REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 octobre et 3 novembre 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour M. Henri X, demeurant … ; M. X demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’ordonnance du 5 octobre 2004 par laquelle le président délégué de la cour administrative d’appel de Douai a annulé l’ordonnance du 29 juillet 2004 du juge des référés du tribunal administratif d’Amiens condamnant l’office public d’aménagement et de construction (OPAC) de l’Oise à lui verser la somme de 36 117,40 euros à titre de provision à valoir sur le montant des indemnités de licenciement auxquelles il a droit ;
2°) de condamner l’OPAC de l’Oise à lui verser la somme de 42 206,67 euros à titre de provision à valoir sur le montant total des allocations chômage qui lui sont dues en application de l’article L. 35112 du code du travail ;
3°) de mettre à la charge de l’OPAC de l’Oise la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 7611 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail, notamment son article L. 35112 ;
Vu le code de la construction et de l’habitation, notamment son article R. 42122 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Michel Delpech, chargé des fonctions de Maître des requêtes,
– les observations de la SCP Piwnica, Molinié, avocat de M. X et de la SCP Peignot, Garreau, avocat de l’OPAC de l’Oise,
– les conclusions de M. Christophe Devys, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’aux termes de l’article R. 5411 du code de justice administrative : « Le juge des référés peut, même en l’absence d’une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l’a saisi lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable. Il peut, même d’office, subordonner le versement de la provision à la constitution d’une garantie » ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 35112 du code du travail, dans sa rédaction applicable en l’espèce : « Ont droit à l’allocation d’assurance dans les conditions prévues à l’article L. 3513 : 1° Les agents non fonctionnaires de l’Etat et de ses établissements publics administratifs, les agents titulaires des collectivités territoriales ainsi que les agents statutaires des autres établissements publics administratifs ; 2° Les agents non titulaires des collectivités territoriales et les agents non statutaires des établissements publics administratifs autres que ceux de l’Etat et ceux mentionnés au 4° cidessous ainsi que les agents non statutaires des groupements d’intérêt public ; 3° Les salariés des entreprises, sociétés et organismes définis au a) du paragraphe I de l’article 164 de l’ordonnance portant loi de finances pour 1959 (n° 581374 du 30 décembre 1958), les salariés relevant soit des établissements publics à caractère industriel et commercial des collectivités territoriales, soit des sociétés d’économie mixte dans lesquelles ces collectivités ont une participation majoritaire ; 4° Les salariés non statutaires des chambres de métiers, des services à caractère industriel et commercial gérés par les chambres de commerce et d’industrie, des chambres d’agriculture, ainsi que les salariés des établissements et services d’utilité agricole de ces chambres. La charge et la gestion de cette indemnisation sont assurées par les employeurs mentionnés au présent article. Ceuxci peuvent toutefois, par convention conclue avec les institutions gestionnaires du régime d’assurance, leur confier cette gestion. Les employeurs mentionnés au 3° et 4° cidessus ont aussi la faculté par une option irrévocable, de se placer sous le régime de l’article L. 3514 (…) » ;
Considérant qu’il résulte des termes mêmes des dispositions précitées de l’article L. 35112 de ce code, eu égard notamment à leur objet, que le directeur d’un office public d’aménagement et de construction, lequel est un établissement public industriel et commercial, a la qualité de salarié au sens du 3° de cet article, alors même que l’intéressé a la qualité d’agent public ; qu’ainsi, en estimant que l’obligation dont se prévalait M. X ne pouvait être regardée comme n’étant pas sérieusement contestable au motif que la demande de référéprovision soulevait la question de savoir si l’intéressé, agent contractuel de droit public et directeur général de l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise, pouvait être assimilé à un salarié d’un établissement public à caractère industriel et commercial d’une collectivité territoriale au sens du 3° de l’article L. 35112 du code du travail, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Douai a entaché sa décision d’une erreur de droit ; qu’il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, en application de l’article L. 8212 du code de justice administrative, de régler l’affaire au titre de la procédure de référé-provision engagée ;
Considérant que M. X, fonctionnaire de l’Etat placé en position de hors cadre a été recruté, en qualité de directeur général, par l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise, établissement public à caractère industriel et commercial relevant d’une collectivité territoriale ; qu’il a fait l’objet le 1er octobre 2003 d’une décision de licenciement par cet office ; qu’il résulte de l’instruction et n’est d’ailleurs pas contesté qu’il est à la recherche d’un emploi depuis son licenciement ; qu’il résulte de ce qui a été dit plus haut que M. X entre dans le champ des dispositions combinées du 3° de l’article L. 35112 et de l’article L. 3513 du code du travail et peut, à ce titre, prétendre aux allocations d’assurance mentionnées à l’article L. 3513 du même code ; que, par suite, la créance dont se prévaut l’intéressé n’est pas sérieusement contestable dans son principe ;
Considérant que M. X demande, par voie d’appel incident, que le montant de la provision accordée par les premiers juges, fixé à 36 117,40 euros, soit porté à 42 206,67 euros ; qu’il n’est pas contesté que cette somme correspond au montant des allocations auxquelles M. X est en droit de prétendre ; qu’il y a lieu, dans ces conditions, d’accorder à l’intéressé la provision qu’il sollicite ; que l’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif d’Amiens doit être réformée seulement dans cette dernière mesure ;
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise le versement à M. X d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 7611 du code de justice administrative ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme que l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens soit mise à la charge de M. X qui n’est pas la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’ordonnance en date du 5 octobre 2004 du juge des référés de la cour administrative d’appel de Douai est annulée.
Article 2 : La provision que l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise est condamné à payer à M. X est portée à la somme de 42 206,67 euros.
Article 3 : L’ordonnance du juge des référés du tribunal administratif d’Amiens en date du 29 juillet 2004 est réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La requête de l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise devant la cour administrative d’appel de Douai est rejetée.
Article 5 : L’office public d’aménagement et de construction de l’Oise versera une somme de 2 000 euros à M. X au titre de l’article L. 7611 du code de justice administrative.
Article 6 : La demande présentée devant le Conseil d’Etat par l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise au titre de l’article L. 7611 du code de justice administrative est rejetée.
Article 7 : La présente décision sera notifiée à M. Henri X, à l’office public d’aménagement et de construction de l’Oise et au ministre des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer.