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CJCE, 10 janvier 2008, Commission européenne contre Portugal, Aff. n°C-70/06

Citer : Revue générale du droit, 'CJCE, 10 janvier 2008, Commission européenne contre Portugal, Aff. n°C-70/06, ' : Revue générale du droit on line, 2008, numéro 57471 (www.revuegeneraledudroit.eu/?p=57471)


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Décision citée par :
  • Christophe De Bernardinis, §2. Des juges ordinaires, juges de droit commun des garanties européennes


ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

10 janvier 2008 (*)

«Manquement d’État – Arrêt de la Cour constatant le manquement – Inexécution – Sanction pécuniaire»

Dans l’affaire C‑70/06,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 228 CE, introduit le 7 février 2006,

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. X. Lewis, A. Caeiros et P. Andrade, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République portugaise, représentée par M. L. Fernandes, Mme P. Fragoso Martins et M. J. de Oliveira, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

LA COUR (première chambre),

composée de M. P. Jann, président de chambre, MM. A. Tizzano (rapporteur), R. Schintgen, A. Borg Barthet et E. Levits, juges,

avocat général: M. J. Mazák,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 5 juillet 2007,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 9 octobre 2007,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour:

–        de constater que, en n’ayant pas pris les mesures nécessaires pour assurer l’exécution de l’arrêt du 14 octobre 2004, Commission/Portugal (C-275/03, non publié au Recueil), la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 228, paragraphe 1, CE;

–        de condamner la République portugaise à lui payer, sur le compte «Ressources propres de la Communauté européenne», une astreinte d’un montant de 21 450 euros par jour de retard dans l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, à compter du prononcé du présent arrêt et jusqu’à l’exécution dudit arrêt Commission/Portugal, ainsi que de

–        condamner la République portugaise aux dépens.

 Le cadre juridique

2        Les troisième, quatrième et sixième considérants de la directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l’application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux (JO L 395, p. 33), énoncent ce qui suit:

«considérant que l’ouverture des marchés publics à la concurrence communautaire nécessite un accroissement substantiel des garanties de transparence et de non-discrimination et qu’il importe, pour qu’elle soit suivie d’effets concrets, qu’il existe des moyens de recours efficaces et rapides en cas de violation du droit communautaire en matière de marché public ou des règles nationales transposant ce droit;

considérant que, dans certains États membres, l’absence de moyens de recours efficaces ou l’insuffisance des moyens existants dissuadent les entreprises communautaires de tenter leur chance dans l’État du pouvoir adjudicateur concerné; qu’il convient dès lors que les États membres concernés remédient à cette situation;

considérant qu’il est nécessaire d’assurer que, dans tous les États membres, des procédures adéquates permettent l’annulation des décisions illégales et l’indemnisation des personnes lésées par une violation».

3        L’article 1er, paragraphe 1, de la directive 89/665 dispose:

«Les États membres prennent, en ce qui concerne les procédures de passation des marchés publics relevant du champ d’application des directives 71/305/CEE et 77/62/CEE, les mesures nécessaires pour assurer que les décisions prises par les pouvoirs adjudicateurs peuvent faire l’objet de recours efficaces et, en particulier, aussi rapides que possible […] au motif que ces décisions ont violé le droit communautaire en matière de marchés publics ou les règles nationales transposant ce droit.»

4        Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, de la directive 89/665:

«Les États membres veillent à ce que les mesures prises aux fins des recours visés à l’article 1er prévoient les pouvoirs permettant:

[…]

c)      d’accorder des dommages-intérêts aux personnes lésées par une violation».

 Les antécédents de l’affaire

 L’arrêt Commission/Portugal

5        Au point 1 du dispositif de l’arrêt Commission/Portugal, précité, la Cour a déclaré et arrêté:

«En n’abrogeant pas le décret-loi n° 48 051, du 21 novembre 1967, subordonnant l’octroi de dommages-intérêts aux personnes lésées par une violation du droit communautaire des marchés publics ou des règles nationales le transposant à la preuve d’une faute ou d’un dol, la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 1er, paragraphe 1, et 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/665 […]»

 La procédure précontentieuse

6        Par lettre du 4 novembre 2004, la Commission a demandé à la République portugaise de lui communiquer les mesures qu’elle avait adoptées ou qu’elle avait l’intention d’adopter afin de modifier le droit interne et, ainsi, de se conformer à l’arrêt Commission/Portugal, précité.

7        Dans sa réponse du 19 novembre 2004, la République portugaise a fait valoir, en substance, qu’un récent changement de gouvernement avait entraîné un retard dans l’adoption des mesures que comportait l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité. Cet État membre a également transmis à la Commission un projet de loi abrogeant le décret-loi nº 48 051 et prévoyant un nouveau régime juridique de responsabilité civile extracontractuelle de l’État portugais et des autres entités publiques concernées, en lui demandant d’indiquer si les solutions adoptées dans ce projet étaient conformes aux exigences d’une transposition correcte et complète de la directive 89/665.

8        Le 21 mars 2005, la Commission a envoyé aux autorités portugaises une lettre de mise en demeure dans laquelle elle a fait valoir, d’une part, que les changements de gouvernement intervenus ne sauraient, conformément à la jurisprudence de la Cour, justifier le non-respect des obligations et des délais prescrits par la directive 89/665. D’autre part, la Commission a relevé, dans cette lettre, que, en tout état de cause, le projet de loi susmentionné, qui, d’ailleurs, n’avait pas encore été approuvé par l’Assembleia da República (Parlement), n’était pas conforme à la directive 89/665.

9        Insatisfaite de la réponse fournie le 25 mai 2005 par la République portugaise, la Commission a adressé à cette dernière, le 13 juillet 2005, un avis motivé dans lequel elle a constaté que, en n’ayant pas encore adopté les mesures nécessaires que comportait l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, cet État membre avait manqué aux obligations qui lui incombaient en vertu de l’article 228, paragraphe 1, CE. La Commission a invité ledit État membre à se conformer à cet avis motivé dans un délai de deux mois à compter de sa réception.

10      Dans sa réponse du 12 décembre 2005 audit avis motivé, la République portugaise a expliqué que le projet de loi nº 56/X, du 7 décembre 2005, sur la responsabilité civile délictuelle de l’État et des autres entités publiques (ci-après le «projet de loi nº 56/X»), abrogeant le décret-loi n° 48 051, avait déjà été présenté au Parlement pour approbation finale et que son inscription prioritaire ainsi qu’urgente à l’ordre du jour de cette assemblée avait été demandée.

11      Considérant que la République portugaise n’avait toujours pas exécuté l’arrêt Commission/Portugal, précité, la Commission a, le 7 février 2006, introduit le présent recours.

 Sur le manquement reproché

 Argumentation des parties

12      La Commission estime que, dès lors qu’elle n’a pas abrogé le décret-loi nº 48 051, la République portugaise n’a pas pris les mesures nécessaires pour assurer l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité. Le gouvernement portugais se serait en fait limité, afin de se conformer audit arrêt, à adopter le projet de loi nº 56/X. Or, ce dernier n’aurait pas encore été approuvé par le Parlement et son contenu ne serait, en tout état de cause, pas conforme aux exigences d’une transposition correcte et complète de la directive 89/665.

13      La République portugaise soutient, en revanche, que le recours est dépourvu de fondement dans la mesure où le régime figurant dans le projet de loi nº 56/X, bien que non encore approuvé définitivement par le Parlement, constitue une transposition adéquate des dispositions de la directive 89/665 et garantit l’exécution intégrale des obligations découlant de l’arrêt Commission/Portugal, précité.

14      Cet État membre soutient, en outre, qu’il a toujours eu la «ferme intention» d’instaurer un régime de responsabilité civile des entités de droit public conforme aux exigences de la directive 89/665, mais que des difficultés d’ordre constitutionnel, dont la nature et l’importance devraient à tout le moins entraîner une atténuation de sa responsabilité, l’ont empêché de parvenir à ce résultat.

15      Enfin, la République portugaise soutient que, en tout état de cause, les articles 22 et 271 de sa Constitution ainsi que le nouveau code de procédure des tribunaux administratifs assurent de manière suffisante l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, dans la mesure où ils prévoient déjà la responsabilité de l’État du fait des dommages causés par des actes commis par ses fonctionnaires et agents.

 Appréciation de la Cour

16      Au point 1 du dispositif de l’arrêt Commission/Portugal, précité, la Cour a jugé que, en n’abrogeant pas le décret-loi n° 48 051, la République portugaise avait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 1er, paragraphe 1, et 2, paragraphe 1, sous c), de la directive 89/665.

17      Dans le cadre de la présente procédure en manquement, afin de vérifier si la République portugaise a adopté les mesures que comporte l’exécution dudit arrêt, il importe de déterminer si le décret-loi n° 48 051 a été abrogé.

18      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la date de référence pour apprécier l’existence d’un manquement au titre de l’article 228 CE se situe à l’expiration du délai fixé dans l’avis motivé émis en vertu de cette disposition (arrêts du 12 juillet 2005, Commission/France, C-304/02, Rec. p. I-6263, point 30; du 18 juillet 2006, Commission/Italie, C-119/04, Rec. p. I-6885, point 27, et du 18 juillet 2007, Commission/Allemagne, C-503/04, non encore publié au Recueil, point 19).

19      En l’espèce, il est constant que, à la date à laquelle a expiré le délai imparti dans l’avis motivé qui lui a été adressé le 13 juillet 2005, la République portugaise n’avait pas encore abrogé le décret-loi n° 48 051.

20      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de conclure que, en n’ayant pas pris les mesures nécessaires que comporte l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 228, paragraphe 1, CE.

21      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument invoqué par la République portugaise, selon lequel des difficultés d’ordre constitutionnel l’auraient empêchée de parvenir à l’approbation définitive d’un texte abrogeant le décret-loi n° 48 051 et, ainsi, d’exécuter l’arrêt Commission/Portugal, précité.

22      En effet, selon une jurisprudence constante, un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations résultant du droit communautaire (voir arrêt du 18 juillet 2007, Commission/Allemagne, précité, point 38 et jurisprudence citée).

23      De même, ne saurait être accueilli l’argument de la République portugaise selon lequel la responsabilité de l’État du fait des dommages causés par des actes commis par ses fonctionnaires et agents est déjà prévue par d’autres dispositions de son droit national. En effet, comme la Cour l’a jugé au point 33 de l’arrêt Commission/Portugal, précité, cette circonstance est sans incidence sur le manquement consistant à avoir laissé subsister le décret-loi n° 48 051 dans l’ordre juridique interne. L’existence de telles dispositions ne saurait, dès lors, garantir l’exécution dudit arrêt.

24      En conséquence, il convient de constater que, en n’ayant pas abrogé le décret-loi n° 48 051 subordonnant l’octroi de dommages-intérêts aux personnes lésées par une violation du droit communautaire des marchés publics ou des règles nationales le transposant à la preuve d’une faute ou d’un dol, la République portugaise n’a pas pris les mesures nécessaires que comporte l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, et a manqué de ce fait aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 228, paragraphe 1, CE.

 Sur la sanction pécuniaire

 Argumentation des parties

25      Se fondant sur la méthode de calcul définie dans ses communications 96/C 242/07, du 21 août 1996, concernant la mise en œuvre de l’article [228] du traité (JO C 242, p. 6, ci-après la «communication de 1996»), et 97/C 63/02, du 28 février 1997, concernant la méthode de calcul de l’astreinte prévue à l’article [228] du traité CE (JO C 63, p. 2, ci-après la «communication de 1997»), la Commission propose à la Cour d’infliger à la République portugaise une astreinte de 21 450 euros par jour de retard dans l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, à compter de la date du prononcé de l’arrêt à intervenir dans la présente affaire et jusqu’au jour où il sera mis fin au manquement constaté.

26      La Commission considère que la condamnation au paiement d’une astreinte constitue la sanction la plus appropriée pour faire cesser, le plus rapidement possible, l’infraction constatée. Le montant de cette astreinte serait calculé en multipliant un forfait de base de 500 euros par un coefficient de 11 (sur une échelle graduée de 1 à 20) au titre de la gravité de l’infraction, un coefficient de 1 (sur une échelle graduée de 1 à 3) au titre de la durée de l’infraction, ainsi qu’un coefficient de 3,9, calculé sur la base du produit intérieur brut de la République portugaise et du nombre de voix dont cet État membre dispose au Conseil de l’Union européenne, au titre de la capacité de paiement dudit État membre.

27      La République portugaise fait valoir que le montant de l’astreinte proposé par la Commission est manifestement disproportionné eu égard aux circonstances de l’espèce et n’est pas conforme à la jurisprudence bien établie de la Cour en la matière.

28      Les objections formulées par cet État membre visent, en particulier, deux aspects des modalités de calcul de l’astreinte. En premier lieu, le coefficient de gravité de 11 appliqué par la Commission serait excessif pour sanctionner un prétendu manquement partiel d’un État membre dans le domaine des marchés publics dès lors que, dans le cadre de recours en manquement relatifs à des domaines plus sensibles que celui-ci, tels que notamment celui de la santé publique (arrêt du 4 juillet 2000, Commission/Grèce, C-387/97, Rec. p. I-5047) ou celui de l’environnement (arrêt du 25 novembre 2003, Commission/Espagne, C‑278/01, Rec. p. I‑14141), la Commission aurait proposé des coefficients de gravité de, respectivement, 6 et 4. Par conséquent, la Cour devrait, dans la présente affaire, fixer l’astreinte sur la base d’un coefficient de gravité ne dépassant pas 4. En second lieu, conformément au point 13.3 de la communication de la Commission sur la mise en œuvre de l’article 228 du traité CE [SEC(2005) 1658, ci-après la «communication de 2005»], le calendrier de référence qu’il convient de retenir, en l’espèce, pour apprécier la conformité de la réglementation nationale en cause à la directive 89/665 devrait reposer sur une base annuelle et non, comme le demande la Commission, sur une base journalière.

29      La République portugaise soutient, en outre, que, indépendamment de la réduction du montant de ladite astreinte et de la fixation de la périodicité de celle-ci sur une base annuelle, la Cour devrait ordonner la suspension de l’application de cette sanction jusqu’à l’entrée en vigueur du projet de loi nº 56/X. Cette possibilité serait en effet prévue au point 13.4 de la communication de 2005, en considération duquel la Cour peut, dans des cas exceptionnels, ordonner la suspension de l’astreinte lorsqu’un État membre a déjà adopté les mesures nécessaires pour se conformer à un arrêt constatant un manquement, mais qu’un certain temps doit inévitablement s’écouler avant que le résultat requis soit atteint. Or, la République portugaise estime que tel serait le cas en l’espèce.

 Appréciation de la Cour

30      Ayant reconnu que la République portugaise ne s’est pas conformée à son arrêt Commission/Portugal, précité, la Cour peut, en application de l’article 228, paragraphe 2, troisième alinéa, CE, infliger à cet État membre le paiement d’une somme forfaitaire ou d’une astreinte.

31      À cet égard, il convient de rappeler qu’il appartient à la Cour, dans chaque affaire, d’apprécier, eu égard aux circonstances de l’espèce, les sanctions pécuniaires à arrêter (arrêts du 12 juillet 2005, Commission/France, précité, point 86, et du 14 mars 2006, Commission/France, C-177/04, Rec. p. I-2461, point 58).

32      En l’espèce, ainsi qu’il a été relevé au point 25 du présent arrêt, la Commission propose à la Cour d’infliger une astreinte à la République portugaise.

33      Cette proposition est fondée sur la méthode de calcul que la Commission a définie dans ses communications de 1996 et de 1997. Il importe, par ailleurs, de préciser que ces deux communications ont été remplacées par la communication de 2005 qui, conformément à son paragraphe 25, s’applique aux décisions de saisir la Cour au titre de l’article 228 CE prises par la Commission à partir du 1er janvier 2006.

34      À ce propos, il y a lieu, tout d’abord, de relever que les propositions de la Commission ne sauraient lier la Cour et ne constituent qu’une base de référence utile (voir arrêts précités Commission/Grèce, point 80, et Commission/Espagne, point 41). De même, des lignes directrices telles que celles contenues dans les communications de la Commission ne lient pas la Cour, mais contribuent à garantir la transparence, la prévisibilité et la sécurité juridique de l’action menée par cette institution (voir, en ce sens, arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 85, et du 14 mars 2006, Commission/France, point 70).

35      La Cour a également précisé que la condamnation au paiement d’une astreinte et/ou d’une somme forfaitaire vise à exercer sur un État membre défaillant à exécuter un arrêt en manquement une contrainte économique qui l’incite à mettre fin au manquement constaté. Les sanctions pécuniaires infligées doivent donc être arrêtées en fonction du degré de persuasion nécessaire pour que l’État membre en cause modifie son comportement (voir, en ce sens, arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 91, ainsi que du 14 mars 2006, Commission/France, points 59 et 60).

36      Or, en l’espèce, force est de constater que, au cours de l’audience de la Cour du 5 juillet 2007, l’agent de la République portugaise a confirmé que le décret-loi nº 48 051 était encore en vigueur à cette date.

37      Étant donné qu’il y a lieu de considérer que le manquement en cause perdurait à la date à laquelle la Cour a examiné les faits, force est de constater que, ainsi que l’a proposé la Commission, la condamnation de la République portugaise au paiement d’une astreinte constitue un moyen adapté afin d’inciter cette dernière à prendre les mesures nécessaires pour assurer l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité (voir, en ce sens, arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 31; du 14 mars 2006, Commission/France, point 21, et Commission/Italie, point 33).

38      S’agissant, ensuite, des modalités de calcul du montant d’une telle astreinte, il appartient à la Cour, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation, de fixer cette astreinte de telle sorte que celle-ci soit, d’une part, adaptée aux circonstances et, d’autre part, proportionnée au manquement constaté ainsi qu’à la capacité de paiement de l’État membre concerné (voir, notamment, arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 103, et du 14 mars 2006, Commission/France, point 61).

39      Dans cette perspective, les critères de base qui doivent être pris en considération pour assurer la nature coercitive de l’astreinte en vue de l’application uniforme et effective du droit communautaire sont, en principe, la durée de l’infraction, son degré de gravité et la capacité de payer de l’État membre en cause. Pour l’application de ces critères, il y a lieu de tenir compte en particulier des conséquences du défaut d’exécution sur les intérêts privés et publics ainsi que de l’urgence qu’il y a à amener l’État membre concerné à se conformer à ses obligations (voir, notamment, arrêts précités du 12 juillet 2005, Commission/France, point 104, et du 14 mars 2006, Commission/France, point 62).

40      En ce qui concerne, en premier lieu, la gravité de l’infraction et, en particulier, les conséquences du défaut d’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, sur les intérêts privés et publics, il convient de rappeler que, conformément au troisième considérant de la directive 89/665, l’ouverture des marchés publics à la concurrence communautaire nécessite un accroissement substantiel des garanties de transparence et de non-discrimination. Or, pour que cette ouverture soit suivie d’effets concrets, il importe qu’il existe des moyens de recours efficaces et rapides en cas de violation du droit communautaire en matière de marché public ou des règles nationales transposant ce droit.

41      À cette fin, l’article 1er, paragraphe 1, de ladite directive impose aux États membres l’obligation de garantir que les décisions illégales des pouvoirs adjudicateurs puissent faire l’objet de recours efficaces et aussi rapides que possible, tandis que l’article 2, paragraphe 1, sous c), de celle-ci met l’accent sur le fait qu’il est important de prévoir des procédures nationales permettant que des dommages‑intérêts soient accordés aux personnes lésées par une telle violation.

42      Or, le défaut d’abrogation, par la République portugaise, du décret-loi n° 48 051 qui subordonne l’octroi de dommages‑intérêts aux particuliers à ce que soit apportée la preuve d’une faute ou d’un dol imputable à l’État portugais ou aux entités publiques concernées doit être considéré comme sérieux dans la mesure où, bien qu’il ne rende pas impossible les recours juridictionnels exercés par des particuliers, il aboutit cependant, ainsi que l’a également relevé M. l’avocat général au point 51 de ses conclusions, à rendre ces recours plus difficiles et plus onéreux en faisant ainsi obstacle au plein effet de la politique communautaire en matière de marchés publics.

43      Il convient néanmoins de constater que le coefficient de 11 (sur une échelle graduée de 1 à 20) proposé par la Commission apparaît, en l’espèce, trop sévère, un coefficient de 4 reflétant, en revanche, de manière plus appropriée le degré de gravité de l’infraction en cause.

44      S’agissant, en deuxième lieu, du coefficient relatif à la durée de l’infraction, la proposition de la Commission, visant à ce que celui-ci soit fixé à 1, ne saurait être accueillie. Il ressort en effet du dossier que ce coefficient a été calculé sur la base du laps de temps qui s’est écoulé entre la date du prononcé de l’arrêt Commission/Portugal, précité, et celle de l’introduction du présent recours.

45      Or, il y a lieu de rappeler que la durée de l’infraction doit être évaluée en ayant égard au moment auquel la Cour apprécie les faits et non pas à celui où cette dernière est saisie par la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 14 mars 2006, Commission/France, précité, point 71).

46      En l’occurrence, le manquement de la République portugaise à son obligation d’exécuter l’arrêt Commission/Portugal, précité, perdure depuis plus de trois ans compte tenu du laps de temps considérable qui s’est écoulé depuis le 14 octobre 2004, date du prononcé dudit arrêt.

47      Dans ces conditions, un coefficient de 2 (sur une échelle graduée de 1 à 3) apparaît plus approprié pour rendre compte de la durée de l’infraction.

48      En ce qui concerne, en troisième lieu, la proposition de la Commission consistant à multiplier un montant de base par un coefficient fondé sur le produit intérieur brut de l’État membre concerné et sur le nombre de voix dont celui-ci dispose au Conseil, celle-ci constitue, en principe, une manière appropriée de refléter la capacité de paiement de cet État membre tout en maintenant un écart raisonnable entre les divers États membres (voir, en ce sens, arrêts précités Commission/Grèce, point 88; Commission/Espagne, point 59, et du 12 juillet 2005, Commission/France, point 109).

49      Toutefois, en l’espèce, le coefficient de 3,9 proposé par la Commission ne reflète pas de manière adéquate l’évolution des facteurs qui sont à la base de l’évaluation de la capacité de paiement de la République portugaise, en particulier pour ce qui concerne la croissance de son produit intérieur brut. Dès lors, ainsi qu’il ressort d’ailleurs du point 18.1 de la communication de 2005, ce coefficient doit être porté de 3,9 à 4,04.

50      De même, le montant de base auquel sont appliqués les coefficients multiplicateurs doit être fixé à 600 euros, conformément à l’indexation du montant de 500 euros opérée par la Commission au point 15 de cette même communication, afin de tenir compte de l’évolution de l’inflation depuis la publication de la communication de 1997.

51      Eu égard à tout ce qui précède, la multiplication d’un montant de base de 600 euros par des coefficients fixés à 4, au titre de la gravité de l’infraction, à 2, au titre de la durée de celle-ci, et à 4,04, au titre de la capacité de paiement de l’État membre concerné, aboutit en l’occurrence à un montant de 19 392 euros par jour de retard. Ce montant doit être considéré comme adéquat eu égard aux finalités de l’astreinte telles qu’elles sont mentionnées au point 35 du présent arrêt.

52      Quant à la périodicité de l’astreinte, il convient, dans la présente affaire qui est relative à l’exécution d’un arrêt de la Cour impliquant l’adoption d’une disposition législative modificative, d’opter pour une astreinte infligée sur une base journalière (voir, en ce sens, arrêt 14 mars 2006, Commission/France, précité, point 77).

53      Enfin, les arguments de la République portugaise tirés de la possibilité pour la Cour d’ordonner, en l’espèce, la suspension de l’astreinte, au sens du point 13.4 de la communication de 2005, ne sauraient être accueillis. En effet, indépendamment de la circonstance que, ainsi qu’il a été rappelé au point 34 du présent arrêt, cette communication ne saurait lier la Cour, il suffit de relever que, en tout état de cause, contrairement à ce qui est requis audit point 13.4 pour qu’une telle suspension soit décidée, les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt Commission/Portugal, précité, n’ont pas été adoptées.

54      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de condamner la République portugaise à payer à la Commission, sur le compte «Ressources propres de la Communauté européenne», une astreinte de 19 392 euros par jour de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt Commission/Portugal, précité, à compter du prononcé du présent arrêt et jusqu’à l’exécution dudit arrêt Commission/Portugal.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République portugaise et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) déclare et arrête:

1)      En n’ayant pas abrogé le décret-loi n° 48 051, du 21 novembre 1967, subordonnant l’octroi de dommages-intérêts aux personnes lésées par une violation du droit communautaire des marchés publics ou des règles nationales le transposant à la preuve d’une faute ou d’un dol, la République portugaise n’a pas pris les mesures nécessaires que comporte l’exécution de l’arrêt du 14 octobre 2004, Commission/Portugal (C‑275/03), et a manqué de ce fait aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 228, paragraphe 1, CE.

2)      La République portugaise est condamnée à payer à la Commission des Communautés européennes, sur le compte «Ressources propres de la Communauté européenne», une astreinte de 19 392 euros par jour de retard dans la mise en œuvre des mesures nécessaires pour se conformer à l’arrêt du 14 octobre 2004, Commission/Portugal, précité, à compter du prononcé du présent arrêt et jusqu’à l’exécution dudit arrêt du 14 octobre 2004.

3)      La République portugaise est condamnée aux dépens.

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