Vu, la décision du Conseil d’État n° 351234 en date du 26 octobre 2012 annulant l’arrêt n° 10NC01377, en date du 30 juin 2011, par lequel la cour administrative d’appel de Nancy, sur requête de l’association Paysages d’Alsace et de l’association Nature Aménagement Réfléchi Territoire Environnement Culture Sauvegardés (N.A.R.T.E.C.S.), a annulé le jugement n° 0903719 du 23 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg avait rejeté leur demande tendant à l’annulation de la délibération du 28 mai 2009 du conseil municipal approuvant la révision du plan d’occupation des sols de la commune de Voegtlinshoffen et renvoyant à la cour administrative d’appel de Nancy le jugement de ces conclusions ;
Vu la requête, enregistrée le 18 août 2010, complétée par un mémoire de production enregistré le 17 septembre 2010, et des mémoires enregistrés les 8 avril 2013, 6 juin 2013, 9 août 2013, 13 novembre 2013, 27 janvier 2014 et 11 février 2014, présentés pour l’association Paysages d’Alsace, dont le siège est au 33, rue de Ferrette, à Bouxwiller (68480) et l’association N.A.R.T.E.C.S., dont le siège est au 2, rue du Muscat, à Voegtlinshoffen (68420), par Me Brand, avocat ;
L’association Paysages d’Alsace et l’association N.A.R.T.E.C.S. demandent à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 0903719 en date du 23 juin 2010 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l’annulation de la délibération en date du 28 mai 2009 par laquelle le conseil municipal de la commune de Voegtlinshoffen a approuvé la révision simplifiée de son plan d’occupation des sols ;
2°) d’annuler ladite délibération ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Voegtlinshoffen la somme de 3 000 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Elles soutiennent que :
– le principe du contradictoire a été méconnu, elles n’ont pas été en mesure de répliquer aux mémoires du département du Haut-Rhin et de la commune de Voegtlinshoffen communiqués par le tribunal le 7 juin 2010, soit deux jours avant l’audience publique ;
– le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que le projet a été modifié postérieurement à l’ouverture de l’enquête publique ;
– le sens des conclusions du rapporteur public lors de l’audience n’était pas conforme au sens indiqué sur l’application Sagace ;
– la délibération attaquée encourt l’annulation dès lors qu’elle approuve un plan qui a été modifié postérieurement à l’enquête publique en méconnaissance de l’article L. 123-10 du code de l’urbanisme ;
– la modification du projet est intervenue après l’enquête publique et suite à l’intervention du directeur de la SEMHA qui ne pouvait être assimilée à une remarque du public ;
– l’étude environnementale est insuffisante et ne traite pas du projet de construction du pavillon de chasse ;
– l’avis du commissaire enquêteur n’est pas motivé ;
– le commissaire enquêteur a censuré des interventions ;
– elle forme une demande d’inscription de faux en application de l’article R. 633-1 du code de justice administrative à l’encontre du plan produit par la commune ;
– le courrier présenté comme émanant du commissaire-enquêteur ne peut être considéré comme sincère ;
– la délibération contestée méconnaît l’article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales du fait de la participation de conseillers intéressés, le tribunal a commis une erreur de droit en substituant l’article L. 2541-17 du code général des collectivités territoriales, non invoqué, à l’article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ;
– la révision a porté sur deux projets en méconnaissance des dispositions de l’article L. 123-19 du code de l’urbanisme et l’un des deux projets est destiné à une utilisation privée des membres de l’association de chasse ;
– à la date de la décision, les parcelles étaient encore comprises dans un espace naturel sensible dans lequel les terrains doivent en application de l’article L. 142-10 du code de l’urbanisme être aménagés pour être ouverts au public ;
– créer une zone urbaine dans un espace naturel sensible est contraire à l’article L. 142-10 du code de l’urbanisme ;
Vu le jugement et la décision contestés ;
Vu, le mémoire enregistré le 4 février 2011, complété les 8 janvier 2013, 16 mai 2013, 15 juillet 2013, 10 septembre 2013, 26 novembre 2013 et 7 février 2014, présentés pour la commune de Voegtlinshoffen, par MeA… ;
Elle conclut :
1°) au rejet de la requête;
2°) à ce que soit mis à la charge de l’association Paysages d’Alsace et de l’association N.A.R.T.E.C.S. le paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative;
Elle soutient que :
– le principe du contradictoire n’a pas été méconnu devant le tribunal administratif, les mémoires de la commune produits avant l’audience devant le tribunal ne comportant pas de moyens nouveaux ; lors de l’audience publique, le rapporteur public a conclu en défaveur des requérantes, contrairement aux mentions portées sur SAGACE ;
– le tribunal a répondu au moyen tiré de l’irrégularité de l’enquête publique tel qu’il était formulé devant lui ;
– s’agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 123-10 du code de l’urbanisme, les appelantes se méprennent sur le rôle de la SEMHA dans la réalisation du projet, cette dernière étant maître d’ouvrage délégué ; dans ces conditions, ses observations auprès du commissaire enquêteur peuvent être assimilées à une remarque du public qui pouvait être prise en compte par la commune ; la modification ne résulte d’ailleurs pas de ces observations mais de l’avis du commissaire-enquêteur ; le projet n’avait pas à être de nouveau soumis à l’architecte des bâtiments de France eu égard au caractère restreint de la modification ; la modification est tout à fait mineure et ne remet pas en cause l’économie générale du projet ; aucun membre de l’association des chasseurs n’est membre du conseil municipal de Voegtlinshoffen ;
– le moyen tiré de la violation des dispositions de l’article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales ne pourra qu’être écarté, les conseillers municipaux incriminés ne pouvant être regardés comme intéressés au sens de ces dispositions ;
– dans le cadre de la révision simplifiée d’un POS, les personnes publiques associées n’émettent pas d’avis sur le projet mais procèdent seulement à un examen conjoint du projet de révision simplifiée : leurs appréciations n’avaient pas à figurer au dossier ;
– aucune évaluation environnementale ne devait être réalisée ;
– s’agissant de la qualité de l’étude environnementale, l’abri de chasse se trouve dans le périmètre de l’étude d’incidences Natura 2000 réalisée par le cabinet Waechter et dans le rapport de présentation de la révision du POS ; les terrains objet du classement UL et du sous-secteur UL 1 sont situés hors du périmètre Natura 2000 ; le projet de construction de l’abri de chasse vient compenser la destruction d’anciens bâtiments affectés aux chasseurs et dont la destruction a été rendue nécessaire par la réalisation du projet viti-vinicole de Voegtlinshoffen mais ne constitue pas une mesure compensatoire ; l’étude Natura 2000 était suffisante ;
– s’agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 300-2 du code de l’urbanisme, le moyen manque en fait, dès lors que la délibération du 26 mai 2008 détaille les adaptations du POS envisagées pour permettre le projet, conformément aux dispositions de l’article L. 123-19 du code de l’urbanisme ; par ailleurs, le projet de révision simplifiée n’a pas été arrêté dans sa nature et ses options essentielles avant que la concertation se déroule et le projet a constamment évolué ;
– s’agissant de la régularité de l’enquête publique : le commissaire enquêteur n’a censuré aucune intervention ; le dossier complet d’enquête publique est versé aux débats ; la jurisprudence Danthony est appliquée de manière très libérale par le juge administratif en matière de POS lorsqu’est invoquée l’irrégularité de l’enquête publique ; l’avis du commissaire enquêteur était suffisamment motivé ; l’impartialité du commissaire-enquêteur ne peut être mise en doute ;
– s’agissant de la violation de l’article L. 123-19 du code de l’urbanisme, le local destiné aux chasseurs est une construction provisoirement affecté à l’association de chasseurs, conformément au droit local ; le secteur UL1 est un secteur de la zone UL et non une zone distincte
– s’agissant de la violation de l’article L. 142-10 du code de l’urbanisme, il sera écarté dès lors qu’il existe une indépendance entre la procédure de déclassement d’un espace naturel sensible et la procédure de révision simplifiée du POS ; un terrain acquis par voie de préemption n’est pas figé ; la zone était déjà urbanisée du fait de la présence d’anciens bâtiments, et desservie par l’ensemble des viabilités ; la délibération du conseil municipal
n’est pas entachée d’erreur manifeste d’appréciation ;
Vu les décisions du président du bureau d’aide juridictionnelle près du tribunal de grande instance de Nancy (section administrative) en date du 14 février 2013, admettant les associations Paysages d’Alsace et N.A.R.T.E.C.S au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 24 février 2014 :
– le rapport de Mme Rousselle, président,
– les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,
– et les observations de Me B…pour les requérantes et Me A…pour la commune de Voegtlinshoffen ;
1. Considérant que, par une délibération en date du 28 mai 2009, le conseil municipal de Voegtlinshoffen a approuvé la révision simplifiée de son plan d’occupation des sols, créant une zone UL destinée à l’implantation d’un complexe viti-vinicole doté d’un hébergement touristique ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les conclusions des associations Paysages d’Alsace et de l’association Nature Aménagement Réfléchi Territoire Environnement Culture Sauvegardés (N.A.R.T.E.C.S.) tendant à l’annulation de cette décision ;
Sur la régularité du jugement :
Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que, devant les premiers juges, les associations requérantes avaient soulevé le moyen, qui n’était pas inopérant, tiré de ce que la commune avait, en méconnaissance des dispositions de l’article L. 123-10 du code de l’urbanisme, d’une part, fait droit à une modification proposée au cours de l’enquête publique par le directeur de la société d’économie mixte de Haute-Alsace en sa qualité de promoteur du projet, et, d’autre part, de ce que la proposition de modification dont s’agit avait été déposée le dernier jour de l’enquête publique, ce qui avait interdit au public d’en être informé et, par suite, de pouvoir la discuter ; qu’en se bornant à indiquer que cette circonstance n’avait pas été de nature à entacher d’irrégularité le déroulement de l’enquête publique dès lors que le commissaire-enquêteur n’était pas tenu de faire usage de la faculté prévue par l’article R. 123-13 du code de l’environnement de proroger la durée de ladite enquête, le tribunal a omis de statuer sur le moyen tel qu’il était formulé ; qu’ainsi, les associations Paysages d’Alsace et Nature Aménagement Réfléchi Territoire Environnement Culture Sauvegardés sont fondées à soutenir que le jugement entrepris doit, pour ce motif, être annulé ;
3. Considérant qu’il y a lieu pour la Cour, statuant par la voie de l’évocation, d’examiner l’ensemble des moyens présentés devant le tribunal administratif ; qu’il ressort des pièces du dossier que, devant les premiers juges, l’association Alsace Nature était volontairement intervenue à l’instance ; qu’afin de permettre le respect du contradictoire, il y a lieu, pour la Cour, avant de statuer sur les conclusions des parties principales de communiquer l’intégralité des éléments de la procédure présentés à hauteur d’appel à l’association Alsace Nature et de recueillir ses observations ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0903719 du tribunal administratif de Strasbourg en date du 23 juin 2010 est annulé.
Article 2 : L’intégralité de la procédure d’appel sera communiquée à l’association Alsace Nature, aux fins qu’elle produise ses observations dans le délai d’un mois à compter de la notification du présent arrêt, avant dire droit sur les conclusions des associations Paysages d’Alsace et Nature Aménagement Réfléchi Territoire Environnement Culture Sauvegardés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l’association Paysages d’Alsace, à l’association Nature Aménagement Réfléchi Territoire Environnement Culture Sauvegardés, à l’association Alsace Nature et à la commune de Voegtlinshoffen.