REQUETE du Préfet de la Corrèze, tendant à l’annulation d’un jugement du 15 mai 1963 par lequel le tribunal administratif de Limoges a, sur les demandes des consorts X… et du sieur Cammat, annulé les arrêtés dudit Préfet en date des 17 avril et 7 mai 1962 autorisaient l’Entreprise de travaux publics Bourg à occuper temporairement des parcelles sises sur le territoire de la commune de Naves ;
Vu la loi du 22 juillet 1889, le décret du 8 septembre 1934 et la loi du 7 juin 1956 ; la loi du 29 décembre 1892 ; l’ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; le Code général des impôts ;
Sur la recevabilité de l’intervention de la dame Y… et d’autres habitants de la section de Chaunac :
CONSIDERANT qu’aux termes de l’article 41 de l’ordonnance du 31 juillet 1945 à la requête des parties doit être signée par un « avocat au Conseil d’Etat » ; qu’en vertu de l’article 42 de la même ordonnance « la requête peut être signée par la partie intéressée ou son mandataire lorsque des lois spéciales ont dispensé du ministère d’avocat et, notamment, pour les affaires visées à l’article 45 » ;
Considérant que l’intervention de la dame Y… Geneviève et autres habitants de la section de commune de Chaunac est présentée au soutien de conclusions tendant au rejet d’un appel formé contre un jugement du Tribunal administratif de Limoges qui a annulé deux arrêtés du préfet de la Corrèze en date des 17 avril, 7 mai 1962 autorisant l’Entreprise Bourg à occuper temporairement des terrains dans la section de Chaunac de la commune de Naves ;
Considérant que ni l’article 45 de l’ordonnance du 31 juillet 1945, modifié par l’article 13 du décret du 30 septembre 1953, ni aucun texte spécial ne dispense une telle requête du ministère d’un avocat au Conseil d’Etat ; que, dés lors, l’intervention susvisée, présentée sans le ministère d’un avocat au Conseil d’Etat, n’est pas recevable ;
Sur les conclusions de la requête du préfet de la Corrèze :
Considérant que le ministre de l’intérieur s’est approprié les conclusions de l’appel du préfet de la Corrèze lesquelles doivent être regardées comme présentées au nom de l’Etat ;
Sur la recevabilité de la demande du sieur Cammat agissant comme représentant la section de Chaunac de la commune de Naves :
Considérant, en premier lieu, qu’il n’est pas contesté qu’en désignant « les habitants de Chaunac » comme propriétaires des terrains dont ils autorisaient l’occupation, les arrêtés attaqués ont entendu reconnaître les droits de la section de commune de Chaunac, qui avait ainsi intérêt à en demander l’annulation ; que la commission syndicale de ladite section de commune, élue pour étudier un projet de vente des terrains à l’Entreprise Bourg, était compétente pour décider des intérêts de la section à propos de t’occupation temporaire de ces terrains par ladite entreprise ;
Considérant, en second lieu, qu’il résulte de l’instruction qu’en application des dispositions de l’article 130 du Code de l’administration communale selon lesquelles : « En cas de désaccord entre le conseil municipal et la commission syndicale, il est statué par arrêté motivé du préfet. Si le préfet estime qu’il y a lieu d’exercer ou de soutenir l’action et que le conseil municipal soit de l’avis opposé, l’arrêté précité charge le président de la commission syndicale de représenter la section dans les conditions prévues à l’article suivant », le préfet de la Corrèze a, par décision du 30 août 1962, autorisé la commission syndicale de la section de Chaunac de la commune de Naves, représentée par son président, à attaquer les arrêtés préfectoraux susvisés des 17 avril et 7 mai 1962 ; qu’ainsi le sieur Cammat, président en exercice de la commission syndicale de la section de commune de Chaunac avait qualité pour introduire, au nom de cette section, devant le Tribunal administratif de Limoges, une demande tendant à l’annulation des arrêtés préfectoraux susvisés ; qu’alors même qu’une nouvelle commission syndicale a été ensuite constituée par arrêté préfectoral du 7 septembre 1962 pour rechercher un accord avec l’Entreprise Bourg sur les conséquences de l’occupation, le sieur Cammat n’a pas perdu qualité pour représenter la section de commune dans l’action engagée contre les arrêtés d’occupation temporaire pris en faveur de la même entreprise ;
Considérant enfin que la demande du sieur Cammat n’est pas au nombre de celles qui devaient être introduites, à peine de déchéance, devant la juridiction administrative du premier degré dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision attaquée, ni en vertu du décret du 8 septembre 1934, ni par application de l’article 3 du décret du 30 septembre 1953 ou de la loi alors en vigueur du 7 juin 1956 ; que la loi du 29 décembre 1892 n’institue aucun délai pour la présentation de pourvois dirigés contre des arrêtés portant autorisation d’occupation temporaire ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le ministre de l’Intérieur n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Limoges a déclaré recevable la demande formée par le sieur Cammat, au nom de la section de commune de Chaunac ; que, par suite, il n’y a lieu de rechercher si d’autres demandes tendant aux mêmes fins et présentées par des habitants de la section de commune étaient aussi recevables ;
Sur la légalité des arrêtés litigieux :
Considérant que l’article 3 de la loi du 29 décembre 1892 prévoit que l’arrêté d’occupation doit notamment : « indiquer de façon précis les travaux à raison desquels l’occupation est ordonnée … « ; que les arrêtés préfectoraux dé 17 avril et 7 mai 1962, en se bornant à indiquer que l’occupation avait pour but de permettre l’exécution de travaux divers sur toutes « catégories de routes, chemins et rues dans diverses communes » sans même énumérer lesdites communes, n’ont pas respecté les exigences de la loi ; que, dès lors, le ministre de l’Intérieur n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que le jugement attaqué a annulé les arrêtés dont s’agit ;
Sur les dépens de première instance :
Considérant qu’aucune disposition de la loi du 29 décembre 1892 ne prescrit de mettre les dépens de l’instance qui a abouti à l’annulation d’un arrêté d’occupation temporaire à la charge de la collectivité publique pour le compte de qui les travaux qui ont donné lieu à l’occupation devaient être exécutés ;
Mais considérant qu’aux termes de l’article 19 de la loi du 29 décembre 1892 « les plans, procès-verbaux, certificats, significations, jugements, contrats, quittances et autres actes faits en vertu de la présente loi, seront visés pour timbre et enregistrés gratis, quand il y aura lieu à la formalité de l’enregistrement » ; que, dés lors, le ministre est fondé à demander l’annulation du jugement attaqué – lequel était suffisamment motivé – en tant qu’il a mis à la charge de l’Etat des dépens afférents. à des actes exonérés par les dispositions de l’article 19 susreproduit ; … Intervention de la dame Y… Geneviève et des autres habitants de la section de Chaunac non admise ; annulation de l’article 2 du jugement attaqué en tant qu’il a condamné l’Etat à supporter les dépens afférents à des actes exonérés par les dispositions de l’article 19 de la loi du 29 décembre 1892 ; rejet du surplus des conclusions de la requête reprise par le ministre de l’Intérieur .