RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le premier et le second moyen réunis :
Vu l’article 177 du traité de Rome du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne ;
Attendu que Mme X… a été engagée le 5 mars 1973 en qualité d’agent technique par la Caisse nationale d’assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS) ; qu’elle a été promue rédacteur juridique le 1er janvier 1983 ; qu’au cours de l’année 1983, outre des congés maladie du 4 au 13 février, du 3 au 16 mars et du 16 mai au 12 juin, Mme X… a été en congé de maternité du 13 juin 1983 au 1er octobre 1983, dans le cadre de l’article 45 de la Convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale et du 3 octobre 1983 au 16 novembre 1983 dans le cadre de l’article 46 de ladite convention ;
Attendu qu’en se fondant sur le chapitre XIII du règlement intérieur type, annexé à la convention collective et selon lequel » Tout agent ayant au moins 6 mois de présence dans l’année doit faire l’objet d’une notation « , la CNAVTS a refusé de noter, pour l’année 1983, Mme X…, ce qui a eu pour effet de la priver de la possibilité d’obtenir un avancement d’échelon au choix, conformément à l’article 31 de la convention collective ;
Attendu que Mme X… a alors saisi la juridiction prud’homale en soutenant que le défaut de notation, en raison de son absence pour maternité, constituait une mesure discriminatoire et qu’elle avait perdu, de ce fait, une chance de promotion ; que le jugement attaqué, rendu sur renvoi après cassation, a fait droit à sa demande en condamnant son employeur à indemniser le préjudice subi par elle ;
Attendu que la Caisse fait grief au jugement d’avoir ainsi statué, alors que, selon le pourvoi, d’une part, l’article 31 de la Convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale ne prévoit pas l’inscription de plein droit au tableau dit » d’avancement au mérite » des agents remplissant les conditions requises et que, Mme X… aurait-elle rempli lesdites conditions, la Caisse n’était pas tenue de la faire bénéficier d’un échelon au 1er janvier 1984, en sorte que la condamnation prononcée n’est pas légalement justifiée ; alors que, d’autre part, la » pratique professionnelle » telle que décomptée conformément aux articles 3 et 3 bis de l’avenant du 13 novembre 1975 modifié concerne exclusivement la classification des emplois du personnel des organismes de sécurité sociale et est étrangère au temps effectif de présence dans l’entreprise à prendre en considération pour que l’employé puisse faire l’objet d’une notation professionnelle conformément à l’article 31 de la Convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale et de l’article XIII du règlement intérieur type et que le conseil de prud’hommes ne pouvait, sauf à violer ces dispositions légales et réglementaires ajouter la période de congé de maternité de Mme X… au temps de travail effectivement passé par elle au service de la Caisse pendant l’année considérée pour déterminer si elle justifiait d’une durée suffisante pour faire l’objet d’une notation professionnelle ; alors que, enfin, l’absence de notation de Mme X… n’était pas fondée sur une considération de sexe, le principe de l’égalité professionnelle ne pouvant s’appliquer qu’à des droits potentiellement ouverts aux salariés des deux sexes et que le jugement n’a pu décider autrement qu’en violation, par fausse application, de l’article L. 123-1 C du Code du travail ;
Attendu que l’article L. 123-1 C du Code du travail résultant de la transposition en droit français de la directive n° 76-207 du 9 février 1976 relative à la mise en oeuvre du principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes, en ce qui concerne l’accès à l’emploi, à la formation et à la promotion professionnelles et les conditions de travail, le litige soulève une difficulté sérieuse relative à l’interprétation de cette directive et justifiant un renvoi préjudiciel devant la Cour de justice des Communautés ;
PAR CES MOTIFS :
SURSOIT A STATUER jusqu’à ce que la Cour de justice des Communautés européennes se soit prononcée à titre préjudiciel sur l’interprétation et la portée de la directive n° 76-207 du 9 février 1976 et ait dit pour droit si les articles 1er paragraphe 1, 2 paragraphe 1, 5 paragraphe 1 et, éventuellement, 2 paragraphe 4 de la directive n° 76-207 du 9 février 1976 doivent être interprétés en ce sens qu’ils interdisent de priver une femme du droit d’être notée et, par voie de conséquence, de pouvoir profiter d’une promotion professionnelle, parce qu’elle a été absente de l’entreprise à raison d’un congé de maternité ;
Renvoie à la Cour de justice des Communautés siégeant à Luxembourg.