
        • A. Une Charte qui est devenue l’instrument principal de protection des droits fondamentaux dans le système communautaire
        • B. Un champ d’application et une utilisation nouvelle de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
      • §2. Des rapports qui ont vocation à devenir directs pour matérialiser une garantie des droits et libertés commune
        • A. La mise en place d’un dialogue constructif entre les juges
        • B. Le projet d’adhésion de l’Union européenne à la ConvEDH
  • Conclusion

Table des matières du document

  • A – Des pouvoirs du juge administratif aujourd’hui aussi performants que ceux du juge judiciaire
    • 1 – Une emprise plus directe et plus forte du juge administratif sur l’action administrative
      • a) La mise en place des référés d’urgence et du référé liberté
      • i) Les référés avant l’an 2000 : des procédures moins efficaces que celle du juge civil
      • ii) Les référés après l’an 2000 : une nouvelle culture de l’urgence et une institution centrale caractérisée par le référé liberté
      • b) L’efficacité des pouvoirs d’injonction du juge du référé liberté et la possibilité de prendre des décisions définitives
      • i) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des avancées certaines
      • ii) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des limites persistantes pour ne pas faire acte d’administrateur
      • iii) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : des limites persistantes compensées par un contrôle de proportionnalité in concreto
      • iv) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : la question du pouvoir de remédier à la carence ou la passivité de l’administration
      • v) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : les limites du référé liberté mis en avant par le juge européen (1)
      • vi) L’exemple de la détention dans les établissements pénitentiaires : les limites du référé liberté mis en avant par le juge européen (2)
      • vii) L’exemple de la détention dans des centres d’accueil des étrangers
      • viii) L’exemple lié aux refus d’ouverture ou aux fermetures de mosquée (1)
      • ix) L’exemple lié aux refus d’ouverture ou aux fermetures de mosquée (2)
      • x) Des décisions en référé non définitives mais qui présentent, le plus souvent et indirectement, un caractère définitif
      • xi) Un juge du référé liberté administrateur ?
      • c) La perception large de la notion de liberté fondamentale par le juge du référé liberté
      • i) Une notion la plupart du temps définie sur le fondement d’une norme constitutionnelle
      • ii) Une notion parfois définie sur le fondement de normes européennes
      • iii) Une notion qui reste source d’interrogations impérissables
      • d) La possibilité pour le juge du référé liberté de mettre en avant l’exception d’inconstitutionnalité
      • i) Une extension initiale substantielle de l’office du juge du référé-liberté malgré l’interdiction d’opérer un jugement de valeur sur la loi
      • ii) Une QPC susceptible d’être soulevée en référé si la condition d’urgence est remplie
      • iii) Une QPC susceptible d’être soulevée même si le litige peut prendre fin sans la réponse
      • e) La possibilité pour le juge du référé liberté de mettre en avant l’exception d’inconventionnalité in abstracto et in concreto
      • i) Une 1ère exception admise pour le droit de l’Union : l’arrêt Diakité
      • ii) Une 2nde exception admise pour le droit de la ConvEDH : les arrêts Lambert et Domenjoud
      • iii) Une 2nde exception admise pour le droit de la ConvEDH : l’arrêt Gonzales Gomez
      • iv) La généralisation du contrôle de conventionnalité in concreto
      • v) La généralisation d’un contrôle de proportionnalité de 2nd rang
      • vi) Un contrôle in concreto finalement limité ou, tout le moins, cantonné
      • vii) Un contrôle in concreto qui ne serait pas exercé dans tous les cas
      • f) Le dépassement, au final, des limites légales à l’action du juge dans le cadre du référé liberté
      • i) Un juge des référés qui se permet d’aller plus vite que le juge du fond
      • ii) Un juge des référés qui se permet d’agir plus efficacement que le juge du fond
      • iii) Les dangers de l’extension toujours généralisée des pouvoirs du juge du référé liberté : l’exemple de la crise sanitaire
    • 2. Le dépassement des limites légales pour adapter l’office du juge à une optique plus subjective de protection des droits et libertés
      • a) Du pouvoir d’injonction légale au pouvoir d’injonction jurisprudentielle
      • i) Des conditions de recevabilité des demandes d’astreintes de plus en plus larges
      • ii) Un pouvoir d’injonction qui aboutit, au final, à protéger les droits et libertés
      • iii) Un juge administratif qui se reconnait le pouvoir de prononcer des injonctions d’office
      • iv) Des injonctions qui se multiplient au cœur des trois référés d’urgence
      • v) Des motifs qui indiquent et ordonnent l’exécution des mesures nécessaires
      • vi) Des injonctions jurisprudentielles qui portent, dorénavant, plus directement, sur l’exécution de la règle de droit
      • b) La réduction de la théorie des actes de gouvernement
      • i) Des actes qui échappent normalement à tout contrôle juridictionnel
      • ii) Des tentatives de contrôle : la théorie de « l’acte détachable »
      • iii) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la Constitution : un refus du Conseil d’État malgré une possible ouverture
      • iv) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la Constitution : un refus confirmé par la Cour de cassation
      • v) Une immunité contentieuse qui pourrait être contestée par rapport à la ConvEDH
      • vi) Un Conseil d’État qui rejette la qualification d’acte de gouvernement en présence d’atteinte aux droits et libertés : l’exemple du décret d’extradition
      • vii) Un Conseil d’État qui tend à limiter les déclarations d’incompétence quand il y a atteinte aux droits et libertés des personnes
      • viii) La pression de plus en plus forte quant à la mise en place d’un contentieux subjectif : l’affaire du « rapatriement des femmes et enfants de djihadistes en Syrie » (1)
      • La pression de plus en plus forte quant à la mise en place d’un contentieux subjectif : l’affaire du « rapatriement des femmes et enfants de djihadistes en Syrie » (2)
      • c) La réduction des cas de mesures d’ordre intérieur
      • i) Des mesures qui remettent en cause les droits et libertés
      • ii) Le cas des mesures prises à l’intérieur des établissements scolaires ou universitaires
      • iii) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : les mesures susceptibles de recours
      • iv) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : les mesures insusceptibles de recours
      • v) Le cas des mesures prises dans le cadre de la fonction publique : une nouvelle réduction récente qui pose la question de la disparition de ces mesures
      • vi) Le cas des mesures prises à l’égard des militaires
      • vii) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : l’arrêt Marie et ses suites
      • viii) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : les arrêts Planchenault, Boussouar et Payet, une nouvelle « grille » de réflexion
      • ix) Le cas des mesures prises au sein des établissements pénitentiaires : une ouverture toujours plus large
      • x) Des mesures d’ordre intérieur qui persistent néanmoins
      • d) Le développement du contrôle normal dans les contentieux touchant aux droits et libertés
      • i) Un changement dans l’intensité du contrôle concernant 3 catégories de sanctions
      • ii) Le cas des sanctions infligées aux administrés : les arrêts Le Cun et Alstom
      • iii) Le cas des sanctions infligées aux administrés : les recours de pleine juridiction contre les décisions de sanction des autorités de régulation (art. L. 311-4 CJA)
      • iv) Le cas des sanctions infligées aux administrés : le cas des recours devant la Cour d’appel de Paris et sa procédure matériellement administrative
      • v) Le cas des sanctions professionnelles infligées aux membres d’une profession réglementée
      • vi) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les fonctionnaires
      • vii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les détenus (1)
      • vii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les détenus (2)
      • viii) Le cas des sanctions disciplinaires institutionnelles : les militaires
      • ix) Des discussions doctrinales quant à la faiblesse supposée du recours pour excès de pouvoir
      • x) Des incidences sur le contrôle opéré par le juge de cassation : l’ambiguïté de l’arrêt Bonnemaison
      • xi) Des incidences sur le contrôle opéré par le juge de cassation : la portée de l’arrêt Bonnemaison

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