Demandeur : M. Rémy X…
Défendeur : M. le Procureur général près la cour d’appel de Dijon
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que l’enfant M… Y… est né le …, à Victorville (Californie, Etats-Unis d’Amérique) de Mme Z…, de nationalité américaine, qui avait conclu avec M. Y…, de nationalité française, une convention de gestation pour autrui ; qu’il a été reconnu par Mme Z… et M. Y… ; que, le 1er novembre 2013, ce dernier a épousé M. X…, de nationalité française, auquel il était lié par un pacte civil de solidarité depuis 2004 ; que, par requête du 3 juillet 2014, M. X… a saisi le tribunal de grande instance d’une demande d’adoption simple de l’enfant M… ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 353 et 361 du code civil, ensemble les articles 3, § 1, de la Convention de New-York du 20 novembre 1989 relative aux droits de l’enfant et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, l’adoption est prononcée à la requête de l’adoptant par le tribunal qui vérifie si les conditions de la loi sont remplies et si l’adoption est conforme à l’intérêt de l’enfant ; que, selon les deux derniers, l’enfant a droit au respect de sa vie privée et familiale et, dans toutes les décisions qui le concernent, son intérêt supérieur doit être une considération primordiale ;
Attendu que, pour rejeter la demande d’adoption simple, l’arrêt retient que la naissance de l’enfant résulte d’une violation, par M. Y…, des dispositions de l’article 16-7 du code civil, aux termes duquel toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle d’une nullité d’ordre public ; Qu’en statuant ainsi, alors que le recours à la gestation pour autrui à l’étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l’adoption, par l’époux du père, de l’enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l’adoption sont réunies et si elle est conforme à l’intérêt de l’enfant, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles 348 et 361 du code civil ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que lorsque la filiation de l’enfant est établie à l’égard de son père et de sa mère, ceux-ci doivent consentir l’un et l’autre à l’adoption ;
Attendu que, pour rejeter la demande d’adoption, l’arrêt retient encore que le consentement initial de Mme Z…, dépourvu de toute dimension maternelle subjective ou psychique, prive de portée juridique son consentement ultérieur à l’adoption de l’enfant dont elle a accouché, un tel consentement ne pouvant s’entendre que comme celui d’une mère à renoncer symboliquement et juridiquement à sa maternité dans toutes ses composantes et, en particulier, dans sa dimension subjective ou psychique ;
Qu’en statuant ainsi, par des motifs inopérants, alors qu’elle constatait l’existence, la sincérité et l’absence de rétractation du consentement à l’adoption donné par la mère de l’enfant, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 24 mars 2016, entre les parties, par la cour d’appel de Dijon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris ;
Président : Mme Batut
Rapporteur : Mme le Cotty, conseiller référendaire
Avocat général : M. Ingall-Montagnier, premier avocat général
Avocats : SCP Spinosi et Sureau