Mme Hallal, ressortissante algérienne, a vécu en France de 1964 à 1981 et est mère de 7 enfants nés sur le sol français et de nationalité française. En août 2000, après qu’elle a perdu son emploi et se retrouve sans ressources, Mme Hallal a sollicité auprès du consul général de France à Annaba la délivrance d’un visa de long séjour en qualité d’ascendant à charge de ressortissant français pour pouvoir vivre en France auprès de ses enfants. Le 28 juin 2001, le consul général a rejeté sa demande au motif qu’elle percevait un salaire mensuel qui ne permettait pas de la considérer comme étant à la charge de ses enfants résidant en France, ce qui faisait donc obstacle à l’obtention du visa en tant qu’ascendant à charge. Mais si ces ressources étaient trop importantes pour considérer que Mme. Hallal était à la charge de ses enfants, elles étaient en revanche insuffisantes, selon le consul, pour qu’elle puisse bénéficier d’un visa de long séjour en qualité de visiteur.
Mme. Hallal a formé contre cette décision de refus un recours préalable obligatoire devant la commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France. Ce recours a été rejeté par la commission, mais pour un motif différent de ceux qui fondaient la décision du consul général. La commission a en effet estimé – et c’est le seul motif retenu- que dans la mesure où Mme Hallal vivait en Algérie auprès de deux de ses filles, elle ne pouvait être considérée comme isolée dans son pays d’origine. Or, il résulte de la jurisprudence du Conseil d’Etat que si un tel élément « pouvait être utilisé pour rechercher si l’intéressée était à la charge effective de ses enfants français, (il) ne pouvait à lui seul légalement justifier que la qualité d’ascendante ne lui fût pas reconnue » (CE 5 novembre 2003, Sbai, req. n°241900).
Cette solution est ici reprise ce qui conduit le Conseil d’Etat à estimer que la décision attaquée est entachée d’erreur de droit. Dans le cadre d’une conception traditionnelle du recours pour excès de pouvoir, le juge se serait borné à cette annulation. Tel n’est pas le cas en l’espèce, le Conseil d’Etat prenant en compte le fait que pour établir que la décision attaquée était légale, le ministre des affaires étrangères invoque, dans son mémoire en défense, un autre motif, tiré de ce que la requérante n’a pas justifié, à la date de la décision de refus, recevoir régulièrement des ressources de la part de ses enfants français résidant en France.
Or, si ce nouveau motif est effectivement susceptible de fonder la décision contestée, il ne figurait pas dans la décision initialement prise. Revenant sur sa jurisprudence URSSAF du jura (CE Sect. 23 juillet 1976, req. n°96526 : Rec. p.362 ; AJDA 1976, p.416, chron. Nauwelaers et Fabius ; Rev. adm. 1976, p.607, concl. Dondoux), le Conseil d’Etat admet la possibilité, pour le juge de l’excès de pouvoir, de procéder à une substitution de motifs et il définit les conditions auxquelles cette possibilité est subordonnée.
I- Admission de la substitution de motifs
La technique de la substitution de motifs se rapproche d’autres mécanismes qui ont pour point commun de permettre au juge de l’excès de pouvoir de rectifier l’acte contesté, ce qui permet de passer outre certaines illégalités. Mais si ces techniques sont parfois anciennes, les juges ont longtemps cantonné la possibilité d’opérer une substitution de motifs aux seules hypothèses dans lesquelles l’administration exerçait une compétence liée.
A- Techniques alternatives de rectification des actes utilisées par le juge de l’excès de pouvoir
De ce point de vue doivent être mentionnées la technique de la substitution de base légale et celle de neutralisation des motifs illégaux.
Dans la première hypothèse, l’illégalité relevée par les juges porte non pas sur les motifs de la décision attaquée mais sur le fondement légal qui a permis à l’administration d’agir. Dans un arrêt Rozé du 8 mars 1957 (Rec. p. 148, concl. Mosset ; AJDA 1957, p.181, chron. Fournier et Braibant) le Conseil d’Etat a admis que le juge peut substituer à un fondement juridique inadéquat un autre fondement en rattachant la décision contestée à un texte qui lui confère des pouvoirs d’une même nature.
Par exemple, dans un arrêt Fadiadji du 26 février 2001, (req. n° 223953 : Rec. p. 1151), le Conseil d’Etat a relevé que pour prendre un arrêté de reconduite à la frontière, un préfet s’était à tort fondé sur les dispositions du 6° de l’article 22 de l’ordonnance du 2 novembre 1945 qui n’étaient pas applicables à la requérante à laquelle n’avait été délivré ni un récépissé de carte de séjour ni une autorisation provisoire de séjour. Toutefois, il y avait lieu de substituer comme fondement légal de l’arrêté contesté les dispositions du 1° du I de l’article 22, dès lors qu’après le refus de sa demande d’admission au statut de réfugié par la commission des recours des réfugiés, la requérante se trouvait dans la situation où le préfet pouvait légalement ordonner sa reconduite à la frontière.
Il faut également préciser sur ce point qu’il ne peut être procédé d’office à la substitution de base légale, au vu des pièces du dossier, que sous réserve que les parties aient été mises à même de présenter leurs observations sur ce point (CE Sect. 21 novembre 2003, préfet Seine-Maritime c/ El Bahi, req. n° 240267 : Rec. p.479, concl. Stahl ; AJDA 2004, p. 202, chron. Donnat et Casas ; RFDA 2004, p.733, concl. Stahl).
La seconde technique utilisée est celle de neutralisation des motifs illégaux. Le Conseil d’Etat admet que, confronté à une décision fondée sur plusieurs motifs dont certains sont erronés, le juge de l’excès de pouvoir a la possibilité d’apprécier, au vu des motifs non erronés qui subsistent, si la sanction prise par l’autorité administrative est ou non justifiée (CE 12 janvier 1968, Ministre de l’économie et des finances c/ Perrot : Rec. p.39 ; AJDA 1968, p. 179, concl. Kahn). Lorsque les juges font jouer ce mécanisme, les moyens tirés des erreurs entachant le ou les autres motifs fondant la décision sont regardés comme inopérants (V. par ex. CE 19 juin 1992, SARL Le Bistrot aixois, req. n°126413 : Rec. p. 239 ; JCP G 1992, IV, 2266). En revanche, si le motif que les juges considèrent déterminant ne permet pas de justifier légalement la décision prise, celle-ci sera annulée (V. par exemple, CE 25 novembre 1998, Onteniente, req. n° 185442 : Rec. p. 446).
Cette appréciation est très délicate puisque « l’annulation doit être justifiée et quasiment proportionnée à l’illégalité commise, dont l’incidence est soigneusement soupesée par le juge, qui se livre à une « simulation » pour déterminer ce qu’aurait été la décision administrative si les motifs illégaux n’avaient pas été pris en compte » (E. de Silva, concl. précitées).
Les techniques de substitution de base légale et de neutralisation des motifs sont complétées par la technique de substitution de motifs.
B- Extension de la technique de la substitution de motifs
La technique de la substitution de motif n’était jusqu’à présent utilisée par le juge de l’excès de pouvoir que dans les hypothèses où l’acte contesté a été pris en application d’une compétence liée de l’administration (CE Sect. 8 juin 1934, Augier, req. n°27035 : Rec. p. 660 ; D. 1934. 3. p. 31, concl. Josse). Cette solution se justifie par le fait qu’il est inutile d’annuler une décision qui ne pouvait pas ne pas être prise. Dans un tel cas, en effet, annuler la décision contestée ne fait que retarder l’intervention de cette décision. Pour des raisons évidentes, liées à l’idée d’une bonne administration de la justice, il importe que le juge puisse maintenir la décision attaquée si un motif de droit, même s’il n’est pas invoqué par l’administration, la justifiait sur le fond.
Dans ce cas, le juge peut opérer d’office à la substitution de motifs. Cependant, compte tenu de la jurisprudence Préfet de la Seine-maritime c/ El Bahi, il est toutefois possible qu’il soit exigé, à l’avenir, comme pour la substitution de base légale, que le juge laisse un certain délai aux parties pour qu’elles puissent présenter leurs observations (V. dans ce sens E. Da Silva, concl. précitées)
Ce qui était admis dans les hypothèses où l’administration faisait usage d’une compétence liée, a en revanche longtemps été exclu dans les cas où c’est l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire qui était en cause. Dans l’arrêt de Section URSAFF du Jura du 23 juillet 1976 (préc.) le Conseil d’Etat a estimé que dans un tel cas, lorsqu’une décision administrative est fondée sur un seul motif erroné en droit, la circonstance que l’auteur de cette décision ait invoqué ultérieurement, devant le juge de l’excès de pouvoir, un autre motif qui aurait pu justifier légalement la décision contestée, n’est pas de nature à la rendre légale. En d’autres termes, les juges considèrent que les motifs sur lesquels l’administration se fonde pour prendre sa décision sont ceux exposés dans la motivation de cette décision. Il refuse, en conséquence, de connaître d’autres motifs susceptibles de fonder légalement la décision que l’autorité administrative peut avancer devant lui.
Une bonne illustration de cette jurisprudence est fournie par l’arrêt du Conseil d’Etat Joorawon du 10 janvier 2003 (req. n° 223395). Dans cette affaire, les juges, après avoir annulé une décision de refus de délivrance d’un visa motivée par l’application d’une convention internationale inapplicable en l’espèce, relèvent que « s’il est vrai, que le ministre invoque devant le Conseil d’Etat, au soutien de la décision attaquée, un autre motif tiré de ce que l’entrée de M. Joorawon sur le territoire français comporterait un risque de menace à l’ordre public … cette circonstance, même si ce dernier motif aurait pu justifier légalement un refus de visa, n’est pas de nature à rendre légale la décision attaquée qui a été prise sur la base d’un seul motif, lequel était erroné en droit ».
Cette jurisprudence rigoureuse n’était guère plus conforme à l’évolution récente du recours pour excès de pouvoir, notamment depuis que le juge administratif s’est vu conférer la possibilité de prononcer des injonctions pour assurer l’exécution de ses propres décisions. En effet, il est désormais admis que le juge de l’excès de pouvoir peut aller au-delà du prononcé d’une simple annulation de l’acte contesté. Pour des raisons, qui relèvent essentiellement de l’opportunité, il peut ainsi prononcer des annulations « en tant que ne pas » qui consistent à indiquer à l’administration les modalités précises selon lesquelles elle doit réparer une illégalité par omission (CE Ass. 29 juin 2001, Vassilikiotis, req. n°213229 : Rec. p.303, concl. Lamy ; AJDA 2001, p. 1046, chron. Guyomar et Collin ; LPA octobre 2001, n° 212, note Damarey ; Europe 2001, comm. n°265). De la même façon, comme cela a été reconnu quelques semaines après l’arrêt Hallal, le juge de l’excès de pouvoir dispose désormais de la possibilité de moduler dans le temps les effets d’une annulation (CE Ass. 11 mai 2004, Assoc. AC ! et a., req. n°255886 : Rec. 2004, p.197, concl. Devys ; AJDA 2004 p.1183,chron. Landais et Lenica ; RFDA 2004, p.454, concl. Devys ; Droit adm. 2004, n°115, note Lombard ; LPA 18 octobre 2004, p.15, note Melleray).
Avant même l’arrêt Hallal, la jurisprudence URSAFF du Jura avait déjà connu un premier infléchissement à l’occasion de l’arrêt du Conseil d’Etat du 23 novembre 2001 Compagnie Air France (req. n°195550 Rec. p. 576 ; CJEG 2002, p. 230, concl. de Silva). Dans cette affaire, le Conseil d’Etat avait admis que le juge de pleine juridiction pouvait désormais substituer au motif invoqué par l’autorité administrative un autre motif de droit susceptible de fonder légalement la décision prise. L’arrêt Hallal, qui concerne le recours pour excès de pouvoir, marque, quant à lui, l’abandon total de cette jurisprudence.
Toutefois, si le juge de l’excès de pouvoir a désormais la possibilité d’opérer une substitution de motifs, y compris dans les cas où l’administration dispose d’un pouvoir discrétionnaire, ce pouvoir est strictement encadré.
II- Mise en œuvre de la technique de substitution de motifs
A l’occasion de l’arrêt Hallal, le Conseil d’Etat reconnaît que l’administration a la possibilité, pour éviter l’annulation d’une décision, de faire valoir devant le juge de l’excès de pouvoir, un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Les conditions de la substitution de motifs sont définies par le Conseil d’Etat et son champ d’application a été précisé par la jurisprudence ultérieure.
A- Conditions de la substitution de motifs
Si la possibilité de procéder à une substitution de motifs tend à rapprocher le recours pour excès de pouvoir du recours de plein contentieux, le juge a l’obligation, avant d’utiliser cette technique, de réaliser plusieurs opérations successives.
Tout d’abord, comme c’est le cas lorsqu’il procède à une substitution de base légale, le juge doit mettre l’auteur du recours à même de présenter ses observations sur la substitution demandée. Cette demande doit se faire soit par la communication du mémoire dans lequel l’administration demande qu’il soit opéré à la substitution de motif, soit par l’envoi d’un courrier spécifique émanant du greffe. Il est à noter également que si le juge n’est pas tenu de s’interroger d’office sur une substitution de motifs, hors les cas de compétence liée, il a l’obligation de statuer sur ce moyen, lorsqu’il est soulevé par l’administration (CE 10 mars 2006, Ministre de la défense c/ Poindrelle, req. n°259192 : JCPA 2006, Act. 237, obs. Rouault).
Le juge doit ensuite opérer un triple contrôle.
Le premier contrôle porte sur la nature du motif avancé par l’administration qui doit être de nature à fonder légalement la décision contestée. Si cette condition n’est pas remplie, la substitution de motif est impossible.
Le second contrôle consiste à apprécier, compte tenu de l’instruction, si l’administration aurait pris la même décision si elle s’était fondée initialement sur le nouveau motif invoqué. Comme l’a relevé Mme. De Silva (Substitution de motifs, deux ans d’application de la jurisprudence Hallal : AJDA 2006, p. 690), ce contrôle s’apparente à celui réalisé dans le cadre de la jurisprudence Dame Perrot (préc.) qui permet de neutraliser un motif illégal s’il résulte de l’instruction que l’administration aurait pris la même décision si elle n’avait pris en considération que des motifs légaux.
Enfin, le juge doit vérifier que la substitution demandée ne prive pas le requérant d’une garantie procédurale liée au motif substitué. L’examen de la jurisprudence postérieure à l’arrêt Hallal conduit à assimiler très nettement ces garanties aux différentes formalités constitutives des droits de la défense.
Par exemple, dans un arrêt Espied c/ Centre hospitalier Arcachon du 24 avril 2006 (req. n° 02BX01088), la Cour administrative d’appel de Bordeaux a décidé que le motif que voulait substituer l’administration à celui initialement indiqué étant un motif pris en considération de la personne, le requérant aurait dû être mis à même d’obtenir la communication de son dossier. Des solutions identiques ont été rendues dans des affaires où ont été relevées l’absence de consultation de la commission départementale de réforme (CAA Lyon, 9 mai 2006, Centre hospitalier universitaire de Grenoble, req. n° 01LY01986 : AJDA 2006, p. 1485, note Kolbert), le non respect du principe du contradictoire (CAA Douai, 18 janvier 2005, Société civile d’exploitation agricole Leprince,req. n°02DA01044) ou encore l’absence de l’exercice de recours administratif préalable obligatoire (CAA Lyon, 6 juillet 2006, ANPE, req. n° 02LY01377).
En revanche, comme l’a précisé le commissaire du gouvernement Seners dans ses conclusions sur l’arrêt Poindrelle du 10 mars 2006 (préc.) si « l’examen attentif par l’administration du dossier qui lui est présenté est incontestablement une garantie dont l’intéressé doit pouvoir bénéficier et dont il doit pouvoir faire censurer la méconnaissance devant le juge … la privation de cette garantie est pleinement compensée par l’examen de l’ensemble des circonstances de fait utiles devant le juge de l’excès de pouvoir ».
Ainsi, la substitution de motifs ne présente aucun caractère d’automaticité et elle ne saurait être conçue comme un moyen d’absoudre l’administration de l’ensemble des erreurs commises par elle.
B- Juridictions devant lesquelles peut être utilisée la technique de la substitution de motifs
Dans l’arrêt Hallal, le Conseil d’Etat a décidé que l’administration pouvait demander la substitution de motif « en première instance comme en appel ». Dans un arrêt Commune de Vred du 25 mai 2004 (req. n°01DA00264 : AJDA 2004, p.2342, concl. Michel ; RFDA 2004, p.750, note Yeznikian), la Cour administration d’appel de Douai a précisé que la possibilité de former cette demande en appel n’était pas conditionnée par la solution retenue par les premiers juges : en effet, la substitution peut être demandée même dans les cas où la décision a été annulée en première instance.
De la même façon, dans les cas où la substitution a été accordée en première instance, les juges d’appel ont la possibilité d’estimer qu’elle l’a été à tort. Ainsi, dans un arrêt Boulay du 25 janvier 2005 (req. n°01BX01026), la Cour administrative d’appel de Bordeaux a estimé, en se fondant sur des éléments nouveaux communiqués en appel, qu’il n’y avait pas lieu de procéder à une substitution de motif, ce qui aboutit à l’annulation de l’acte contesté.
De même, dans l’arrêt Société civile d’exploitation agricole Leprince du 18 janvier 2005 (préc.), la Cour administrative d’appel de Douai a annulé la décision des premiers juges qui avaient procédé à une substitution de motif, dans un cas où le destinataire de l’acte n’avait pas bénéficié de garanties procédurales suffisantes.
En revanche, dans l’arrêt OFPRA du 22 novembre 2006 (req. n°277373 : AJDA 2007, p. 91, note Vérot ; JCPA 2006, act. 1036 ; Droit adm. 2007, comm. 16), le Conseil d’Etat a estimé que « si l’administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l’excès de pouvoir que la décision dont l’annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, elle ne saurait faire cette demande pour la première fois devant le juge de cassation ».
Cette solution s’explique aisément au regard de l’office du juge de cassation, qui permet de le distinguer assez nettement du juge de l’excès de pouvoir. En effet, la question de déterminer si l’administration aurait pris une même décision sur le fondement du nouveau motif invoqué est un type de question qui relève de la compétence des juridictions du fond et qui reste très éloigné des missions traditionnelles dévolues au juge de cassation.
Enfin, une autre précision a été apportée par le Conseil d’Etat à l’occasion de l’arrêt Commune de Villasavary du 15 mars 2004 (req. n° 261130 : Rec. p. 132 ; AJDA 2004, p. 1311, concl. Chauvaux ; Contrats et marchés publ. 2004, comm. 154, note Piétri ; Mon TP 14 mai 2004, p. 78 ; BJDU 3/2004, p. 222), dans lequel le Conseil d’Etat décide d’étendre la jurisprudence Hallal aux instances de référé suspension.
La solution n’était pourtant pas évidente, puisqu’elle concerne des hypothèses où le juge est censé opérer un contrôle de légalité moins poussé que les juges du fond. Pourtant, pour des raisons d’ordre essentiellement pratique, le Conseil d’Etat a admis le recours à cette technique tout en définissant des conditions particulières à la procédure de référé suspension. Plus précisément, si le requérant demeure en mesure de présenter ses observations sur le demande de substitution faite par l’administration, le Conseil d’Etat précise que cette demande doit être faite « dans des conditions adaptées à l’urgence qui caractérise la procédure de référé ».
En toute logique, la substitution de motifs doit être demandée par l’administration au juge des référés. Ainsi, il n’appartient pas à ce juge de rechercher d’office si un autre motif était susceptible de fonder légalement la décision dont la suspension est demandée (CE, 29 mars 2006, Commune Antibes, req. n° 280194).
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