Vu 1°), sous le n° 360724, le mémoire, enregistré le 3 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présenté par l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité (APPEL), dont le siège est situé 76, rue Philippe de Girard à Paris (75018), représentée par son président, en application de l’article 23-5 de l’ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 ; l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité (APPEL) demande au Conseil d’Etat, à l’appui de sa requête tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Président de la République sur sa demande du 29 février 2012 tendant à l’abrogation de l’ensemble des dispositions réglementaires de la loi du 18 germinal An X et du décret n° 2001-31 du 10 janvier 2001 relatif au régime des cultes catholique, protestants et israélite dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924 ;
Vu 2°), sous le n° 360725, le mémoire, enregistré le 3 octobre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présenté par l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité (APPEL), dont le siège est situé 76, rue Philippe de Girard à Paris (75018), représentée par son Président, en application de l’article 23-5 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ; l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité (APPEL) demande au Conseil d’Etat, à l’appui de sa requête tendant à l’annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre, sur sa demande du 29 février 2012 tendant à l’abrogation du décret n° 2007-1341 du 11 septembre 2007 modifiant la loi locale du 15 novembre 1909 relative aux traitements et pensions des ministres des cultes rétribués par l’Etat et leurs veuves et orphelins, ainsi que du décret n° 2007-1445 du 8 octobre 2007 relatif à la fixation du classement indiciaire des personnels des cultes d’Alsace et de Moselle, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924 ainsi que de l’article 7 des Articles organiques des cultes protestants annexés à la loi du 18 germinal An X ;
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu les notes en délibéré, enregistrées le 17 décembre 2012, présentées par l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu les articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal An X relative à l’organisation des cultes, notamment l’article VII ;
Vu la loi du 17 octobre 1919 relative au régime transitoire de l’Alsace et de la Lorraine ;
Vu la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, notamment le 13° de son article 7 ;
Vu l’ordonnance du 15 septembre 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2011-157 QPC du 5 août 2011 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Isabelle Lemesle, Maître des Requêtes,
– les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;
1. Considérant que les mémoires présentés à l’appui des requêtes n°s 360724 et 360725 soulèvent des questions semblables ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
2. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : » Le moyen tiré de ce qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé, y compris pour la première fois en cassation, à l’occasion d’une instance devant le Conseil d’Etat (…) » ; qu’il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu’elle n’ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
Sur la question prioritaire de constitutionnalité relative au 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924 :
3. Considérant qu’aux termes de l’article 3 de la loi du 17 octobre 1919 relative au régime transitoire de l’Alsace et la Lorraine : » Les territoires d’Alsace et de Lorraine continuent, jusqu’à ce qu’il ait été procédé à l’introduction des lois françaises, à être régies par les dispositions législatives et réglementaires qui y sont actuellement en vigueur » ; que le 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924 maintenant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle a maintenu l’application dans ces départements de » la législation locale sur les cultes et les congrégations religieuses » en vigueur au 1er février 1925 ; qu’aux termes de l’article 3 de l’ordonnance du 15 septembre 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle : » La législation en vigueur (…) à la date du16 juin 1940 est restée seule applicable et est provisoirement maintenue en vigueur » ; que ces dispositions, qui ont pour effet de maintenir en vigueur, dans les trois départements précités, le Concordat et les articles organiques applicables aux cultes catholique et protestants de la loi du 18 germinal An X, n’ont jamais été abrogées;
4. Considérant que l’instance, à l’occasion de laquelle la présente question prioritaire de constitutionnalité est posée, a pour objet l’annulation du refus du président de la République d’abroger les dispositions réglementaires de la loi du 18 germinal An X et du décret du 10 janvier 2001 relatif au régime des cultes catholique, protestants et israélite dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; que, ainsi qu’il a été dit, les dispositions du 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924 maintiennent en vigueur, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, la législation locale sur les cultes et les congrégations religieuses en vigueur au 1er janvier 1925, jusqu’à l’intervention de l’ordonnance du 15 septembre 1944 ; que, par suite, ces dispositions législatives ne sont pas applicables au présent litige au sens et pour l’application des dispositions précitées de l’article 23-5 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 ; qu’ainsi, sans qu’il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que les dispositions du 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924 portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;
Sur la question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article VII des articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal An X :
5. Considérant qu’aux termes de l’article VII des articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal An X : » Il sera pourvu au traitement des pasteurs des églises consistoriales, bien entendu qu’on imputera sur ce traitement les biens que ces églises possèdent, et le produit des oblations établies par l’usage ou par des règlements » ; que l’APPEL soutient que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au principe constitutionnel de laïcité ;
6. Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées de l’article VII des articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal An X qui, notamment, posent le principe de la rémunération des ministres des cultes protestants, sont applicables au litige tendant à l’annulation du décret du 11 septembre 2007 modifiant la loi locale du 15 novembre 1909 relative aux traitements et pensions des ministres des cultes rétribués par l’Etat et leurs veuves et orphelins, ainsi que du décret du 8 octobre 2007 relatif à la fixation du classement indiciaire des personnels des cultes d’Alsace et de Moselle ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions législatives critiquées n’ont pas été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ;
8. Considérant, en troisième lieu, que le moyen dont se prévaut l’association requérante, tiré de ce que les dispositions de l’article VII des articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal An X relative à l’organisation des cultes seraient contraires au principe de laïcité, soulève une question sérieuse ;
9. Considérant qu’il y a lieu, dans ces conditions, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article VII des articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal An X ;
D E C I D E :
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Article 1er : Il n’y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité relative au 13° de l’article 7 de la loi du 1er juin 1924.
Article 2 : La question de la conformité à la Constitution de l’article VII des articles organiques applicables aux cultes protestants de la loi du 18 germinal An X relative à l’organisation des cultes est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 3 : Il est sursis à statuer sur la requête n° 360725 de l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité jusqu’à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l’Association pour la promotion et l’expansion de la laïcité.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.