REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le recours du MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 13 juillet 1983 au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, et tendant à ce que le Conseil d’Etat :
1°) annule le jugement du tribunal administratif de Caen en date du 25 janvier 1983 en tant que, par ce jugement, ce tribunal a accordé à M. Albert X… la décharge des cotisations d’impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1973, 1974 et 1975 ;
2°) rétablisse M. X… au rôle de l’impôt sur le revenu au titre des années 1973, 1974 et 1975 dans les rôles de la commune de Lantheuil (Calvados) à raison de l’intégralité des droits et pénalités qui lui avaient été assignés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
– le rapport de M. Querenet Y… de Breville, Conseiller d’Etat,
– les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier devant le tribunal administratif que, pour contester les impositions consécutives à la fixation des nouveaux forfaits qui lui ont été notifiés, M. X… a soulevé pour la première fois en première instance, par un mémoire complémentaire enregistré le 22 septembre 1980, après l’expiration du délai de recours contentieux, un moyen tiré de ce qu’il aurait été privé, en matière de procédure d’imposition, des garanties prévues à l’article 1649 septies du code général des impôts alors applicable ; que ce moyen, qui se rattache à une cause juridique différente de celle sur laquelle était fondé le moyen unique développé dans sa demande introductive d’instance et qui était relatif au bien-fondé de l’imposition, n’est pas d’ordre public ; qu’il constituait ainsi une demande nouvelle qui, présentée tardivement, n’était pas recevable ; que le ministre appelant est fondé à soutenir que, par suite, c’est à tort que, pour prononcer la décharge des impositions litigieuses, le tribunal administratif a retenu l’irrégularité alléguée de la procédure d’imposition ;
Considérant, toutefois, qu’il appartient au Conseil d’Etat saisi de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner l’autre moyen soulevé par M. X… devant le tribunal administratif ;
Considérant que les impositions à l’impôt sur le revenu dont M. X… conteste le bien-fondé ont été établies au titre des années 1973, 1974 et 1975 sur la base d’un montant forfaitaire de bénéfices industriels et commerciaux fixé par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires ; qu’il appartient, en conséquence, au contribuable, pour obtenir la décharge ou la réduction des impositions, d’apporter devant le juge de l’impôt tous éléments comptables ou extra-comptables de nature à permettre d’apprécier le bénéfice que son entreprise de friperie pouvait normalement produire compte tenu de sa situation propre ; que, si M. X… soutient, à cette fin, que la comptabilité occulte qu’il tenait avait pour seul objet de faire apparaître des recettes plus élevées que dans la réalité afin d’obtenir un prêt d’une banque, ses allégations sur ce point sont dépourvues de tout commencement de justification et, par suite, ne peuvent, en tout état de cause, être regardées comme des éléments extra-comptables dont il appartiendrait au juge de tenir compte ; qu’il en est de même des critiques, de caractère général, qu’il formule en ce qui concerne les « éléments du train de vie », correspondant aux travaux de réparation et d’entretien réalisés par lui dans son château, et les prêts qu’il avait consentis à ses amis, dont la commission a fait état dans les motifs de sa décision ; que la circonstance que les forfaits de bénéfices établis au titre de la période biennale 1977-1978 s’élèvent seulement au quart environ du montant de ceux qui ont été fixés pour les trois années au titre desquelles les impositions litigieuses sont établies ne constitue pas, par elle-même, un élément permettant de déterminer le montant du bénéfice que son entreprise pouvait normalement produire au cours desdites années ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L’ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est fondé à demander que M. X… soit rétabli au rôle de l’impôt sur le revenu au titre des années 1973, 1974 et 1975 à raison de l’intégralité des droits et pénalités qui lui avaient été assignés et que le jugement attaqué soit réformé en ce sens ;
Article 1er : M. X… est rétabli au rôle de l’impôt sur le revenu au titre des années 1973, 1974 et 1975 dans la commune de Lantheuil (Calvados) à raison de l’intégralité des droits et pénalités qui lui avaient été assignés.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Caen en date du 25 janvier 1983 est réformé en ce qu’il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X… et au ministre délégué auprès du ministre d’Etat, ministre de l’économie, des finances et du budget, chargé du budget.