LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
– M. Philippe X…,
contre l’arrêt de la cour d’appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 16 décembre 2009, qui, pour non-assistance à personne en danger, l’a condamné à cinq mois d’emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que Marie Y…, âgée de 9 mois, est décédée, le 21 décembre 2003, des suites d’une gastro-entérite, au centre hospitalier de Poissy ; qu’à l’issue de l’information ouverte sur les circonstances de ce décès, M. X…, médecin régulateur de l’Association de la médecine d’urgence des Yvelines, intervenant au centre de réception des appels médicaux du SAMU de ce département, contacté à deux reprises par la mère de l’enfant qui avait appelé, le même jour, le numéro d’urgence à 20 h 23 puis à 22 h15, s’est vu reprocher de n’avoir pas pris les mesures permettant d’éviter la mort de l’enfant, pour n’avoir pas permis sa prise en charge et sa réhydratation en temps utile ; que le tribunal l’a condamné pour homicide involontaire et s’est déclaré incompétent pour statuer sur les demandes de dommages-intérêts présentées par les consorts Y… ; que, sur les appels du prévenu et du parquet, la cour d’appel, après avoir reçu les observations des parties, a retenu les faits sous la qualification de non-assistance à personne en péril ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 223-6, alinéa 2, du code pénal et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué a déclaré M. X… coupable du délit de non-assistance à personne en danger et l’a condamné à la peine de cinq mois d’emprisonnement avec sursis ;
« aux motifs qu’il appartient à la cour de vérifier que les faits reprochés ne sont pas susceptibles d’emporter condamnation sous la qualification de non-assistance à personne en péril porté aux débats par le ministère public ; qu’en application des dispositions de l’article 223-6 du code pénal, ce délit consiste à s’abstenir de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour soi ou pour les tiers, on peut lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant les secours ; que, le 21 décembre 2003 à 23 heures 45, Marie Y… est décédée au centre hospitalier de Poissy des suites d’une gastro-entérite très importante et d’une déshydratation sévère après que les services de l’hôpital aient tenté de la sauver à compter de 23 heures 15, heure de son arrivée à l’hôpital, où elle avait été transportée par ses parents, dans un tableau de déshydratation extrême-aréactive, très cernée, le teint grisâtre, les muqueuses sèches et en état de choc avec une perte de poids d’au moins 15% ; qu’il résulte par ailleurs de l’expertise que l’état de l’enfant s’est aggravé durant la journée du 21 décembre 2003 sur une période de douze heures environ et qu’entre 20 heures et 22 heures s’est installé un état de choc patent ; que Marie Y… avait déjà perdu un tiers de chance de survie lors du premier appel au 15, ses chances de survie lors du second étaient inférieures à deux sur trois ; que Marie Y… était en conséquence en état de péril imminent dès le premier appel de sa mère au 15 à 20 heures 23 ; qu’il résulte des éléments du dossier, des pièces produites et des débats que, lorsqu’une personne appelle le centre de réception et de régulation des appels médicaux du Samu des Yvelines en composant le 15, elle entre en contact avec un opérateur non médical qui peut en fonction des premiers éléments fournis soit déclencher le SMUR immédiatement, soit transmettre l’appel à un médecin régulateur du SAMU – lorsqu’il lui apparaît qu’existe une détresse vitale – ou à un médecin régulateur de l’Association de la médecine d’urgence des Yvelines ; que le rôle de ce dernier est de reprendre l’interrogatoire de l’interlocuteur et au vu des éléments recueillis, d’opter pour la réponse la plus adéquate : simple conseil, médecin de garde, médecin de SOS médecin, maison médicale de garde, premier secours pompiers, ambulance privée, ambulance de réanimation SMUR ; que, dans ce dernier cas, il doit prendre contact avec le médecin régulateur du SAMU et lui transmettre la fiche informatique ; que, dans le cadre de son activité de régulation, il incombe, au premier chef au médecin régulateur ainsi mis à disposition par l’AMU 78 au sein du centre de réception et de régulation des appels médicaux du SAMU, de tenter d’apprécier le plus exactement possible la gravité de la situation du malade et le risque encouru par celui-ci avant, dans un deuxième temps, de choisir parmi les moyens dont il dispose la solution la plus adaptée à cette situation ; que la gravité potentielle de la gastro-entérite du nourrisson, liée à la déshydratation de celui-ci, est connue de tout professionnel – a fortiori urgentiste – qui, dans le cadre de l’évaluation du risque doit porter son attention sur les signes de gravité de l’état du bébé ; qu’il appartient à la cour, qui n’est pas tenue par la qualification de faute simple par négligence retenue par l’expert, d’apprécier les conséquences qu’il convient de tirer au plan pénal de la régulation réalisée par M. X… ; que l’évaluation de l’état du patient présente une spécificité dans le cadre de l’activité de régulation dans la mesure où le médecin ne voit pas celui-ci et qu’il ne peut fonder son analyse que sur les éléments qui lui sont fournis oralement par un interlocuteur qu’il ne connaît pas ; qu’ainsi, la cour considère que certains éléments relevés par l’expert relatifs à l’appréciation du poids de l’enfant, de la persistance du pli cutané, du temps de recoloration cutanée, ou de l’état de la fontanelle peuvent être difficiles à demander aux parents d’un enfant et l’absence de question de M. X… sur ce point lors des entretiens téléphoniques ne sera pas considéré comme fautif ; qu’il convient néanmoins d’observer que le guide d’aide à la régulation établi en 2004 mentionne certains de ces éléments parmi les critères de gravité ; qu’en revanche, ainsi que l’a retenu l’expert et dès la première conversation, la gastro entérite elle-même n’est guère étudiée par M. X…, puisque les selles ne sont pas quantifiées, ni leur qualité précisées, complètement hydriques ou non, sanglantes ou non ; que le médecin régulateur ne se renseigne pas sur l’heure et sur la date du début des signes digestifs ainsi que sur l’évolutivité du syndrome dysentérique ; que, de plus, existent des vomissements qui gênent l’absorption d’eau et qui ne sont pas documentés ; que la cour considère que de tels renseignements devaient être demandés à la mère de l’enfant ; que, par ailleurs, lors de cette première conversation, M. X… interroge Mme Z… pour savoir si l’enfant accepte de se réhydrater, ce à quoi elle répond positivement, mais il n’y a pas de quantification des apports d’eau qui constitue l’un des éléments essentiels à la détermination d’un seuil, en fonction de l’état clinique, à partir duquel il est indispensable de passer à la réhydratation par voie veineuse ainsi que l’a relevé l’expert, médecin attaché à un service dé réanimation pédiatrique et dont le rapport n’a pas donné lieu à une demande de contre expertise du prévenu ; qu’enfin, si M. X… s’assure que l’enfant est consciente et s’il informe la mère sur le retentissement neurologique en lui préconisant d’aller à l’hôpital si l’enfant refuse de s’alimenter, si elle est somnolente et molle, la cour retient avec l’expert que si l’existence de signes neurologiques témoigne d’une déshydratation supérieure mettant la vie en jeu, leur absence ne permet en rien de postuler que la perte de poids est inférieure à ces chiffres d’où la nécessité de l’étude d’autres critères ; qu’il est ainsi établi par l’expertise qu’au terme de ce premier appel, Mme Z… a été faussement rassurée par le médecin régulateur par le fait que buvant encore et n’ayant pas de troubles neurologiques sévères, l’enfant n’avait pas besoin d’être emmenée à l’hôpital, alors qu’il est probable qu’une consultation aux urgences de l’hôpital ou à fortiori l’envoi d’un SMUR aurait considérablement modifié le pronostic et permis la survie de l’enfant ; qu’ainsi, lors de la première conversation, M. X… n’a pas réalisé une analyse suffisamment rigoureuse lui permettant de déterminer précisément l’état de l’enfant et d’y répondre de manière adaptée, en conseillant à la mère d’aller immédiatement à l’hôpital ou en déclenchant les secours ; que la cour considère cependant, s’agissant de ce premier appel, que compte tenu de l’activité importante du centre de régulation ce jour là, lié à une épidémie de gastro-entérite, et du nombre d’appels reçu par l’intéressé, soit quarante-sept entre 20 heures et minuit, du fait que la mère de l’enfant a indiqué au début de la conversation appeler pour un conseil, l’interrogatoire lacunaire ainsi réalisé par M. X… ne permet pas à ce stade de caractériser une omission volontaire de porter secours ; qu’au moment du second appel, l’aggravation de la diarrhée, l’hypotonie, le refus de s’alimenter, l’existence persistante de vomissements, la froideur des extrémités, le fait que l’enfant est hagarde, prostrée, amorphe, bougeant peu témoignent, ainsi que le relève l’expert, d’une déshydratation aggravée bien supérieure à 10% ; qu’au cours de cet appel, Mme Z… indique qu’elle pense que c’est grave et que l’état de son enfant empire, elle fournit à M. X… des éléments clairs concernant l’aggravation de la diarrhée (« elle se vide complètement, j’arrête pas de changer les couches »), le fait que l’enfant bouge peu, est amorphe, prostrée, et qu’elle présente une froideur des extrémités ; qu’ainsi que l’établit l’expertise, elle donne à M. X… au cours de l’entretien tous les éléments inquiétants d’une situation pathologique gravissime chez un nourrisson (aggravation de la dysenterie et échec du traitement correctement suivi, signes péjoratifs, hémodynamique et neurologique) ; que Mme Z… fait état de son inquiétude et sollicite l’envoi d’un SMUR alors que SOS Médecin lui a indiqué qu’un délai de deux heures était nécessaire avant son arrivée ; que M. X… reprend l’idée que si l’enfant se réhydrate par la bouche, il n’y a pas de problème ; que la mère ayant indiqué une seule fois à propos de l’Adiaril, « elle le prend mais bon euh… », celui-ci intervient aussitôt en parlant d’élément majeur ; qu’il s’informe pour savoir si l’enfant est consciente et éveillée, à la recherche des signes de gravité les plus avancés, alors qu’il résulte de l’expertise que le retentissement neurologique (torpeur, léthargie, hypotonie voire coma) d’une déshydratation constitue un stade très avancé et grave ; que, malgré la gravité manifeste de l’état de l’enfant à ce moment, l’interrogatoire qu’il mène présente le même caractère lacunaire que lors du premier appel, les questions omises lors du premier entretien n’étant pas non plus posées et notamment celles permettant de préciser et de quantifier ce qu’ingère exactement l’enfant ; qu’il refuse d’envoyer un SMUR estimant que le cas ne s’y prête pas, estime que le délai de deux heures pour la venue de SOS Médecin est raisonnable et conseille à plusieurs reprises à la mère d’emmener l’enfant à l’hôpital, tout en précisant au cours de la conversation qu’elle doit agir de la sorte si l’état de l’enfant l’inquiète, faisant par ailleurs état d’éléments rassurants ; que, lors de cet appel, et alors que le fait que la mère appelle à nouveau le 15 devait particulièrement appeler l’attention du médecin régulateur, M. X… n’a pas posé les questions qui auraient permis de préciser l’état de l’enfant dont il ne pouvait, en sa qualité de médecin régulateur urgentiste, ignorer la gravité au regard des données qui, ainsi que le souligne l’expert, ont été à maintes reprises fournies par Mme Z… ; qu’il s’est en outre montré faussement rassurant ; que, même à tenir compte des difficultés propres à son activité, au regard des nombreux appels qu’il a régulé ce soir là, force est de constater qu’il s’est volontairement placé en position de ne pouvoir apprécier complètement l’état de l’enfant, afin de déterminer le moyen d’assistance le plus adapté à mettre en oeuvre alors qu’il ne pouvait manquer, en tout état de cause, d’avoir conscience de l’état de péril imminent de celui-ci au regard des éléments dont il disposait ; qu’il résulte de l’expertise que l’état de Marie Y… lors du second appel nécessitait l’envoi d’un SMUR ; que l’expertise établit par ailleurs que lorsque des signes neurologiques existent dans un cas de ce type, il n’est pas adéquat de recommander à une famille d’attendre encore deux heures avec le même traitement sans rien tenter d’autre et qu’en l’absence d’envoi d’un SMUR, le transfert effectué à l’hôpital par la famille s’est effectué dans de mauvaises conditions (enfant non perfusée, non déchoquée) ; que la nécessité de l’envoi d’un SMUR est corroborée par les conclusions mêmes de M. X… dans sa note en délibéré – selon lesquelles s’il avait eu conscience de la gravité de l’état de santé de Marie, il n’aurait pas manqué d’envoyer un SMUR ; qu’en outre, l’envoi d’un SMUR constitue, aux termes du guide d’aide à la régulation, la décision à prendre en cas de déshydratation avérée, de mauvaise tolérance fonctionnelle ou de signes septiques majeurs ; qu’enfin, il appartenait en tout état de cause à M. X…, compte tenu des éléments portés à sa connaissance de se mettre en contact avec le régulateur du SAMU afin de permettre à celui-ci d’apprécier la nécessité de déclencher un tel secours ; que le fait que l’état de Marie Y… ait été gravement altéré lors du second appel, ce qui rendait incertain les chances de succès d’une prise en charge rapide par le SMUR à ce stade, est sans incidence sur le délit de non-assistance à personne en péril ; que, dans ces conditions, en se limitant à proposer à la mère d’attendre l’arrivée de SOS médecin censé intervenir deux heures plus tard et en la laissant analyser seule des signes de gravité pour déterminer si elle devait se rendre aux urgences de l’hôpital, M. X…, a commis le délit de non-assistance à personne en danger ;
« 1°) alors que constitue le délit de non-assistance à personne en danger le fait de s’abstenir volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours ; qu’en se bornant à affirmer que M. X… n’avait pas posé à Mme Z… les questions pour lui permettre de poser un diagnostic exact et qu’ainsi, il s’était volontairement placé en position de ne pouvoir apprécier complètement l’état de l’enfant, afin de déterminer le moyen d’assistance le plus adapté à mettre en oeuvre, sans pour autant caractériser la volonté prétendue de M. X… de ne pas poser les questions adéquates dans le but de ne pas porter secours, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé l’élément intentionnel de l’infraction, a privé sa décision de base légale ;
« 2°) alors que constitue le délit de non-assistance à personne en danger le fait de s’abstenir volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours ; qu’en s’abstenant de relever à l’encontre de M. X… un refus de porter assistance, en l’état d’une conscience avérée de la nécessité des secours, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision ;
« 3°) alors que constitue le délit de non-assistance à personne en danger le fait de s’abstenir volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours ; qu’en décidant que M. X… s’était rendu coupable d’un tel délit, après avoir pourtant constaté que sa mission consistait, non pas à poser un diagnostic en présence du malade, mais à tenter d’apprécier la situation afin de déterminer les mesures pouvant être mises en oeuvre, et qu’il avait expressément indiqué à Mme Y…, qui se trouvait en présence de l’enfant, que si l’état de celui-ci l’inquiétait, il était impératif de se rendre au service des urgences de l’hôpital, ce dont il résultait que M. X… avait délivré le conseil pouvant permettre de porter secours à l’enfant, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales qui s’évinçaient de ses propres constatations » ;
Attendu que les énonciations de l’arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s’assurer que la cour d’appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu’intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D’où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles de la loi des 16 et 24 août 1790, du décret du 16 fructidor an III et de l’article 593 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
« en ce que la cour d’appel a décidé que la juridiction répressive n’était pas incompétente pour connaître des conséquences dommageables des faits reprochés à M. X… ;
« aux motifs que M. X…, seul appelant de la décision déférée concernant l’action civile, demande à la cour de dire, comme les premiers juges, que la juridiction répressive n’est pas compétente pour se prononcer sur les intérêts civils ; que la question de la compétence des juridictions judiciaires ou administratives pour connaître de l’action en réparation de la faute de l’agent d’un service publique est d’ordre public que M. X…, médecin régulateur employé par une association d’aide médicale d’urgence de droit privé mais participant en qualité d’agent au centre de réception et de régulation des appels médicaux du SAMU 78, service public, en application des dispositions de l’article L. 6112-5 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable au marnent des faits et du décret du 16 décembre 1987 relatif aux missions et à 1′ organisation des unités participant au SAMU ne peut voir sa responsabilité mise en cause que si est établie l’existence d’ une faute personnelle de sa part ; que l’infraction de non assistance à personne en danger qu’il a commise, en ne prenant pas en considération les nombreux signes de gravité qui étaient portés à sa connaissance par la mère de Marie Y…, enfant en péril, en s’abstenant de poser les questions qui lui auraient permis de préciser l’état de celle-ci puis en ne déclenchant pas les secours appropriés, dans les circonstances sus-mentionnées, constitue une faute personnelle détachable de ses fonctions ; qu’il convient en conséquence d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle a constaté l’incompétence de la juridiction répressive pour connaître des demandes formées par les parties civiles ; qu’il y a lieu de constater que celles-ci n’étant pas appelantes du jugement déféré, ne formulent pas de demandes devant la présente cour ;
« alors que les juridictions de l’ordre judiciaire ne sont pas compétentes pour statuer sur la réparation des conséquences dommageables de la faute commise par un agent public, hormis l’hypothèse où cette faute présente un caractère personnel, de sorte qu’elle est détachable des fonctions de l’agent ; que la cour d’appel, qui s’est bornée à reprocher à M. X…, de s’être placé en position de ne pouvoir apprécier complètement l’état de l’enfant, en s’abstenant de poser les questions adéquates et en ne prenant pas les mesures adaptées à l’état de santé de celui-ci, n’a pas caractérisé à son encontre une faute personnelle, détachable du service, de sorte qu’elle n’a pas légalement justifié sa décision de retenir la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire pour connaître des conséquences dommageables des faits reprochés » ;
Vu la loi des 16 et 24 août 1790 ;
Attendu que l’agent d’un service public n’est personnellement responsable, devant les juridictions répressives, des conséquences dommageables de l’acte délictueux qu’il commet que si celui-ci constitue une faute détachable de ses fonctions ;
Attendu que, pour retenir la compétence du juge répressif pour liquider le préjudice subi par les consorts Y…, la cour d’appel retient que M. X…, médecin régulateur employé par une association d’aide médicale d’urgence de droit privé mais participant en qualité d’agent au centre de réception et de régulation des appels médicaux du SAMU 78, service public, en application des dispositions de l’article L. 6112-5 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable au moment des faits et du décret du 16 décembre 1987 relatif aux missions et à l’organisation des unités participant au SAMU, ne peut voir sa responsabilité mise en cause que si est établie l’existence d’une faute personnelle de sa part ; que la cour d’appel indique que l’infraction de non-assistance à personne en danger qu’il a commise, en ne prenant pas en considération les nombreux signes de gravité qui étaient portés à sa connaissance par la mère de Marie Y…, enfant en péril, en s’abstenant de poser les questions qui lui auraient permis de préciser l’état de celle-ci, puis en ne déclenchant pas les secours appropriés, constitue une faute personnelle détachable de ses fonctions dont les conséquences doivent être réparées par le juge répressif ; que les juges ajoutent que les parties civiles non appelantes ne formulent pas de demandes devant la cour ;
Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que la faute, quelle que soit sa gravité, commise par un agent du service public, dans l’exercice de ses fonctions et avec les moyens du service, n’est pas détachable de ses fonctions, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D’où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et attendu que, le prévenu ne pouvant pas voir engager sa responsabilité civile personnelle devant le juge répressif, il n’y a plus rien à juger ; que la cassation doit être prononcée sans renvoi ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l’arrêt susvisé de la cour d’appel de Versailles, en date du 16 décembre 2009, en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n’y avoir lieu à renvoi ;
DIT n’y avoir lieu à application au profit des consorts Y… de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Louvel président, M. Le Corroller conseiller rapporteur, MM. Palisse, Arnould, Nunez, Mme Radenne conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, M. Roth, Mme Moreau conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Mazard ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;