REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 avril 2004, présentée pour l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES, représenté par son président, et ayant pour avocat la SCP Deygas-Perrachon-Bes-Cottin ;
L’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES demande à la Cour :
1°) d’annuler l’ordonnance du 12 février 2004 par laquelle le juge des référés du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
2°) de déclarer non avenue l’ordonnance du 30 janvier 2004 par laquelle a été désigné un expert à la demande de la COMMUNE DE SAINT-FONS ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 23 septembre 2004 :
– le rapport de M. Moutte, président-assesseur ;
– les observations de Me Deygas, avocat de l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES et de Me Massa, avocat de la COMMUNE DE SAINT-FONS ;
– et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;
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Classement CNIJ : 54-03-02 54-08-04
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Sur la régularité de l’ordonnance :
Considérant qu’aux termes de l’article R. 531-1 du code de justice administrative : S’il n’est rien demandé de plus que la constatation de faits, le juge des référés peut, sur simple requête qui peut être présentée sans ministère d’avocat et même en l’absence d’une décision administrative préalable, désigner un expert pour constater sans délai les faits qui seraient susceptibles de donner lieu à un litige devant la juridiction. Avis en est donné immédiatement aux défendeurs éventuels. Par dérogation aux dispositions des articles R. 832-2 et R. 832-3, le délai pour former tierce opposition est de quinze jours. ; qu’aux termes de l’article R. 832-1 du même code : Toute personne peut former tierce opposition à une décision juridictionnelle qui préjudicie à ses droits, dès lors que ni elle ni ceux qu’elle représente n’ont été présents ou régulièrement appelés dans l’instance ayant abouti à cette décision. ;
Considérant qu’un membre d’une juridiction administrative ne peut pas participer au jugement d’un recours en tierce opposition dirigé contre une décision juridictionnelle qui a été prise par une formation de jugement à laquelle il appartenait ; qu’il ressort des pièces du dossier que le président délégué, qui a rejeté par l’ordonnance attaquée du 12 février 2004 le recours en tierce opposition formé par l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES contre une ordonnance du 30 janvier 2004, avait précisément déjà pris cette
première décision juridictionnelle ; qu’il ne pouvait dès lors se prononcer régulièrement sur le recours en tierce opposition ; qu’il y a lieu, dès lors, d’annuler l’ordonnance du 12 février 2004, d’évoquer et de statuer sur la demande en tierce opposition présentée par l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES devant le tribunal administratif ;
Sur la tierce-opposition :
Considérant que, par l’ordonnance précitée du 30 janvier 2004, le président délégué du Tribunal administratif de Lyon a désigné, sur demande de la COMMUNE DE SAINT-FONS, un expert à l’effet de dire qui était l’occupant réel de locaux donnés à bail par la commune au …, de dire si les constructions prévues par le bail avaient été réalisées par l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES, de constater l’état d’entretien et d’utilisation des bâtiments donnés à bail et enfin de constater l’affectation de chacune des pièces desdits bâtiments ;
Considérant que les circonstances alléguées selon lesquelles l’expert désigné se serait présenté dans les locaux et aurait procédé à ses constatations sans que l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES n’ait été avisé de l’ordonnance sont postérieures à la procédure juridictionnelle s’étant achevée par l’ordonnance du 30 janvier 2004 ; que, par suite, l’institut requérant n’est pas fondé à soutenir que ladite ordonnance méconnaîtrait le principe de l’instruction contradictoire au sens de l’article L. 5 du code de justice administrative et celui de l’égalité des armes entre parties à une instance ;
Considérant que la demande de la COMMUNE DE SAINT-FONS ne tendait qu’à voir ordonner un constat avant tout procès ; que le fond d’un éventuel litige entre la commune et l’association requérante à propos des conditions d’occupation des locaux donnés à bail par la personne publique pour la création d’un centre d’hébergement est de nature à relever, fût-ce pour partie, de la compétence de la juridiction administrative ; que, dans ces conditions, alors même que la commune avait depuis 2001 saisi le procureur de la République qui avait ouvert une information sur les conditions d’occupation des locaux, le juge des référés du tribunal administratif était valablement saisi et pouvait se prononcer ;
Considérant que si l’ordonnance du 30 janvier 2004 donne comme mission à l’expert de dire si les constructions prévues par le bail ont été réalisées, elle précise, comme il a été exposé précédemment, la nature et la localisation desdites constructions ; que, dans ces conditions, le juge des référés n’a pas confié à l’expert une mission tendant à se prononcer sur le respect de dispositions contractuelles, et par là sur une question de droit, mais lui a seulement demandé de constater la réalisation de travaux ; que les autres mesures ordonnées portent aussi sur la constatation de faits au sens de l’article R. 531-1 susmentionné et non sur une expertise au sens de l’article R. 532-1 du code de justice administrative qui n’aurait pu être ordonnée qu’après instruction contradictoire de la demande dans les conditions prévues par l’article R. 532-2 ;
Considérant que l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES ne précise pas quelles stipulations contractuelles auraient permis à la commune de faire procéder à un tel constat sans avoir recours à une procédure juridictionnelle ; que cette procédure juridictionnelle permet également à la commune d’obtenir une ordonnance du juge des référés revêtue de la force exécutoire pour procéder au constat ; que les constatations ordonnées, opérées par un expert, présentent un caractère utile en cas de litige pour apprécier les conditions d’occupation des locaux ;
Considérant que les dispositions susmentionnées de l’article R. 531-1 du code de justice administrative permettent au juge du référé administratif de faire constater des faits survenus dans des locaux occupés par des personnes privées dans la perspective d’un éventuel litige relevant de la compétence de la juridiction administrative ; que la mesure ordonnée ne constitue pas une visite domiciliaire ;
Considérant que les mêmes dispositions de l’article R. 531-1 n’imposent pas de condition d’urgence pour saisir le juge administratif d’une demande de constat ; que le moyen tiré de ce qu’il n’y avait pas urgence à faire constater les faits, objet de la demande de la commune, est ainsi inopérant ;
Considérant qu’ainsi qu’il vient d’être exposé l’ordonnance du 30 janvier 2004 pouvait être prise sur le fondement de l’article R. 531-1 ; que l’association requérante n’est donc pas fondée à soutenir que la demande présentée par la COMMUNE DE SAINT- FONS constituait un détournement de procédure destiné à méconnaître le principe du contradictoire ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES n’est pas fondé à demander que l’ordonnance du 30 janvier 2004 soit déclarée non avenue et que la demande de constat d’urgence de la COMMUNE DE SAINT-FONS soit rejetée ;
Sur les demandes d’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la COMMUNE DE SAINT-FONS, qui n’est pas partie perdante, soit condamnée à verser une somme quelconque à l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu’il y a lieu en revanche de condamner l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES à verser une somme de 1 000 euros à la COMMUNE DE SAINT-FONS au titre des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : L’ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Lyon susvisée du 12 février 2004 est annulée.
Article 2 : La demande en tierce-opposition de l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES contre l’ordonnance du juge des référés du Tribunal administratif de Lyon du 30 janvier 2004 est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de l’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : L’INSTITUT DE FORMATION RHÔNE-ALPES versera une somme de 1 000 euros à la COMMUNE DE SAINT-FONS en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.