RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf février deux mille treize, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller GUÉRIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l’avocat général DESPORTES ;
Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formulée par mémoire spécial reçu le 25 janvier 2013 et présenté par :
– M. Jérémy X…,
à l’occasion du pourvoi formé par lui contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de BORDEAUX en date du 15 janvier 2013 qui, sur demande des autorités judiciaires du Royaume-Uni, a accordé l’extension des effets du mandat d’arrêt européen décerné à son encontre ;
Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« L’article 695-46 § 4 du Code de procédure pénale, en ce qu’il énonce que, dans l’hypothèse où une chambre de l’instruction est saisie pour statuer, après la remise de la personne recherchée, sur toute demande des autorités compétentes de l’Etat membre d’émission en vue de consentir à des poursuites ou à la mise à exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté prononcée pour d’autres infractions que celles ayant motivé la remise commises antérieurement à celle-ci, la chambre de l’instruction statue « sans recours », est-il contraire à la constitution, et notamment au principe d’égalité devant la loi et la justice énoncé par les articles 6 et 16 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et au principe du droit à un recours juridictionnel effectif et à un accès égal à la justice tel que résultant de l’article 16 de la même déclaration, en ce qu’il prive du contrôle de la violation de la loi, sans aucune justification, une personne faisant l’objet d’une demande d’extension des effets d’une remise à une autorité judiciaire étrangère ? » ;
Attendu que la disposition législative contestée est applicable à la procédure et n’a pas été déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ;
Attendu que la question présente un caractère sérieux en ce que la disposition critiquée de l’article 695-46 du code de procédure pénale est susceptible de constituer une atteinte au droit à un recours effectif et au principe d’égalité devant la justice dès lors que, si la décision de remise à des autorités judiciaires étrangères prise en exécution d’un mandat d’arrêt européen à l’encontre d’une personne n’y consentant pas peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation, tel n’est pas le cas de l’arrêt de la chambre de l’instruction qui statue sans recours sur la demande de l’Etat membre d’émission en vue de consentir à des poursuites ou à la mise à exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté prononcées pour d’autres infractions que celles ayant motivé la remise, commises antérieurement à celle-ci;
D’où il suit qu’il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;
Par ces motifs :
RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Louvel président, M. Guérin conseiller rapporteur, Mme Guirimand, MM. Beauvais, Straehli, Finidori, Monfort, Buisson conseillers de la chambre, Mme Divialle, MM. Maziau, Barbier, Talabardon conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Desportes ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;