REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°), sous le n° 211878, la requête enregistrée le 30 août 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat présentée pour Mme Arlette Y…, demeurant … ; Mme Y… demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt en date du 21 janvier 1999 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Paris du 10 juillet 1996, a rejeté sa demande tendant à l’annulation et au sursis à exécution de la décision du 22 décembre 1994 prise par le maire de Nanterre de ne pas s’opposer à l’exécution de divers travaux ;
Vu 2°), sous le n° 213462, la requête enregistrée le 15 octobre 1999 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour Mme Arlette Y…, demeurant … ; Mme Y… demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt en date du 21 janvier 1999 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, après avoir annulé le jugement en date du 10 juillet 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté comme irrecevable sa demande tendant à l’annulation et au sursis à exécution de la décision du 22 décembre 1994 du maire de Nanterre de ne pas s’opposer à l’exécution, par M. et Mme A… Z…, au …, de divers travaux, a rejeté sa demande présentée devant le tribunal administratif de Paris ;
2°) d’annuler ladite décision, en date du 22 décembre 1994, du maire de Nanterre ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de justice administrative, notamment ses articles L. 761-1, L. 811-2 et R. 411-7 ;
Vu le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de Mme Laigneau, Maître des Requêtes,
– les observations de Me Roger, avocat de Mme Arlette Y…, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la commune de Nanterre, de Me Delvolvé, avocat de Mme A… Z… née X… Alexandrina et de Me Cossa, avocat de Mme Brigitte B…,
– les conclusions de M. Austry, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes de Mme Y… sont dirigées contre le même arrêt ; qu’il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Sur la recevabilité :
Considérant, d’une part, qu’en vertu de l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme, l’auteur d’un pourvoi dirigé contre une décision relative à l’occupation ou à l’utilisation su sol ou contre un jugement ou un arrêt refusant d’annuler une telle décision doit, à peine d’irrecevabilité de ce pourvoi, notifier dans le délai de quinze jours ce dernier à l’auteur de la décision et à son bénéficiaire ;
Considérant, d’autre part, qu’en vertu de l’article 39 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 pris pour l’application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, lorsqu’une demande d’aide juridictionnelle en vue de se pourvoir devant le Conseil d’Etat est adressée au bureau d’aide juridictionnelle établi près cette juridiction avant l’expiration du délai imparti pour le dépôt du pourvoi, ce délai est interrompu ; que selon ces mêmes dispositions : « un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l’intéressé de la notification de la décision du bureau d’aide juridictionnelle ( …) », que si, en application du dernier alinéa de l’article 23 de la loi du 10 juillet 1991, l’intéressé qui s’est vu refuser l’aide juridictionnelle demandée en vue de se pourvoir devant le Conseil d’Etat peut, selon le motif de la décision, soit former un recours devant le président de la section du contentieux, soit demander au bureau d’aide juridictionnelle une nouvelle délibération, il ne résulte ni de ces dispositions, ni d’aucune autre de la loi et du décret précité, que ce recours ait pour effet d’interrompre à nouveau le délai imparti à l’intéressé pour se pourvoir ;
Considérant qu’en raison des dispositions particulières régissant l’octroi de l’aide juridictionnelle, lesquelles ont pour objet de rendre effectif le principe à valeur constitutionnelle du droit d’exercer un recours, l’irrecevabilité instituée par l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme ne peut être opposée à un requérant qui a sollicité le bénéfice de cette aide que pour autant que, dans le délai de quinze jours suivant le dépôt de sa requête présentée dans le délai prorogé par sa demande d’aide juridictionnelle, il n’a pas notifié cette requête au titulaire de l’autorisation d’utilisation dusol contestée ainsi qu’à l’autorité administrative qui a délivré cette autorisation ;
Considérant que Mme Y… s’est pourvue en cassation contre l’arrêt en date du 21 janvier 1999 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, confirmant un jugement du tribunal administratif de Paris, a refusé d’annuler une autorisation de travaux délivrée le 22 décembre 1994 aux époux A… Z… par le maire de Nanterre ; qu’à cet effet elle a demandé le 11 mars 1999 le bénéfice de l’aide juridictionnelle, laquelle lui a été accordée le 29 juin 1999 ; que sans attendre que cette décision lui soit notifiée, elle a déposé le 30 août 1999, sous le n° 211878 une première requête en cassation, puis a déposé le 15 octobre 1999, sous le n° 213462, moins de deux mois après la notification de la décision relative à l’aide juridictionnelle, une seconde requête par le ministère d’un avocat au Conseil d’Etat et à la cour de cassation ; que la circonstance que ni sa demande d’aide juridictionnelle ni sa première requête n’ont fait l’objet des notifications exigées par l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme n’est de nature à affecter la recevabilité du pourvoi en cassation, dès lors que ces formalités ont été effectuées dans les quinze jours suivant la requête introduite dans le délai prorogé par sa demande d’aide juridictionnelle ;
Au fond :
Considérant que la règle posée par l’article UC 4 du règlement du plan d’occupation des sols de la commune de Nanterre selon laquelle aucun aménagement ne doit faire obstacle au libre écoulement des eaux pluviales, constitue le rappel des obligations édictées par l’article 640 du code civil ; que, par suite, en relevant que le permis de construire ou l’autorisation administrative qui en tient lieu est toujours délivré sous réserve du droit des tiers et que Mme Y… ne pouvait donc pas demander l’annulation pour excès de pouvoir de l’autorisation litigieuse au motif qu’elle méconnaîtrait les droits qu’elle tire de l’article 640 du code civil, la cour administrative d’appel a, abstraction faite de motifs surabondants, légalement motivé son arrêt ;
Considérant qu’en estimant que « si les dispositions de l’article UC 6 du règlement du plan d’occupation des sols exigent que les constructions respectent un recul de 6 mètres par rapport à l’alignement de la voie, ces dispositions ne sont pas opposables à l’édification d’un portail à alignement, un tel équipement ne constituant pas une construction au sens des dispositions en cause », la cour n’a commis ni erreur de droit, ni erreur dans la qualification juridique de la clôture dont s’agit ;
Considérant que si la requérante soutient qu’elle a informé le maire de Nanterre par un courrier du 29 septembre 1994 de l’existence à son profit d’un droit de passage sur le terrain de ses voisins, la cour n’a pas dénaturé les pièces du dossier en estimant qu’il ne résulte pas de l’instruction que, lorsqu’il a pris la décision attaquée, le maire de Nanterre ait été informé d’une contestation sérieuse sur l’existence de ce droit de passage ;
Considérant que les autorisations d’utilisation du sol accordées sous réserve du droit des tiers ont pour seul objet de s’assurer de la conformité des travaux qu’elles autorisent avec la législation et la réglementation d’urbanisme ; qu’ainsi en estimant « que l’existence du litige soulevé par Mme Y… relativement à son droit de passage ne pouvait légalement faire obstacle à l’octroi du permis de construire », la cour n’a pas commis d’erreur de droit et n’a pas méconnu l’autorité de la chose jugée par le jugement du tribunal de grande instance de Nanterre du 13 novembre 1998 reconnaissant à la requérante un tel droit de passage ;
Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que Mme Y… n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que par l’arrêt attaqué la cour, après avoir annulé le jugement entrepris, a rejeté sa demande devant le tribunal administratif de Paris tendant à l’annulation de la décision du 22 décembre 1994 prise par le maire de Nanterre de ne pas s’opposer à l’exécution de diverstravaux ;
Sur l’application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 reprises à l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il n’y a pas lieu dans les circonstances de l’espèce de faire application de ces dispositions et de condamner Mme Y… à verser à la ville de Nanterre la somme qu’elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les requêtes de Mme Y… sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de la ville de Nanterre tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme Arlette Y…, à Mme Alexandrina X…, à la ville de Nanterre et au ministre de l’équipement, des transports et du logement.