RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 26 janvier 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d’Etat, présentée par M. Mantumona X…, détenu à la Maison d’arrêt de Rouen, … Seine-Maritime , et tendant à ce que le Conseil d’Etat :
°1 annule le jugement en date du 30 novembre 1984 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté la demande de M. X… et tendant à l’annulation de l’arrêté d’expulsion en date du 3 juillet 1984 pris à son encontre, ainsi que de la décision de le reconduire dans son pays d’origine contenue dans le procès-verbal de notification du 17 juillet 1984 ;
°2 annule cet arrêté d’expulsion, ainsi que cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l’ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 29 octobre 1981 ;
Vu l’ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu :
– le rapport de M. Wahl, Maître des requêtes,
– les conclusions de M. Vigouroux, Commissaire du gouvernement ;
En ce qui concerne l’arrêté du 3 juillet 1984 ordonnant l’expulsion de M. X… :
Considérant, d’une part, que si M. X… conteste être l’auteur des faits de falsification de documents administratifs et de chèques qui ont notamment motivé l’arrêté attaqué, il est constant qu’il a été condamné pour ces mêmes faits par un arrêt de la cour d’appel de Paris du 28 juin 1983 devenu définitif ; que, dès lors, il n’est pas fondé à soutenir que ledit arrêté repose sur des faits matériellement inexacts ;
Considérant, d’autre part, que la circonstance alléguée que les falsifications reprochées à l’intéressé concernent des documents administratifs étrangers et, de ce fait, n’auraient causé aucun « préjudice » à l’Etat français, est sans incidence sur la légalité de la mesure d’expulsion attaquée, qui a été prise en considération du danger pour l’ordre public que révélait le comportement du requérant ;
Considérant, enfin, que la décision contenue dans le procès-verbal de la notification du 17 juillet 1984 et prévoyant que l’intéressé serait reconduit sous escorte à destination de son pays d’origine est distincte de l’arrêté d’expulsion du 3 juillet précédent ; que son illégalité serait en elle-même sans influence sur la légalité dudit arrêté dont l’auteur n’avait pas à préciser le pays dans lequel l’intéressé devait se rendre ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. X… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du ministre de l’intérieur lui enjoignant de quitter le territoire français ;
En ce qui concerne la décision contenue dans le procès-verbal de notification en date du 17 juillet 1984 :
Considérant que le procès-verbal joint à la demande formée par M. X… devant le tribunal administratif mentionne qu’à sa libération de prison celui-ci « sera conduit sous escorte à destination de son ays d’origine » ; qu’eu égard à l’argumentation de cette demande, notamment fondée sur le risque que comporterait pour lui son retour au Zaïre, l’intéressé doit être regardé comme ayant également présenté des conclusions tendant à l’annulation de cette décision, distincte de l’arrêté d’expulsion ; qu’il y a lieu d’annuler le jugement attaqué pour défaut de réponse à ces conclusions et d’évoquer l’affaire sur ce point ;
Considérant que, pour demander l’annulation de la décision attaquée, le requérant soutient que son retour dans son pays d’origine lui ferait courir des risques graves en raison de son opposition au régime politique de ce pays ;
Considérant que M. X… dont la demande d’admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision de l’office français de protection des réfugiés et apatrides devenue définitive, ne justifiait, à la date de la décision attaquée, d’aucune circonstance particulière de nature à faire légalement obstacle à sa reconduite à destination de son pays d’origine ; que, dès lors, il n’est pas fondé à soutenir que la décision contenue dans le procès-verbal de notification du 17 juillet 1984 serait entachée d’excès de pouvoir ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif deRouen en date du 30 novembre 1984 est annulé en tant qu’il a omis de statuer sur les conclusions de M. X… dirigées contre la décision de le reconduire sous escorte dans son pays d’origine, contenue dans le procès-verbal de notification du 17 juillet 1984.
Article 2 : Lesdites conclusions et le surplus des conclusions de la requête de M. X… sont rejetés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. X… et au ministre de l’intérieur.