AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
M. D… A… a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 à 2011, ainsi que des pénalités correspondantes et des amendes qui lui ont été infligées sur le fondement du IV de l’article 1736 du code général des impôts. Par un jugement n° 1715892 du 7 mai 2019, le tribunal administratif de Paris a déchargé M. A… des impositions contestées auxquelles il a été assujetti au titre de l’année 2009, en droits et pénalités, ainsi que des pénalités pour manquement délibéré qui lui ont été infligées pour l’ensemble des années en litige et rejeté le surplus de sa demande.
Par un arrêt nos 19PA02127, 19PA02687 du 31 juillet 2020, la cour administrative d’appel de Paris a rejeté l’appel formé par M. B… A… et Mme C… A…, venant aux droits de M. D… A…, contre ce jugement en tant qu’il n’a pas fait droit à la demande de première instance et, sur appel du ministre de l’action et des comptes publics, a annulé ce jugement en tant qu’il a partiellement fait droit à la demande de M. A… et remis à sa charge les impositions et pénalités en litige.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés le 30 septembre 2020 et le 29 décembre 2020, et de nouveaux mémoires enregistrés le 8 mars 2021 et le 6 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. A… et Mme A… demandent au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;
– l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Mathieu Le Coq, maître des requêtes,
– les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de M. et Mme A… ;
Vu la note en délibéré et le mémoire soulevant une question prioritaire de constitutionnalité, enregistrés le 19 avril 2022 après la clôture de l’instruction, présentés par les consorts A… ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. D… A… a fait l’objet d’un examen contradictoire de situation fiscale personnelle au titre des années 2009 à 2011, au terme duquel l’administration fiscale a retenu qu’il avait omis de déclarer les revenus tirés d’avoirs qu’il détenait directement ou indirectement sur des comptes ouverts à l’étranger, en Suisse, auprès de la Banque Privée Edmond de Rothschild, et en Israël, auprès des banques Leumi et Israël Discount Bank Ltd. Après avoir étendu son droit de reprise aux années 2006 à 2008, qui ont donné lieu à un contrôle sur pièces, l’administration a procédé à des rehaussements de bases imposables de M. A… au titre des années 2006 à 2011 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. M. A…, qui a obtenu un dégrèvement partiel des impositions en cause à la suite de sa réclamation, a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge du surplus des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, de prélèvements sociaux et de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auxquelles il a été assujetti au titre des années en cause, ainsi que des pénalités correspondantes et des amendes qui lui ont été infligées. Par un jugement du 7 mai 2019, le tribunal a prononcé la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées au titre de l’année 2009 ainsi que des pénalités pour manquement délibéré dues au titre des autres années en litige. M. B… A… et Mme C… A…, héritiers de M. D… A…, se pourvoient contre l’arrêt du 31 juillet 2020 par lequel la cour administrative d’appel de Paris, d’une part, a rejeté leur appel formé contre ce jugement en tant qu’il n’a pas fait droit à la demande de M. A… et, d’autre part, sur appel du ministre de l’action et des comptes publics, a annulé ce jugement en tant qu’il a partiellement fait droit à cette demande et remis à sa charge les impositions et pénalités en litige.
Sur la régularité de l’arrêt attaqué :
2. M. A… et Mme A… soutiennent que l’arrêt attaqué a été rendu au terme d’une procédure irrégulière au motif que le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public du prononcé de ses conclusions lors de l’audience, sur le fondement des dispositions de l’article 8 de l’ordonnance du 25 mars 2020, qui seraient contraires au principe d’égalité devant la justice dès lors qu’elles ne fixent aucun critère objectif de dispense des conclusions du rapporteur public et laisseraient ainsi au président de la formation de jugement le pouvoir de décider de manière discrétionnaire une telle dispense.
3. Aux termes de l’article L. 7 du code de justice administrative : » Un membre de la juridiction, chargé des fonctions de rapporteur public, expose publiquement, et en toute indépendance, son opinion sur les questions que présentent à juger les requêtes et sur les solutions qu’elles appellent « . Aux termes de l’article L. 732-1 du même code : » Dans des matières énumérées par décret en Conseil d’Etat, le président de la formation de jugement peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, d’exposer à l’audience ses conclusions sur une requête, eu égard à la nature des questions à juger « . Aux termes de l’article R. 732-1-1 de ce code, applicable aux tribunaux administratifs et aux cours administratives d’appel : » Sans préjudice de l’application des dispositions spécifiques à certains contentieux prévoyant que l’audience se déroule sans conclusions du rapporteur public, le président de la formation de jugement ou le magistrat statuant seul peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience sur tout litige relevant des contentieux suivants : / 1° Permis de conduire ; / 2° Refus de concours de la force publique pour exécuter une décision de justice ; / 3° Naturalisation ; / 4° Entrée, séjour et éloignement des étrangers, à l’exception des expulsions ; / 5° Taxe d’habitation et taxe foncière sur les propriétés bâties afférentes aux locaux d’habitation et à usage professionnel au sens de l’article 1496 du code général des impôts ainsi que contribution à l’audiovisuel public ; / 6° Prestation, allocation ou droit attribués au titre de l’aide ou de l’action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d’emploi « .
4. Aux termes de l’article 8 de l’ordonnance du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif, prise sur habilitation donnée par la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 : » Le président de la formation de jugement peut dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, d’exposer à l’audience des conclusions sur une requête « . L’article 2 de la même ordonnance prévoit que ces dispositions sont applicables » durant la période comprise entre le 12 mars 2020 et la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 « , soit le 10 juillet 2020.
5. Une habilitation donnée par le Parlement sur le fondement de l’article 38 de la Constitution élargit de façon temporaire le pouvoir réglementaire dont le Gouvernement dispose, en l’autorisant à adopter des mesures qui relèvent du domaine normalement réservé à la loi, que ce soit en vertu de l’article 34 de la Constitution ou d’autres dispositions de celle-ci. Alors même que les mesures ainsi adoptées ont la même portée que si elles avaient été prises par la loi, les ordonnances prises en vertu de l’article 38 de la Constitution conservent le caractère d’actes administratifs, aussi longtemps qu’elles n’ont pas fait l’objet d’une ratification, qui ne peut être qu’expresse, par le Parlement. Leur légalité peut être contestée, y compris au regard des règles et principes à valeur constitutionnelle, par la voie d’un recours pour excès de pouvoir devant le Conseil d’Etat, compétent pour en connaître en premier et dernier ressort, ou par la voie de l’exception, à l’occasion de la contestation d’un acte ultérieur pris sur leur fondement, devant toute juridiction.
6. Après l’expiration du délai d’habilitation, la contestation, au regard des droits et libertés que la Constitution garantit, des dispositions relevant du domaine de la loi d’une ordonnance non ratifiée n’est recevable qu’au travers d’une question prioritaire de constitutionnalité, qui doit être transmise au Conseil constitutionnel si les conditions fixées par les articles 23-2, 23-4 et 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel sont remplies.
7. Dans le cas où un moyen mettant en cause, après l’expiration du délai d’habilitation, la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de dispositions d’une ordonnance non ratifiée prise sur le fondement de l’article 38 de la Constitution est soulevé à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir formé contre l’ordonnance ou de la contestation par voie d’exception de la légalité de l’ordonnance, il appartient au Conseil d’Etat ou à la juridiction saisie de déterminer si les dispositions critiquées de l’ordonnance relèvent du domaine de la loi ou de la compétence réglementaire.
8. En l’espèce, l’ordonnance du 25 mars 2020 a été prise sur le fondement des dispositions de l’article 11 de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19. Le délai d’habilitation fixé par ces dispositions, qui était de trois mois à compter de la publication de la loi, est expiré à la date de la présente décision. Par ailleurs, les dispositions en litige de cette ordonnance n’ont pas été ratifiées par le Parlement.
9. En vertu de l’article 34 de la Constitution, la loi fixe notamment » les règles concernant (…) les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques (…) « . Si les dispositions de la procédure applicable devant les juridictions administratives relèvent de la compétence réglementaire dès lors qu’elles ne mettent en cause aucune des matières réservées au législateur par l’article 34 de la Constitution ou d’autres règles ou principes de valeur constitutionnelle, tel n’est pas le cas des dispositions de l’article L. 7 du code de justice administrative prévoyant l’intervention du rapporteur public, lesquelles relèvent des garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Dès lors, relèvent également du domaine de la loi les dispositions de l’article 8 de l’ordonnance du 25 mars 2020, qui dérogent aux dispositions de l’article L. 7 et s’ajoutent, de façon temporaire, à la dérogation résultant déjà de l’article L. 732-1 du code de justice administrative, en prévoyant, à compter du 12 mars 2020 et jusqu’à la cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré dans les conditions de l’article 4 de la loi du 23 mars 2020, la faculté pour le président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, d’exposer à l’audience des conclusions sur toute requête. Il s’ensuit que leur conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit ne peut être contestée que par la voie d’une question prioritaire de constitutionnalité présentée sur le fondement de l’article 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. A défaut d’avoir présenté un mémoire distinct tendant à la transmission d’une telle question au Conseil constitutionnel avant la clôture de l’instruction, les requérants ne sont pas recevables à soutenir que les dispositions de l’article 8 de l’ordonnance du 25 mars 2020 seraient contraires au principe d’égalité devant la justice.
Sur le bien-fondé de l’arrêt attaqué :
En ce qui concerne la prescription du droit de reprise au titre de l’année 2009 :
10. En premier lieu, aux termes de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de l’article 58 de la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 : » Pour l’impôt sur le revenu et l’impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l’administration des impôts s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due. / (…) Le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due, lorsque les obligations déclaratives prévues aux articles 123 bis, 209 B, 1649 A, 1649 AA et 1649 AB du même code n’ont pas été respectées. Toutefois, en cas de non-respect de l’obligation déclarative prévue à l’article 1649 A, cette extension de délai ne s’applique pas lorsque le contribuable apporte la preuve que le total des soldes créditeurs de ses comptes à l’étranger est inférieur à 50 000 euros au 31 décembre de l’année au titre de laquelle la déclaration devait être faite. Le droit de reprise de l’administration concerne les seuls revenus ou bénéfices afférents aux obligations déclaratives qui n’ont pas été respectées (…) « .
11. Le paragraphe n° 100 des commentaires administratifs publiés le 12 septembre 2012 sous le n° BOI-CF-PGR-10-50 énonce qu' » afin de permettre à l’administration de lutter plus efficacement contre la fraude réalisée par le biais d’États ou territoires avec lesquels la France n’échange pas de renseignements de nature bancaire, les dispositions de l’article L169 du LPF prolongent de trois à dix ans le délai de reprise en matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés (5ème alinéa de l’article L169 du LPF) lorsque les obligations déclaratives prévues aux articles 123 bis, 209 B, 1649 A et 1649 AA du CGI n’ont pas été respectées et concernent un Etat ou un territoire qui n’a pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales permettant l’accès aux renseignements bancaires « . Selon le paragraphe 110 des mêmes commentaires, » pour que le délai de reprise de dix ans puisse être mis en œuvre, la loi prévoit deux conditions cumulatives : une des obligations déclaratives prévues aux articles 123 bis, 209 B, 1649 A et 1649 AA du CGI n’a pas été respectée et cette obligation concerne un État ou territoire n’ayant pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales permettant l’accès aux renseignements bancaires « . Aux termes du paragraphe n° 150 des mêmes commentaires : » (…) L’extension du délai de reprise ne s’applique qu’aux contribuables qui n’ont pas déclaré un compte bancaire, un contrat d’assurance-vie ou une entité bénéficiant d’un régime fiscal privilégié détenu dans un Etat ou territoire qui n’a pas conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales permettant l’accès aux renseignements bancaires « .
12. Il résulte de ces énonciations, en particulier du paragraphe 110 qui expose les conditions prévues par la loi commentée, que le paragraphe n° 150 constitue un commentaire des dispositions de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales issues de l’article 52 de la loi du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 qui subordonnait l’application du délai spécial de reprise de dix ans de l’administration à l’absence de convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales conclue entre la France et l’Etat dans lequel se situe le compte non déclaré par le contribuable. Il s’ensuit que la cour n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que ce paragraphe de l’instruction ne commentait pas les dispositions de l’article L. 169 du livre des procédures fiscales, applicables aux délais de reprises venant à expiration postérieurement au 31 décembre 2011, issues de l’article 58 de la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011 qui a supprimé la condition tenant à l’absence de conclusion d’une convention d’assistance administrative entre Etats et en en déduisant que M. A… et Mme A… ne pouvaient utilement s’en prévaloir sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales pour soutenir qu’en raison de l’existence d’une convention d’assistance administrative conclue entre Israël et la France, les impositions mises à leur charge au titre de l’année 2009 ne pouvaient pas être soumises au délai spécial de reprise de dix ans et étaient par suite atteintes par la prescription triennale de droit commun.
13. Par ailleurs, les motifs par lesquels la cour a ajouté que l’article 58 de la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 ne revêtait pas un caractère rétroactif de sorte que l’instruction du 12 septembre 2012 ne pouvait davantage rétroagir et qu’elle n’était pas opposable, sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales, aux rehaussements d’imposition primitives mises en recouvrement avant le 12 septembre 2012, présentent un caractère surabondant. Il s’ensuit que les moyens dirigés contre ces motifs de l’arrêt attaqué doivent être écartés comme inopérants.
En ce qui concerne la qualité d’ayant-droit économique unique de la société Mochita Holding Corporation :
14. Aux termes de l’article 123 bis du code général des impôts : » 1. Lorsqu’une personne physique domiciliée en France détient directement ou indirectement 10 % au moins des actions, parts, droits financiers ou droits de vote dans une personne morale, un organisme, une fiducie ou une institution comparable, établi ou constitué hors de France et soumis à un régime fiscal privilégié, les bénéfices ou les revenus positifs de cette personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable sont réputés constituer un revenu de capitaux mobiliers de cette personne physique dans la proportion des actions, parts ou droits financiers qu’elle détient directement ou indirectement lorsque l’actif ou les biens de la personne morale, de l’organisme, de la fiducie ou de l’institution comparable sont principalement constitués de valeurs mobilières, de créances, de dépôts ou de comptes courants. / (…) 3. Les bénéfices ou les revenus positifs mentionnés au 1 sont réputés acquis le premier jour du mois qui suit la clôture de l’exercice de l’entité juridique établie ou constituée hors de France ou, en l’absence d’exercice clos au cours d’une année, le 31 décembre. Ils sont déterminés selon les règles fixées par le présent code comme si l’entité juridique était imposable à l’impôt sur les sociétés en France. (…) / Toutefois, lorsque l’entité juridique est établie ou constituée dans un Etat ou territoire n’ayant pas conclu de convention d’assistance administrative avec la France, ou qui est non coopératif au sens de l’article 238-0 A, le revenu imposable de la personne physique ne peut être inférieur au produit de la fraction de l’actif net ou de la valeur nette des biens de la personne morale, de l’organisme, de la fiducie ou de l’institution comparable, calculée dans les conditions fixées au 1, par un taux égal à celui mentionné au 3° du 1 de l’article 39 (…) « . Par ces dispositions, le législateur a entendu imposer les résidents fiscaux à raison des bénéfices réalisés à l’étranger par certaines entités établies dans des Etats ou territoires dans lesquels elles sont soumises à un régime fiscal privilégié, sur lesquelles ces résidents exercent un contrôle, même partagé, quelle que soit sa forme juridique et, dans le cas où il est quantifiable, supérieur à 10 %.
15. La cour a relevé que le compte ouvert au nom de la société panaméenne Mochita Holding dans les livres de la Banque privée Edmond de Rothschild avait été alimenté pendant des années par les revenus professionnels de M. D… A… non déclarés en France, que par des courriers du 16 novembre 2011 M. A… avait précisé ses intentions quant aux modalités de legs à ses enfants des avoirs détenus sur ce compte et de l’appartement du 16 avenue Montaigne à Paris acquis grâce aux fonds détenus par la même société et que les documents comptables de cette société indiquaient que M. A… en était le seul associé. En l’état de ces constatations souveraines, exemptes de dénaturation, et alors que les requérants se bornaient à soutenir que l’administration n’établissait pas que M. A… détenait la totalité des actifs de cette société panaméenne, c’est sans erreur de droit et par un arrêt suffisamment motivé que la cour a jugé que l’administration établissait que M. A… exerçait seul le contrôle de cette société et devait par suite être imposé, sur le fondement de l’article 123 bis du code général des impôts, à raison de la totalité du produit des actifs de la société panaméenne.
En ce qui concerne les pénalités pour manquement délibéré :
16. Aux termes de l’article 1729 du code général des impôts : » Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (…) « .
17. La cour a relevé, pour caractériser l’intention qu’avait M. D… A… de se soustraire à ses obligations déclaratives, que les certificats médicaux des 17 novembre 2008 et 2 juin 2009 produits par les requérants, s’ils attestaient de troubles de la mémoire, n’indiquaient pas que le discernement de M. A… avait été aboli, que son fils avait indiqué au service de police judiciaire lors de son audition du 11 octobre 2012, que son père était apte à raisonner et cohérent d’esprit, que M. A… avait été en mesure, en 2011, de préciser ses intentions quant aux modalités de legs à ses enfants des avoirs détenus par la société Mochita Holding Corporation dont il était l’ayant-droit économique unique ainsi que de l’appartement situé avenue Montaigne à Paris acquis quelques mois auparavant grâce aux fonds de la même société, que les requérants n’avaient pas produit le rapport du 14 décembre 2010 d’un orthophoniste dont ils se prévalaient et qui en tout état cause ne constituait pas un avis médical et que la déclaration, faite lors de son audition en 2012, selon laquelle M. A… ne savait plus dans quelle banque il disposait d’un compte en Israël, ne suffisait pas à démontrer qu’il était dans l’incapacité de prendre des décisions concernant sa situation fiscale en France. Après avoir ainsi souverainement apprécié l’intention de l’intéressé, sans dénaturer les pièces versées au dossier, la cour n’a pas commis d’erreur de qualification juridique en retenant l’existence de manquements délibérés justifiant l’application de la majoration prévue au a de l’article 1729 du code général des impôts au titre des années en litige.
18. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le pourvoi de M. A… et Mme A… doit être rejeté, y compris les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. A… et Mme A… est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B… A…, à Mme C… A… et au ministre de l’économie, des finances et de la relance.