Vu la requête, enregistrée le 3 avril 1998 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour M. Bruno A…, demeurant … ; M. A… demande que le Conseil d’Etat annule le décret du 10 février 1998 par lequel le Premier ministre a, dans le cadre des dispositions de l’article L.O. 144 du code électoral, chargé M. Z… d’Attilio, député des Bouches-du-Rhône, d’une mission temporaire auprès du secrétaire d’Etat à l’industrie ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution ;
Vu le code électoral notamment ses articles L.O. 142 et L.O. 144 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de M. Donnat, Auditeur,
– les observations de Me Pradon, avocat de M. Bruno A… et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Z… d’Attilio,
– les conclusions de Mme Maugüé, Commissaire du gouvernement ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
Considérant que l’article L.O. 142 du code électoral énonce dans son premier alinéa que l’exercice de fonctions publiques non électives est incompatible avec le mandat de député ; que l’article L.O. 144 du même code permet de déroger à cette règle dans le cas des « personnes chargées par le gouvernement d’une mission temporaire » qui peuvent cumuler l’exercice de cette mission avec leur mandat parlementaire pendant une durée n’excédant pas six mois ;
Considérant que le décret par lequel le Premier ministre charge un parlementaire d’une mission que celui-ci doit accomplir auprès d’une administration ou en son sein, constitue le premier acte de l’exécution d’une mission administrative dont un parlementaire se trouve temporairement investi ; qu’un tel acte, qui est détachable des rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif tels qu’ils sont organisés par la Constitution, revêt le caractère d’une décision administrative susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir ; qu’ainsi, M. d’X… n’est pas fondé à soutenir que la requête susvisée dirigée contre le décret du 10 février 1998 le chargeant d’une mission temporaire en application de l’article L.O. 144 du code électoral devrait être rejetée comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le Premier ministre et M. d’Attilio :
Considérant qu’au soutien de sa requête, M. A… allègue que la mission confiée à M. d’Attilio serait dépourvue de toute consistance et que le décret attaqué du 10 février 1998 n’aurait eu d’autre but, en permettant à M. d’Attilio d’être, après un renouvellement de sa mission au-delà de la durée initiale de six mois, remplacé à l’Assemblée nationale, par application de l’article L.O. 176-1 du code électoral, par son suppléant, que de créer des conditions dans lesquelles M. d’Attilio pourrait être candidat lors du renouvellement triennal du Sénat de septembre 1998 sans que son élection comme sénateur impliquât une élection législative partielle dans la douzième circonscription des Bouches-du-Rhône où il avait été élu le 1er juin 1997 en l’emportant sur M. A… ;
Considérant toutefois que, dans le cadre de la mission temporaire qui lui a été confiée par le gouvernement, M. d’Attilio a, le 28 juillet 1998, remis au secrétaire d’Etat à l’industrie un rapport, rendu public le 15 septembre 1998, portant sur « l’utilisation par les collectivités locales des nouvelles technologies de l’information » ; que le détournement de pouvoir allégué n’est pas établi ;
Sur les conclusions de M. d’Attilio tendant à l’application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner M. A… à payer à M. d’Y… la somme qu’il demande au titre des frais exposés par luiet non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. d’Attilio tendant à l’application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Bruno A…, à M. Z… d’Attilio et au Premier ministre.