Résumé : Si, au sens littéral, « le dialogue des juges désigne toutes les situations concrètes, quelles qu’en soient les modalités, au cours desquelles une discussion portant sur le droit est entamée entre des juges1 », ce dialogue n’implique pas que les juges partagent nécessairement le même avis2. Il en va à plus forte raison lorsque, derrière la discussion sur des points de droit en partage, apparaissent d’irréductibles différences entre les systèmes juridiques. Deux affaires relatives à des titres de recettes mal notifiés par des collectivités territoriales ont donné l’occasion à la Cour de cassation, dans sa formation la plus solennelle, de se prononcer sur l’opportunité d’une transposition du délai Czabaj aux juridictions judiciaires. Ces arrêts témoignent, non d’un « dialogue de sourds », mais d’un authentique dialogue des juges, lequel révèle les limites à la convergence des jurisprudences entre la Cour de cassation et le Conseil d’État en présence de fondements ou principes juridiques propres à chaque ordre.
Sensibles à l’exigence de sécurité juridique, plusieurs cours d’appel faisaient déjà application de la célèbre jurisprudence du Conseil d’État du 13 juillet 2016 en matière de titres locaux de recettes (voir par exemple en matière de titres exécutoires relatifs à des consommations d’eau : CA, Chambéry, civ., sect. 01, 22 juin 2021, n° 20/01613).
Dans le premier cas d’espèce, la société Cora avait assigné en 2015 la commune de Sarrebourg pour obtenir l’annulation de trois titres exécutoires émis par cette dernière entre 2009 et 2011 dans le cadre d’une taxe locale ainsi que le remboursement de ces sommes. En l’espèce, le délai de contestation de deux mois contre les titres de recettes, prévu par l’article L. 1617-5, 2° du code général des collectivités territoriales, n’avait pu courir faute d’une notification régulière des titres émis, ceux-ci ne mentionnant pas la juridiction devant laquelle la contestation devait être formée. Sur ce point, ainsi que nous le verrons, la jurisprudence de la Cour de cassation est constante : en cas de notification incomplète ou en l’absence de notification, les délais de recours prévus par les textes ne sont pas opposables (voir spécifiquement en matière de titres exécutoires, avec application combinée du CGCT et de l’article R. 421-5 du code de justice administrative : Cass. civ. 2ème, 8 janvier 2015, pourvoi n° 13-27.678, Bull. 2015, II, n° 4).
Avant 2016, le Conseil d’État considérait que l’absence de notification régulière d’une décision administrative conduisait seulement à l’inopposabilité des délais de recours pour la contester (article R. 421-5 du code de justice administrative). Mais par sa jurisprudence « Czabaj » du 13 juillet 20163, le Conseil d’État a décidé qu’une décision administrative irrégulièrement notifiée ne pouvait plus être contestée que dans un délai raisonnable, en principe d’un an sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant.
Il faut noter, car ce point est important, que la société Cora fondait à titre principal son action sur une décision du Conseil constitutionnel en QPC. Avant l’introduction de son action devant le TGI de Metz le 16 mars 2015, la société avait déjà sollicité auprès de la commune, par lettre du 14 octobre 2013, le remboursement à titre conservatoire des impositions pour les années 2010 à 2013. Elle l’a fait après avoir été informée que, le 3 septembre 2013, une QPC portant sur les dispositions législatives du CGCT relatives à la taxe locale sur la publicité extérieure (fondant les titres litigieux) avait été transmise au Conseil. Par une décision QPC du 25 octobre 20134, le Conseil a donc prononcé l’abrogation à effet immédiat des dispositions législatives créant la taxe litigieuse. Les dispositions censurées sont celles dans leur version antérieure à la loi de finances rectificative pour 2011, ce qui explique que la Société Cora ne demande que l’annulation des titres émis entre 2009 et 2011. Il ressort clairement des motifs de la déclaration d’inconstitutionnalité que celle-ci pouvait être invoquée à l’encontre de toutes les impositions contestées avant la date de sa publication (cons. 18). La société pouvait donc a priori demander en 2015 l’annulation des titres (ceux-ci ayant été notifiés sans mention régulière des voies de recours, de telle sorte que le délai de deux mois n’avait pas commencé à courir) et le remboursement des sommes versées, l’action en répétition de l’indu n’étant pas prescrite.
Mais plutôt que de constater l’absence de base légale des titres exécutoires, et alors qu’en première instance le TGI de Metz, par un jugement du 27 septembre 2018, avait fait droit aux prétentions de la société, la cour d’appel de Metz, par un arrêt du 1er décembre 2020, a infirmé le jugement et opposé une irrecevabilité Czabaj à la société au motif que plus d’un an s’était écoulé entre le moment où elle a eu connaissance des titres et le moment où elle en a demandé l’annulation5. L’action de la société a donc été jugée tardive par la Cour d’appel car exercée au-delà du « délai raisonnable » de l’arrêt Czabaj, consacré entre-temps et étendu en 2018 par le Conseil d’État aux titres exécutoires relevant au fond du juge administratif.
Dans la seconde affaire, à la suite de la résiliation d’un abonnement au service d’eau potable entre la société des Cyprès, aux droits de laquelle se trouve la société City, et la communauté d’agglomération havraise, cette dernière avait émis contre la société, en mars et en mai 2012, des titres exécutoires concernant des factures d’eau. En février 2016, la société a assigné la communauté d’agglomération, aux droits de laquelle se trouve la communauté Le Havre Seine métropole en annulation des titres émis et en décharge des sommes réclamées. Alors qu’en première instance, le TGI du Havre avait considéré l’action tardive car introduite au-delà du délai d’un an à compter de la date à laquelle la société a eu connaissance des titres mal notifiés, la cour d’appel de Rouen, par un arrêt du 17 juin 2021, a réformé le jugement en considérant l’action de la société recevable mais sans faire droit à ses prétentions. Elle a donc considéré, contrairement à la cour d’appel de Metz, que le délai Czabaj n’était pas applicable devant le juge judiciaire. Ces deux pourvois soulèvent donc, par la contradiction des arrêts rendus par les juges du fond, la question de la transposition du délai raisonnable devant le juge judiciaire.
Dans l’éventualité d’une transposition, se posait aussi la question de l’application aux contentieux en cours d’un tel revirement de jurisprudence (les actions ayant été introduites avant l’arrêt Czabaj) au regard notamment de l’article 6.1 de la CEDH et de la manière dont la Cour de cassation aborderait la question des « circonstances particulières ».
Dans ses arrêts du 8 mars 2024, l’assemblée plénière confirme sa jurisprudence classique et, tout en évoquant l’exigence de sécurité juridique, juge « qu’en l’absence de notification régulière des voies et délais de recours, le débiteur n’est pas tenu de saisir le juge civil dans le délai défini par la décision du Conseil d’État du 13 juillet 2016 précitée » (cons. 25 et 26).
En conséquence, sur le premier pourvoi, elle casse et annule intégralement l’arrêt de la cour d’appel de Metz qui a fait application du délai raisonnable. Sur le second pourvoi, la décision adopte, s’agissant de la méconnaissance des exigences légales liées à la présence des nom, prénoms et qualité de l’auteur du titre de recettes (en plus des voies et délais de recours) une solution conforme à la jurisprudence du Conseil d’État, à savoir la nullité du titre. La Cour énonce ainsi : « il convient de juger que la mention, dans l’ampliation adressée au débiteur, des nom, prénoms et qualité de l’auteur ayant émis le titre de recettes constitue une formalité substantielle dont l’inobservation est sanctionnée par la nullité, à moins qu’il ne soit établi que ces informations ont été portées à la connaissance du débiteur » (cons. 33).
Faisant droit au pourvoi principal de la société (les titres ne mentionnant pas la formalité substantielle précitée) et rejetant le pourvoi incident formé par la communauté urbaine, elle casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Rouen, sauf en ce qu’il a jugé recevable l’appel de la société City (sur ce dernier point, le juge d’appel ne s’est pas mépris en ne faisant pas application de Czabaj).
Après avoir rappelé l’état du droit positif s’agissant des conséquences à tirer de la non-application des délais de recours en cas de notification irrégulière, l’assemblée plénière a commencé par relever que « si, pour répondre, notamment, aux impératifs de clarté et de prévisibilité du droit, une convergence jurisprudentielle entre les deux ordres de juridiction est recherchée lorsqu’il est statué sur des questions en partage, celle-ci peut ne pas aboutir en présence de principes et règles juridiques différents applicables respectivement dans ces deux ordres » (cons. 15 et 16).
Il convient donc de se pencher plus précisément sur la motivation retenue par la Cour de cassation pour justifier la non-transposition de la jurisprudence Czabaj aux litiges relevant du juge judiciaire. Une analyse des avis écrits de l’avocat général sur les deux pourvois apporte de plus amples précisions.
I. L’application du code de justice administrative et du délai raisonnable devant le juge judiciaire
La Cour de cassation juge dans ses décisions du 8 mars 2024 que les motifs ayant présidé à la règle dégagée dans l’arrêt Czabaj « sont propres aux règles du contentieux administratif » (cons. 16 et 17). Elle ajoute que « les juridictions judiciaires n’exercent pas de contrôle de légalité par la voie du recours pour excès de pouvoir » (cons. 17 et 18).
Il est vrai que l’absence d’un contentieux de la légalité objective des actes administratifs unilatéraux devant le juge judiciaire, ainsi que l’exprime l’avocat général dans ses avis écrits, « élimine dans leur principe une partie des difficultés rencontrées par le Conseil d’État ». Cependant, nous verrons que si la Cour de cassation, s’agissant de décisions irrégulièrement notifiées faisant grief, a développé une jurisprudence identique à la règle de l’article R. 421-5 du code de justice administrative (CJA), ce dernier s’applique parfois directement devant le juge judiciaire à l’occasion de certains litiges impliquant des actes administratifs, interrogeant l’opportunité d’une transposition du délai Czabaj.
Il convient ainsi d’étudier en premier lieu la possibilité d’une remise en cause de l’application même du CJA devant le juge judiciaire, et notamment des articles R. 421-1 et R. 421-5, comme un élément de compréhension dans le cadre des présents pourvois.
En effet, alors que ces derniers étaient en cours d’examen, une demande d’avis adressée à la première chambre civile de la Cour de cassation était pendante. Elle portait sur les titres exécutoires de l’ONIAM, établissement public administratif. Ainsi que le note l’avocat général dans ses avis, la réponse de la Cour, selon qu’elle conduit à appliquer ou au contraire à exclure l’application du code de justice administrative devant le juge judiciaire, aurait pu priver d’objet le débat sur la transposition du délai Czabaj.
A. Le code de justice administrative devant le juge judiciaire
Citant un avis du Conseil d’État6, la Cour de cassation avait en effet admis que l’ONIAM pouvait émettre un titre exécutoire en vue du recouvrement de toute créance dans le cadre de son action récursoire contre l’assureur du responsable et qu’un recours pouvait être introduit contre ce titre devant la juridiction compétente7. La Cour de cassation devait donc se prononcer sur la détermination du délai applicable lorsque la contestation de ce titre relève de la compétence du juge judiciaire. En effet, le titre exécutoire émis par l’ONIAM, décision administrative, peut relever aussi bien de la compétence administrative que judiciaire selon la nature du contrat liant l’assureur au responsable du dommage.
Si la Cour était d’avis d’appliquer le CJA, et donc les articles R. 421-1 et R. 421-5, la question de la transposition du délai Czabaj devant le juge judiciaire continuerait de se poser. Mais si elle décidait au contraire d’appliquer à la contestation de ce titre administratif le code civil et, par voie de conséquence, faute de texte le délai de prescription de cinq ans prévu par son article 2224 (ce qui établirait une différence sensible de traitement entre assureurs), la Cour de cassation relancerait le débat sur l’application ponctuelle de l’article R. 421-5 devant le juge judiciaire et sur la transposition hypothétique du délai raisonnable. Il en va de même si la Cour optait, ainsi que l’envisageait l’avis écrit de l’avocat général, pour la consécration d’un délai prétorien de deux mois, distinct du CJA mais de même durée que celui qu’il prévoit par soucis de cohérence avec ce dernier. L’application du code de justice administrative devant le juge judiciaire n’a en effet rien d’évident. L’article L.1 du CJA affirme ainsi que ce dernier ne s’applique qu’aux « tribunaux administratifs, aux cours administratives d’appel et au Conseil d’État ». Appliquer le CJA en matière de contestation des titres exécutoires émis par l’ONIAM, lorsque ces titres relèvent de la compétence judiciaire, revient donc à privilégier la nature de la décision attaquée sur celle de l’ordre de juridiction saisi.
En fait, la règle énoncée par l’article R. 421-5 du code de justice administrative, qui dispose que « les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision » entretient des liens étroits avec la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d’inopposabilité des délais contre une décision dont la notification est irrégulière. La règle reprise à l’article R. 421-5 et, avant lui, codifiée à l’article R. 104 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel, est héritée du décret du 11 janvier 1965 relatif aux délais de recours contentieux en matière administrative modifié par le décret du 28 novembre 1983.
Or, même si elle jugeait que le décret de 1965 ne s’appliquait pas devant le juge judiciaire, la Cour de cassation a constaté l’existence d’un principe général induit non seulement par les articles 680 (exigences relatives à la notification régulière d’un acte de jugement) et 693 (à peine de nullité de l’acte) du code de procédure civile mais aussi par le décret de 1965 selon lequel « toute notification ne mentionnant pas ou mentionnant de manière erronée les délais et voies de recours dont peut faire l’objet la décision notifiée ne fait pas courir le délai d’exercice du recours8 ».
En matière de sécurité sociale par exemple, contentieux d’application de délais de forclusion de deux mois similaires à l’article R. 421-1, il a été jugé que la « décision de la commission de recours amiable des organismes de Sécurité sociale constituant le préalable nécessaire à la saisine de la juridiction de sécurité sociale, la notification de cette décision, qui fait courir le délai de 2 mois dans lequel doit être formé à peine de forclusion le recours contentieux, est assimilable, par ses effets, à la notification d’une décision juridictionnelle et doit en conséquence indiquer, de manière très apparente, pour la garantie des droits des assurés, le délai du recours et ses modalités d’exercice9 ».
Ainsi, le principe général développé à partir du code de procédure civile et de la règle du décret de 1965 reprise dans le CJA s’étend à toute décision faisant grief, dont la notification irrégulière est assimilable à celle d’une décision de justice, ce qui vise en très grande majorité en droit privé des décisions non-administratives. Le débat se complexifie toutefois, au regard de l’opportunité d’une transposition de la règle dégagée par l’arrêt Czabaj, lorsque la Cour de cassation décide, au regard de la nature administrative d’un acte, que le code de justice administrative est lui-même applicable devant la juridiction judiciaire.
Si le principe général identifié par la Cour de cassation pour les notifications irrégulières a vocation à s’appliquer dans tous les contentieux et pour toutes les décisions, les cas d’application des articles R. 421-1 et R. 421-5 du code de justice administrative devant le juge judiciaire demeurent, a contrario, extrêmement limités. La possible remise en cause de l’applicabilité du CJA devant le juge judiciaire en matière d’actes administratifs unilatéraux n’était donc pas une question négligeable, compte tenu des développements récents de la jurisprudence Czabaj et, en parallèle, de la portée du principe général, désormais ancré et stabilisé en droit commun, inspiré notamment par les articles 680 et 693 du code de procédure civile.
Dans la mesure où la jurisprudence développée par la Cour de cassation est directement inspirée par ces articles, la consécration d’un délai raisonnable devant le juge judiciaire, s’il venait à s’étendre au-delà des seules décisions administratives, devrait logiquement s’appliquer aux décisions juridictionnelles (en plus des autres décisions faisant grief). Or, il en résulterait un premier paradoxe avec la jurisprudence administrative puisque le Conseil d’État n’applique pas sa jurisprudence Czabaj aux décisions de justice irrégulièrement notifiées10.
En ce qui concerne les titres exécutoires émis par les collectivités territoriales, on pourrait penser de prime abord que la question de l’application du CJA ne se pose pas. Le délai de contestation de deux mois contre le titre ainsi que la compétence du juge judiciaire sont en effet déterminés par un texte législatif spécial : aujourd’hui le 1°, anciennement le 2° de l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT). De plus, le texte qualifie expressément le délai de deux mois de délai de « prescription », alors que le délai de deux mois prévu par le CJA est un délai de forclusion.
Cependant, dans l’arrêt du 8 janvier 2015 précité concernant un titre exécutoire local mal notifié, la 2ème chambre civile a fait le choix de viser non seulement l’article L. 1617-5, 2°, du CGCT mais aussi l’article R. 421-5 du CJA. Elle jugeait que l’application du premier n’excluait pas celle du second11. Ainsi que l’exprime l’avocat général dans son avis écrit, il ressort du contexte de cette décision que le délai de deux mois prévu par le CGCT « a été compris comme étant celui de l’article R. 421-1 du code de justice administrative » ce qui commandait l’application de l’article R. 421-5. De plus, la volonté était de s’aligner sur la jurisprudence administrative avant la consécration de l’arrêt Czabaj.
Le Conseil d’État considère également, en matière de titres exécutoires relevant au fond de la compétence du juge administratif, que le non-respect de l’obligation d’une notification régulière fait obstacle, conformément à l’article R. 421-5, à l’application du délai de deux mois prévu par le CGCT. Mais dans une telle hypothèse, il applique depuis 2018 sa jurisprudence Czabaj ((Conseil d’État, 3ème et 8ème CR, 9 mars 2018, n° 401386, Communauté d’agglomération du pays ajaccien, mentionné aux Tables)). On ne manquera pas de noter que le Conseil d’État considère que le recours contre le titre doit être exercé dans le délai de deux mois prévu par le CGCT à peine de « forclusion » du recours.
Finalement, dans son avis du 13 décembre 202312, la première chambre civile a estimé que le titre exécutoire émis par l’ONIAM contre l’assureur du responsable d’un dommage était soumis, en tant que décision administrative, au délai de deux mois de l’article R. 421-1 (et donc à la règle de l’article R. 421-5) et non au délai de prescription de l’article 2224 du code civil. Cependant, même si elle n’était pas explicitement interrogée sur ce point, la Cour n’a nullement évoqué l’existence d’un quelconque délai raisonnable dans le cas où le délai de deux mois n’aurait pas été opposable, faute d’une notification régulière. La question de la transposition de Czabaj demeurait donc entière.
B. Le délai raisonnable devant le juge judiciaire
Si le CJA a toujours vocation à s’appliquer, dans de rares cas, devant le juge judiciaire, cette seule circonstance ne justifie pas une transposition du « délai raisonnable ». Il convient, sur le plan d’une analyse des fondements théoriques, de bien identifier la nature du « délai raisonnable » dont l’application est envisagée dans la mesure où l’agencement des délais de prescription et de forclusion peut parfois poser des difficultés13. Il est donc aussi important de connaître la nature du délai de recours qui n’aurait pas commencé à courir, notamment en raison d’une notification irrégulière.
Une lecture des conclusions du rapporteur public sur l’arrêt Czabaj révèle que le délai « raisonnable » ne serait ni un délai de prescription extinctive ni un délai de forclusion.
En droit commun, on rappelle que si l’article 2219 du code civil définit la prescription extinctive comme « un mode d’extinction d’un droit résultant de l’inaction de son titulaire pendant un certain laps de temps », l’article 2220 se contente, sans les définir, d’indiquer que les délais de forclusion « ne sont pas, sauf dispositions contraires prévues par la loi, régis par le présent titre » (relatif à la prescription). En droit privé, la doctrine considère généralement que la catégorie des délais de forclusion regroupe, d’une part, « les délais auxquels sont soumises les voies de recours » ) et, d’autre part, « certaines actions ayant un objet spécifique [et qui] sont enfermées dans des délais précis14 ». Il est aussi admis que, sauf dispositions spéciales, le délai de forclusion, contrairement à la prescription, n’est pas susceptible d’interruption ou de suspension.
Le point de départ d’un délai de forclusion est en principe objectif en ce sens qu’il n’est pas évolutif ou susceptible d’être différé. De plus, un délai de forclusion ne peut en principe « en borner » un autre. Enfin, on pourra également noter que le juge doit soulever d’office la forclusion, contrairement à la prescription de droit commun. Depuis la réforme de la prescription en 200815, le code civil prévoit également, sans le nommer, un « délai butoir » de vingt ans qui court « à compter de la naissance du droit » (article 2232 du code civil). Cet article n’évoque que la relation entre ce délai butoir et le cours de la prescription extinctive (et non d’autres délais de forclusion). Dans ses avis écrits sur les arrêts du 8 mars, l’avocat général assimile cependant ce délai butoir à une « forclusion de 20 ans à compter de naissance du droit ». Quoi qu’il en soit, en dépit de régimes juridiques distincts, la prescription extinctive et la forclusion ont pour finalité commune de borner dans le temps l’action en justice16.
En revanche, on notera qu’il existe en droit administratif de nombreuses causes d’interruption des délais de forclusion que sont les délais de recours et que le délai Czabaj lui-même ne fait pas exception à la règle17.
1. Un délai prétorien de forclusion comme « délai de secours »
S’agissant de la véritable nature du délai Czabaj, le rapporteur public sur la décision du 13 juillet 2016 rejetait catégoriquement l’idée que l’on puisse qualifier le délai raisonnable de délai de forclusion, affirmant qu’il « semblerait paradoxal de l’opposer dans une configuration où le délai de recours contentieux n’a jamais été déclenché » et que « dégager une forclusion du recours contentieux non exercé dans les deux mois reviendrait à superposer un second délai de même nature à celui qui est prévu par l’article R. 421-1 du code de justice administrative » ce qui n’a fait l’objet d’aucun précédent, ni en procédure civile ni en contentieux administratif18.
Une telle explication n’emporte guère la conviction et si certains commentateurs n’hésitent pas à évoquer un authentique « délai de forclusion19 », Czabaj semble être à tout le moins un délai « butoir » bornant dans le temps la sanction attachée à l’inopposabilité d’un délai textuel de recours.
S’agissant des titres exécutoires locaux, il faut premièrement déterminer la nature du délai de contestation de deux mois. Ainsi que cela a été dit, le délai de deux mois prévu par le CGCT est qualifié par le texte de délai de « prescription ». Toutefois, dans d’autres contentieux, comme en matière d’actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs, il arrive que la Cour de cassation dépasse la lettre du texte. Ainsi, l’article 1792-4-3 du code civil, bien qu’évoquant les actions se « prescrivant » au-delà de dix ans, est en réalité interprété comme fixant un délai de forclusion20. D’ailleurs, « en dépit de sa lettre », donc d’une écriture maladroite du législateur, le Conseil d’État interprète bien le délai de deux mois de l’article L. 1617-5 du CGCT comme « une règle de forclusion21 ».
Mais si la Cour de cassation évoque parfois un délai « de contestation » ou plus simplement le délai de recours déterminé par l’article L. 1617-5, elle a déjà expressément qualifié le délai prévu par cet article de « délai de prescription22 ». Si l’on envisage donc devant le juge judiciaire la consécration d’un délai prétorien de forclusion d’un an, un tel délai butoir viendrait simplement « se superposer » à un premier délai de prescription. Devant le juge judiciaire, l’avocat général note dans son avis écrit que « le délai de secours d’un an serait donc un délai butoir de facture classique, seulement critiquable, au regard de notre droit commun de la prescription, pour sa brièveté ». La nouveauté viendrait « seulement » de la consécration prétorienne du délai de forclusion.
Si l’on envisage, en revanche, le délai de deux mois du CGCT comme un délai de forclusion, en dépit d’une lecture littérale de l’article L. 1617-5, 1°, aucun délai prétorien de forclusion ou « butoir » ne devrait pouvoir intervenir car aucune forclusion ne peut logiquement venir se superposer à une autre. Si l’on met de côté les titres exécutoires locaux, la question est la même pour d’autres délais de forclusion applicables devant le juge judiciaire concernant des décisions administratives (par exemple les titres exécutoires de l’ONIAM, avec l’article R. 421-1) ou bien encore concernant des décisions non-administratives (avec les délais de forclusion de deux mois dans la législation de la sécurité sociale).
2. Les délais de prescription comme « délais de secours »
D’une part, sur un plan théorique, admettre le droit de saisir le juge comme un droit subjectif, soumis à la prescription extinctive et donc nécessairement limité dans le temps, ne pose pas fondamentalement de difficultés en droit privé. La chose devient plus baroque si la prescription a vocation à « encadrer » un premier délai de forclusion (et non l’inverse) même si, ainsi que nous le verrons, cela n’est pas inconcevable en droit commun.
En revanche, considérer l’action en justice comme un droit pouvant se prescrire, comme une solution en réponse à un délai de forclusion qui n’a pas couru, pose de réelles difficultés en droit administratif. En effet, si le délai de secours Czabaj ne peut être considéré comme un délai de prescription extinctive, c’est parce qu’en droit administratif la prescription concerne le « fond » du droit alors qu’un délai de recours contre une décision administrative s’analyse nécessairement comme un délai de forclusion qui commande sur le plan procédural la recevabilité du recours. Pour comprendre la logique administrative, il faut admettre que la prescription extinctive éteint le droit subjectif, donc une obligation, objet du recours en justice, et non le recours lui-même. Or, dans un recours en légalité devant le juge administratif, il n’est pas, du moins directement, question de la défense d’un droit subjectif.
Sur un plan ontologique, le rapporteur public de l’arrêt Czabaj énonçait justement que « la question qui se présente aujourd’hui n’est pas celle de l’extinction d’une obligation, mais celle de mettre un terme à la possibilité d’une action en justice sans condition de délais » et ajoutait que « faute d’obligation à éteindre, la prescription que vous pourriez envisager de créer supposerait de consacrer l’existence d’un droit subjectif d’agir en justice23 ». Dans ses conclusions, il évoquait aussi quelques obstacles pratiques à une telle consécration, s’agissant notamment des modalités de computation ou de l’impossibilité de soulever d’office une prescription.
Mais la conception théorique de la distinction entre prescription extinctive et forclusion retenue par le droit administratif est étrangère à celle de la procédure civile. L’article 30 du code de procédure civile reconnaît explicitement l’action en justice, donc la possibilité d’exercer le recours, comme un droit subjectif, soumis en tant que tel à la prescription. Une partie de la doctrine partageait cette conception avant la création du nouveau code de procédure civile en 197524. Que la prescription éteigne l’action en justice et le droit qui l’accompagne, ou seulement l’action, elle permet au moins, pour reprendre les termes utilisés par l’avocat général dans ses avis, « d’affirmer que, dans tous les cas, elle éteint l’action, en tant que droit subjectif ». Par ailleurs, l’article 122 du code de procédure civile qualifie explicitement la prescription de fin de non-recevoir, comme une cause d’irrecevabilité du recours, avant tout examen au fond.
Ainsi, sans même envisager la consécration d’un délai de forclusion prétorien devant le juge judiciaire, la prescription peut de manière générale faire office de « délai de secours », y compris lorsqu’un premier délai de forclusion n’a pas commencé à courir. Certes, cela n’est pas pleinement logique25 dans la mesure où le délai de forclusion est censé démarrer de manière objective alors que ce n’est pas le cas du délai de prescription dont le point de départ peut être fluctuant. C’est pourtant ce dernier qui vise, dans cet agencement, à assurer la sécurité juridique.
Cela signifie que même en l’absence d’un texte spécifique, la prescription comme « délai de secours » peut être envisagée dans le cas où un premier délai de forclusion n’aurait pas commencé à courir, faisant craindre une hypothèse de « perpétuité de fait », c’est-à-dire une contestation indéfinie d’une décision irrégulièrement notifiée. Le contentieux récent de la sécurité sociale a tranché ce point.
Par exemple, la simple information donnée par la caisse de sécurité sociale à l’employeur de sa décision de prendre en charge la maladie à titre professionnel n’est pas considérée comme une « notification », ce qui empêche de faire courir le délai de deux mois prévu par le code de sécurité sociale. Mais opérant un revirement, depuis une décision du 18 février 2021 rendue par la deuxième chambre civile26, la Cour de cassation juge de manière constante qu’en l’absence d’un texte spécifique le recours de l’employeur contre cette décision dans le but de la rendre inopposable à son égard ne peut plus être exercé indéfiniment et constitue désormais « une action personnelle » dès lors soumise à la prescription de cinq ans au sens de l’article 2224 du code civil.
D’autre part, de manière plus pratique, la prescription extinctive, qui irrigue l’ensemble du droit privé, suffit dans presque tous les cas à empêcher d’éventuelles situations de perpétuité de fait. L’avocat général notait d’ailleurs la similitude existante entre les points de départ des délais Czabaj et de 5 ans de l’article 2224 du code civil (respectivement « à compter de la laquelle il est établi qu’un destinataire a eu connaissance de la décision » et de celle à laquelle « le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer »). Dans son rapport écrit, la conseillère rapporteur relève dans le même esprit « qu’en droit civil, de nombreuses situations juridiques sont définitivement consolidées par l’effet de la prescription extinctive, qu’elle soit de droit commun ou prévue par des textes particuliers27 ». La doctrine civiliste considère également que la prescription extinctive poursuit plusieurs fonctions, dont une fonction « sécuritaire » qui vise à consolider dans le temps les situations de fait28.
Devant le juge administratif, le délai raisonnable d’un an n’est justement pas applicable dans un recours de plein contentieux subjectif lorsque la décision ayant pour objet de lier le contentieux est mal notifiée29. En effet, le recours ne vise pas, dans ce cas précis, à apprécier la légalité de la décision attaquée mais à se prononcer sur le bien-fondé de la demande indemnitaire. Les règles de la prescription quadriennale (ou de la prescription décennale en matière de responsabilité hospitalière) suffisent alors à assurer la sécurité juridique, sans qu’il soit besoin d’enserrer le recours dans un délai plus contraint. Mais hors de cette hypothèse particulière de « second filet de sécurité juridique30 », le délai raisonnable, dans un recours objectif en légalité, devient pour le juge administratif la seule solution pour borner dans le temps le recours en raison de l’absence d’opposabilité du délai de forclusion contre l’acte attaqué. Ce n’est pas le cas en droit commun.
S’agissant de l’agencement entre un délai de forclusion qui n’a pas commencé à courir et un délai de prescription, la Cour de cassation a par exemple déjà jugé, en matière sociale, que la notification irrégulière de la décision, empêchant le délai de forclusion de deux mois prévu par l’article R. 142-1 du code de la sécurité sociale de courir, n’avait aucun effet interruptif de la prescription biennale en remboursement des actes dispensés dès lors que cette dernière commençait à courir à compter de la connaissance par l’intéressé de la décision de refus litigieuse, « quels que fussent le mode et les mentions de la notification de la décision prise par la Caisse31 ». Ainsi, dès lors que le destinataire a eu connaissance de la décision litigieuse, le délai de prescription extinctive démarre même si le délai de forclusion n’a pu courir en raison d’une notification irrégulière.
Ainsi, on peine à voir un réel intérêt à la transposition de Czabaj devant le juge judiciaire dans des situations similaires puisque la prescription suffira presque toujours à assurer la sécurité juridique.
On notera que la Cour de cassation s’est déjà prononcée contre la transposition de la jurisprudence du 13 juillet 2016. Dans un arrêt du 21 octobre 2021 rendue par la deuxième chambre civile, la Cour de cassation jugeait que le destinataire peut contester le bien-fondé de la décision de refus de l’organisme de sécurité sociale irrégulièrement notifiée « sans condition de délai » devant le juge et que cette absence de délai ne méconnaît ni le principe de sécurité juridique ni les stipulations de la CEDH32. Dans cette affaire, l’organisme de sécurité sociale avait reproduit devant les juges du fond le considérant de principe Czabaj.
Par ailleurs, le rapport au temps du juge administratif de la légalité n’est pas le même que celui du juge judiciaire. Dans ses conclusions à l’audience publique du 19 janvier 2024, l’avocat général rappelait justement que si le délai Czabaj, en principe d’un an, peut déjà en lui-même apparaître « culturellement long » dans un contentieux qui exige une certaine célérité, celui du recours pour excès de pouvoir, il apparaît au contraire devant le juge judiciaire relativement court33.
Dans l’hypothèse où la Cour consacrait un délai prétorien de substitution devant le juge judiciaire, l’avocat général recommandait d’ailleurs que ce délai soit supérieur à un an et ne puisse faire l’objet d’une interruption ou d’une suspension en raison de « circonstances particulières ».
L’assemblée plénière, rejetant l’idée d’un délai prétorien de forclusion, a finalement jugé dans ses arrêts que le risque d’une action indéfinie « ne se présente pas dans les mêmes termes devant les juridictions judiciaires devant lesquelles les règles de la prescription extinctive suffisent en principe à répondre à l’exigence de sécurité juridique » (cons. 21 et 22).
En matière de titres exécutoires portant sur des créances détenues par des collectivités territoriales, la Cour de cassation rappelle d’ailleurs que les actions en recouvrement formées devant les juridictions judiciaires ou administratives sont nécessairement soumises à la prescription quadriennale de la loi du 31 décembre 1968 (cons. 18 et 19). Les actions en répétition de l’indu ou tendant à la décharge des sommes réclamées au titre d’une imposition et fondées sur la contrariété à une norme supérieure sont soumises à la prescription biennale de l’article L. 190 du Livre des procédures fiscales (cons. 19 et 20) et les « mêmes actions, lorsqu’elles sont fondées sur une déclaration de non-conformité à la Constitution du texte servant de fondement à l’imposition, sont ouvertes dans les conditions fixées par la décision du Conseil constitutionnel » (cons. 20 et 21).
La sécurité juridique, interprétée par la jurisprudence du Conseil d’État de manière extensive depuis 2016, est l’élément fondamental sur lequel repose le délai raisonnable. Consacrée comme un principe général du droit depuis 2006 par le Conseil d’État, elle vise de manière générale à éviter de remettre « indéfiniment en cause des situations consolidées par l’effet du temps » dans un souci de bonne administration de la justice et de stabilité des relations juridiques.
Ainsi, dépassant la question de la légalité des actes unilatéraux dans le cadre du recours pour excès de pouvoir ou de plein contentieux objectif (par voie d’action ou d’exception), Czabaj été étendu au recours de plein contentieux subjectif des tiers contre un contrat administratif34. Il ne s’agit alors plus de sanctionner une mauvaise notification mais simplement d’assurer la « stabilité » des relations contractuelles par suite d’une publicité défaillante. Il s’agit donc de la superposition d’un délai prétorien d’un an sur un autre délai prétorien, de deux mois, puisque ce dernier, ouvert aux tiers contre le contrat depuis les arrêts Tropic travaux et Tarn-et-Garonne n’est pas celui de l’article R. 421-1 du CJA.
Il est vrai qu’un contrat, qu’il soit administratif ou de droit privé, est un instrument de stabilité et de « prévision pour les parties35 », permettant de maîtriser l’avenir et de sécuriser les relations économiques. Mais en droit privé des contrats, le recours par voie d’action en nullité est déjà soumis, sauf textes spéciaux pour certains contrats, à la prescription quinquennale de droit commun, contrairement à l’invocation de la nullité en défense par voie d’exception si le contrat n’a pas commencé à être exécuté.
Enfin, la Cour de cassation fait également référence dans ses décisions, depuis le début des années 2000, à la sécurité juridique. Elle juge ainsi qu’un délai de forclusion « ne porte pas atteinte à la substance même du droit d’accès au juge » dans le but légitime d’assurer la sécurité juridique36. Mais sa position est identique s’agissant des délais de prescription extinctive, qui sont beaucoup plus présents en droit privé. Elle juge ainsi que la fixation d’un terme à l’action en justice par l’effet extinctif de la prescription poursuit la finalité de garantir la sécurité juridique37.
II. Le souhait d’éviter un « effet domino »
Sur le plan matériel, le délai Czabaj, conçu à l’origine pour traiter des contentieux sériels, a largement débordé le contentieux massif des titres de liquidation des pensions de retraite et continue de conquérir de nouveaux terrains. Se faisant chantre de la sécurité juridique, le Conseil d’État l’a étendu à la contestation des titres exécutoires devant le juge administratif mais aussi aux autorisations d’urbanisme38ou encore aux décisions implicites de rejet39. S’il n’est pas applicable aux recours en responsabilité, Czabaj est applicable aux « décisions à objet purement pécuniaire » mal notifiées40.
On peut donc en conclure que la Cour de cassation n’a pas souhaité transposer l’irrecevabilité Czabaj au risque d’ouvrir la boîte de Pandore. Se posait immanquablement la question de l’extension de la jurisprudence Czabaj à d’autres contentieux relevant des juridictions placées sous l’autorité de la Cour de cassation et impliquant, principalement ou à titre incident, l’examen d’actes administratifs individuels ou de décisions non-administratives attaquables dans des délais de forclusion spéciaux proches dans leur principe du délai de l’article R. 421-1. Même s’il est possible d’identifier certains contentieux où la transposition du délai raisonnable n’apparaît pas illogique, ces contentieux restent peu nombreux et, ainsi que l’a relevé l’avocat général dans les conclusions écrites de ses avis, « le risque de propagation non maîtrisé, sous la forme de demandes de transposition de la transposition, existe pour toutes les chambres de la Cour de cassation ». Une analyse approfondie des cas envisagés par l’avocat général demeure intéressante.
Concernant le contentieux fiscal, selon l’avocat général et malgré un avis défavorable de sa part, le « partage de compétence en cette matière permet d’envisager théoriquement la même extension devant les tribunaux judiciaires », le délai Czabaj ayant été appliqué par le Conseil d’État aussi bien au contentieux de l’établissement qu’à celui du recouvrement de l’impôt.
Sur la question des titres exécutoires locaux, qu’ils soient ou non fiscaux, la consécration du délai raisonnable apparaît en revanche fortement inadaptée car contraire au prince d’équilibre en procédure civile des voies d’exécution entre les droits du débiteur d’accéder au juge et ceux du créancier de recouvrer sa créance. L’assemblée plénière énonce même que sa jurisprudence « qui se justifie par les principes et règles applicables devant le juge civil, permet un juste équilibre entre le droit du créancier public de recouvrer les sommes qui lui sont dues et le droit du débiteur d’accéder au juge » (cons.24 et 25). Après tout, pour le juge administratif, les titres exécutoires ne constituent qu’une catégorie d’actes administratifs unilatéraux parmi d’autres. Mais le raisonnement devant le juge judiciaire n’est pas le même.
En rappelant clairement le principe d’équilibre en droit commun qui gouverne les procédures civiles d’exécution, l’assemblée plénière partage les propos tenus à l’occasion des conclusions orales à l’audience publique de l’avocat général. D’abord, il ne s’agit pas totalement d’un « contentieux partagé » dans la mesure où, en matière de titres exécutoires, le partage des compétences concerne le juge du fond (qui peut être le juge administratif ou judiciaire suivant la nature de ladite créance), compétent pour se prononcer sur le « bien-fondé de la créance » (article L. 1617-5 du CGCT) et non le juge de l’exécution, se prononçant sur la régularité des actes de poursuite fondés sur le titre, qui est nécessairement le juge judiciaire (y compris si le juge administratif est compétent au fond).
Ensuite, le véritable problème vient du fait que le juge de l’exécution n’est aujourd’hui plus compétent pour contrôler l’existence même d’un titre exécutoire correctement notifié, donc valable. L’article L.281 du Livre des procédures fiscales donne compétence au juge du fond en matière « d’exigibilité » de la somme réclamée, ce qui, au-delà de son montant, va jusqu’à la preuve de sa notification. Lorsqu’il est saisi valablement dans le délai en contestation, le juge de l’exécution ne peut donc valider une saisie sans savoir si celle-ci repose sur un titre régulier, tant que le juge du fond, qui a généralement été saisi après la notification de l’acte de poursuite, ne s’est pas prononcé sur le titre exécutoire. Or, une application de la jurisprudence Czabaj devant le juge du fond compétent du tribunal judiciaire pourrait inciter le créancier public à engager les voies d’exécution lorsque le délai raisonnable est expiré, après avoir notifié un titre irrégulièrement, afin de soulever ensuite l’irrecevabilité de la contestation au fond du débiteur formée tardivement. Ainsi, il ne serait plus possible pour le débiteur de demander devant le juge du fond l’annulation du titre exécutoire en mettant en cause sa validité, en raison de sa mauvaise notification, ni soutenir ensuite, devant le juge de l’exécution, que la saisie doit être annulée pour ce même motif (ce qui est actuellement possible devant le juge judiciaire lorsque le délai de deux mois n’a pas commencé à courir faute d’une notification régulière). Dans son avis écrit, pointant « l’iniquité d’un surcroît de déséquilibre » entre les parties, l’avocat général écrit qu’il y a quelque chose de contradictoire à empêcher le juge de l’exécution de se prononcer sur l’existence d’un titre exécutoire valide, et, dans le même temps, « à veiller scrupuleusement à multiplier, jusqu’à parvenir à les rendre systématiques, les irrecevabilités de ces mêmes contestations devant le juge du fond ».
Concernant les titres exécutoires nationaux non fiscaux, comme les titres exécutoires émis par l’ONIAM, nous avons vu dans son avis du 13 décembre 2023 que la première chambre civile considère applicables les articles R. 421-1 et R. 421-5 sans consacrer de délai raisonnable en cas de notification imparfaite, contrairement à certains juges du fond (cour d’appel de Paris, chambre 4-8, RG, 4 octobre 2023, n° 22/20175).
En ce qui concerne l’exception d’illégalité devant le juge pénal (article 111-5 du code pénal), la chose est plus délicate. L’avocat général évoquait à l’audience publique la possibilité de soutenir que l’exception d’illégalité dirigée contre un acte administratif servant de fondement à des poursuites pénales, non prescrites, est tardive lorsque les poursuites pénales sont engagées plus d’un an après la notification irrégulière de l’acte. En ce qui concerne l’exception d’illégalité au civil, les cas d’application de la jurisprudence du Tribunal des conflits du 17 octobre 2011 « SCEA du Chéneau c. Inaport » sont relativement rares et l’avocat général reconnaît qu’il n’est « pas possible d’affirmer en l’état que la jurisprudence du 13 juillet 2016 a un impact également sur l’exception d’illégalité en matière civile ».
Le droit privé rencontre aussi quelques délais de forclusion de deux mois que l’on peut aisément comparer, dans leur nature, au délai de deux mois de l’article R. 421-1 du code de justice administrative, notamment dans la législation relative à la sécurité sociale. Une transposition du délai Czabaj pour les actes administratifs devant le juge judiciaire ne devrait-elle pas logiquement s’étendre également à ces délais législatifs particuliers que connaît le droit privé ?
Mais plus que la transposition à quelques cas particuliers, c’est le risque d’une transposition générale aux juridictions judiciaires de la décision du 13 juillet 2016 qui est mis en évidence par les arrêts du 8 mars, en raison de la jurisprudence bien établie de la Cour de cassation à partir de l’article 680 du code de procédure civile. Dans son avis, l’avocat général évoquait « l’onde de choc d’une transposition de la jurisprudence du 13 juillet 2016 » qui serait « d’autant plus importante que la jurisprudence de la Cour de cassation sur les notifications imparfaites excède largement l’application très exceptionnelle de l’article R. 421-5 du code de justice administrative ». Surtout, il affirmait que « c’est réalité l’article 680 du code de procédure civile qui inspire un niveau d’exigence élevé et général, dans tous les contentieux, à une jurisprudence judiciaire qu’il faudrait alors remettre en cause, dans son principe et dans ses nombreuses applications ».
Dans ses arrêts du 8 mars, l’assemblée plénière rappelle ainsi que cette règle structurante et générale, que nous avons évoquée ci-dessus, s’applique « quelle que soit la nature de cette décision ou de cet acte et celle des voies et délais de recours » (cons. 22 et 23). Elle s’est construite en parallèle d’une jurisprudence administrative stable mais qui, face au risque d’une perpétuité de certains actes administratifs, a récemment évoluée de manière spectaculaire. La Cour ajoute que la transposition de Czabaj pourrait donc conduire « à étendre cette règle à tous les délais de recours, ce qui remettrait en cause l’application de ce principe général et pourrait porter atteinte à l’équilibre des droits des parties dans le procès civil » (cons. 23 et 24).
III. Une décision logique et prévisible dans le prolongement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme
S’agissant notamment du premier pourvoi, les 3ème et 4ème branches du moyen de cassation faisaient en effet grief à l’arrêt attaqué d’avoir considéré, en violation de l’article 6.1 de la CEDH, le recours de la société Cora irrecevable par application rétroactive de la jurisprudence Czabaj, alors que ce recours n’était enfermé dans aucun délai à l’époque où il a été formé (en 2015). De plus, à supposer que l’application rétroactive de Czabaj soit admise, il était reproché à l’arrêt de ne pas avoir admis l’existence de la « circonstance particulière » (que constitue la possibilité, révélée en 2013 à la société, de l’abrogation de la base légale des titres exécutoires) permettant un allongement du délai raisonnable en cours d’instance.
De toute évidence, un hypothétique revirement de jurisprudence par la Cour de cassation n’avait aucune chance de s’appliquer aux affaires en cours. Pour rappel, la Cour européenne des droits de l’homme a récemment condamné la France sur le terrain de l’article 6.1 de la CEDH et 1er du premier protocole additionnel pour avoir fait une application rétroactive de la jurisprudence Czabaj ((CEDH, 9 nov. 2023, n° 72173/17, Legros et a. c/ France.)). Le Conseil d’État en a d’ailleurs récemment tiré les conséquences dans une décision dont on note qu’elle a été rendue par une chambre jugeant seule et non publiée au recueil Lebon (Conseil d’État, 3ème, 16 février 2024, n° 444996).
Si la CEDH a jugé que l’instauration d’un tel délai prétorien porte une atteinte « substantielle » mais pas « excessive » au droit au recours garanti par l’article 6 de la Convention, en raison des buts légitimes qu’elle poursuit, son application rétroactive, imprévisible et imparable en pratique, a restreint le droit d’accès à un tribunal des requérants jusqu’à l’atteindre dans sa substance même. Le désaveu pour le Conseil d’État, pour qui le délai Czabaj ne concernait pas la « substance » du recours mais ses « modalités de mise en œuvre », est cinglant.
Dans ses avis écrits, l’avocat général relevait que « l’imprévisibilité résulte désormais d’une circonstance nouvelle ayant autorité (le prononcé de l’arrêt du 9 novembre 2023 de la CEDH) » et qu’il paraît donc nécessaire « d’assortir d’un différé d’application une décision de transposition de la jurisprudence du 13 juillet 2016 ».
S’agissant de l’aspect du revirement « imprévisible dans sa survenance », il faut noter que dans les pourvois soumis à la Cour, les créances litigieuses dataient des années 2009 à 2011 (pour le premier pourvoi) et 2012 (pour le second pourvoi). Dans la première affaire, la société a contesté les titres devant le tribunal de grande instance le 16 mars 2015 et, dans la seconde affaire, l’assignation a eu lieu à la fin du mois de février 2016, soit quelques mois avant l’arrêt Czabaj. Dans ces conditions, les sociétés ne pouvaient évidemment pas avoir conscience de l’existence du délai Czabaj au moment où les actions ont été introduites, d’autant que ce délai n’a été formellement étendu aux titres exécutoires par le Conseil d’État qu’en 2018.
Et s’agissant de l’aspect imparable ou insurmontable du revirement en pratique, la CEDH, dans son arrêt du 9 novembre 2023, a mis l’accent sur le fait qu’il n’existait pas, à l’époque des litiges en cause, une jurisprudence établie sur la nature des « circonstances particulières », empêchant les requérants d’obtenir une perspective raisonnable de prolongation du délai en cours d’instance. Il pouvait donc être soutenu que l’application rétroactive est possible si le requérant est en mesure d’invoquer des circonstances particulières pour tenter d’obtenir, avec une chance raisonnable, une prolongation du délai en cours d’instance.
Pour la société Cora par exemple, la possibilité, connue par elle dès la mi-septembre 2013, de l’abrogation en QPC des dispositions créant la taxe sur le fondement de laquelle les titres ont été émis constitue une telle circonstance, et la Cour d’appel, même en appliquant rétroactivement Czabaj, aurait dû la prendre en compte pour considérer l’action recevable alors même qu’elle avait été exercée au-delà du délai d’un an.
Toutefois, à l’audience publique du 9 janvier, l’avocat général notait que la faiblesse de l’argument relatif à la circonstance particulière repose précisément sur le fait que cette circonstance ne peut « apparaître » postérieurement à l’expiration du délai raisonnable. Dans la dernière page de son avis écrit sur le premier pourvoi, il écrivait ainsi, s’il était nécessaire de se prononcer sur ce point que, selon lui, « la cour d’appel ne pouvait tenir compte d’une circonstance particulière qui n’est pas survenue durant le délai de forclusion ». Le principe même des circonstances particulières ne devrait pas être admis dans la logique judiciaire puisque si l’on assimile le délai raisonnable à un délai de forclusion, un tel délai ne peut pas en principe être interrompu ou suspendu.
Cet article a précédemment été publié par Revue Lexsociété, 2024, Revue LexSociété, ⟨hal-04601800⟩.
- X. MAGNON, « L’expression de « dialogue des juges » peut-elle avoir un sens utile pour connaître ce qu’elle est censée décrire ? » Annuaire international des droits de l’homme, 2016, hal-01725330. [↩]
- B. DE LAMY, « Dialogue des juges : cadre, enjeux et perplexité », La qualité de la norme Bonis, Evelyne et Malabat, Valérie (eds.) Mare et Martin, Series “Droit & Science Politique”. [↩]
- CE, Ass., 13 juillet 2016, n° 387763, publié au recueil Lebon. [↩]
- Conseil constitutionnel, décision n° 2013351 QPC du 25 octobre 2013, Société Boulanger, Taxe locale sur la publicité extérieure II. [↩]
- Dans ses conclusions orales à l’audience publique du 9 janvier 2024, l’avocat générait notait d’ailleurs qu’en consacrant une irrecevabilité prétorienne, alors que le litige n’avait pas été définitivement tranché, la cour d’appel avait « modifié le périmètre » de la décision du Conseil constitutionnel, alors que ce dernier avait expressément admis l’invocabilité de la déclaration d’inconstitutionnalité aux contestations formées avant la date de sa publication. Lien vers l’audience filmée : https://www.courdecassation.fr/agenda-des-audiences/2024/01/19/pourvoi-ndeg21-12560. [↩]
- CE, Avis, 9 mai 2019, n° 426365 et n° 426321. [↩]
- Cass. civ. 2ème, 14 avril 2022, n° 21-16.435, Bull. [↩]
- Cass, com., 10 mai 2011, n° 10-14.160, Bull., IV, n° 71. [↩]
- Cass, soc., 27 novembre 1997, n° 96-12.751. [↩]
- La mauvaise notification d’un jugement ou d’un arrêt quant aux voies de recours emporte certes inopposabilité du délai pour le contester (CE, 1ère chambre, 25 mai 2007, n° 298093). Cependant, de jurisprudence constante, le Conseil d’État a toujours déconnecté l’article R. 421-5, à partir duquel Czabaj a été établi, des actes juridictionnels. Il considère ainsi que les dispositions de l’article R. 421-5 doivent se comprendre comme exigeant de la notification, s’agissant des voies de recours, qu’elle mentionne l’existence d’un éventuel recours administratif préalable obligatoire « ou, dans l’hypothèse d’un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée » (voir CE, 9ème chambre, 28 septembre 2022, n° 448656 ; CE, 5ème chambre, 24 juillet 2019, n° 422487). L’article ne s’étend pas aux décisions rendues par les juridictions. [↩]
- Cass, civ. 2ème, 8 janvier 2015, n° 13-27.678, Bull., II, n° 4 [↩]
- Avis, Cass. civ. 1ère, 13 décembre 2023, n° 23-70.013. [↩]
- Sur ce point, la doctrine note que « l’enjeu d’une distinction entre les délais de prescription, butoir, de forclusion est de permettre de leur appliquer le régime juridique adéquat » F. Rouvière, La distinction des délais de prescription, butoir et de forclusion. Les Petites Affiches, 2009, p.7-11. [↩]
- M. HERVIEUX, « Délais de forclusion et de prescription : principe et enjeux de la distinction », Dalloz Actualité étudiant, 29 juin 2021, https://actu.dalloz-etudiant.fr/a-la-une/article/delais-de-forclusion-et-de-prescription-principe-etenjeux-de-la-distinction-1/h/3ebc91ac1650625eda713e5c3824e936.html. [↩]
- Loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile. [↩]
- Voir notamment P. FONTAINE, rapport écrit sur le pourvoi n° 21-15-809, s’agissant de la nature du délai pour agir en garantie des vices cachés, p.10-20. [↩]
- Le Conseil d’État a récemment jugé que si la décision prise sur le recours administratif ayant interrompu un premier délai Czabaj est mal notifiée, l’intéressé disposera d’un nouveau délai Czabaj (Conseil d’État, 8ème et 3ème CR, 12 juillet 2023, n° 474865, Rec.). [↩]
- Dans ses avis écrits sur les deux pourvois, l’avocat général affirme quant à lui que c’est précisément ce que le Conseil d’État a fait « en agençant un délai de recours (textuel et déterminé) et un délai de secours (prétorien et raisonnable), de manière que le délai d’un an puisse borner (à compter de la connaissance, en l’absence de notification) ou suppléer (en présence d’une notification imparfaite) le délai de deux mois ». [↩]
- T. BIGOT, « Le Conseil d’État consacre un nouveau délai de recours Czabaj », Dalloz, 10 décembre 2019, https://www.dalloz-actualite.fr/flash/conseil-d-etat-consacre-un-nouveau-delai-de-recours-czabaj. [↩]
- Cass, civ. 3ème 10 juin 2021, n° 20-16.837. [↩]
- V. VILLETTE, conclusions sur CE, 1ère et 4ème CR, 18 mars 2020, n° 425400, p.4. [↩]
- Cass, civ. 1ère, 8 février 2017, n° 15-27.124, Bull. [↩]
- O. HENRARD, conclusions sur CE, Ass., 13 juillet 2016, n° 387763, p.17. [↩]
- Voir notamment H. MOTULSKY, « Le droit subjectif et l’action en justice », Archives de Philosophie du Droit, Sirey, 1964, p. 215-230. [↩]
- L’avocat général concède d’ailleurs dans ses avis que « même dans la logique judiciaire, il n’est ni fréquent, ni même peut-être orthodoxe, qu’un délai de prescription vienne borner un délai de forclusion ». [↩]
- Cass. civ., 2ème, 18 février 2021, pourvoi n° 19-20.102, Bull. [↩]
- A. ISOLA, conseillère, rapport sur le pourvoi n° 21-12.560, p. 32 [↩]
- S. GUINCHARD, C. CHAINAIS et F. FERRAND, Procédure civile, Dalloz, 32e éd., 2014, §173. [↩]
- Conseil d’État, 5ème et 6ème CR, 17 juin 2019, n° 413097, Centre hospitalier de Vichy, publié au recueil Lebon. [↩]
- N. LABRUNE, conclusions sur CE, 7ème et 2ème CR, 19 juillet 2023, n° 465308, p. 3. [↩]
- Cass. soc. 10 octobre 1996, pourvoi n° 94-20.562, Bull. [↩]
- Cass. civ. 2ème, 21 octobre 2021, pourvoi n° 20-16.170. [↩]
- Il note plus en détail à ce propos dans ses avis écrits que « dans la mesure où le délai du 13 juillet 2016 est remplaçable – et remplacé – devant les juridictions judiciaires par un délai de prescription, on peut estimer au contraire que le délai d’un an est extrêmement court au regard de nos délais de prescription habituels (2, 3 ou 5 ans) ». [↩]
- Conseil d’État, 7ème et 2ème CR, 19 juillet 2023, n° 465308, Société Seateam Aviation, mentionné aux Tables. [↩]
- M.C VINCENT-LEGOUX, « L’ordre public et le contrat. Étude de droit comparé interne », Archives de philosophie du droit, 2015/1 (Tome 58), p. 215-241. [↩]
- Cass. civ. 3ème, 9 mai 2019, pourvoi n° 17-28.836. [↩]
- Cass. soc. 20 avril 2022, pourvoi n° 19-17.614, Bull. [↩]
- Conseil d’État, 5ème et 6ème CR, 9 novembre 2018, n° 409872, mentionné aux Tables [↩]
- Conseil d’État, 5ème et 6èmeCR, 18 mars 2019, n° 417270, Jounda Nguegoh c/ Préfet du Val de Marne, publié au Recueil. [↩]
- Conseil d’État, 3ème et 8ème CR, 9 mars 2018, n° 405355, Communauté de communes du pays roussillonnais, mentionné aux Tables. [↩]
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