RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B… C…a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler la décision de la commission supérieure d’appel de la Fédération française de football du 21 avril 2011 qui lui a infligé une sanction de suspension ferme de toutes fonctions officielles de cinq ans avec date d’effet au 8 mars 2011.
Par un jugement n° 1106003 du 25 août 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision susmentionnée.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 octobre 2015 et 3 mai 2016, la Fédération française de football, représentée par la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, Poupot, demande à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 25 août 2015 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. C… devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
3°) de mettre à la charge de M. C… une somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– le contrôle du juge pour apprécier la proportionnalité d’une sanction porte sur l’adéquation entre le quantum de la sanction et la gravité de la faute qui l’a fondée et non, ainsi que l’ont fait à tort les premiers en juges, en une comparaison des sanctions infligées aux différentes personnes mises en cause ;
– la gravité des fautes commises par M. C… justifie la sanction prononcée à son encontre ;
– le cautionnement d’une fraude est un comportement qui peut justifier le prononcé d’une sanction disciplinaire sur le fondement de l’article 207 des règlements généraux de la Fédération française de football ;
– en tout état de cause, l’article 200 des règlements généraux de la Fédération française de football suffit à fonder légalement la sanction ;
– la méconnaissance du principe d’égalité ne peut être utilement invoquée, la sanction ayant été prise en fonction d’une appréciation individualisée du comportement de M. C… et de la gravité des faits que révélait son comportement.
La requête a été communiquée à M. C…, qui n’a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code du sport ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Michel, premier conseiller,
– les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,
– et les observations de Me A…pour la Fédération française de football.
1. Considérant que la commission régionale de discipline de la ligue de Lorraine de football a prononcé à l’encontre de M. C…, éducateur sportif de l’équipe » U15 » du club de football de Devant-les-Ponts une suspension ferme de toutes fonctions officielles du 8 mars au 30 juin 2011 en raison de sa participation à la dissimulation de pratiques frauduleuses relatives à l’obtention des licences au sein du club ; qu’à la suite de l’appel formé par le club et le conseil fédéral contre cette décision, la commission supérieure d’appel de la Fédération française de football, dans sa formation » amateur « , a prononcé le 21 avril 2011 à l’encontre de l’intéressé une suspension ferme de toutes fonctions officielles de cinq ans avec date d’effet au 8 mars 2011 ; que sur le fondement des dispositions des articles L. 141-4 et R. 141-5 du code du sport, le Comité national olympique et sportif français a été saisi d’une procédure de conciliation obligatoire le 27 juin 2011 par M. C… ; que le 29 août 2011, le conciliateur a proposé à la Fédération française de football d’assortir la sanction en cause d’un sursis de deux ans ; que par un courrier du 27 septembre 2011, M. C… s’est opposé à la proposition du conciliateur puis a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d’une demande tendant à l’annulation de la décision du 21 avril 2011 susmentionnée prononcée à son encontre par la commission supérieure d’appel de la Fédération française de football ; que la Fédération française de football relève appel du jugement du 25 août 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette décision ;
Sur le moyen d’annulation retenu par le tribunal :
2. Considérant qu’aux termes de l’article 207 » Dissimulation et fraude » des règlements généraux de la Fédération française de football : » Est passible des sanctions prévues à l’article 200 des Règlements Généraux ou à l’article 2 de l’annexe 2 des Règlements Généraux, tout licencié et/ou club qui a : (…) dissimulé une information concernant l’obtention ou l’utilisation des licences » ; qu’aux termes de l’article 200 des ces règlements : » Les principales sanctions que peuvent prendre le Comité Exécutif, le C.A. de la L.F.A., les Commissions de la Fédération, le Conseil d’administration et les Commissions de la L.F.P., les Ligues et les Districts, à l’occasion de tout litige dont ils sont saisis ou pour toute infraction de quelque nature qu’elle soit, à l’encontre des joueurs, éducateurs, arbitres, dirigeants, clubs ou groupements de clubs, sont les suivantes en dehors de celles visées aux articles ci-après ou figurant dans les différents statuts : l’avertissement ; / – le blâme ; / – l’amende ; (…) / – l’interdiction de toutes fonctions officielles ; / – la radiation à vie » ;
3. Considérant qu’il est constant que le secrétaire du club de football de Devant-les-Ponts apposait habituellement de manière frauduleuse le cachet d’un médecin sur les bordereaux de demande de licence en faveur du club en vue de leur validation, sans que les joueurs aient fait l’objet d’une visite médicale préalable ; que s’il n’est pas contesté que M. C… n’est pas à l’origine de cette pratique, la Fédération française de Football fait valoir qu’il en avait connaissance depuis l’origine dès lors qu’il n’a pas signé lui-même sa propre licence et qu’il a menacé de la dévoiler à la ligue Lorraine de football en raison du refus du comité de direction du club de lui accorder une lettre de sortie ; que ces éléments ne sont toutefois pas de nature à remettre en cause les dires de M. C… qui a soutenu en première instance sans être contesté, qu’il n’avait été informé de cette pratique qu’au mois de novembre 2010 par l’intermédiaire du dirigeant d’un autre club de football ; que si M. C… a porté à la connaissance des instances dirigeantes du club puis de la ligue régionale de Lorraine de football cette pratique frauduleuse dès le 29 novembre 2010, il n’est pas contesté non plus que le requérant n’a pas immédiatement dénoncé ladite fraude ; que le silence de l’intéressé compte tenu plus particulièrement de l’objet de cette pratique et de ses fonctions d’éducateur sportif du club doit être regardé comme une dissimulation d’informations concernant l’obtention des licences au sens de l’article 207 susmentionné des règlements généraux de la Fédération française de football de nature à justifier une des sanctions prévues à l’article 200 précité des règlements généraux de la Fédération française de football ;
4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la dissimulation d’informations par M. C… a été de courte durée, tout au plus un mois à compter de la date à laquelle il peut être regardé comme en ayant eu connaissance ; qu’en outre, M. C…, qui a informé les instances dirigeantes du club puis la ligue régionale de Lorraine de football de cette pratique frauduleuse, n’a pas bénéficié à titre personnel de l’apposition frauduleuse d’un cachet médical sur sa demande de licence et n’a fait l’objet d’aucune procédure disciplinaire antérieure ; que, dans ces conditions, et alors même que M. C… n’aurait dénoncé cette fraude que pour des motifs personnels et étrangers à l’intérêt de ses fonctions sportives officielles afin d’obtenir la lettre de sortie que lui refusait le comité de direction, la sanction de suspension ferme de toutes fonctions officielles pour une durée de cinq ans prononcée à son encontre par la commission supérieure d’appel de la Fédération française de football le 21 avril 2011 est disproportionnée par rapport à la gravité de la faute commise ;
5. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la Fédération française de football n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 21 avril 2011 de la commission supérieure d’appel de la Fédération française de football qui a infligé à M. C… une sanction de suspension ferme de toutes fonctions officielles de cinq ans avec date d’effet au 8 mars 2011 ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. C…, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la Fédération française de football demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la Fédération française de football est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération française de football et à M. B… C….