REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée le 12 avril 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE, dont le siège est 23-25 rue Radziwill à Paris Cedex 01 (75049) ; le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE demande au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler l’ordonnance du 28 mars 2006 par laquelle le juge des référés de la cour administrative d’appel de Paris, statuant en application des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, a prononcé la suspension de l’exécution de sa délibération en date du 6 décembre 2005 modifiant l’article 8 de son règlement intérieur ;
2°) statuant au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter la requête de la Banque de France ;
3°) de mettre à la charge de la Banque de France la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code monétaire et financier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de Mme Nathalie Escaut, Maître des Requêtes,
– les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat du COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE et de la SCP Delvolvé, Delvolvé, avocat de la Banque de France,
– les conclusions de M. Didier Casas, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par une délibération en date du 6 décembre 2005, le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE a décidé de modifier l’article 8 de son règlement intérieur en autorisant la participation à ses réunions d’invités par les organisations syndicales ; que la Banque de France a demandé au tribunal administratif de Paris la suspension et l’annulation de cette délibération ; que ses requêtes ayant été rejetées respectivement par une ordonnance du juge des référés en date du 6 février 2006 et par une ordonnance prise sur le fondement de l’article R. 222-1 du code de justice administrative en date du 21 février 2006, la Banque a saisi la cour administrative d’appel de Paris d’une requête d’appel contre cette dernière ordonnance et a demandé au juge des référés de la cour, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l’exécution de la délibération en litige ; que par une ordonnance en date du 28 mars 2006, le juge des référés de la cour administrative d’appel de Paris a ordonné la suspension de l’exécution de cette délibération ; que le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE se pourvoit en cassation contre cette ordonnance ;
Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 142-1 du code monétaire et financier : La Banque de France est une institution dont le capital appartient à l’Etat ; qu’aux termes de l’article L. 144-3 du même code : La juridiction administrative connaît des litiges se rapportant à l’administration intérieure de la Banque de France ou opposant celle-ci aux membres du Conseil de la politique monétaire, aux membres du Conseil général ou à ses agents ; que la Banque de France est une personne publique chargée par la loi de missions de service public qui revêt une nature particulière et présente des caractéristiques propres, au nombre desquelles figure l’application à son personnel des dispositions du code du travail qui ne sont incompatibles ni avec son statut, ni avec les missions de service public dont elle est chargée ;
Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par la délibération litigieuse en date du 6 décembre 2005, le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE a introduit à l’article 8 de son règlement intérieur une disposition prévoyant que Participent également aux séances du comité central d’entreprise le conseiller général représentant le personnel et un invité par organisation syndicale représentative. Chacune d’elle peut changer d’invité en fonction des points de l’ordre du jour. / Le secrétaire est assisté, outre la sténotypiste, par deux collaborateurs ; que le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE est, en application de l’article L. 435-1 du code du travail, une personne morale de droit privé qui n’exerce aucune mission de service public et ne prend pas de décision administrative ; que le juge judiciaire est ainsi seul compétent pour connaître des litiges portant sur son règlement intérieur ; que dès lors, le juge des référés n’était pas compétent pour se prononcer sur la demande de suspension de la délibération en litige ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE est fondé à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, par application de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au titre de la procédure de référé engagée par la Banque de France ;
Considérant que, ainsi qu’il a été dit, la délibération du COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE en date du 6 décembre 2005 émane d’une personne de droit privé n’exerçant aucune mission de service public ; que, par suite, les conclusions de la requête de la Banque de France tendant à ce que soit ordonnée la suspension de l’exécution de cette délibération ne relèvent pas de la compétence de la juridiction administrative ;
Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de la Banque de France une somme de 5 000 euros au titre des frais exposés, devant la cour administrative d’appel et le Conseil d’Etat, par le COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er : L’ordonnance du juge des référés de la cour administrative d’appel de Paris en date du 28 mars 2006 est annulée.
Article 2 : La requête de la Banque de France tendant à la suspension de l’exécution de la délibération du COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE en date du 6 décembre 2005 est rejetée.
Article 3 : La Banque de France versera au COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l’article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au COMITE CENTRAL D’ENTREPRISE DE LA BANQUE DE FRANCE et à la Banque de France.