Le Conseil d’Etat, sur les conclusions de M. le commissaire du gouvernement Pichat, vient de faire une tentative extrêmement intéressante pour régler les relations du recours pour excès de pouvoir avec le recours contentieux ordinaire.
C’est une difficulté qui n’est pas nouvelle, et qui, sans doute, ne recevra jamais une solution logique tout à fait satisfaisante, parce que le problème est dominé par des éléments de fait et de pratique. Mais on verra cependant que nos arrêts font faire un pas à la question et qu’en tout cas ils ont le mérite de la poser sur un terrain autre que celui de la distinction entre l’acte d’autorité et l’acte de gestion. Nous nous en applaudissons quant à nous, car il y a longtemps déjà que nous avons déclaré néfaste cette distinction.
Nous suivrons de très près les conclusions de M. le commissaire du gouvernement que l’on trouvera rapportées ci-dessus et auxquelles on voudra bien se reporter car elles le méritent.
I. — M. Lafage, médecin principal de première classe des troupes coloniales, était sous-directeur du service de santé en Cochinchine, et recevait, en cette qualité, l’indemnité pour frais de représentation prévue par le tarif n. 12, annexé au décret du 29 décembre 1903. Une instruction du ministre des colonies du 3 novembre 1909 ayant supprimé le titre de sous-directeur du service de santé, et l’ayant remplacé (dans les colonies secondaires des groupes de colonies) par celui de chef du service de santé, M. Lafage devint chef du service de santé de la Cochinchine. Alors, le ministre des colonies, faisant application d’une circulaire du 8 février 1910, décida, le 30 août 1910, que l’indemnité pour frais de représentation cesserait d’être allouée à M. Lafage. Recours pour excès de pouvoir formé par l’intéressé contre cette décision, et sans ministère d’avocat. Ce recours était-il recevable ?
M. le Commissaire du gouvernement a conclu à la recevabilité pour les motifs suivants :
1° Dans les affaires de solde et traitements, qui sont de minime importance en elles-mêmes et qui intéressent un personnel peu fortuné, le recours pour excès de pouvoir est plus pratique, parce qu’il est dispensé des frais et du ministère de l’avocat, et qu’en somme, les frais de la procédure ne risquent pas de dépasser l’intérêt en jeu, ce qui arriverait avec le recours contentieux ordinaire.
Cette considération pratique ne serait pas déterminante à elle seule, et il importe de chercher un critérium théorique permettant de distinguer les deux contentieux ; il faut faire cesser sur ce point des incertitudes qui durent depuis trop longtemps.
2° Il convient de chercher du côté des conditions requises par la jurisprudence pour que le recours pour excès de pouvoir soit ouvert (Remarquons, que par cette expression, M. le commissaire du gouvernement désigne, à la fois, ainsi qu’on va le voir, les conditions de recevabilité et les ouvertures au fond). Ces conditions sont au nombre de trois ; il y a deux conditions de recevabilité : le recours doit être formé contre une décision administrative exécutoire, et il ne doit pas troubler l’ordre des compétences (les deux autres conditions classiques de recevabilité, la qualité du réclamant et l’observation des formes et délais, sont sans intérêt dans la question de la distinction des deux contentieux) ; il y a une condition de fond : le recours doit être fondé sur la violation de règles de droit légales ou réglementaires.
a) D’abord, le recours pour excès de pouvoir doit être formé contre une décision exécutoire administrative ; il est recevable en principe contre toute décision exécutoire, la distinction que l’on a essayé de faire à une certaine époque, entre l’acte d’autorité et l’acte de gestion ayant complètement échoué. (V. sur ce point, outre les arrêts cités par M. le Commissaire du gouvernement dans ses conclusions ci-dessus reproduites, notre Précis de dr. admin., 7ème éd., p. 413 et s., et 11ème éd., p. 390 et s.)
b) Il ne doit pas troubler l’ordre des compétences, et c’est ce qui a donné lieu à la fin de non-recevoir tirée de l’existence d’un recours parallèle ; mais il convient de remarquer que le recours contentieux de pleine juridiction, ouvert devant le Conseil d’Etat à l’occasion de la même opération, ne doit pas être considéré comme un recours parallèle faisant obstacle au recours pour excès de pouvoir, car le recours pour excès de pouvoir, ici, étant porté devant le même juge, ne risque pas de troubler l’ordre des juridictions, et le Conseil d’Etat ne saurait se porter ombrage à lui-même (V., dans les conclusions de m. le commissaire du gouvernement, une démonstration très convaincante sur ce point.)
c) Enfin, il y a une condition de fond : le recours doit être fondé sur la violation de règles de droit légales ou réglementaires ; il ne peut pas l’être sur la violation d’un droit contractuel, quasi contractuel ou quasi délictuel.
M. le Commissaire du gouvernement paraît avoir été mis sur la voie de cette distinction par la jurisprudence du Conseil d’Etat en matière de concession de travaux publics, jurisprudence que d’ailleurs il vise expressément : on sait que la concession de travaux publics se caractérise par ce fait qu’à côté de la situation contractuelle, réglée par le cahier des charges, il y a une situation purement réglementaire, qui vise la police du service dont l’exploitation est concédée. Si une décision ministérielle ou préfectorale est rendue en matière d’exploitation des chemins de fer ou de tramways, par exemple, et si cette décision n’est relative qu’à la police, elle ne peut être critiquée qu’au point de vue de sa légalité, et ne peut être attaquée que par le recours pour excès de pouvoir ; si elle est relative aux obligations résultant du cahier des charges, elle peut être critiquée au point de vue de l’équilibre financier du contrat, et elle pourra être l’objet d’un recours de pleine juridiction devant le conseil de préfecture (V. Cons. d’Etat, 4 août 1905, Chem. de fer de Bône-Guelma, S. et P. 1907.3.103 ; 22 déc. 1905, Comp. française des tramways de Bordeaux, S. et P., 1907.3.155 ; 6 déc. 1907, Chem. de fer de l’Est, du Midi, du Nord, d’Orléans, de l’Ouest et de Paris-Lyon-Méditerranée, S. et P. 1908.3.1 ; Pand. pér., 1908.3.1, les conclusions de M. Tardieu, commissaire du gouvernement, et la note de M. Hauriou; 4 févr. 1910, Chem. de fer métropolitain de Paris, [2ème espèce], Rec. des arrêts du Cons. d’Etat, p.99 ; 11 mars 1910, Min. des travaux publics, S. et P. 1911.3.1 Pand. pér., 1911.3.1, avec les conclusions de M. Blum, commissaire de gouvernement, et la note de M. Hauriou).
Partant de cette opposition entre la situation légale ou réglementaire, d’une part, contractuelle, de l’autre. M. le Commissaire du gouvernement a généralisé, et a rangé à côté des situation contractuelles les situations quasi contractuelles et quasi délictuelles, sans doute à cause du grand développement des actions en indemnité pour faute de service qui naissent du quasi-délit, et qui sont des recours contentieux de pleine juridiction.
Le Conseil d’Etat [1ère espèce] a suivi les conclusions de M. Pichat, en ce qu’elles tendaient à la recevabilité du recours pour excès de pouvoir, mais il n’a pas reproduit en substance, dans son arrêt, l’opposition esquissée entre la violation des règles légales et réglementaires, d’une part, la violation des droits contractuels, quasi contractuels ou quasi délictuels, d’autre part ; il se borne à dire ceci : « La requête met en question la légalité d’un acte d’une autorité administrative ; par suite, la requête en excès de pouvoir est recevable. »
Que faut-il penser de ces conclusions et de cette formule ? Notre sentiment est qu’elles sont dans la direction de la vérité, avec cependant quelques réserves. Voici qu’elles seraient, à notre avis, les formules tout à fait exactes, et l’on verra qu’elles ne sont pas très éloignées :
1° Toute requête qui ne vise que la légalité d’une décision administrative, envisagée à l’état exécutoire, et sans tenir compte des faits d’exécution ou de leurs conséquences, est une requête en excès de pouvoir. On le voit, nous n’ajoutons qu’une précision, c’est qu’il est essentiel que la décision administrative soit envisagée exclusivement à l’état exécutoire, comme si elle n’était pas encore exécutée, uniquement dans l’effet de droit qu’elle produit avant d’être exécutée. C’est ce que signifie cette règle, toujours maintenue par le Conseil d’Etat, à savoir qu’on ne peut pas joindre à un recours pour excès de pouvoir des conclusions à fin de restitution ou à fin d’indemnité (V. not., Cons. d’Etat, 29 juin 1906, Carteron, S. et P. 1907.3.97, et les décisions citées dans la note, 1ère col., de M. Hauriou ; adde, les renvois de la note, 1ère et 3ème col., de M. Hauriou, sous Cons. d’Etat, 31 mars 1911, Blanc, Argaing et Bézie, 3 arrêts, S. et P. 1912.3.129 ; Pand. pér., 1912.3.129. Comp. ces arrêts), parce qu’alors on dépasse le point de vue de l’acte exécutoire pour se placer au point de vue des conséquences de l’exécution, et qu’ainsi on dépasse le point de vue du contentieux de l’annulation. Il s’agit uniquement de briser un certain effet de droit, qui est menaçant par lui-même, mais qui ne s’est pas encore traduit en faits d’exécution. En somme, les décisions administratives exécutoires, même les plus particulières, apparaissent comme de petites lois ou de petits règlements, qui sont menaçants, même avant d’avoir été réellement appliqués, parce qu’ils modifient l’état du droit. C’est ainsi que la loi du 9 décembre 1905, sur la séparation des Eglises et de l’Etat, a été menaçante pendant une année avant de s’appliquer réellement. L’habitude de ces lois qui ne s’appliquent qu’après un certain délai tend à s’établir, et met bien en évidence l’espèce d’effet de droit que produit une décision exécutoire avant d’être exécutée ; c’est une sorte de modification de l’atmosphère juridique, qui incite tous les intéressés à se préparer et à prendre leurs précautions en vue de l’exécution. C’est la mobilisation qui suit la déclaration de guerre, avant les premières hostilités. C’est ainsi que, le maire d’une ville ayant pris un arrêté pour imposer des protège-pointe aux épingles à chapeau, mais ayant accordé un délai de trois jours, pendant ce délai, les dames se précipitent dans les magasins de mercerie pour se procurer des protège-pointe, et, de leur côté, les agents de la police, en vue des contraventions futures, s’exercent au signalement des coiffures. Dans notre arrêt Lafage [1ère espèce], le ministre avait décidé que l’indemnité de frais de représentation cesserait d’être allouée; mais c’était du futur, cela comportait une mesure d’exécution financière ultérieure, et, en réalité, l’intéressé ne cesserait de toucher qu’après un certain délai. Seulement, dès maintenant, il était décidé qu’il ne toucherait plus.
On saisit maintenant le point de vue, et en même temps, on comprend combien il est juste de dire que cet effet de droit, créé par la décision exécutoire, sera examiné dans sa légalité. D’abord, il est bien évident que le mot « légalité » est pris ici dans un sens très large, puisque, de l’aveu de M. Pichat lui-même, il comprend tous les cas d’excès de pouvoir ; ce ne sont pas seulement les règles légales et réglementaires, ce sont aussi les principes fondamentaux de la bonne administration, même ceux qui ne sont pas codifiés. Ensuite, légalité de la décision exécutoire, cela veut dire : conditions extérieures auxquelles cette manifestation de volonté de l’Administration est assujettie pour être valable dans sa forme ; c’est un point de vue purement formel. Il ne s’agit pas de la justice au fond des prétentions de l’Administration. Cette question ne sera posée qu’après l’exécution. Il s’agit simplement de savoir si le droit nouveau, que l’Administration a la prétention de créer par sa décision, s’adapte à l’ensemble du droit, et si, pour ainsi dire, il est bien venu, au point de vue de la technique juridique.
2° Toute requête qui vise les conséquences de l’exécution d’une décision administrative ou les conséquences d’une opération administrative est une requête en contentieux de la pleine juridiction, parce que ces conséquences sont forcément dominées par les principes du commerce juridique. Le commerce juridique, ce ne sont pas seulement les contrats nommés, les quasi-contrats, et les quasi-délits, ce sont tous les principes de la justice commutative, qui reposent sur la donnée de l’équilibre des patrimoines. Tout service fait, c’est-à-dire tout service rendu à l’Administration sur la foi légitime d’une récompense, mérite d’être rémunéré. C’est un facio ut des, et cela oblige l’Administration d’où le contentieux de ce qu’on pourrait appeler les engagements innommés. Tout préjudice causé par l’Administration dans l’exécution de ses services, et qui l’a été dans des conditions où les habitudes du commerce juridique établissent qu’il est injuste, doit être considéré comme un damnum injuria datum, et oblige l’Administration à réparation ; d’où le contentieux des dommages causés sans faute par des inconvénients de voisinage, celui des dommages causés par des fautes de service, etc.
Et pourquoi les principes du commerce juridique et de la justice commutative ne sont-ils mis en mouvement que par les faits d’exécution et les opérations réalisées ? Parce qu’ils sont essentiellement des forces qui tendent à rétablir un équilibre rompu entre des patrimoines, et parce que l’équilibre n’est rompu que par le préjudice ou le dommage souffert, par le tort causé, non seulement en droit, mais en fait. Les décisions juridiques non exécutées ne sont que des menaces ; exécutées, elles deviennent des dommages. Et c’est ainsi que le contentieux administratif de la pleine juridiction apparaît comme un contentieux de l’indemnité.
On voit en quoi notre formule diffère, encore ici, de celle de M. Pichat : d’une part, elle est plus compréhensive, car elle vise les hypothèses d’engagements innommés ; d’autre part, elle est plus explicative, car elle ramène toutes les hypothèses possibles et imaginables à celle d’une opération exécutée, soit par l’Administration, soit dans l’intérêt de l’Administration.
Et, en somme, le critérium apparaît relativement simple : si le point de vue qui s’impose est celui d’une décision envisagée dans son effet exécutoire, recours pour excès de pouvoir ; au contraire, si, le point de vue qui s’impose est celui d’une opération exécutée, recours contentieux ordinaire.
II. — Nous allons pouvoir faire la contre-épreuve en appliquant ce critérium à la seconde espèce, affaire Schlemmer, où nous allons voir s’accentuer l’écart entre la doctrine de M. Pichat et la nôtre. Il s’agit, cette fois, d’un portier-consigne, qui avait indûment cumulé avec sa solde une pension militaire proportionnelle. Une décision du ministre des finances avait déclaré le requérant débiteur envers le Trésor public du montant des arrérages de la pension touchée en même temps que la solde. Un pourvoi fut formé par l’intéressé sans ministère d’avocat ; le requérant, dit M. le commissaire du gouvernement Pichat, ne contestait pas la légalité de la décision attaquée ; il ne soutenait pas que le cumul fût possible entre les arrérages de sa pension et sa solde de portier-consigne ; il ne prétendait pas non plus qu’un arrêté de débet ne pouvait pas être légalement pris en cette matière. Il se bornait à soutenir que les certificats de vie produits par lui mentionnaient le cumul, que le service public avait donc commis, en lui payant les arrérages de sa pension, une faute qui engageait la responsabilité quasi délictuelle de l’Etat, et qui mettait obstacle au reversement des sommes dues. En conséquence, la requête ne pouvait pas être admise sans ministère d’un avocat, parce qu’au lieu de soulever une simple question de légalité, elle soulevait une question de faute de service.
La décision du Conseil d’Etat reproduit ce raisonnement. Elle constate que « la requête du sieur Schlemmer, qui soulève une question de responsabilité civile de l’Etat, ayant été présentée sans le ministère de l’avocat, n’est pas recevable ».
La décision est, en soi, peu importante, parce qu’elle se présente comme une décision d’espèce, mais la doctrine de M. le Commissaire du gouvernement apparaît plus discutable. Elle se précise en ce sens que, selon lui, le recours pour excès de pouvoir aurait été ouvert au requérant, si celui-ci, au lieu d’invoquer une faute du service public, avait critiqué la légalité de l’arrêté de débet. D’ailleurs, il avoue formellement se séparer ici de la jurisprudence du Conseil d’Etat, qui, jusqu’à présent, n’a jamais admis la recevabilité du recours pour excès de pouvoir formé contre les arrêtés de débet, même si le recours était fondé sur l’illégalité de l’arrêté (V. Cons. D’Etat, 28 nov. 1902, d’Aubigny, Rec. des arrêts du Cons d’Etat. p. 709 ; 8 juill. 1910, Dagneaud, Id., p. 582), sauf dans le cas d’incompétence (V. Cons. d’Etat, 20 janv. 1905, Paternoster, S. et P. 1907.3.8.).
Ainsi, d’après M. le Commissaire du gouvernement, ce ne serait plus qu’une affaire de conclusions, au gré du requérant : si le requérant ne veut conclure qu’à l’illégalité de la décision, recours pour excès de pouvoir ; s’il veut conclure à la responsabilité de l’Administration, recours contentieux ordinaire. Et son choix est libre.
Nous ne croyons pas, quant à nous, que le choix soit libre, il y a un point de vue auquel on doit forcément se placer, et qui dépend des circonstances.
Dans le cas de l’arrêté de débet, le recours contentieux de pleine juridiction s’impose, même pour discuter, la légalité de l’arrêté, parce qu’il s’agit de régler les conséquences d’une opération exécutée. Il y a eu trop-perçu de la part du fonctionnaire, c’est un fait, ce fait cause un dommage à l’Administration, le dommage est causé, l’équilibre des patrimoines est rompu. L’arrêté de débet du ministre, bien qu’étant en soi une décision exécutoire, est dominé par cette situation préexistante, il n’en est qu’un résultat. La cause du litige est le trop-perçu, l’arrêté de débet n’est que l’occasion ; c’est la décision qui lie l’instance, pas autre chose.
Prenons une autre hypothèse, celle de l’affaire Antoine, du 12 janvier 1912 (Rec. des arrêts du Cons. d’Etat, p.59). Il ‘agit d’un capitaine adjudant-major, qui a fait un séjour à Viviers, du 30 septembre au 25 novembre 1910, comme militaire isolé, chargé évidemment de quelque mission, et qui réclame contre une décision du sous-secrétaire d’Etat à la guerre, qui a refusé de lui allouer les indemnités journalières de déplacement normales et réduites prévues par le décret du 12 juin 1908. La requête avait été formée sans ministère d’avocat ; elle est rejetée.
Avons-nous besoin de savoir si la requête visait la seule illégalité de la décision, ou si elle tendait à faire allouer au requérant le montant des indemnités ? Les deux intentions sont ici tellement connexes qu’il n’y en a qu’une. Il est clair que le requérant veut l’allocation des indemnités et il la veut parce qu’il a accompli le déplacement ; il y a de sa part service fait, prestation exécutée, dont il attend la contrepartie.
III. — Résumons : la tentative que marquent nos arrêts est extrêmement intéressante ; elle est dans la direction de la vérité, mais à une condition, c’est que l’on ne se fourvoie pas dans l’impasse qui consisterait à dire : c’est une affaire de point de vue, au gré du requérant ; le vrai chemin, celui qui aboutit, conduit à dire : c’est une affaire de point de vue, mais le point de vue s’impose, il jaillit de la situation même, selon qu’on se trouve en présence d’une décision exécutoire, qui peut être envisagée en elle-même, ou en présence d’une décision qui ne peut être envisagée que par rapport à une opération déjà en voie d’exécution.