AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Halina Y…, divorcée Z…, demeurant …,
en cassation d’un arrêt rendu le 14 février 1997 par la cour d’appel de Paris (1re Chambre, Section B), au profit de M. François X…, demeurant …,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l’audience publique du 8 décembre 1998, où étaient présents : Mme Delaroche, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, M. Sargos, Mme Marc, MM. Aubert, Cottin, Bouscharain, conseillers, Mmes Verdun, Catry, conseillers référendaires, M. Sainte-Rose, avocat général, Mme Collet, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Delaroche, conseiller, les observations de la SCP Vincent et Ohl, avocat de Mme Y…, de Me Vuitton, avocat de M. X…, les conclusions de M. Sainte-Rose, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l’article 1147 du Code civil ;
Attendu que Mme Y… qui, en 1984, avait subi une intervention de chirurgie esthétique consistant en la mise en place de prothèses mammaires pré-remplies de gel de silicone, a, à la suite d’une information médiatique sur les risques inhérents au gel de silicone, consulté, en novembre 1991, M. X…, chirurgien-plasticien, en vue du remplacement de ces prothèses par des prothèses gonflées au sérum physiologique ; qu’après une seconde visite à ce praticien en avril 1992, l’intervention a été pratiquée le 15 mai suivant ; que, se plaignant du mauvais résultat obtenu, elle a sollicité une expertise judiciaire ; que, contestant les conclusions de l’expert, elle a assigné M. X… en responsabilité, lui reprochant de n’avoir pas rempli son obligation d’information et d’avoir pratiqué l’intervention sans avoir recueilli son consentement éclairé ;
Attendu que, pour débouter Mme Y… de ses demandes, l’arrêt attaqué, après avoir relevé que l’anomalie présentée était, selon l’expert, le fait d’une évolution physiologique, non imputable à la technique chirurgicale utilisée, laquelle était conforme aux données acquises de la science, se borne à énoncer que l’intéressée qui, en six mois, avait eu, à deux reprises, un entretien avec le chirurgien avant l’intervention, avait disposé d’un délai de réflexion suffisant avant d’accepter l’opération qu’elle avait elle-même sollicitée en pleine connaissance de cause, ne pouvant ignorer le risque de rétractation péri-prothétique puisqu’il s’était déjà réalisé à la suite de la précédente opération ;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, sans rechercher si le praticien avait informé sa patiente de l’existence et de l’étendue du risque inhérent à la nouvelle opération, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 14 février 1997, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X… aux dépens ;
Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X…, ainsi que celle de Mme Y… ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.