REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Donne acte à la société Dalkia France du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre le syndicat des copropriétaires de la clinique Axium et la société G2E ;
Sur le premier moyen :
Vu l’article 1382, devenu 1240, du code civil ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 12 novembre 2015), que la copropriété clinique Axium est composée notamment du lot n° 7 situé dans le bâtiment A, propriété de la SCI Hydraxium et donné à bail à la société Axium Kinésithérapie, du lot n° 1 situé dans le bâtiment B et d’autres lots n° 2 à n° 6, situés au sous-sol du bâtiment A, propriété de la société Holding d’Aix-en-Provence et donnés à bail à la société Sorevie Gam ; qu’en 2004, la société Sorevie Gam et le syndicat des copropriétaires ont fait réaliser, dans le bâtiment A, des travaux de chauffage, climatisation et traitement de l’eau, par le groupement constitué par la société Dalkia France et la société Faure ingénierie, des études étant confiées à la société G2E ; qu’une première instance a opposé la société Sorevie Gam aux sociétés Dalkia France, Faure ingénierie et G2E ; qu’en 2007, invoquant une importante condensation dans les locaux du lot n° 7, la SCI Hydraxium et sa locataire, la société Axium Kinésithérapie, ont, après expertise, assigné en indemnisation le syndicat des copropriétaires et la société Holding d’Aix-en-Provence qui a appelé en garantie les sociétés Dalkia France et G2E ;
Attendu que, pour déclarer la société Dalkia France responsable de la condensation anormale dans le lot n° 7, rejeter ses appels en garantie et la condamner à paiement, l’arrêt retient qu’il résulte de la convention du 5 avril 2004 que la société Faure ingénierie et la société Dalkia France se sont engagées solidairement à l’égard de la société Sorevie Gam à livrer un ouvrage conforme aux prévisions contractuelles et exempt de vices, qu’en manquant à cette obligation, la société Dalkia France a commis une faute à l’origine de la condensation anormale et que cette faute engage sa responsabilité délictuelle à l’égard de la SCI Hydraxium et de la société Axium Kinésithérapie ;
Qu’en statuant ainsi, par des motifs qui, tirés du seul manquement à une obligation contractuelle de résultat de livrer un ouvrage conforme et exempt de vices, sont impropres à caractériser une faute délictuelle, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il déclare la société Dalkia France responsable de la condensation anormale ayant affecté le local abritant la piscine dépendant du lot 7 entre le mois de novembre 2004 et le mois de mai 2011, rejette ses appels en garantie dirigés contre le syndicat des copropriétaires de la clinique Axium, la société G2E et la société Holding d’Aix-en-Provence, condamne la société Dalkia France à payer à la SCI Hydraxium une indemnité de 18 909,73 euros en réparation des dommages matériels causés à son local par la condensation, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 20 février 2014, condamne la société Dalkia France à payer à la société Axium Kinésithérapie une indemnité de 180 000 euros en réparation de son préjudice économique, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 20 février 2014, l’arrêt rendu le 12 novembre 2015, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la SCI Hydraxium et la société Axium Kinésithérapie aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille dix-sept.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Dalkia France
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR déclaré la société Dalkia France responsable de la condensation anormale ayant affecté le local abritant la piscine dépendant du lot 7 entre le mois de novembre 2004 et le mois d’avril 2011, D’AVOIR débouté la société Dalkia France de ses appels en garantie dirigés contre le syndicat des copropriétaires de la clinique Axium, la société G2E et la société Holding d’Aix-en-Provence et D’AVOIR condamné la société Dalkia France à payer à la SCI Hydraxium, une indemnité de 18 909,73 euros en réparation des dommages matériels causés à son local par la condensation et à la société Axium kinésithérapie, une indemnité de 180 000 en réparation de son préjudice économique ;
AUX MOTIFS QUE s’il est constant que le groupe Wesper a été installé par la société Faure ingéniérie, la convention du 5 avril 2004 liant le contractant général à la société Sorévie Gam, maître de l’ouvrage, précise que le groupement a en charge l’ensemble des études préalables de conception et d’exécution et la réalisation des travaux, qu’il organise le chantier dans le cadre des délais prévus, qu’il est responsable de la fourniture des matériaux et de leur mise en oeuvre, qu’il est débiteur d’une garantie de parfait achèvement et qu’il s’engage à exécuter les travaux pour une somme globale forfaitaire ; qu’il résulte des termes de cette convention que la société Faure ingénierie et la société Dalkia France se sont engagées solidairement à l’égard de la société Sorévie Gam à livrer un ouvrage conforme aux prévisions contractuelles et exempt de vices ; qu’en manquant à cette obligation, la société Dalkia France a commis une faute à l’origine de la condensation anormale qui s’est produite dans le local piscine dépendant su lot 7, et cette faute engage sa responsabilité délictuelle à l’égard de la SCI Hydraxium et de la société Axium kinésithérapie ; qu’aucune faute ne pouvant être reprochée à la société Holding d’Aix-en-Provence qui n’est pas intervenue dans la réalisation des travaux dont sa locataire était maître d’ouvrage, les demandes dirigées contre elle seront rejetées
ALORS, 1°), QUE si le tiers à un contrat peut, en principe, invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage, il en va différemment lorsque la personne dont la responsabilité délictuelle est recherchée n’a, elle-même, commis aucune faute dans l’exécution de ses obligations et ne pourrait voir engager sa responsabilité contractuelle qu’au titre d’une solidarité avec un cocontractant fautif, dont un tiers au contrat ne peut se prévaloir ; qu’en se bornant à constater, pour retenir que la société Dalkia France avait engagé sa responsabilité délictuelle envers les société Hydraxium et Axium kinésithérapie, qu’elle s’était solidairement engagée vis-à-vis de la société Sorévie Gam à livrer un ouvrage exempt de vices, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Dalkia France était, par sa faute, à l’origine des désordres dont la réparation était recherchée, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 1382 du code civil ;
ALORS, 2°), QU’en se bornant à retenir, pour rejeter toutes les demandes formées contre la société Holding d’Aix-en-Provence, qu’elle n’était pas intervenue dans la réalisation des travaux dont, sa locataire, la société Sorévie Gam, était maître d’ouvrage, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, dans le courant du mois de juillet 2008, soit postérieurement à la réalisation des travaux, elle n’avait pas commis une faute ayant aggravé les désordres en procédant de manière unilatérale au démontage du caisson de ventilation du bâtiment A, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard de l’article 1382 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué D’AVOIR condamné la société Dalkia France à payer à la société Axium kinésithérapie, une indemnité de 180 000 en réparation de son préjudice économique ;
AUX MOTIFS QUE le phénomène de condensation anormale a commencé en novembre 2004, a diminué en 2010 en raison de travaux effectués par la société Dalkia France et n’a cessé qu’en mai 2011, date à laquelle le groupe Wesper a finalement été remplacé par un groupe d’une autre marque ; que la société Axium ayant commencé son activité dans le lot 7 en mars 2004, il est incontestable que les inconvénients liés à l’importante condensation qui s’est produite dans le local piscine ainsi que les désordres causés par cette condensation, ont entraîné une dépréciation de son image et une désaffection de sa clientèle à l’origine d’une baisse de son chiffre d’affaires ; qu’il n’est toutefois pas établi de manière certaine que si cette condensation ne s’était pas produite, le chiffre d’affaires de la société Axium kinésithérapie aurait progressé d’une manière aussi importante que ce qu’elle affirme, en sorte que son préjudice s’analyse en une perte de chance de réaliser cette progression ; qu’en l’état des pièces produites par la société Axium kinésithérapie, le préjudice économique doit être fixé à 180 000 euros ;
ALORS QUE le juge doit, en toute circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en relevant d’office le moyen tiré de ce que le préjudice subi par la société Axium kinésithérapie s’analysait en une perte de chance de voir son chiffre d’affaires progresser, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences de l’article 16 du code de procédure civile.