AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
M. C… B… a demandé au tribunal administratif de Poitiers d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 20 octobre 2015 par laquelle la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Bordeaux a confirmé la décision du 7 septembre 2015 du directeur de la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré lui infligeant la sanction de dix jours de cellule disciplinaire. Par un jugement n° 1502696 du 5 juillet 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 17BX03016 du 28 juin 2019, la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté la requête présentée par M. B… tendant à l’annulation de ce jugement.
Par un pourvoi, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 18 novembre 2019, 18 février et 21 septembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. B… demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’arrêt du 28 juin 2019 ;
2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros à verser à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, son avocat, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code de procédure pénale ;
– la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
– la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
– le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme A… D…, maître des requêtes en service extraordinaire,
– les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. C… B… ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que M. C… B…, incarcéré à la maison centrale de Saint-Martin-de-Ré entre le 8 juin 2010 et le 15 décembre 2015, s’est vu infliger, par une décision du 7 septembre 2015 du directeur de l’établissement pénitentiaire en commission de discipline, une sanction de dix jours de placement en cellule disciplinaire pour avoir insulté un surveillant et craché au visage de celui-ci. Cette sanction a été confirmée par une décision de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Bordeaux du 20 octobre 2015. Par un jugement du 5 juillet 2017, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté la demande de M. B… tendant à l’annulation de cette décision. M. B… se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 28 juin 2019 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l’annulation de ce jugement.
2. En premier lieu, le premier alinéa de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, dont les dispositions figurent désormais à l’article L. 111-2 du code des relations entre le public et l’administration, dispose que : » Dans ses relations avec l’une des autorités administratives mentionnées à l’article premier, toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l’adresse administratives de l’agent chargé d’instruire sa demande ou de traiter l’affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l’anonymat de l’agent est respecté. » Aux termes de l’article R. 57-7-13 du code de procédure pénale : » En cas de manquement à la discipline de nature à justifier une sanction disciplinaire, un compte-rendu est établi dans les plus brefs délais par l’agent présent lors de l’incident ou informé de ce dernier (…). » Les dispositions du premier alinéa de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000, contrairement à ce qu’a jugé la cour administrative d’appel de Bordeaux par l’arrêt attaqué, sont applicables à toutes les procédures dans le cadre desquelles un agent est chargé du traitement d’une affaire, y compris les procédures disciplinaires. La cour a, par suite, entaché son arrêt d’erreur de droit en écartant comme inopérant, au motif que n’était pas en cause, au sens de ces dispositions, le traitement d’une affaire, le moyen tiré de ce que les comptes rendus établis à la suite de l’incident impliquant M. B… ne mentionnaient pas l’identité de son rédacteur. Toutefois, la méconnaissance de ces dispositions est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision prise, au terme de la procédure, par l’autorité administrative compétente. Ce motif de pur droit, dont l’examen n’implique l’appréciation d’aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif erroné retenu par l’arrêt attaqué, dont il justifie le dispositif.
3. En deuxième lieu, en jugeant qu’avait été sans incidence sur la régularité de la procédure disciplinaire suivie la circonstance que M. B… avait fait l’objet de deux compte rendus d’incident relatifs aux mêmes faits, établis les 26 et 31 août 2015, alors même qu’ils divergeaient de quelques minutes quant à l’heure de survenance de l’incident rapporté et que le second avait été établi six jours après les faits, la cour administrative d’appel de Bordeaux n’a pas entaché son arrêt de dénaturation.
4. En troisième lieu, c’est par une appréciation souveraine des pièces du dossier, exempte de dénaturation, que la cour administrative d’appel de Bordeaux a estimé que M. B… avait reconnu, lors de la séance de la commission de discipline du 7 septembre 2015, avoir commis les faits qui lui étaient reprochés.
5. En dernier lieu, l’article R. 57-7-1 du code de procédure pénale dispose que : » Constitue une faute disciplinaire du premier degré le fait, pour une personne détenue : 1° d’exercer ou de tenter d’exercer des violences physiques à l’encontre d’un membre du personnel ou d’une personne en mission ou en visite dans l’établissement « .
6. En jugeant que le fait de cracher au visage d’un surveillant devait être regardé comme une violence physique au sens de ces dispositions, la cour administrative d’appel de Bordeaux a exactement qualifié les faits et n’a pas entaché son arrêt d’erreur de droit.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B… n’est pas fondé à demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement par la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. B….
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. B… est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C… B… et au garde des sceaux, ministre de la justice.
ECLI:FR:CECHR:2021:436013.20210301